Je suis bien embêtée parce que j'ai autant adoré qu'été gênée par ce dernier tome de Paradise Kiss, mais ce qui est sûre c'est que l'autrice m'a soufflé par la force des émotions de ses personnages. C'est la grande force de son écriture dans chacun de ses titres, je trouve.
Le tournant pris dans la dernière partie du précédent tome m'avait déjà un peu gênée avec l'arrivée d'une potentielle rivale pour Yukari, et effectivement ça ne se passe pas très bien.
Ai Yazawa joue la carte de la jalousie qui vient tout dérégler pour provoquer le déraillement du train du groupe ParaKiss. On aime ou on déteste mais on ne peut pas y rester insensible. Elle porte à son paroxysme les relations compliquées de chacun des couples et des amis pour un final très riche et puissant de ce côté-là, mais elle ne fait pas cela sans maladresses.
Je vais d'abord revenir sur LE point qui m'a le plus gênée : la relation Miwako - Arashi. On découvre que celle-ci a débuté par un viol et celui-ci est complètement oblitéré, sous-estimé, retourné pour en faire un accident de parcours. Je dis non ! Quand je lis, "elle ne te disait pas non à toi mais à ta violence, c'est pour ça qu'elle t'a pardonné", je ne peux pas m'empêcher de trouver ça hyper malsain et dérangeant. Ainsi, cette relation qui depuis le début me semblait bancale, l'est même plus que ça, et je trouve ça désolant que l'autrice normalise le viol, l'emprise et autres relations toxiques...
A l'inverse, entre Yukari et George même si ça semble compliqué, étrange et pas très normal, en fait, c'est LA relation la mieux construite. L'autrice nous explique à merveille la limite floue entre muse et amant(e) dans le milieu de l'art, la souffrance que l'on peut ressentir quand on s'en compte, la complexité des sentiments alors en jeu. La relation entre George et Yukari est on ne peut plus réelle. Ils ont chacun leurs cadavres dans leur placard mais j'ai trouvé superbe la façon dont ils réalisent tristement la limite de leur relation et en tirent les conséquences. C'est sublime et poignant !
Du côté de la mode, j'ai eu ce que je voulais, un discours honnête et réaliste. Yukari se lance vraiment dans le mannequinat et on découvre les joies et les limites de ce métier tranquillement, subrepticement, avec elle. George, lui, n'est pas un styliste pour le prêt-à-porter et il en tire toutes les conséquences même si parfois c'est un peu flou et compliqué pour lui. J'ai adoré suivre son parcours avec ses choix chaotiques, mais également sa confrontation enfin avec son père. Finalement Aso fut vraiment utile à l'histoire et sa relation avec George est elle aussi plus compliquée qu'on aurait pu le croire au premier abord.
Graphiquement, j'ai encore vécu des moments sublimes avec un trait vraiment parfaitement maîtrisé, l'autrice assoit encore ce qui est SA touche. Ce mélange de décors photographiques incrustés avec en premier plan des personnages filiformes aux jambes interminables ultra stylés. Elle a une richesse expressive folle aussi bien pour montrer le drame des personnages, leurs émotions à vif, mais aussi pour nous faire rire. Ses personnages sont tous ultra looké du premier au dernier, et la multitude de tenues qu'elle a inventée est incroyable, un vrai régal pour les yeux. C'est sans parler du découpage et de la mise en scène qu'elle élabore qui font de ce titre une lecture vraiment marquante.
Si vous cherchez une bluette passez votre chemin, mais si vous êtes prêts à vibrer avec ses artistes, à faire malmener votre petit coeur et à lire des romances qui prennent aux trippes et ne vous confortent pas, n'hésitez pas à entrer dans la danse et à venir découvrir le sublime univers de ParaKiss.
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