"Anna, les contrats doctoraux se comptent sur les doigts d'une main. Et vous êtes trop nombreux, certains contrats sont déjà pourvus deux ans à l'avance.[...] Si j'étais vous, je chercherais un vrai travail.[...]Bim, l'ascenseur social venait de me déposer au sous-sol. "
C'est ainsi qu'Anna, diplômée de philosophie, se retrouve à Pôle Emploi, où sa conseillère lui assène qu'elle n'a aucune compétence et lui propose un emploi de chauffeuse de salle pour une émission télé. En parallèle elle file le parfait amour avec Lulu, bricoleur de génie. Deux smicards comme il y en a tant ni malheureux, ni heureux car Anna souffre de l'absence de reconnaissance sociale. Jusqu'au jour où la donne change de façon complètement inattendue...
Ce premier roman à la plume enlevée, dépeint une jeunesse en perte de repères dans une société bourrée d'injonctions et de conventions absurdes et contradictoires, où le paraître prend une importance démesurée. Conte moderne corrosif, il interroge sur le sens de la vie quand il n'y a plus de valeurs sur lesquelles s'appuyer, pas vraiment d'avenir et des idéaux confisqués. Les personnages sont plutôt bien incarnés, Anna est tête à claques autant qu'attachante, Lulu très touchant.
C'est drôle, décapant, doux-amer.
En librairie mercredi 3 janvier.
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Anna est une jeune diplômée en philosophie qui finit par trouver du travail en tant que chauffeuse de salle pour une émission de télévision autour de la chanson et de jeunes talents.
Elle rencontre Lulu, qui, très vite s'installe chez elle. Lui, bricole, répare tout. Bientôt, un apport d'argent va changer leur vie et leurs rapports.
Satire sociale, délicieusement drôle dans les premiers chapitres, notamment dans le décalage entre la jeune femme qui entre dans le monde du travail et pas n'importe lequel, dans celui de la télévision, du paraître, loin donc, très loin de ces études de philosophie. Également dans l'écriture parfois très classique et d'autres fois, plus moderne, plus rapide : "Robe. Rouge à lèvres. Métro. J'interphone, j'escalier, je bise."
Et puis, au fil des pages, l'argent rentre et l'insouciance s'en va, la société du paraître prend le dessus et le roman se fait plus critique, moins drôle. C'est bien vu même si parfois un peu long, et j'avoue être passé un peu à côté de la fin. Un court roman, bien écrit, avec des personnages attachants, même lorsqu'ils prennent des chemins dans lesquels ils vont se perdre.
Pour prolonger, et sur un thème assez proche, je conseille fortement la très bonne série sur France Télé, Or de lui.
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Anna, jeune femme ni belle ni vraiment laide malgré ce qu'on lui a répèté inlassablement pendant son adolescence, est fraîchement diplômée. La philosophie c'est bien, mais ça n'offre aucun débouché et ne semble porteur d'aucune compétence.
La voilà donc chez pôle emploi à la recherche d'un poste à hauteur de son diplôme. Hélas, on lui propose de devenir chauffeuse de salle pour émission de télévision.
Smicarde avec bac plus cinq, classique et démoralisant.
Elle rencontre Lulu, réparateur d'objets cassés, amoureux et beau comme un Dieu. La vie s'installe, appartement, petit boulots, petits câlins. Tranquille mais frustrante.
Enfin, jusqu'au moment où tout bascule. Lulu est malfe, mais d'une maladie rare et inconnue qui satisfait Anna au delà du raisonnable.
Jolie surprise que ce premier roman, court, enlevé, singulier.
Anna et ses rêves, ses envies qui la font sortir de sa ligne de conduite, qui lui font oublier le bien être de son amoureux, superficielle et dépensière, avec des envies d'être une autre, de vivre mieux ou du moins d'afficher cette différence assumée bien que loin de ses ambitions de jeunesse.
Conte philosophique, satire ou état des lieux d'une jeunesse d'aujourd'hui et de ses contradictions, conte ethnologique qui nous fait découvrir cette génération que nous ne connaissons pas et parfois ne comprenons pas. Excellent moment de lecture.
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Ce talentueux premier roman ne pourra vous laisser de marbre, vous vous y retrouverez forcément, quel que soit l’état de votre compte en banque. Dynamique, drôle, émouvant, révoltant parfois, il questionne sur notre façon de vivre et sur l’importance que nous donnons aux autres.
Lire la critique sur le site : Actualitte
Vers deux heures du matin, mon téléphone a vibré. J’ai essayé de l’ignorer, mais l’appel était insistant. J’ai décroché et entendu la voix de Sophie, paniquée :
- Pourquoi Dieu existe ?
- T’as pas une question plus vaste au milieu de la nuit ?
- Chez Descartes, pardon, je suis en plein dans les Méditations. La première preuve, je crois que j’ai compris, mais pas la deuxième, avec l’argument ontologique.
- En fait, c’est plutôt un argument ontologico-axiologique, tu vois, parce qu’il part du présupposé de la plus grande valeur de l’existence sur l’inexistence. Grosso modo, c’est mieux d’être que de ne pas être, et comme Dieu est parfait, il est forcément.
