La femme de Martin Guerre

Si on connaît tous cette célèbre affaire d'usurpation d'identité datant du XVIe siècle (jugée à Toulouse en 1560) grâce au film de Daniel Vigne et Jean-Claude Carrière " le retour de Martin Guerre", avec les acteurs incontournables de l'époque (1982) Gérard Depardieu et Nathalie Baye, cette affaire a passionné dès le départ ses contemporains et bien après de nombreux écrivains (Montaigne, Leibniz, Alexandre Dumas, etc.) ;
si le roman de Natalie Zemon Davis, historienne canadienne, conseillère sur le film précité, a amplifié l'intérêt sur cette affaire incroyable, qui connaît aujourd'hui le magnifique roman de Janet Lewis ?
Injustice réparée avec l'édition en poche, cette année, du chef d'oeuvre de cette romancière américaine paru en 1941.
Il est d'ailleurs remarquable que cette auteure née en 1899 à Chicago nous immerge de façon si vraie dans l'atmosphère de cette France du XVIe siècle, au coeur de la Gascogne.
Poétesse à l'origine, Janet Lewis a une écriture claire, précise, simple et riche, sensuelle et concise.
Focalisé sur la femme de Martin Guerre, Bertrande, le récit décrit avec précisions psychologiques le déchirement de cette épouse pieuse partagée entre la joie de voir revenir un mari joyeux et attentionné (Martin, le premier Martin, n'était-il pas vif, égoïste à l'extrême, impatient ? ; ne l'avait-t-il pas battue le jour même de leur mariage ?) et l'angoisse et la culpabilité de s'être consciemment donnée à un homme autre que celui que Dieu lui a choisi, et même de l'aimer, de ressentir du désir charnel pour lui.
La pendaison d'Arnaud du Tilh, l'usurpateur, devant son logis, le retour de son époux et la reprise de leur vie conjugale laissent augurer une destinée faite de désillusions, de soumission et de culpabilité. " On ne sait rien de Bertrande de Rols, mais quand amour et haine s'allient pour épuiser une âme, il est rare que le corps y survive encore longtemps", écrit en épilogue Janet Lewis.
Chef d'oeuvre !!

Fait divers célèbre, je l'avais découvert avec le film de Daniel Vigne, le Retour de Martin Guerre.
Grâce à la récente réédition dans la collection Pavillons poche, je découvre ce texte initialement paru en 1941.
Nous sommes au XIVe siècle. Martin brave l'autorité paternelle et décide de se mettre au vert pendant quelques jours, le temps que son père calme sa colère. Bertrande, son épouse, le couvre.
Quelques jours, quelques semaines et ce sont les années qui passent avant que Martin ne rentre au bercail.
Mais est-ce bien Martin ?
L'histoire est absolument incroyable. le style de Janet Lewis en rend toutes les subtilités et conduit le lecteur à travers les interrogations des uns et des autres, jusqu'au procès. C'est aussi l'occasion pour le lecteur de vivre au rythme d'une exploitation agricole de l'époque, un grand domaine dont les propriétaires sont respectés.
C'est aussi un beau portrait de femme, celui de Bertrande, qui subit les doutes, les violences. Elle choisira sa conscience plutôt que son épanouissement. Une époque qui a encore de vifs échos.

Écrit en 1967,réédité en format poche l'année dernière, le livre de Janet Lewis, s'il a été éclipsé par le livre que Nathalie Zeeman Davis, conseillère historique pour le film de 1982, a écrit en 1983, n'en demeure pas moins un excellent roman qui laisse planer un doute sur les motivations de Bertrande.
Si dans le film, Bertrande soutient le « faux Martin », dans le livre de Janet Lewis, elle conçoit très vite des doutes. Elle en parle autour d'elle et Pierre guerre et le seul à la prendre au sérieux quand tout le monde, des soeurs de Martin au curé du village l'accuse soit de mensonges, soit de folie.
Bertrande est tiraillée entre sa conviction, sa foi et sa morale, qui lui interdisent de vivre auprès d'un homme qui n'est pas son époux, et les sentiments qu'elle a développé pour cet homme, infiniment plus bon que celui qu'elle a épousé.
D'ailleurs, si elle veut confondre l'homme, le spectre de la condamnation à mort lui fait peur et la peine.
En dénonçant l'imposture, Bertrande se prive du bonheur qu'aurait pu lui apporter cet homme pour retrouver un mari qui n'a pour elle que des reproches dont celui de n'avoir pas vu l'imposture.
Oui, celle-la même qu'elle a dénoncé envers et contre tous.
À mon avis, elle aurait mieux fait de ne rien dire, mais bon, ce n'est que mon avis !

Ce roman date de 1941 et a révélé J. Lewis. Cette édition française nous fait découvrir un vrai bijou de la littérature américaine.

Qui ne connait pas l'histoire de Martin Guerre, cette histoire d'usurpation d'identité qui a été l'occasion d'un des plus grands procès de la Renaissance ?

Ce livre se met du côté de sa femme, Bertrande, et la suit depuis son mariage jusqu'à la fin du procès. Janet Lewis suit à peu de choses près, la vérité historique des faits. Sauf que nous savons peu de choses de la part de sa femme. Ce roman vient comme combler ce vide.

L'écriture est vraiment superbe. C'est un régal à lui seul. Beaucoup de descriptions mais aucune longueur. le style est vif et nous amène à tout allure vers cette fin déjà connue. Et cela n'enlève rien justement à l'élégance et à la beauté de ce roman.

Un vrai coup de coeur !

Nouvelle lecture chez Pavillons Poche. J'ai vaguement entendu parler, il y a fort fort longtemps, d'un film inspiré de cette histoire, avec Gérard Depardieu, je crois. C'est donc avec beaucoup de curiosité que j'ai commencé cette lecture, avec la potentielle idée de regarder le film, ou pas.

Bertrande est une jeune fille de 11 ans, lorsqu'elle est unie à Martin Guerre. Cette union arrangée scelle un marché entre deux familles importantes. Les années passent et les deux enfants grandissent et se rapprochent. Mais le père, comme beaucoup de patriarche, est un homme autoritaire et intransigeant. C'est ainsi qu'après une décision impulsive concernant les affaires de la famille, le jeune homme préfère partir plutôt que subir le courroux de son père. Bertrande se retrouve seule, jusqu'au jour, quelques années plus tard, où Martin revient à la ferme.

Le récit se déroule sans grande surprise, puisque le principal chamboulement est annoncé en amont. Toute l'histoire est davantage vécue du point de vue de Bertrande. Son introduction dans la famille Guerre, la vie dans une exploitation agricole, sa vie de couple et de famille, etc. La position de la femme dans cette société de l'époque est, comme le lecteur s'y attend, soumise et totalement dépendante de son mari, comme une enfant. Avec l'âge, elle acquière une position respectée, mais sans plus.

Sans spoiler la fin (même si tout le monde la connaît), l'honnête de Bertrande ne va pas lui apporter le bonheur escompté. L'aspect psychologique est bien développé. Bien au contraire. Pourtant, elle reste droite dans ses bottes et va jusqu'au bout de sa décision. Janet Lewis n'aborde pas particulièrement les sentiments et émotions des personnages. Même si le lecteur comprend sa réaction, sans particulièrement la soutenir dans son choix, il ne se crée pas de réelle empathie vis-à-vis d'elle. Une distance persiste entre les personnages et le lecteur.
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