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EAN : 9782266246224
360 pages
Pocket (03/07/2014)
4.46/5   40 notes
Résumé :
Sam Pivnik est l'un des tout derniers survivants de la Shoah. Un miraculé.

Il a à peine 13 ans lorsque les nazis envahissent la Pologne et sa ville, Bedzin, en 1939. Pour la communauté juive, c'est le début de la vie en ghetto, les privations, les humiliations, les violences arbitraires, la peur, les rafles. Puis en 1943, Sam est déporté avec son père, sa mère, ses deux sœurs et ses trois frères cadets au camp d'extermination d'Auschwitz-Birkenau. Il ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (11) Voir plus Ajouter une critique
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Livre lu dans le cadre de mon défi personnel de lectures 2024, item : "lire 20 livres témoignages, essais, romans en lien avec la Seconde guerre mondiale et la Shoah, se trouvant dans ma pile à lire" (je suis passionnée par cette thématique).

Je connaissais déjà le nom de Sam Pivnik car j'avais eu l'occasion de visionner divers reportages et vidéos le concernant, raison pour laquelle je me suis intéressée à son témoignage qui constitue "ses mémoires", écrit avec l'aide de son collaborateur MJ Trow (la première édition publiée en anglais sous le titre de SURVIVOR Auschwitz, The Death March ans My Fight of Freedom date de 2012). C'était un juif Polonais né en 1926 et décédé en 2017 (à 2 jours de son 91e anniversaire) à Londres. En 1943, il a été déporté avec sa famille à Auschwitz-Birkenau. Son père, sa mère, ses deux soeurs et trois frères cadets furent exterminés.
Après-guerre, Sam Pivnik est devenu marchand d'art et ses souvenirs sont aujourd'hui connu du grand public grâce à ses tournées de conférences qu'il a effectuées, en son temps, à travers le monde.

Dans ce récit, Sam Pivnik évoque sa vie heureuse avec sa famille en Pologne (il était originaire de Bedzin) avant l'invasion des Allemands le 1er septembre 1939 (jour de son anniversaire), puis la survenue des différentes stigmatisations et restrictions à l'égard des juifs polonais, puis la mise en ghetto même si un temps les membres masculins de sa famille ont pu en sortir pour travailler pour l'occupant, ainsi qu'en 1943, les conditions de l'arrestation de sa famille puis de sa déportation (avec des détails glauques sur ses conditions de transport).

Au fur et à mesure de la narration évoquant son histoire personnelle, le récit est agrémenté de données historiques, géopolitiques, documentaires précises permettant au lecteur de bien appréhender le contexte (soit une petite différence de registre de langue, même si ce n'est pas gênant à la lecture) ou d'expliquer tel ou tel point. C'est un éclairage, a posteriori, particulièrement intéressant donnant encore plus de véracité à son témoignage. On reconnaît là la volonté des survivants d'expliquer aux plus jeunes générations les conditions précises de cet enchaînement de circonstances et d'actes perpétrés par les nazis, enchaînement qui ne procède pas du hasard, mais bien d'une véritable volonté politique d'hégémonie raciale.

Il n'a pas encore dix-sept ans lorsqu'il se retrouvera, avec sa famille, sur la rampe d'arrivée des trains à Auschwitz-Birkenau. A ce moment précis, il ne devra son salut qu'à l'injonction d'un déporté qui lui dit de dire qu'il a dix-huit ans et à la décision de sa mère de le pousser brutalement vers la colonne de droite, celle des hommes aptes au travail, pour "sauver sa vie".

Dès lors, son parcours de déporté sera à l'image de tous les témoignages que l'on connaît déjà. Un parcours fait d'humiliations et de brutalités gratuites, de peurs raisonnées et irraisonnées, de faim criante, de froid mordant, de chaleur irrespirable, d'hygiène déplorable, de maladies à combattre, de coups à éviter, de travaux d'esclave à effectuer, de visions d'horreur à occulter pour tenter de ne pas devenir fou, de trahisons quotidiennes, mais aussi d'actes de solidarité inattendus, de doutes criants sur son devenir. Devenu quasi zombie plus proche de l'animal que de l'humain, il luttera longtemps entre la tentation de se laisser aller jusqu'à mourir et la volonté de survivre à l'indicible, permettant ainsi au nom de sa famille de perdurer.