- Aaaaah, OK. Et tout ça pour qu’il soit tué chez Nietzsche après ?
- Ouais, pas de bol, hein… Et chez Deleuze, c’est un homard à double pince, je te dis pas la déchéance…
- Quoi ? T’es sérieuse ?
- Écoute, le mieux, c’est que t’évites de parler de Dieu dans ta copie, OK ?
Entre-temps, j’avais terminé ma période d’essai. Marjorie m’avait appelée un soir. Elle était à deux cents volts. Elle criait presque au téléphone. « Ils vous gardent, ils vous gardent ! » J’avais l’impression d’être un de ces vieux chiens de la SPA que des propriétaires pouvaient ramener s’ils les trouvaient trop méchants. Les RH de l’émission lui avaient confié que je n’étais pas le boute-en-train de l’année, mais que je m’acquittais correctement de ma tâche, je pouvais donc rester. Marjorie mettait tellement de dynamisme dans son discours, elle employait tellement de superlatifs qu’elle a bien failli me convaincre que j’avais obtenu un travail formidable.
- Un team building, c’est pour souder les liens entre collègues. Tu vas voir, c’est super. C’est très important pour la cohésion de l’équipe.
- Attends, ils nous forcent déjà à passer huit heures par jour ensemble, ils ne peuvent pas en plus nous obliger à nous apprécier.
Incipit :
C’était l’époque où je cherchais du travail. Ou, plutôt, le moment où j’en ai trouvé un. Avec l’arrêt des études, plus de bourse. Sitôt mon diplôme récupéré, je m’étais dirigée vers Pôle emploi. Sans réfléchir. J’avais suivi la cohorte. Tout le monde savait que c’était un passage obligé après le master.
J'étais si fatiguée que mes cernes eux-mêmes avaient des cernes
Dans cet épisode, nous vous présentons des livres qui nous ont fait rire. Huit propositions de lectures pour différents âges : de l'humour, fin ou gras, des jeux de mots, de l'absurde, du comique de situation, de la satire sociales... Des livres que nous avons beaucoup aimés, auxquels nous repensons avec le sourire et que nous adorons mettre entre les mains des lecteurs. Une liste à garder précieusement, concoctée par nos libraires Laure, Rozenn, Nolwenn, Jérémy, Nicolas et Adeline !
Voici les livres cités dans cet épisode :
Un ours, un vrai, de Stéphane Servant et Laëtitia le Saux (éd. Didier Jeunesse) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/23128786-un-ours-un-vrai-stephane-servant-didier-jeunesse ;
Horace. Tome 1, Cheval de l'Ouest, de Poirier (éd. Revival) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/23359947-horace-tome-1-poirier--revival ;
Les Culs-reptiles, de Mahamat-Saleh Haroun (éd. Gallimard/Folio) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/22745328-les-culs-reptiles-mahamat-saleh-haroun-folio ;
Admirable, de Sophie Fontanel (éd. Seghers) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/22540820-admirable-l-histoire-de-la-derniere-femme-ride--sophie-fontanel-seghers ;
Chroniques du Château faible, de Jean-Christophe Mazurie (éd. Fluide Glacial) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/23032241-1-chroniques-du-chateau-faible-tome-01-jean-christophe-mazurie-fluide-glacial ;
Stella et l'Amérique, de Joseph Incardona (éd. Finitude) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/23109474-stella-et-l-amerique-joseph-incardona-finitude ;
Le Rire des autres, d'Emma Tholozan (éd. Denoël) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/23030426-le-rire-des-autres-emma-tholozan-denoel ;
Roman fleuve, de Philibert Humm (éd. des Équateurs/Folio) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/23286751-roman-fleuve-philibert-humm-folio.
Et quelques autres titres qui auraient pu faire partie de cette sélection de livres drôles :
Le Discours, de Fabrice Caro (éd. Gallimard/Folio) ;
Miracle à la tombe aux Aspics, d'Ante Tomi (éd. Libretto) ;
N'essayez jamais d'aider un kangourou !, de Kenneth Cook (éd. Autrement) ;
Je dénonce l'humanité, de Frigyes Karinthy (éd. Viviane Hamy) ;
Le Chien de madame Halberstadt, de Stéphane Carlier (éd. le Tripode) ;
Roulio fauche le poil, de Julia (éd. le Tripode) ;
La Vie est une corvée, de Salomé Lahoche (éd. Superexemplaire) ;
Idées noires, de Franquin (éd. Fluide Glacial) ;
#Les Mémés, de Sylvain Frécon (éd. Fluide Glacial).
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Les Éclaireurs de Dialogues, c'est le podcast de la librairie Dialogues, à Brest. Chaque mois, nous vous proposons deux nouveaux épisodes : une plongée dans le parcours d'un auteur ou d'une autrice au fil d'un entretien, de lectures et de plusieurs conseils de livres, et la présentation des derniers coups de coeur de nos libraires, dans tous les rayons : romans, polar, science-fiction, fantasy, BD, livres pour enfants et adolescents, essais de sciences humaines, récits de voyage…
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