Le vitrail écarlate

Le vitrail écarlate / Pilar Pedraza
Sorcellerie, nécrophilie, érotisme et amours saphiques au temps de l'Inquisition.
L'histoire se passe en Espagne au cours du XVIIe siècle alors que l'Inquisition, juridiction créée au XIIIe siècle dont le but était de combattre l'hérésie, sévit toujours et ne sera abolie qu'au début du XIXe siècle.
D'étranges événements bouleversent la paix de la petite ville castillane de la Perla : envoûtements, possessions démoniaques, disparitions mystérieuses de jeunes filles et sorcellerie en tout genre font jaser et inquiètent la hiérarchie ecclésiastique. Torcuato, secrétaire au Saint Office, chargé de cours à l'Université, ne peut plus traduire tranquillement Tacite, trop occupé à tenter de résoudre les problèmes avec l'aide du père Losada. Et puis Torcuato est très attaché à sa demi-soeur prénommée Impératrice, à qui il rend visite très souvent, une femme mélancolique avide de chevauchées silencieuses et solitaires vers des lieux de perdition, une femme d'une troublante beauté et qui vit dans un faste chargé de passions et de plaisirs secrets, qui peuvent aller très loin dans le satanique quand elle s'abandonne aux forces obscures du Mal.
Et Torcuato d'accompagner le père Losada pour faire sonner les cloches pour chasser les démons qui rôdent dans la petite ville car décidément un mal secret plane sur la ville et l'envahit comme un brouillard. Il se passe d'étranges choses une fois de plus. Est-ce le diable qui tourmente soeur Blanche de Saint Michel ou bien l'âme de soeur Thérèse de la Croix défunte depuis peu ? le diable cessera-t-il de se présenter à soeur Blanche sous la forme d'une religieuse morte ?
Impératrice est la narratrice d'un chapitre sur deux de ce roman à l'ambiance étrange où l'imaginaire parfois fantastique ne connaît pas de limite, teinté d'un érotisme subtil ou subliminal, au style raffiné et chargé d'un humour qui abolit tout caractère tragique dans les scènes de barbarie et toute vulgarité dans les scènes sensuelles et cruelles menant à l'extase d'Impératrice qui notamment s'adonne aux amours saphiques. Par ailleurs Impératrice tient absolument à connaître le parfum des panthères, cette fragrance si souvent évoquée dans les vieux grimoires ésotériques et qui mène à l'extase, une odeur de fauve âcre et presque irrespirable pareille à celle du sang frais mais avec quelques notes de vinaigre et d'ambre plus un léger fond de pourriture ! Impératrice va tout faire pour assouvir ce désir, comme tous les autres du reste. Jusqu'où les frasques notamment nécrophiles de Doña Imperia des Cobos Grimani la mèneront avant que l'Inquisition ne se penche sur son cas ?
Que peuvent Torcuato et le père Losada lorsqu'une jeune femme est accusée d'avoir eu un enfant avec le diable et de l'avoir jeté dans un puits ? Vérifier si le puits contient bien le corps immonde sans doute ! Tant de misères deviennent l'objet de spéculations obscurantistes et de dénonciations et ne peuvent qu'aboutir à un procès pour sorcellerie instruit par la commission de l'Inquisition.
Un roman très bien traduit de l'espagnol et qui ravira les amateurs du genre. Je l'ai découvert et lu en 1991, date de sa parution, puis relu ce jour avec grand plaisir.
Pilar Pedraza est née en 1951. Elle est docteur en histoire et enseigne à l'université de Valence.