Quand en janvier 1945, à l'approche des forces russes (ou ailleurs alliées), les Allemands prendront la décision de traîner leurs prisonniers sur les routes dans ces horribles "Marches de la mort" auxquelles peu d'entre eux reviendront , Sam Pivnik ne savait pas encore s'il s'en sortirait. Il puisa alors dans des ressources qu'il ne pensait plus posséder pour se maintenir vivant jusqu'en début mai 1945, moment où avec d'autres compagnons, et à la faveur du naufrage du paquebot SS Cap Arcona où les nazis les avaient parqués pour servir de bouclier humain, il réussira à s'échapper. S'ensuivra un périple de plusieurs semaines pour se maintenir en vie, retrouver la civilisation, être pris en charge et voir si, par hasard, son grand frère Nathan dont il était sans nouvelles, avait survécu. En fait, c'est Nathan qui le retrouvera en premier.

La fin de ses mémoires évoque le devenir des différents camps de concentration libérés par les Alliés, le devenir de certains de ses camarades (et de certains de ses bourreaux) et la façon dont Nathan et lui ont rejoint leur famille vivant à Londres, avant que de prendre, ensemble, la décision de s'exiler en Palestine pour oeuvrer à la création de l'Etat d'Israël.

Ce témoignage est également agrémenté de photos de la famille de Sam Pivnik et de photos d'archives historiques (industriels travaillant pour les nazis, ghetto, arrivée à Auschwitz-Birkenau, locaux, paquebot Cap Arcona...) ainsi que d'un lexique détaillé des principaux termes allemands ou des noms de lieux cités dans l'ouvrage.

En ce qui me concerne, à part l'épisode détaillé du naufrage du Cap Arcona et les aspects liés à Israël, je n'ai rien appris de nouveau. Néanmoins, c'est toujours avec beaucoup d'humilité et de respect, mais aussi d'émotion que je prends connaissance du dramatique vécu de ces familles de déportés (qu'ils aient d'ailleurs été déportés pour leur religion, leur nationalité, leur orientation politique ou sexuelle) et des conditions, le cas échéant, de leur survivance. J'y puise toujours des informations crédibles et confirmées de ce qui a été vécu (pour avoir lu près d'une centaine de ces témoignages, je sais, moi, que tout cela a réellement existé et n'est pas le fait d'une "propagande" ciblée que certains révisionnistes de l'Histoire tentent de nous vendre). J'y puise aussi un attachement sensible à ces histoires de vies contrariées et pourtant si belles dès lors qu'elles mettent en avant la résilience de ces personnes et leur volonté de partage pour le plus grand nombre, pour que plus jamais, cela n'arrive aux Juifs certes, mais aussi à toute autre population susceptible d'être stigmatisée pour quelque raison que ce soit.

Sam Pivnik et beaucoup d'autres sont des témoins précieux qui, par delà leur mort, continuent de nous inciter à la plus grande vigilance, car ils savent, eux, le prix qu'ils ont dû payer dans leur chair et dans leur coeur.
De mon point de vue, RESCAPE devrait être un livre proposé aux collégiens et aux lycéens pour que jamais ne s'efface, dans l'esprit des plus jeunes générations, la trace de la barbarie nazie.





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De nombreux adjectifs peuvent qualifier cette lecture, mais leur énumération ne serait pas suffisante pour décrire ce que j'ai pu ressentir au fil des pages.

De plus, il m'apparait compliqué de parler de moi, lectrice, tranquillement installée dans mon fauteuil, alors que le sujet de ce livre est la déportation.

Sam Pivnick, jeune homme de confession juive dont l'adolescence a été chamboulée par son arrivée dans un camp de la mort, l'un des plus connu aujourd'hui, a été le témoin de la perversion des hommes lors de cette triste période de l'Histoire.

Il nous parle de sa vie d'avant l'invasion des nazis en Pologne, de son vécu à Auschwitz, des moments où il a frôlé la mort. Puis vient la libération, le retour à la vie « normale », la vie d'après le camp. Il nous parle de tout cela, et de bien d'autres choses encore, avec beaucoup d'humilité, de retenue et de pudeur.

Il relate son incompréhension et, plus généralement, l'incompréhension du peuple juif face à l'enchainement des événements survenus à l'époque, face à la folie d'un homme.

