Quand le thème "Une BD cradingue" a été proposé dans le Challenge BD 2023, j'ai tout de suite pensé à
Reiser... et je savais que j'en avais un planqué dans mes étagères. Planqué, pour pas que mes gosses mettent la main dessus... bien sûr.
Sont pas plus fort que nous... le titre est déjà tout un poème en beaufitude maximale. La beaufitude... la source des saillies de
Reiser. Les beaufs... les petits chéris de l'auteur. Ils ne sont jamais avares d'inspiration, les beaufs...
Reiser, c'est de l'Audiard mis en dessin.
Evidemment, le tome a un peu vieilli car il s'agit des dessins de presse de 1975, donc il faut avoir Wikipedia à côté de soi, ou être un vieux croûton, comme moi. 1975, c'est une bonne année pour
Reiser, Franco est mort. Il s'est bien accroché à la vie et au pouvoir, ce vieux morpion... mais il a passé l'arme à gauche (un comble pour un dictateur de droite). 1975, c'est aussi la guerre en Angola, les Portugais dégustent, et pas que de la sardine... ou l'année où le divorce est légalisé en France. Des thèmes bien porteurs pour
Reiser.
C'est aussi l'année internationale de la femme... ça, pour
Reiser, c'est du pain béni. Il aime appeler une chatte... une chatte...
Personnellement, le trait de
Reiser m'a toujours tenu à l'écart de ses publications. Je lui préférais
Cabu ou Bretecher. Ils étaient moins vitriolesques, aussi.
Quand je disais qu'il y a déjà tout chez
Reiser, qu'il est visionnaire et foutrement engagé, je peux fournir des exemples des thèmes abordés:
l'écologie, la pollution des sols, l'énergie solaire, l'urbanisation à outrance, les cathos, le divorces, la vieillesse dans les EHPAD, la pauvreté, la misère sexuelle, les banlieues et les manifs, les anars, la Politique agricole commune, le tourisme à outrance, les parents et l'éducation, l'énergie atomique, se moquer du grand remplacement, la corrida, la pauvreté, l'insécurité, l'alcoolisme...
Je pointerai deux gags tout spécialement: la machine à transformer le blé en merde, pour aller plus vite du producteur au producteur... Génial. Et le fait de transformer la porte du garage en capteur solaire pour chauffer l'eau de la douche. D'ailleurs, l'énergie solaire est un sujet récurrent qui semble toucher
Reiser. Il questionne fort à propos l'autarcie énergétique, dont on a pu voir que c'était crucial avec la guerre en Ukraine. Il aborde aussi la notion de progrès, en considérant que parfois le progrès, c'est faire marche arrière.
La pertinence des thèmes et des réflexions pose question, clairement. Soit nous sommes gouvernés par un paquet d'incompétents. Soit
Reiser est un visionnaire fabuleux... Sans doute un peu les deux...
Un sacré bonhomme, donc. Anticonformiste, visionnaire, gauchiste dérangeant et sans pitié pour la gauche,
Reiser aurait sans doute des ennuis aujourd'hui s'il vivait encore, mais je ne crois pas qu'il aurait davantage d'ennuis qu'il en a eux à l'époque.