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EAN : 9782259191104
293 pages
Plon (16/10/2003)
3.5/5   2 notes
Résumé :
La compassion est une force universelle qui lie les humains entre eux à la façon des étoiles d'une galaxie. Chaque individu est ainsi uni à l'autre par une intériorité partagée dont la plus extraordinaire manifestation est le langage. Dans cet échange passionné entre l'un et l'autre se mêlent intimement le sentiment et le geste, l'émotion et la raison. Le cerveau de chacun fonctionne à la façon d'un miroir reproduisant les mouvements et les affects de l'autre. Peut-... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
J.-Didier VINCENT nous parle ici, à chacun et chacune, “au coeur et à corps” avec chaleur fraternelle d'un sujet éculé et rentabilisé, par les “religiosismes” de tous les pays, la « compassion » et son corollaire en revers-pervers humain « la contre-passion* », avec son esprit parfois taquin empreint de bonhomie, mais néanmoins profond, brillant par sa maîtrise du sujet !
Il nous propose tout au long de ce livre “qui se lit tout seul”, nous emmenant vers une reformulation de ce qui constitue à proprement parler “notre possible humanité”, de faire le point sur ce qui nous “habite”, nous Humain.
C'est un appel à retrouver courageusement le “Travail en Soi” sur le goût de l'Autre qui donne son sens à l'amour du prochain indépendamment des “puissants de la Foi” de tous bords ...
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* — “contre-passion” dont il est beaucoup moins question dans ces milieux, c'est “moins vendeur” sans doute, peut ragoutant et cependant l'histoire de l'humanité est assourdie de son omniprésence quotidienne !
Lien : http://camisard.hautetfort.c..
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Citations et extraits (50) Voir plus Ajouter une citation
De la chimie du désir à l'alchimie de l'amour
… “l'attachement” le mot désigne chez l'homme « le sentiment qui unit une personne aux personnes ou aux choses qu'elle affectionne ». En psychologie animale, le terme est généralement réservé au lien entre individus de la même espèce : la mère (éventuellement le père), et les enfants ou les enfants et la mère (éventuellement le père) et enfin entre deux individus (en général des partenaires sexuels). Un biologiste peu soucieux des reproches qui pourraient lui être adressés n'hésitera pas à parler d'amour. « L'amour entre bêtes est une chose admirable », disait déjà au Moyen Age Raymond Lulle. De là à qualifier l'ocytocine d'hormone de l'amour, il y a un pas que je me refuse à franchir, au risque de passer pour un incurable romantique auprès de ceux qui confondent copulation et élans de cœur. La vérité m'oblige toutefois à dire que chez les rats, les souris, les campagnols et les ouistitis, espèces les plus étudiées par les biologistes, l'attachement commence par un accouplement au cours duquel de l'ocytocine est libérée dans les régions basses et profondes du cerveau. Pourquoi alors ne pas signaler que, lors de l'orgasme chez deux individus humains qui font l'amour, l'ocytocine est libérée dans leur hypothalamus où elle forme avec la dopamine le duo neurochimique du plaisir/désir ? Ce qui nous conduit à penser que, dans leur accouplement passionné sur le pont du vaisseau qui les menait en Cornouailles, Tristan et Iseult ont joui comme des bêtes.
Le mythe ne s'arrête pas sur un simple coït qui resterait épisodique même s'il était quelque peu répété avec la même partenaire. Le mythe installe l'acte copulatoire dans la durée, voire dans l'éternité, et lors du duo extatique du deuxième acte de l'opéra de Wagner, les amants échangent ces paroles :
« Tristan : — Toi Tristan, moi Isolde non plus Tristan !
