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EAN : 9782221095782
324 pages
Robert Laffont (26/09/2002)
3.5/5   1 notes
Résumé :
Missions nocturnes
«Missions nocturnes» se déroule pendant les trois journées consécutives à l'invasion de la Tchécoslovaquie par les armées du pacte de Varsovie, le 21 août 1968.Alors que les chars soviétiques entrent dans Prague et que leur père, dissident, se cache, Ondra et son jeune frère se retrouvent livrés à eux-mêmes dans un petit village tchèque. Inconscient de la véritable nature des événements, confronté au chaos du monde adulte, Ondra, tout au lo... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
« Missions nocturnes » s'ancre dans un événement clé de l'histoire tchèque : 1968 et l'invasion des chars soviétiques.
L'Histoire sert la réflexion et l'imagination de Jachym Topol, mais jamais ne l'en rend esclave.

« Les glaces emportaient les berges, sous la croûte glacée, dans les méandres et les bras morts, l'eau battait la campagne. », « Il est allongé dans la barque, la chaleur l'endort… »

« Il », c'est Ondra, le jeune héros de ce roman, qui a dû fuir Prague avec son petit frère.
Leur père travaillait à une invention à l'Office de la propriété industrielle. (Il sera question de l'appareil qu'il a conçu, plus tard dans le roman.)
Un tank a fait feu sur le bâtiment où il travaille. Les archives vont être détruites, et le père, en catastrophe, réussit à sauver quelques documents qu'il pourra emmener dans une mallette.
Il est dissident. Il est traqué. Il rejoindra ses enfants plus tard, mais pour l'instant, il faut qu'ils s'éloignent de Prague, où règne le chaos et le danger.
Le père avait dit à Ondra : « J'ai une mission de guerre pour toi. »

C'est leur oncle Polka, qui accueille Ondra et son frère, « le Petit », dans un petit village de campagne, à la place de leur grand-père, qui vient de mourir.
Au village, « Les nouvelles de Prague sont les suivantes : apparemment on aurait été envahis par les Popofs. »
« Il faut s'armer et s'approvisionner ». le destin de chacun bascule.
Mais pourquoi une idéologie impose-t-elle ses lois ?

Ondra, le grand frère, en l'absence du père, va devoir s'occuper du « Petit » et faire en sorte qu'il soit à l'abri de tout danger. Mais, pour Ondra, la brutale réalité, les épreuves qu'il va devoir affronter, et les rencontres qu'il fera, achèveront le temps de son innocence.
Au départ, Ondra est mal vu des gamins qui vivent dans ce milieu rural, lui qui est Pragois, cet étranger, considéré comme arrogant, à leurs yeux.
Intimidations, rapports de force, évaluations, jeux dangereux, vont faire partie de la nouvelle vie de Ondra. Les gosses du coin, se demandent pourquoi ils doivent subir la présence de ce gamin pragois, pourquoi son père est recherché, pourquoi maintenant, des policiers investissent leur lieu de vie.

Ondra, livré à lui-même, va devoir faire face aux dangers et se montrer courageux.
Il lui faudra intégrer la bande des Liman, cette bande de gamins qui connaissent bien les coins et recoins de leur campagne et vont faire preuve de résistance face aux envahisseurs russes, en les agressant avec des lances-boulons !
Leur lieu de vie est hostile et funeste, les lieux sont escarpés, boueux ; il y a des collines boisées sombres, des marécages, des bunkers, …

Les gens du village ont leurs habitudes, leurs croyances, leurs superstitions.
La plupart n'en ont pas encore fini avec l'obscurantisme.
C'est une communauté d'hommes et de femmes qui vivent un peu en marge, des gens rustres et méfiants, où tout le monde se connaît, et où la mémoire des vieux est importante. Ils gardent en eux les secrets, les savoirs et les pouvoirs. Il y a la Mère des morts, celle que les filles qui sont tombées enceintes vont voir pour avorter clandestinement ; il y a ces vieilles femmes qui communiquent avec les morts, une grand-mère qui veut acquérir un chat noir pour que les gens croient davantage à ses prédictions… des tsiganes vivent alentour…
Et puis il y a les jeunes, avides de la vie et du bonheur…

Il y a le bistrot, ce lieu de rassemblement et de débats, où l'alcool délie les langues ; le cafetier, dont la fille, Zuza, jeune et jolie, attire les hommes et dont Ondra s'éprend, lui qui est encore tout jeune… il y a le bedeau, le policier communiste Frida, qui représente un certain pouvoir, les « culs-terreux », des « paumés », et puis il y a ces flics arrogants, en civil, qui arrivent de Prague… et qui sont à la recherche du père d'Ondra…
Compromissions, lâchetés des adultes dans ce chaos d'un monde qui se défait…

Mais pourquoi au juste, les russes avaient-ils tiré au canon sur le bureau où travaillait le père d'Ondra ?
Pourquoi viennent-ils dans leur village ? Est-ce que le père d'Ondra a caché quelque chose dans leur campagne ? Chacun y va de sa propre supputation, avec ses préjugés, ses soupçons.

Bientôt, les chars investissent le village.
Que va-t-il advenir d'Ondra et du « Petit » ?
Vont-ils revoir leur père ?

Les dialogues des personnages de Jachym Topol se rapprochent un peu des célèbres effusions verbales de Bohumil Hrabal. Il place astucieusement les dialogues et les réflexions de ses personnages, sur la vie, la politique, le dépérissement et l'au-delà.
Il puise son style dans le langage de la rue, le langage familier, l'argot.
Son écriture est sans fard, et le texte sonne naturel.
Le récit est rythmé, bâti en une succession de courtes phrases.

« Missions nocturnes », est un roman à la fois tendre et apocalyptique, qui nous emmène à la limite du rêve, de la réalité et du cauchemar.

Depuis 1990, Jachym Topol fait partie des écrivains tchèques les plus traduits à l'étranger, notamment en français. Il est aujourd'hui considéré comme le chef de file de la nouvelle littérature tchèque.

« Ils n'ont pas reculé devant le fauve russe… »
« Les jours de miracle s'enfilent côte à côte, comme les perles d'un chapelet béni. »
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
D’accord, d’accord, j’ai cafouillé. Les flics, je les emmerde, le tribunal qui m’importe, c’est celui qui siège, depuis la première cellule vivante, depuis l’aube de l’humanité. Bouteille après bouteille, tu as transformé ton cerveau en éponge, ma fille, mais il est encore temps, avant l’heure, c’est pas l’heure, cher jury. Je vais sortir de là. Nom de dieu, je ne suis pas dans un asile de fous soviétique, mais dans une institution sérieuse d’Europe centrale pour mères alcooliques tueuses. J’irai les chercher, à quatre pattes s’il le faut, mes petits. Sans me poser de questions, un peu comme une louve.
(p.66-67)
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C’est Proskova qui pleure, une sale vieille qui ressemble à un morceau de beurre informe et rance, emballé dans des tissus noirs, un bout de beurre fendu de rides… elle pleure, elle pleure, Ferdinandka. Une vieille moustachue aux yeux perçants et au nez aigu comme un bec, une petite vieille futée à l’air de lutin, la soutient par le coude gauche. Sur l’autre flanc de la gigantesque Proskova se tient la vieille Skvorova : Arrête de pleurer comme ça, tu vas te rendre folle…
(p.133)
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