Face nord

Dissolution de l'idéologie dans la montagne ???

Ayant découvert en cours de lecture l'adhésion de Saint-Loup (pseudonyme proustien, je me demande encore pourquoi) à l'idéologie nazie, j'ai eu du mal à faire abstraction de cette information. Et contrairement à lerital31, je pense qu'il y a de l'idéologie dans ce livre. Pas seulement la « spiritualité païenne » bien affichée et douteuse pour moi, surtout juste après la deuxième guerre mondiale. Il s'y apprécie un romantisme de la prise de risque et de la mort qui me révulse quand on parle de montagne. (Pas besoin pour cela d'y avoir perdu des amis ou simplement des connaissances , mais c'est un facteur aggravant). Et puis finalement, cette volonté de former des êtres exceptionnellement forts physiquement et moralement, quitte à en laisser mourir d'autres, me paraît une bien mauvaise digestion de Nietzsche, proche en effet d'un certain nazisme.

Par ailleurs, il y a pour moi tromperie dans le titre. D'accord, n'est pas Frison-Roche qui veut, et on peut pardonner à un écrivain de ne pas trouver souvent les mots justes pour décrire les actes et les émotions autour des ascensions, et ç'aurait été une simple déception si le roman s'était centré là-dessus. Mais c'est que le sujet principal n'est pas l'alpinisme mais l'organisme Jeunesse et Montagne, en réalité proche de l'esprit de la résistance, et présenté ici comme une oeuvre pédagogique en réaction à la défaite de 1939. Il s'agit dans le roman de recréer une jeunesse dynamique, ambitieuse, nationaliste, mais pas nettement en réaction contre les horreurs du nazisme et l'occupation du territoire. C'est facile de se moquer des pétainistes, mais sous la plume de cet auteur ça ne me suffit pas.

Après avoir déversé un peu de bile, je vous livre une petite idée du sujet apparent : Guido La Meslée, démobilisé après la débâcle de l'armée française, va chercher pour lui-même et pour les jeunes qu'il encadre, un perpétuel dépassement par l'effort héroïque en montagne et par la prise de risque. Réussira-t-il dans ses ambitions de montagnard, de pédagogue aux méthodes d'acier ? Son amour sera-t-il compatible avec sa passion pour l'aventure ?
Si je ne vous ai pas dégoûtés, tentez votre chance, le roman n'est pas désagréable à lire, il est historiquement intéressant et donne à penser. Et quand même il y a de beaux passages.

"Face Nord" est un magnifique roman qui contient et révèle l'aura de la Montagne. Sa pratique à la fois exigeante pour le corps et pour l'esprit forme des hommes durs à la tâche mais sensibles aux beautés de la nature, épris de solitude mais aux coeurs solidaires, des hommes qui cherchent avant tout le dépassement de soi dans un environnement hostile où une simple vie a parfois une bien faible valeur.
On y suit les aventure d'un ancien militaire devenu formateur en alpinisme et de toute son équipe. Amitié, amour, aventure, jalousie, une grande aventure humaine.
Ce roman est un trésor pour tout montagnard pratiquant car il vous fournira une réserve de courage pour vos prochaines sorties difficiles. C'est un appel à l'héroïsme de l'homme et à une recherche d'un perfectionnement perpétuel. Affronter vos peurs, oublier vos souffrances, flirter avec la mort s'il le faut.
On perçoit à travers ces lignes le rejet du christianisme et l'attirance pour le renouveau d'une spiritualité païenne qui caractérise l'auteur qui fut national socialiste pendant la guerre. Ceci qui explique la disparition totale de ce livre dans les bibliothèque aujourd'hui, un vrai gâchis à mon avis car aucun sujet polémique n'est abordé dans cet ouvrage.

Ce livre a été écrit pendant la seconde guerre mondiale par Marc Augier, alias Saint-Loup, un ultra-collaborationniste qui a fait le coup de feu sur le front de l'Est dans les rangs de la Légion Volontaire des Français. Publié par Arthaud en 1946, peu après la Libération, on pourrait s'attendre à ce que l'auteur ait expurgé son texte des passages les plus "douteux". Il n'en est rien! Augier/Saint-Loup exalte à l'extrême le culte du héros et/ou du surhomme cher à Himmler et ses sbires tout en dénonçant au travers d'un personnage: Landau, les juifs, évidemment veules et lâches…
Un témoignage des errements de la "pensée"… qui a conduit aux atrocités national-socialisme.