Isolde : — Toi Iseult, moi Tristan non plus Isolde ! »
Le mythe de Tristan devient celui du couple : « le toi et le moi réunis pour toujours dans un bonheur sublime » et dans une conscience confondue qui exprime la compassion dans sa forme la plus accomplie.
p. 111
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De la chimie du désir à l'alchimie de l'amour
L'amitié comme toute autre forme de compassion obéit aussi au principe de pénétration réciproque. Il n'y a pas d'amitié qui marche à sens unique : l'amitié ne fonctionne pas sur le manque mais sur le partage ; l'échange de don de soi fondé sur une connaissance de l'autre : « Parce que c'était lui parce que c'était moi. » Mais il s'y mêle toujours quelque chose de l'élément opposant — “posséder” ce que l'autre a en propre. Il y a donc de l'envie échangée dans toute amitié. Celle-ci est plus douce que l'amour, mais elle est moins généreuse.
Les premiers chrétiens ont inventé une troisième forme d'amour : l'amour du prochain, c'est-à-dire l'amour de tout le monde et de n'importe qui, ennemis compris. Ils l'ont désigné par le mot agapè (du verbe grec agapan qui veut dire « chérir ») que les Latins ont traduit par caritas qui donnera notre « charité », une des trois vertus théologales. Il s'agit d'un amour désintéressé, sans manque et sans concupiscence ; un amour pur, car situé bien au-delà du désir, sans utilité physiologique et appareillé à une joie détachée de la chair — ce que dément le proverbe : charité bien ordonnée commence par soi-même. Ce serait, dit Comte-Sponville, « l'amour que Dieu a pour nous, que Dieu est pour nous (“O theos agapè estin”, “Dieu est amour” selon l'évangile de Jean) [...]. Ce serait une joie, comme aurait pu dire Althusser, sans sujet, ni fin » — sans queue ni tête, en somme.
p. 129
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De la chimie du désir à l'alchimie de l'amour
Sur cette biologie animale sans mystère, faite de chimie organique, s'édifie la compassion qui, elle, n'appartient qu'à l'homme. Il ne s'agit plus seulement du lien neuronal qui attache, mais du face-à-face dans lequel l'étant et l'autrui s'interpénètrent et se comprennent par la médiation du visage à travers la trouée du regard. L'éprouvé du corps reste animal et impose ses contraintes, mais la compréhension est spécifiquement humaine et se fait par la parole que celle-ci soit dite ou figurée. « Alors, selon Lévinas, la vision du visage n'est plus vision, mais audition et parole » et mon être « envisagé » parle à l'autre qui m'écoute.
L'objet premier du désir de l'homme est l'homme ; alors le désir devient amour, forme jouissive de la compassion : « Aimer c'est se réjouir. » La formule d'Aristote est peut-être trop belle pour être toujours vraie : « Il n'y a pas d'amour heureux », se lamente Aragon. Je souscris facilement à l'énoncé de Spinoza : « L'amour est une joie qui accompagne l'idée d'une cause extérieure » en précisant qu'il s'agit d'amour et non simplement de désir et que cette cause extérieure est “l'autre” » cher (chère) à l'âme de l'amant(e). J'insiste sur cette fusion de l'amour et de la joie — l'amour traçant le chemin de la joie — qui se consomme (se consume ?) dans l'autre.
p. 126
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Des anomalies génétiques héréditaires ou accidentelles, auxquelles s'ajoutent les dysfonctionnements de la société dans laquelle grandit l'individu, peuvent fournir une explication valable de la violence comportementale de l'homme, expression de la “contre-passion”. Les animaux offrent des modèles d'agressivité pour se défendre et protéger leurs petits ou de conduites prédatrices pour se nourrir. Dans tous ces cas, il est facile de reconnaître une valeur adaptative. J'avoue être moins convaincu par des arguments bio-logiques lorsqu'il s'agit d'expliquer la furie qui enflamme régulièrement l'espèce humaine ou l'ivresse contagieuse qui s'empare des hommes à la vue du sang. Le caractère adaptatif du “mal” ne me paraît pas alors évident. Comment le même François d'Assise peut-il être successivement le jeune adolescent épris de lui-même qui participe à la boucherie de Collestrada* dans l'impatience de la victoire escomptée et le “poverello” dont le cœur débordant de compassion bat dans la multitude des autres cœurs ? François, “l'homme post-moderne” selon l'expression de Bof qui me permettra de célébrer le triomphe de la compassion. Qui sont ces chrétiens qui violent et massacrent pendant les cruelles croisades au nom d'un Évangile où Jésus, « en voyant cette foule d'hommes, fut ému de compassion pour eux parce qu'ils étaient harassés et abattus comme des brebis sans pasteur » (Matthieu 9, 36) ? Quel darwinien perverti peut dire la valeur adaptative de la Shoah ? Et d'où vient chez nos contemporains la force du ressentiment — un mot nietzschéen qui désigne l'envie, fiel de nos sociétés modernes : avoir tout ce qu'a l'autre et plus si possible ; réussite intolérable de l'autre qui fait de ce dernier l'objet du ressentiment, forme rampante et inépuisable de la contrepassion.
