Quand les gars d'Arlay l'avaient repêchée, par un beau matin d'avril 1910, pauvre corps brisé et ruisselant des eaux boueuses de la Seille, elle n'était personne. Et pendant les mois qui avaient suivi, à peine si elle avait été davantage que des os à assembler, des chairs à recoudre, des tissus à ravauder. Elle était l'inconnue de la rivière, la mystérieuse noyée, la survivante d'une catastrophe dont on ignorait tout et dont elle-même n'avait aucun souvenir. Elle était la femme sans passé, sans visage non plus