Michel Strogoff est le roman classique par excellence tant il obéit aux règles du genre : roman d'aventures, mais aussi historique, de guerre, sentimental, foisonnant et descriptif, grandiloquent avec son héros insubmersible.
Michel Strogoff est un sibérien de 30 ans, capitaine au corps des courriers du tsar (que
Jules VERNE orthographie « czar »). Il est appelé pour donner en mains propres de la part du tsar un billet urgent au Grand-duc, frère dudit tsar et réfugié en Sibérie. En effet, les tartares, menés par le sanglant Ivan Ogareff ont pour projet imminent d'envahir la Sibérie. le Grand-duc est en danger. La Russie également.
Le hasard, ou plutôt la providence, met sur le chemin de
Michel Strogoff une jeune femme d'à peine 17 ans, Nadia, dont il va rapidement tomber amoureux. Pour voyager anonymement jusqu'en Sibérie, Strogoff emprunte un pseudonyme, ce qui ne va pas aller sans soucis. Nadia, quant à elle, s'est donné pour mission de rejoindre son père veuf. Pour cela, il lui faut, ainsi qu'à
Michel Strogoff, traverser une Russie à feu et à sang.
Deux des figures majeures du récit sont journalistes : le français Jollivet et l'anglais Blount, amis et pourtant concurrents qui veulent offrir la primeur des informations sur la guerre en cours à leurs journaux respectifs. Pour la pièce de théâtre,
Jules VERNE a choisi de mettre l'accent (sans mauvais jeu de mots, voir plus loin) sur la relation entre ces deux protagonistes. Soyons lucides : si le roman est une oeuvre d'envergure par sa densité, la pièce est médiocre, fade, se focalisant sur les repartis des journalistes, dialogues de potaches, grotesques et insipides, d'autant que VERNE tient absolument à faire parler Blount avec un fort accent anglais tout au long de la pièce, ajoutant un peu plus en lourdeur et confusion. Mais revenons à la version première.
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Michel Strogoff », derrière ce roman épopée, peut être vu en partie comme un essai sur la Russie tsariste du XIXe siècle, tant les détails sont nombreux, que ce soit pour la géographie, l'histoire, la situation administrative, l'architecture, les croyances et coutumes, etc. Roman riche, dont la caractéristique en est les digressions du roman vers l'essai, le documentaire. Pour tous ces attributs, «
Michel Strogoff » est indéniablement structuré comme un roman russe, il emprunte pas mal de règles à
Léon TOLSTOÏ par exemple, pensons notamment à « Guerre et paix » dont il pourrait être une version expurgée, en étant toutefois très loin d'un copié/collé fatal.
Mais «
Michel Strogoff » est aussi un roman de voyage : les héros descendent la Volga (que VERNE identifie comme « le Volga ») sur 700 verstes, et l'auteur de décrire ce qu'ils voient, nous donnant une idée plus précise des paysages de la Russie ainsi que des costumes locaux qui diffèrent selon les lieux traversés et les origines sociales.
Roman viril aussi, avec cette figure protectrice et très mâle d'un
Michel Strogoff servant d'armure à la jeune Nadia, ambiance à replacer dans le contexte des moeurs du XIXe siècle, où l'Homme est un être dominant et monopolistique, résolument masculin et guerrier.
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Michel Strogoff » aborde une quantité assez conséquente de sujets, n'est jamais en reste et se lit à plusieurs niveaux. Il n'aurait cependant pas pu se dérouler hors Russie tellement il est russe sur le fond, dans sa forme, son ampleur, et même dans l'âme (quoiqu'un poil moins tragique, surtout lors de son dénouement qui le différencie des grands romans russes). Il est une épopée guerrière sanglante, puissante, ainsi qu'une toile romantique assez poussée.
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Michel Strogoff » est singulier dans le paysage littéraire français tant il lorgne du côté de la Russie. Mais pourquoi diable jules VERNE a-t-il voulu en faire ensuite l'écho par une ennuyeuse et maladroite pièce de théâtre ? Sa motivation peut nous échapper. En tout cas, vous l'aurez compris, ne croisez cette pièce que de loin, lui préférant largement le foisonnement du roman, malgré une écriture des plus surannées.
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