Je vais faire un truc que je n'aime pas, un truc d'une mauvaise foi vraiment crasse: critiquer un livre que je n'ai pas lu, ou plutôt pas fini de lire. Et que je ne finirai pas, c'est certain! C'est déjà arrivé à des gens très bien, sur 50 nuances de Grey, alors je ne vois pas pourquoi je me gênerais, pas de raison.
Non, je ne m'acharnerai pas davantage sur la lecture de Passeport à l'iranienne...
D'abord parce que si je veux rire, je préfère les écrivains qui ont vraiment de l'humour (Philip Roth, Emile Ajar-Gary...)
Ensuite parce que si je veux comprendre ce que c'est que l'Iran islamisé , j'ai le formidable Persépolis, dont j'ai déjà dit tout le bien que j'en pensais, cette BD autobiographique de Marjane Satrapi qui, soit dit en passant, a de l'humour, elle, c'est-à-dire qu'elle sait surtout rire de ses malheurs et pas de ceux des autres - ça , cela s'appelle de la condescendance...
Enfin parce que cela ne m'intéresse vraiment pas de lire pendant plus de 200 pages les heurs et malheurs d'une bobo parisienne revenue sur son sol natal, et qui se complaît à nous dire qu'elle va se faire faire une photo de passeport islamiste mais avec un chemisier froissé Issey Miyaké, qu'elle veut faire recouvrir ses chaises Louis XVI en toile de jute -quelle audace, quelle provoc', une rebelle, vraiment! - et que son plus gros problème c'est de savoir combien elle doit donner de pourboires à ses braves photographes-réparateurs de sèche-cheveux-recouvreurs de fauteuils-taxis qui ne veulent absolument pas qu'on les paye, à partir du moment où ils ont reconnu en mâdâââme Tadjadod la high class, la femme célèbre, l'écrivaine parisienne...que même les ayatollahs leur envient! (Au passage vous noterez quelques détails piquants qui PROUVENT que j'ai quand même un peu lu ledit bouquin...)
Ouf! me voilà délivrée de l'obligation catégorique kantienne de finir à toute force un livre commencé , qui , par je ne sais quel forceps de mon éducation pourtant non judéo-chrétienne et presque rousseauiste, me ligotait depuis l'enfance!
Merci, Nahal Tadjadod, pour avoir, bien malgré vous, levé cet interdit...vous pouvez remettre votre voile, maintenant, par-dessus votre chemisier Miyaké, je m'en tape!
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Pour moi, ce livre dans le fait qu'il existe, c'est à dire a trouvé un éditeur et des relais médiatiques à sa sortie, c'est une honte absolue. Lecture insupportable, abandonnée.
A toutes les pages, un nom de marque de mode (parfum, sac, vêtement, rouge à lèvre, vernis à ongle...) est décliné. J'avais l'impression très claire de tourner les pages d'un magazine publicitaire en produits de luxe.
Alors les petits soucis de luxe, d'une superficialité qui n'égale que la fadasserie stylistique, tout cela en exploitant abusivement pour faire du pognon, l'image d'un Iran, dictature religieuse, mais finalement plutôt rigolo dans ses tracasseries administratives. Je pense que les exécutés à mort de cet Iran rigolo ne peuvent même pas se retourner dans leur tombe tant ils doivent être encore plus pétrifiés par ces bassesses.
Si un lecteur de Babelio souhaite cependant lire cet opuscule, je lui enverrai gratuitement, cela débarrassera mes étagères.
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A mon avis, il y a deux problèmes avec ce livre : le premier est le fait que l'auteur a voulu faire un texte sur l'absurdité générée par la dictature iranienne, et du coup, à force de vouloir rester dans une veine (voulue) humoristique, elle reste à la surface des choses. L'idée n'est pas mauvaise en soi, mais il aurait fallu coller à son sujet.
le deuxième problème s'articule avec le premier : c'est le point de vue de l'auteur, qui au lieu de nous livrer une vision de l'Iran qui pourrait nous intéresser, nous, Occidentaux, se cantonne à nous raconter sa vie d'expatriée ultra bourgeoise qui revient de temps en temps dans son pays natal. Elle ne va jamais dans le fond du sujet, elle reste prisonnière de son propre milieu : elle nous montre la vie plutôt dorée de certains iraniens, et seulement par petites touches d'autres moins lotis, mais qui ne sont que des intermédiaires.
Etre bourgeois, être superficiel ? Malheureusement, on a un peu tendance à le croire avec ce livre. Dommage venant d'une femme qui se présente comme une érudite (elle a quand même traduit des livres semble-t-il intéressants). On ne fait pas de la littérature avec son nombril et du snobisme.
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Plus loin, un homme d'une quarantaine d'années est en train d'injurier l'Iran, sa patrie : "Je suis revenu au pays, après vingt-cinq ans d'absence" hurle-t-il. "J'ai trois doctorats ! J'ai tout laissé là-bas, ma villa, mes voitures, mon poste de consultant en produits pharmaceutiques pour rentrer et servir mon pays. Et voilà comment "ils" nous accueillent ! Cette fois c'est fini ! Dès que je mettrai les pieds dehors, je ne penserai plus un seul instant à ce foutu pays ! Je le chasserai de ma tête !"
