LES RIDEAUX…
Extrait 1/2
Les rideaux.
S’ils étaient offerts et sans repli, les yeux
tomberaient à la renverse,
malades, exténués sans doute de trop d’horizon.
Comme les portes
dont ils sont la réplique souple, chiffonnée,
ils isolent et laissent passer.
Certains, parmi les gens,
tirent les rideaux en plein jour,
parce qu’il faut être séparé du soleil
pour mieux sentir comment les corps remuent
à faire l’amour.
[…]
LES RIDEAUX…
Extrait 2/2
À certaines heures,
les yeux des gens se ferment
pour éprouver le monde du dedans,
ils disent que c’est leur manière
de croire à une habitation,
ils disent aussi parfois le mot prière,
le mot refuge.
Avec eux, ils se fabriquent une porte
par où ils passent de l’autre côté.
on voit à peine leur solitude
quand elle s’étire d’une lampe à une autre
démesurément.
Ils ont trouvé sur une étagère du couloir
un livre que plus personne ne lit,
dans ce livre entre deux pages, une vieille image pliée
où sont écrits ces mots en rouge et gris,
perdus dans une flamme : elle ne sait plus qu’aimer.
Ils en sont quittes pour un baiser durable.
Ils rient : encore un
que l’ennemi n’aura pas.
Le ciel pour cette joie fait une roue dans l’eau.
Ils sont les gens comme ça va.
A l’adresse de mes « frères humains » (François Villon)
« Des gens comme ça va » si étranges parfois qu’il me, qu’ils nous ressemblent.
« Ainsi aller au cœur, en suite de poèmes, au plus près de la part secrète,
dans cette communauté de destin malmenée qui nous relie »
Ils sont les gens, les autres. On dit ça va. Un parmi. Écoutez le cœur. Et il y a pour eux. Le ciel pour cette joie.
Parfois ils se reconnaissent,
parfois ils s’ignorent
peut-être se sont-ils trop longtemps perdus de vue (…)
Parfois, ils ont l’air ailleurs, dans un recoin du jour,
ils ont troqué
l’agitation sordide contre le silence des herbes,
ça fait toute une occupation.
Comme l’art de fixer sur le dos de la main
un bref instant de coccinelle.