Un petit conte
De Voltaire, peut-être pas le plus connu, mais qui est un contre-pied amusant au stoïcisme ou, si je ne crains pas les anachronismes, à la mode du bouddhisme : « Memnon conçut un jour le projet insensé d'être parfaitement sage. Il n'y a guère d'hommes à qui cette folie n'ait quelquefois passé par la tête. Memnon se dit à lui-même : Pour être très sage, et par conséquent très heureux, il n'y a qu'à être sans passions, et rien n'est plus aisé, comme on sait. »
Ecrit d'une plume vive et acerbe, ce conte philosophique qui fait la spécialité
De Voltaire est en réalité, semble-t-il, l'article qu'il a écrit pour l'Encyclopédie, pour le chapitre « Confiance en soi ». Ce n'est pourtant pas cela qu'il m'évoque du tout, mais plutôt, sur le mode de du contre-exemple qu'il utilise aussi dans
Candide, l'impossibilité pour l'homme de se soustraire à ses passions et, la vanité d'une telle volonté.
Ce conte, avec l'apparition tardive d'un bel esprit céleste qui vient donner un sens à tout cela, n'est guère à la gloire de l'espèce humaine. « J'ai bien peur, [pour paraphraser Memnon], que notre petit globe terraqué ne soit précisément les Petites-Maison de l'univers dont vous me faites l'honneur de me parler. ». Mais il est amusant et, malgré le trait forcé que
Voltaire nous sert volontairement, il a une part de vrai et fait sourire, un peu jaune car il est bien possible qu'il y ait un peu de Memnon en chacun d'entre nous.