Alors qu'il passe devant nous, Sattâr lui lance : "Tu en as mis du temps à devenir raisonnable"
Quant au chapitre sur l'Angleterre, mon oncle fait partie de cette génération d'Iraniens qui voient la main secrète des Anglais partout — non seulement en Iran et dans le Moyen-Orient mais aussi en Europe et aux États-Unis. Les Anglais sont partout. Ils dirigent le monde. D'après mon oncle, Bush ne prend aucune décision sans consulter Blair. Il n'est qu'une marionnette entre ses mains. La Knesset est aux ordres de la Chambre des Lords, tout comme le sont le Hezbollah libanais et les ayatollahs iraniens. Inutile de lui demande : "Dans ce cas, pourquoi se font-ils la guerre ?" Il se fâche et réplique sèchement : "Je m'exprime en persan, n'est-ce pas ?"
Le renouvellement de passeport est donc pour mon oncle une affaire sérieuse, presque une tragédie, qui nécessite des somnifères puissants, un conjoint compréhensif et des amis disponibles. L’idée que je vais entreprendre ce combat sans que les conditions soient réunies lui semble inconcevable.
Une grosse femme, qui ne réussit pas à introduire toute la masse de sa chair dans la courbure étroite de la chaise, renonce à cette pénible bataille. Les ouvertures des guichets étant placées très bas, elle doit, pour s'adresser au policier, se baisser jusqu'au niveau de ses genoux, offrant à la vue de tous deux grosses fesses charnues — spectacle islamiquement passable de prison.
Par quoi commencer, par les nuits du festival de Shirâz, où, sur la tombe de Hâfaz, à la lueur des bougies, Ravi Shankar jouait jusqu'à l'aube; où, au lever du soleil, un son avestique, émergeant des caveaux de Persépolis, après deux mille cinq cents ans de silence, conviait les êtres à se réveiller?
Golshifteh Farahani et Nahal Tajadod : L'exil (France Culture / L'Atelier intérieur). Émission diffusée sur France Culture le 12 juillet 2014. Nahal Tajadod et Golshifteh Farahani - 2012 - ©Tina Merandon. Son site internet : http://www.tinamerandon.com. “L’Atelier intérieur” s'ouvre à l’exil. À ce qui fait perdre et tout recommencer. Ce qui fait réfléchir à ce que l’on garderait : qu’est-ce qui pourrait témoigner de ce que l’on a été ? Le poète persan Rūmī avait choisi la poésie. Le poème se lit, oui, mais d’abord il se vit. Et comme c’est le “Printemps des poètes” cette semaine dans les “Ateliers de la nuit”, deux femmes en studio, deux vies cramponnées à la poésie. Dont on pourrait dire : “c’est tout un poème.” D’ailleurs l’une est devenue le personnage du roman de l’autre. Golshifteh Farahani a dit “oui” à Nahal Tajadod. Ce sont deux exils à 30 ans d’écart. Deux Iran. Golshifteh a fait son premier film à 14 ans, et à 14 ans déjà elle réalise que tout est éphémère. Elle se dit petit soldat du cinéma, qui un jour prend sa liberté au risque de perdre son pays. L’image de départ ce soir serait celle-là : « La maison de notre enfance celle qui n’existe plus, celle qui est en ruine, celle qui est habitée par d’autres » écrit Nahal Tajadod. L’exil accélère l’oubli, il paraît. Pourtant il reste encore les odeurs des bibliothèques, les bruits des portes, pourtant il y a des lieux que l’on ne quitte jamais. Après une biographie de Rūmī, Nahal Tajadod s’intéresse à Golshifteh Farahani. Parce qu’elle a en elle la question du poète : « D’où je suis, moi ? » Pour l’émission de ce soir, Golshifteh nous a dit : « Je suis là lundi soir à 99%. Probablement. » On a décidé d’y croire et on a bien fait. On a pris le risque : d’avoir une absence, parce que la vie nomade c’est aussi ça parfois : du silence à un endroit. C’est ne promettre à personne “un lieu à telle heure” parce qu’à elle rien n’a été promis. C’est ne pas croire complètement aux rendez-vous. C’est présenter tout comme un miracle. Une chance. Quand on vous a enlevé l’envol et l’élan, pour mettre sous vos pieds la contrainte de certains tracés, alors : “arrive ce qui arrive”. Et ce n’est pas une coquetterie. Ça fait partie du poème. Ça fait partie du poème, donc, de se dire que l’émission de ce soir aurait pu ne pas avoir lieu. La présenter comme un miracle, et alors qu'elle fait du silence à un autre endroit : la vivre jusqu’à minuit en faisant l’inventaire de tout ce qu’“ici ou très loin”, témoigne et témoignera toujours, comme cette “maison habitée par d’autres”, de ce que l’on est.
Golshifteh Farahani, actrice iranienne, en exil depuis 6 ans.
Et Nahal Tajadod, écrivain iranienne, pour son roman “Elle joue” : récit de la vie de Golshifteh Farahani et de leur amitié.
Sur leur exil, la reconstruction d’un intérieur « ailleurs ». Nahal Tajadod est spécialiste du poète persan soufi Djalāl ad-Dīn Muḥammad Rūmī.
Invitées :
Nahal Tajadod, écrivain
Golshifteh Farahani, comédienne
Thèmes : Création Radiophonique| Cinéma| Littérature Française| Théâtre| Cinéma Iranien| Exil| Poème| Golshifteh Farahani| Nahal Tajadod| Anne Steffens| St.Lô| Musique| Poésie| Rūmī| Djalāl ad-Dīn Muḥammad Rūmī
Source : France Culture
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