Dans ce roman graphique historique, on suit d'une part un père réunionnais mobilisé durant la guerre de 14/18, de l'autre sa famille restée sur leur île de l'Océan Indien.
Si les ouvrages sur la Première Guerre Mondiale sont légion, ceux qui s'intéressent aux outremers, colonies et autres se comptent sur la main d'un poilu qui a sauté sur une mine.
Celui-ci est très bien documenté, que ce soit à propos du front ou de la dure vie à la Réunion de l'époque. Il y a même un carnet documentaire à la fin, où on découvre entre autres que la plupart des éléments de la vie de la famille Grondin sont inspirés d'anecdotes réelles. On y apprend donc pas mal de choses, ou on les redécouvre sous un angle nouveau.
L'immersion dans la petite famille rend le tout moins « scolaire », et le récit étant narré par un enfant, il garde une certaine fraîcheur malgré le thème lourd.
Le dessin est clair et agréable, ni trop épuré ni surchargé. Il reconstitue bien l'ambiance de la « Réunion lontan » pour qui la guerre semble si lointaine et pourtant si présente. Et comme il est très expressif, il rend les personnages d'autant plus attachants.
La plupart des personnages parlent en créole réunionnais. Cela leur donne de la vie et du réalisme, mais peut-être aurait-il fallu un lexique à l'intention des lecteurs métropolitains, pour que la BD soit plus aisée à exporter hors de la Réunion.
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Même le docteur parlait de gangrène. Nous, on avait pas compris le mot gangrène.
Nous autres, on parlait de gran' graine.
On se demandait quelle sorte d'arbre pouvait bien donner une gran' graine pareille.
Un pied d'bois qui donnerait des fruits en forme de soldats armés, dangereux et buveurs de sang.
On en a fait des cauchemars de gran' graine et de pieds d'bois à boches, on en hurlait la nuit, ce qui avait le don de mettre papa en zobok et il grognait en nous menaçant de nous faire dormir dehors !