Le dessin est froid, presque schématique, avec une mise en pages stricte, parfois composée de petites vignettes en gaufrier, jusqu'à 35 dans la page (5 x 7), qui alternent avec de grandes illustrations pleine page. Tout est en Bichromie noire et beige, tout aussi froide que le graphisme.
Cette bande dessinée raconte un fait divers, relaté en long, en large et en travers, comme un reportage ou même une accumulation de reportages : Il raconte la seule fois reconnue où un humain a été percuté par une météorite. On étudie l'histoire sous tous ses aspects, individuel, social, économique, juridique, géologique, comment une vie ordinaire a été bouleversée par un évènement extraordinaire.
L'histoire elle-même, répétée tout au long de la bande dessinée, vue à partir des reportages différents, finit par lasser, par ne plus rien avoir d'extraordinaire, en fait l'histoire n'est pas du tout passionnante, le sujet de cette bande dessinée se focalise ailleurs.
On découvre des temps d'attente, des moments de silence, les à-côtés, c'est une description de la société américaine par quelques détails, un évènement improbable, une personne touchée par une météorite tombant du ciel, met le doigt sur la société de consommation telle qu'elle est, avec la publicité et la mise en scène de l'information, l'extraordinaire est mis au même plan que l'ordinaire. À la manière de
Kurt Vonnegut Jr., le monde est vu de l'extérieur, sans passions, sans émotions, décortiqué froidement, faisant ressortir toutes les travers de la société, comme une illustration du livre de
Guy Debord “
La société du spectacle”, donnant à réfléchir sur la nature de cet évènement, juste un sujet d'information pour combler des minutes d'antenne.
Le graphisme, avec son côté froid et schématique, n'a pas besoin des mots, c'est l'inverse qui se passe alors, les mots viennent juste décorer une histoire, pas celle de la météorite, mais celle qui décrit la société américaine de la deuxième moitié du XXe siècle,
la société du spectacle, un récit subtil et sans concession, qui annonce un triste constat, celui de l'inanité de ses vies sans objectifs, perturbées par un petit évènement, juste parce qu'il sort de l'ordinaire, mais il redevient vite ordinaire, la vie reprend son court et la météorite finit oubliée dans un petit musée désert.
J'ai failli passer à côté de cette lecture, l'ennui y est très présent, normal puisqu'il fait partie du sujet, et quand la météorite se détache de notre intérêt, on découvre alors une oeuvre marquante, amère et troublante, une réflexion fine et subtile. Une oeuvre dont on ressent la force quelque temps après sa lecture.