Le premier tiers du livre plante le décor : le quotidien dans la province chinoise de Yunnan de quelques familles d'un milieu relativement privilégié, la plupart des adultes étant enseignants.
En 1966, survient « le grand chambardement », à savoir la révolution culturelle. La vie de ces Chinois se trouve progressivement bouleversée par l'application des principes maoïstes qui les condamnent à renier leurs valeurs.
Les intellectuels sont envoyés en « rééducation », seuls les paysans et ouvriers méritent désormais le respect.
Les enfants cessent d'aller à l'école, c'est plutôt une bonne nouvelle pour la plupart, ils ne mesurent pas les répercussions de l'endoctrinement sur leur développement intellectuel : « Quand on nous a dit que les cours s'arrêtaient, tout le monde a trouvé ça génial ! Plus de cours, plus de devoirs à faire à la maison ! Cette liberté nouvelle valait bien quelques efforts : il a fallu se mettre aux réunions politiques quotidiennes. Dans la salle où elles avaient lieu, quelqu'un avait écrit : 'Les intellectuels puent !' On reprochait aux professeurs leur arrogance. le président Mao lui-même avait donné l'exemple en déclarant publiquement : 'Quel mal y a-t-il à ce qu'un élève s'endorme en classe, si le cours est ennuyeux ?' Les livres étaient méprisés. On allait désormais tout apprendre par la pratique, avec les ouvriers, les paysans et les soldats. » (p. 94-95).
Les plus jeunes ne prendront pleinement conscience des ravages de cette révolution dans leur vie personnelle que lorsque les familles seront divisées : les aînés et même les parents pourront être envoyés très loin pour travailler à la campagne dans des conditions éprouvantes...
Dommage que ce roman soit un peu mollasson et que les protagonistes manquent de relief, on ne s'y attache guère bien qu'on les suive de 1960 à 1972 et que leurs destinées, modelées par le bouleversement politique de ces années, soient intéressantes.
Cet ouvrage est néanmoins un témoignage important sur la Révolution culturelle chinoise (transposable à d'autres révolutions 'rouges').
A découvrir dès 14-15 ans.
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Dans la Chine des années 60, un couple de professeurs revient d'Indonésie pour servir la nation de Mao. Leur fils aîné, Gangming, découvre alors un pays nouveau et surtout une révolution qui bouleverse leurs vies d'intellectuels... Dans le même village, la jeune Taisen, passionnée de danse, finit par danser des opéras révolutionnaires, aux antipodes de ce qu'elle aime. Gangming et Taisen raconte leur révolution culturelle, chacun à leur tour...
Ce roman inspiré de témoignages vécus retrace assez fidèlement, me semble-t-il, la période des années 60-70 en Chine, à travers le regard de deux enfants, puis adolescents, chacun avec son histoire et son passé mais dont les expériences aboutissement à la même désillusion. Pour moi qui ne suis pas familière avec ce pays, ce fut surtout une grande leçon d'histoire. Mais je n'ai pas aimé la fin du roman, trop rapide à mon goût. J'aurais aimé en savoir plus sur l'après-Mao. Je ne suis pas sûre non plus que mes élèves s'intéressent à cette partie de l'histoire dans cette partie du monde (mais ceci est probablement un autre débat...)
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Dans les années soixante, la famille du jeune Gangming revient dans sa Chine natale. le choc est dur pour ces bourgeois d'Indonésie qui découvrent une vie spartiate, dominée sans partage par l'idéologie maoïste La jeune Taisen, habituée à cet état de fait, les aide à s'installer et trouver leurs marques. Puis, Gangming et Taisen grandissent et leurs chemins se séparent… Tour à tour, chacun des deux jeunes prend la parole, racontant son quotidien, qui touche parfois celui de l'autre, notamment quand il s'agit de s'entraider matériellement, mais par forcément, et même de moins en moins au fil des ans, comme si l'atmosphère paranoïaque qui gagne la Chine de cette époque détruisait aussi les relations humaines.
