Pin Yathay est un rescapé de l'enfer. Chassés de Phnom-Penh à la pointe du fusil par les Khmers rouges, tous les citadins se retrouvent au milieu d'une jungle hostile où ils doivent se débrouiller. C'est leur "conscience révolutionnaire" qui doit leur permettre d'aménager l'environnement et de survivre. L'auteur raconte la complète absurdité du système, et le fanatisme des soldats chargés de l'appliquer, dont beaucoup sont des gamins. Il jette ses lunettes le jour où il comprend que tous ceux qui en portent sont emmenés un par un dans la jungle et ne reviennent jamais : le prétexte était que seul un petit bourgeois pouvait porter des lunettes.
Il assiste à la lente agonie de tout un peuple prisonnier des Khmers rouges et voit tous les membres de sa famille périr un à un de famine et de maladie. Une fois le seul survivant, il peut envisager l'évasion, car il n'y aura pas de représailles sur sa famille.
Un système aussi absurde ne peut rester en place que par la terreur, et les Khmers rouges l'ont bien compris. le système exige des purges régulières et encourage la délation, peu importe si les victimes sont coupables ou non. L'auteur, ancien professeur, tremble en reconnaissant un de ses anciens étudiants de peur qu'il ne le dénonce. Au temps des Khmers rouges, avoir été enseignant méritait la mort, car être éduqué était la pire des tares.
L'utopie Meurtrière est un livre qu'on ne peut oublier, témoignage d'une des périodes les plus barbares du 20ème siècle, qui n'en a pourtant pas manqué.