Le lecteur d'un polar abandonne rarement son bouquin. Pas nécessairement parce qu'il est captivé par l'intrigue, mais pour savoir qui a tué ! J'avoue que c'est là la seule raison qui m' a poussé jusqu'au bout. Je n'ai jamais lu un roman policier qui m'ait autant énervé.
Il y a d'abord le style : une juxtaposition de courtes phrases basiques sans aucune recherche. Mais ce n'est pas le plus grave. Impossible de trouver quelques lignes sans qu'il soit question de drogue ou d'alcool. Pas pour émettre des réflexions sur ce problème de société, non : ici tout le monde se drogue, les victimes, les assassins, les flics, et surtout le personnage principal, narrateur du roman. Frank Marr est un policier tôt retraité (ce qui veut dire qu'il a quitté son poste avant d'avoir de gros ennuis). Il s'est reconverti en détective privé. Sa philosophie subtile est bien illustrée par la première phrase du chapitre 82 (oui, il y en a beaucoup mais ils sont heureusement courts) : « Je me gare sur un emplacement interdit parce que je n'en ai rien à foutre »
Frank Marr est plus que violent. On ne compte plus ses effractions , il cogne et tue pour savoir qui a descendu son cousin. Il résout finalement le problème au nez et à la barbe de la police. Tout cela sans se faire inquiéter, il garde même des relations correctes avec ses ex-collègues. Et en étant shooté de la première à la dernière page !
Bref, ce n'est pas demain que je lirai un autre épisode de la série « Frank Marr » !
Commenter  J’apprécie         10
J’ai peaufiné ma technique de surveillance quand j’étais aux Stups dans le 7e district, et plus tard, comme privé. Dans la plupart de ces coins-là, on ne pourrait pas faire ce que je suis en train de fabriquer ici et en plus, les trois quarts du temps, il y aurait un ou deux équipiers en renfort.
J’ai besoin d’un coup de fouet, je sors ma boîte de médicaments de la poche gauche de mon pantalon. Elle contient cinquante gélules que j’ai remplies à ras de cocaïne. Deux gélules équivalent à une bonne ligne – ou, dans ce cas précis, une bonne pile. J’en ouvre une et verse la poudre contenue dans chaque moitié sur le dos de ma main. Après avoir regardé autour de moi, laissé passer un ou deux piétons, je sniffe la poudre, referme la gélule et répète le processus avec la deuxième. Et après, j’allume une cigarette.
Ce ne sera jamais plus comme la première fois, mais la déferlante initiale est toujours agréable. Il m’en faut aussi plus qu’avant, surtout quand je suis seul à la maison.
...quand j’ai appris dans quel guêpier mon cousin Jeffrey Baldwin s’était fourré. Ça fait plus d’une semaine maintenant que je le surveille et lui file le train par intermittence.
La mère de Jeffrey, Linda, vit toujours dans la même petite ville, aux environs d’Akron, dans l’Ohio. La dernière fois qu’on s’est parlé, j’étais inspecteur aux Stups, mais on s’est perdus de vue quand j’ai été mis à la retraite. Je ne lui retournais pas ses appels. Ma faute, pas la sienne. Elle a persévéré longtemps.
Puis, quand elle m’a appelé la semaine dernière, j’ai répondu. Elle a parlé comme si on avait toujours gardé le contact, m’a raconté qu’elle n’avait pas eu de nouvelles de Jeffrey depuis des lustres, qu’il avait séché les cours à l’université George Washington le trimestre précédent et qu’à présent, il devait suivre les sessions de rattrapage d’été. Elle a ajouté qu’il avait traîné avec des types peu fréquentables durant sa dernière année de lycée, et qu’elle avait peur qu’il se soit trouvé une nouvelle bande de voyous risquant de l’entraîner à nouveau vers le fond. Elle pensait que j’étais toujours flic et que je pourrais l’aider. Je lui ai répondu que j’étais devenu détective privé et que oui, peut-être que je pouvais lui donner un coup de main. Gratuitement, ai-je insisté. C’était le moins que je puisse faire pour m’excuser d’avoir coupé court à toute relation, et parce qu’elle avait été là pour moi quand j’étais môme, après la mort de ma mère.
Je lis la mort dans les yeux ternes de mon cousin – regard figé, perdu, comme s’il avait été pris par surprise. Il porte les mêmes vêtements que la veille dans la boîte de nuit. Il a toujours sa veste. Même tee-shirt à col en V, mais d’un gris plus foncé à cause du sang. J’ai envie de poser ma main sur sa tête, de le toucher. Il ne peut pas être mort.
J’ai aussi une étagère sur laquelle je stocke plusieurs grands sachets d’herbe, quatre boîtes de médocs aux étiquettes déchirées et contenant de l’oxycodone, de la Vicodin, du Valium et des Klonopin, médicaments dont aucun n’a été prescrit à mon intention. Sur une autre, il y a un peu plus de vingt mille dollars en rouleaux de billets solidement retenus par des élastiques ainsi qu’un sac renfermant environ une once de poudre premier choix. C’est tout ce qui me reste : une once.
Jeffrey se livrait en douce à quelques petites transactions, quart et demi-gramme, sachet de beuh, mais seulement de façon ponctuelle, et rien qui puisse attirer l’attention. Il faisait principalement affaire avec d’autres étudiants à l’extérieur de la boîte.