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EAN : 9782070740390
180 pages
Gallimard (13/02/1996)
4/5   2 notes
Résumé :
Autour de Trieste, la ville légendaire, jadis carrefour de langues et de cultures, s'étend une zone de plateaux calcaires, avec ses dolines, ses eaux enfouies, sa nature puissante et âpre comme son nom : le Karst. En italien, ce nom hérissé s'adoucit comme sous une caresse légère : le Carso.
Il mio Carso est le titre original de ce livre écrit par un jeune homme à l'aube du siècle. Il fait partie des œuvres majeures de la littérature triestine - et l'on sait ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Dans cet ouvrage, "Il mio Carso" en italien, l'auteur triestin Scipio Slataper évoque des épisodes de son enfance, de sa jeunesse, la ville, très active autour de son port, ainsi que son arrière-pays, calcaire et aride, le Karst, et le front de mer. Scipio Slataper exalte une vie instinctive, quasi héroïque, influencé par les idéaux du Risorgimento. Ce qui n'exclue pas parfois face à la maladie ou la mort des accès de mélancolie et un sentiment tragique. Slataper mourra en 1915 sur le front à l'âge de 27 ans alors qu'il s'était engagé dans l'armée italienne. "Il mio Carso" est une oeuvre saisissante et inclassable, au lyrisme très prononcé, mais appartient aussi sans doute à un autre temps avec toute la fougue de son engagement patriotique et un style qui aujourd'hui semblerait peut-être ampoulé.
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Scipio Slataper a mis toute sa vie dans ce livre unique, flamboyant, panique, qui ne ressemble à aucun autre.

Toute sa vie ...si brève.

Malgré le titre français donné à "Il mio Carso", ces "Années de jeunesse" sont les seules que le jeune poète aura pu raconter: fougueux patriote, il se porte volontaire sur le front du karst et y meurt presque aussitôt, en 1915.

Il avait vingt-sept ans. Il était triestin, blond, grand, beau, fantasque, marcheur infatigable, pauvre, et doué. Giani Stuparich en le présentant à ses amis dira simplement: c'est Scipio, comme s'il était une évidence poétique à lui tout seul!

Il n'hésitait pas à sauter nu au milieu des dauphins pour les empêcher de dévorer, dans les filets , les sardines des petits pêcheurs de Chioggia! Il dévalait en courant les pentes arides de son karst natal au risque de se rompre le cou. Il faisait les 400 coups, enfant, avec son amoureuse, la belle Vila, petite paysanne délurée, sa voisine. Il mesura la terrible indifférence du monde et de Dieu quand Anna, son amie, décida de mourir, lui confiant le soin de travailler et de laisser une oeuvre derrière lui.

Son livre est un chant presque plus qu'un récit. J'ai dû me faire violence pour choisir des citations destinées à vous mettre l'eau à la bouche tant couper dans un tel texte me paraissait sacrilège !

Tout est superbe: la langue -pour n'en rien perdre, j'ai lu en V.F. dans une excellente traduction de Thieŕry Loisel-, les sensations - celles du goût et de l'odorat, si rares en littérature- sont d'un jeune animal, fortes, sauvages, toujours justes! Je ne parle pas de la nature : ce triestin qui dans sa courte vie vécut dans tant de villes " étrangères" à la sienne, est un paysan, un montagnard, un rural, beaucoup plus qu'un citadin comme Magris, Saba ou Stuparich. Il aime sa mer Adriatique, sa montagne, ses collines, ses forêts. Avec passion, délectation, violence.

Et marcher -voire courir- de jour, de nuit, par tous les temps, est une façon de retrouver sa force, comme toucher la terre l'était pour Antée.

On lit ce long poème, ce récit autobiographique pudique, inspiré et fragmenté, comme on écoute de la musique ou comme on prend la route, ou la mer.