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Lecture Jeune, n°130 - juin 2009 - Deux adolescents chinois racontent dix ans de leur jeunesse, de 1960 aux années 70. Lui, Gangming, appartient à une famille aisée qui quitte l'Indonésie pour retrouver le grand-père et participer volontairement au développement de leur pays. Il a 6 ans quand ses parents s'installent au lycée de Kunming, dans le Yunnan, avec ses frères et soeurs, sans avoir pu rejoindre leur grand-père, à Hangzhou à des milliers de kilomètres de là. Taisen, elle, vit avec ses parents, dans le même bâtiment que le jeune garçon. Son père est chef de la propagande politique, sa mère professeur de mathématiques. Elle a deux soeurs plus âgées. Leurs récits parallèles donnent vie à cette société socialiste tout entière tournée vers la mise en oeuvre de la pensée maoïste révolutionnaire et l'édification de la Chine nouvelle. Ainsi, le petit garçon découvre la rusticité de l'habitat collectif, l'absence d'eau courante, la puanteur des latrines. Gangming et Taisen grandissent et s'éloignent l'un de l'autre alors que l'endoctrinement auquel ils sont soumis justifie ces conditions de vie. Cependant, le déclenchement de la Révolution Culturelle et ses excès leur font découvrir des réalités en contradiction avec les pensées du « petit livre rouge ». La famille de Taisen est dispersée, sa mère et ses soeurs sont obligées de partir travailler dans les campagnes misérables. Gangming participent aux grands travaux, comme le comblement d'un immense lac, muni d'une petite corbeille d'osier. Quand les affrontements s'apaisent, les parents, qui ont survécu, ont perdu leurs idéaux. Mais l'esprit des enfants n'a pas été totalement formaté par un discours politique visant à détruire tout comportement « bourgeois ». Trente ans après, Taisen est devenue une femme d'affaires qui gagne sa vie en promouvant l'opéra traditionnel chinois et Gangming s'est installé à l'étranger comme ingénieur. Ce livre, parce qu'il est écrit simplement, permet de saisir ce que pouvait être la vie quotidienne à cette époque et comment le contrôle politique permanent pouvait détruire les familles et les rapports humains. Il contient quantité de détails précis et véridiques tels que la référence à Lei Feng, l'ouvrier modèle, les séances d'autocritique, la misère des paysans, etc. Il est à conseiller comme une première approche de la Chine contemporaine et peut donner envie d'en savoir plus. ?Colette Broutin
Lire la critique sur le site : Lecturejeune
Quand on nous a dit que les cours s'arrêtaient, tout le monde a trouvé ça génial ! Plus de cours, plus de devoirs à faire à la maison ! Cette liberté nouvelle valait bien quelques efforts : il a fallu se mettre aux réunions politiques quotidiennes. Dans la salle où elles avaient lieu, quelqu'un avait écrit : "Les intellectuels puent !". On reprochait aux professeurs leur arrogance. Le président Mao lui-même avait donné l'exemple en déclarant publiquement : "Quel mal y a-t-il à ce qu'un élève s'endorme en classe, si le cours est ennuyeux ?". Les livres étaient méprisés. On allait désormais tout apprendre par la pratique, avec les ouvriers, les paysans et les soldats. (p. 94-95).
On était plusieurs centaines à marcher en ligne, avec notre hotte pleine de terre dans le dos, et la puissance de nos voix est impressionnante. On ses sentait faire partie de quelque chose de très fort, et qui nous portait. J'y mettais toute mon énergie ! Pourtant, chaque fois que j'arrivais au bord de l'eau pour vider mon grand panier, j'avais beau scruter le lac , je n'arrivais pas à voir s'agrandir les terres cultivables.
Rencontre avec Anne Thiollier autour de son roman "La vie en Rouge" (Gallimard)