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EAN : 9781246071085
318 pages
Nabu Press (20/09/2011)
5/5   1 notes
Résumé :
Dans l'hiver de 1884-85, Aloÿse rencontra Bernard Chaumont. Il l'aima. Après une courte résistance, elle devint sa maîtresse passionnée. La découverte accidentelle de leur liaison jeta René Valérien, depuis longtemps détaché de sa femme, dans un de ces accès de fureur possessif qui expliquent souvent les drames de cette sorte.

Chapitre I
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Aucune intimité d'âmes ne s'établit entre les nouveaux époux. Silencieuse, douce, d'humeur sereine, de caractère égal, Aloÿse se développa rapidement, sans que son mari ne devinât aucun des mouvements qui s'accéléraient sous le voile de sa persistante timidité. Elle était devenue ainsi très différente d'elle même sans qu'il s'en füt aperçu. (...) Les événements de leur vie semblaient conspirer pour les éloigner : en trois ans, Aloÿse eu trois filles. Or, René voulait absolument un garçon. Il accueillit la première avec humeur, la seconde avec colère ; à la troisième, il s'éloigna de sa femme. Ils ne furent dès lors plus l'un pour l'autre que deux étrangers, prêts à devenir deux ennemis. Chacun vivait pour soi : le mari pour ses affaires, bientôt pour ses plaisirs; la femme pour ses filles, dans ses rêves. Ils sortaient, ils recevaient dans leur bel appartement de l'avenue d'Iéna, ils avaient des amis communs qu'ils n'aimaient guère, leurs cœurs ne battaient jamais à l'unisson.

Chapitre I
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En quittant ces braves gens, si bien fondus l'un dans l'autre, madame Valérien songeait à d'autres couples pareils, rencontrés le long de son chemin, dans des milieux plus rapprochés d'elle. Ainsi se souvint-elle entre autres d'une très belle vieille dame, ancienne amie de sa mère qu'elle voyait quelquefois aux premiers temps de son mariage, dont le visage flottait dans sa mémoire comme un pastel un peu brouillé. Madame A... était la veuve d'un colonel tué pendant les guerres d'Afrique, aux côtés du maréchal Bugeaud. Elle habitait rue de Grenelle un appartement très moderne, qui contrastait avec la vétusté de sa figure, de ses coiffures, de ses bibelots, de ses tableaux. Elle avait les manières, les habitudes, les allures d'une époque qui n'est plus. Elle tirait de sa mémoire mille anecdotes pittoresques sur des gens oubliés, comme on sort des bijoux d'un reliquaire. Chaque jour, à la fin de l'après-midi, elle recevait les amis qui restaient, leurs fils, leurs filles, parfois leurs petits-enfants. Et chaque jour il y avait là, arrivé premier, restant après les autres, le vieux général T... avec ses impériales d'un blanc d'argent, ses cheveux en brosse, encore noirs, son teint basané de spahi, sanglé dans sa redingote, la taille droite, l'œil éveillé. Le Chronique racontait qu'ils s'étaient aimés tout le long de la vie, à travers des orages dont personne ne savait plus l'histoire, et que si vieux, ils s'aimaient encore, immuables et fidèles dans un monde qui changeait autour d'eux. De fait, ils ne parlaient jamais sans se consulter du regard, comme si chacun n'eût rien tant redouté que de déplaire à l'autre; on les trouvait toujours si parfaitement d'accord, qu'ils sem blaient avoir eu la même idée à la même minute; et l'on n'aurait pu concevoir le salon de madame A... sans la présence du général T...

Chapitre IV
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Le lendemain, en s'éveillant après un sommeil pénible, madame Valérien eût l'impression que le portrait de son mari la regardait avec une expresssion inhabituelle, adoucie, comme s'il la plaignait. C'était un portrait médiocre, quoique signé d'un nom connu : le modèle était représenté de trois quarts, les mains posées sur les genoux ; il était en redingote, avec une cravate bleue ; on lui avait imposé un sourire ligé, qui corrigeait mal l'accent renfrogné du visage, aux traits tendus. Madame Valérien le contempla longuement : Agnès lui ressemblait-elle ? Mon Dieu, non ! À peine un peu dans le haut du visage, par la coupe du front volontaire. De sa , mère elle ne tenait que sa peau brune, plus brune encore. Elle devait avoir un autre sang, une autre àme, qui venait de plus loin. Ah ! qu'elle eût aussi un autre destin!

Chapitre III
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Déjà si loin, Agnès s'éloignerait toujours davantage, selon la loi de nature qui sépare de l'arbre les pousses indépendantes. De plus en plus, la jeune femme vivait sa vie personnelle : égoïste, amoureuse, victime ou résignée, elle aurait ses propres curiosités, ses propres désirs ; elle voudrait savoir, connaitre, éprouver; elle croirait qu'avant elle, personne au monde n'avait traversé ses émotions, ses ardeurs, ses joies ou ses désespoirs ; ainsi elle suivrait le chemin que sa mère avait suivi après tant d'autres, le chemin qui conduit, par de brèves délices, aux longs repentirs des lendemains amers : « Non, non, pas ça ! conclut madame Valérien ; moi qui sais, je lui dirai, s'il le faut, toute mon expérience... Je la sauverai!... »

Chapitre IV
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(...) madame Valérien se sentit emportée par un souffle puissant, venu des plus secrètes profondeurs de son être, — de cet abime que chacun porte en soi, cachée sous l'apparence de son moi passager, comme ces larges crevasses des glaciers dont une couche de neige durcie dissimule les mystères. Son cœur se dilatait: un grand coup d'ailes l'emportait vers des régions où il n'y avait plus place que pour la joie. Ah! s'il savait, ce grand jeune homme grave dont les yeux fixaient encore la toile ! S'il se doutait d'avoir à ses côtés, en cette petite femme entre deux âges, d'élégance un peu provinciale, le modèle, l'inspiratrice, celle dont la tendresse avait exalté si fort au-dessus de lui-même un artiste sage et moyen, avec quelle poignante émotion s'inclinerait-il devant elle ! Mais il ignorait cela, comme il ignorait qu'un mot tombé de ses lèvres réveillait dans cette inconnue le frisson de l'amour frappé dans son vol, tel un aigle à son zénith. Il l'ignorait, il allait partir : jamais il ne saurait que sa parole venait de sonner un impérieux rappel à la vie, de restaurer pour une minute l'orgueil dans une âme dissoute par les regrets, de répercuter le son lointain des heures divines où, sous la caresse du pinceau bien-aimé, un corps adoré et périssable se parait d'immortalité.

Chapitre XII
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