Serions-nous tous, comme le prétend Thoreau, aveugle aux couleurs de la nature, sourd à la multitude des bruits propres à l'automne?
Au dix-neuvième siècle déjà, alors que la nature tenait une place - dans la vie comme sur Terre - largement plus prépondérante qu'aujourd'hui, cet amoureux regrettait le peu d'intérêt que ses contemporains lui portaient. A qui la faute sinon à l'urbanisation et l'industrialisation?
Thoreau, lui, fuit toute nature humaine pour se consacrer à ses recherches botaniques. Mais ce qu'il aime par dessus tout, ce sont donc ces couleurs incroyables que seule la nature est capable de produire et qui se déploient tout autour de lui, à condition de trouver la bonne focale pour les apprécier.
Marchant dans la forêt proche de Concord, Massachusetts, il étudie cette valse des feuilles dans le temps, chacune déployant ses couleurs selon l'espèce de son arbre et son cheminement automnal. A leur apogée, elles sont écarlates et lumineuses, rougeoyant le ciel, diaboliques.
Puis elles tombent sous les rafales d'octobre, tapissant jardins, forêts, ruisseaux et lacs. Les cours d'eau disparaissent sous les feuilles, et Thoreau dans sa barque aime s'asseoir sur ce tapis flamboyant. le moindre petit animal est de suite dénoncé par le bruissement des feuilles sous ses pattes.
Il y a de très beaux passages dans cet
essai sur ces couleurs magnifiques que l'on peut voir sur le continent américain en automne, mêlés à la misanthropie légendaire de Thoreau.