En se laissant porter, transporter emporter.. .
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Ah Trieste...........
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Tout m'était fraternel. J'aimais les papillons amoureux empêtrés dans la trame noirâtre d'un chêne, battant désespérément des ailes en une pluie de poussière blanche, la belle araignée de velours aux pattes sèches qui déroulait dans l'air tremblé son fil argenté pour qu'il vienne s'accrocher au duvet collant d'une feuille ; elle sondait avec sa fine patte le fil avant de s'y élancer franchement pour tisser sa toile. A l'intérieur de ma main, une mouche que j'avais capturée au vol bourdonnait désespérément. Je caressais une chenille, fraîche et lisse, qui se froissait comme un petite feuille morte ; je retenais prisonnière par ses longues ailes bleutées la libellule ; je plongeais le bras dans l'eau pour en ressortir brusquement un petit crapaud au ventre jaune et noir ; l'abdomen d'une guêpe essayait de se tordre contre mon doigt et d'y accoucher de son dard.... p 48
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A l'intérieur de nous s'accumulent d'innombrables nausées, des dégoûts, qui un jour ressurgissent et viennent empester l'air que nous respirons. Rien alors de plus assommant que de devoir s'habiller, manger, se lever de sa chaise, rien de plus inutile; mais mieux vaut ne pas troubler les usages et mettre un pied devant l'autre, puisqu'on nous a montré qu'il fallait marcher.
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Et j'aime ces femmes du karst qui serrent entre les dents, contre la bora, la pointe de leur grand foulard, et descendent en groupes à la ville, avec sur la tête la grande cruche étamée tout emplie de lait chaud. Et la rayure blanche de l'aube, et la brûlure douloureuse de l'aurore à travers les brumes de la ville. Ici, tout n'est qu'ordre et travail. A Puntofranco, six heures du matin, le pilote de garde transi, les yeux troublés de fatigue, salue le préposé aux clés qui ouvre les portes de l'entrepôt. Les grands boeufs bruns et noirs tirent lentement des wagons vides jusqu'aux paquebots arrivés la veille au soir; et lorsque les wagons sont en place, à six heures dix, les débardeurs se disséminent à travers les hangars. Ils ont en poche leur pipe et un morceau de pain. Un chef d'équipe monte sur une passerelle de déchargement, et autour de lui s'agglutinent plus de deux cents hommes, leur livret de travail à bout de bras, qui crient pour être embauchés; le chef d'équipe arrache, en choisissant rapidement, autant de livrets qu'il lui est nécessaire, puis il s'éloigne suivi de ceux qu'il vient d'embaucher. Les autres restent silencieux, et se dispersent à nouveau.(...)
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Années de jeunesse, qui vous ouvrez tremblantes comme les corolles des violettes dans la neige, où voulez-vous donc, si joyeuses, me transporter? Je lève les bras et les rabaisse frénétiquement comme si j'avais des ailes et qu'à chaque battement, mes dents se saisissaient d'une matière plus légère et tellement diaphane que mon âme se dilatait pour former l'aube d'une nouvelle vie. Et je bondis à même le sol, sitôt renvoyé par la montagne elle-même qui m'aide et me comprend. Je descends.
La bora me fouette le dos par rafales, et je dévale comme une cascade légère. Les pierres roulent et voltigent en grondant. Chaque pas est toujours neuf, à tel point que si mon pied rencontre une trace, il se détourne et se déporte. Descente. La poitrine éperonne l'air. Descente, en glissant : envol jusqu'à la branche suivante, jusqu'à la touffe d'herbe qui -effleurée d'un doigt- me maintient sur mes pieds.
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Et nos grands paquebots lèvent l'ancre pour Salonique, ou Bombay. Demain, les locomotives tonitruantes ébranleront le pont de fer sur la Moldau, jouant à cache-cache avec l'Elbe jusqu'au coeur de l'Allemagne.
Nous aussi nous obéirons à notre loi. Nous voyagerons, nostalgiques et perplexes, poussés par des souvenirs impatients qui jamais ne seront tout à fait les nôtres.
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