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*La bataille de Collestrada opposa le 12 décembre 1202 les habitants d'Assise à ceux de Pérouse chez qui s'étaient réfugiés des nobles de la ville. Elle se termina par une sanglante défaite au cours de laquelle François fut fait prisonnier.
Léonardo Boff, François d'Assise, Paris, Editions du Cerf, 1986.
p. 19 et 20
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Si les mécanismes de la mémoire commencent à être mieux connus, la biologie de la conscience du temps (passé, présent et futur) reste matière à spéculation.

Le temps partagé
Mon temps appartient aux autres autant qu'à moi. Nul d'entre nous ne peut prétendre être le maître absolu de son temps. Dès sa naissance, l'enfant est soumis aux contraintes imposées par les adultes : un temps pour dormir, un temps pour manger, un temps pour échanger de l'amour ou déjà des conflits.
Le cerveau est un moulin à moudre de la durée dans lequel des roues tournent à différentes vitesses — une révolution toutes les vingt-quatre heures (rythme circadien) ou toutes les heures (rythme circhoral). Elles gouvernent les activités des cellules et les sécrétions des hormones. Il existe aussi un temps plus intime qui intervient dans le fonctionnement des milliards de neurones, synchronisant leurs actions en des ensembles distribués dans les aires du cerveau grâce à des oscillations rythmiques de leurs propriétés électriques : ces « assemblées neuronales » sont les supports des “représente-actions” où le sujet puise ses souvenirs et la conscience de ce qu'il a à faire.
Le cerveau des horloges correspond à la portion médiane et profonde du cerveau enfouie sous les hémisphères. Un ensemble de dispositifs indique le rythme des années, des saisons et des jours en se réglant sur la marche du monde.
p. 139
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Vidéo de Jean-Didier Vincent
Il n'est pas exclu que la planète Terre vive les prémices d'un basculement historique : la transition d'une gouvernance ancestrale fondée sur la peur et la violence ? dictatures et terrorismes prolifèrent ? vers le pouvoir numérique bien plus subtil, et en apparence démocratique, qui s'affirme de jour en jour. Pourtant, sous des formes nouvelles, c'est le même pouvoir qui se perpétue. C'est pourquoi Jean-Didier Vincent pose ici la question des bases biologiques du pouvoir. Dès le plus jeune âge, notre cerveau est aux prises avec les notions d'imitation, d'empathie et de charisme, de désir de justice et d'humiliation, de violence et d'apaisement, que gèrent les flux de quelques molécules cruciales ? des hormones baptisées ocytocine et vasopressine ? sous le contrôle de la célèbre testostérone. Passionnant, et inquiétant, car cette étrange cuisine moléculaire s'applique aussi bien aux circuits du désir amoureux qu'à ceux qui mènent à la fabrication des monstres politiques. Auteur d'une célèbre « Biologie des passions » (1986) qui a révélé au plus grand nombre les mystères du cerveau, et de bien d'autres ouvrages, Jean-Didier Vincent, professeur à l'Institut universitaire de France et à la faculté de médecine de Paris-Sud, est membre de l'Académie des sciences.
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