En tant que lectrice, j'ai été admirative du courage de l'auteur. Il ne doit pas être facile de poser des mots, de raconter son vécu.

Sam Pivnick, grâce à ce témoignage, nous fait partager son expérience, permet aussi de continuer à se souvenir de cette terrible période de l'histoire, et surtout contribue à ce que, jamais, ces événements ne soient déformés et réécrits.

Le devoir de mémoire ce n'est pas se rappeler de l'horreur et des noms des personnes à l'origine de tant de souffrances. C'est se souvenir d'hommes, de femmes, d'enfants, qui ont été persécutés. Alors aujourd'hui je peux dire qu'après les récits d'Anne Franck et de Primo Levi, je me souviendrai pour longtemps du témoignage de Sam Pivnick.
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Cette lecture fut une véritable immersion au coeur de la réalité humaine, une plongée au coeur de l'horreur. L'horreur la plus insupportable, la plus déstabilisante.

Tour à tour troublée et fascinée par tant de cruauté et tant de courage. Ce contraste si saisissant entre les SS et les prisonniers... J'ai eu beau avoir étudié cette terrible période de l'Histoire, m'y être penchée... Ce livre m'est apparu tel un phénomène paranormal.

A plusieurs reprises, je me suis senti souffler, soupirer, retenir ma respiration, fermer les yeux, en retenir les larmes, croiser les doigts dans ma tête... Tout cela de désespoir, d'aberration, de panique, de stress, d'incompréhension, de colère, de tristesse, de peur... Mais aussi d'espoir.

Et bien qu'ayant ressenti cet éventail d'émotions, je sais qu'à aucun moment je ne me suis approchée, même de très loin, de ce que Sam a pu ressentir.

Le livre achevé, je me suis sentie à la fois, plus bienveillante, plus misanthrope et plus chanceuse que jamais. Un véritable trésor de témoignage.
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Waouh!!! c'est très fort, dur et puissant.
J'ai lu d'autres livres sur ce sujet mais, par des français. Là il s'agit de Sam Pivnik, un polonais. L'un des premier pays envahis... C'est une descente aux enfers d'un très jeune homme, 13 ans, jusqu'à 18, 20ans.
Une jeunesse effroyable et violente. Quel courage, quel résistance physique, mentale pour tenir en sachant dès le début qu'il se retrouve seul car toute sa famille ou presque a été exterminé.
C'est un témoignage simple, dur, cru, tel que les évènements se sont passés pour lui. Avec ses réflexions d'adolescent...
Ce livre m'a profondément touché, ému.
Merci d'avoir eu le courage aussi de témoigner car c'est aussi revivre l'invivable.
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Après plusieurs décennies sans jamais avoir raconté à personne, pas même à sa famille l'horreur qu'il a vécu, Sam Pivnik 87 ans décide de rouvrir cette page de sa vie et d'enfin tout raconter, absolument tout. Tout, le beau comme le laid. Depuis son enfance heureuse en Pologne au sein d'une grande famille, jusqu'au brusque arrêt de toute forme d'humanité et la plongée dans l'enfer concentrationnaire. Puis le retour, transformé, la vie nouvelle face à un monde nouveau.
Ce livre est en fait aussi une autobiographie, car avec ses 300 pages il est bien plus qu'un simple témoignage de la vie des camps, Sam Pivnik y raconte absolument toute sa vie, du commencement jusqu'au moment où il écrit ces lignes. Il décrit densément et précisément tout ce qu'il a vécu, c'est une véritable immersion et c'en est que davantage bouleversant. Et ce fut pour moi à certains moments difficile à lire. Mais nécessaire.
Nécessaire pour ne serait-ce qu'essayer de se rendre compte de l'horreur vécu par Sam et par des millions d'autres qui ne sont pas revenus.
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
À Auschwitz, il n'y avait pas de calendrier. Ni dates, ni anniversaires, rien qui ne puisse marquer le passage du temps. Pour les chanceux, ceux d'entre nous qui survivaient, la nuit suivait le jour, et les jours devenaient des semaines. Peu parmi nous parvenaient à rester vivants pendant des mois. Je ne sais donc pas précisément à quel moment je suis tombé malade. C'était probablement en décembre 1943, par un temps glacial comme l'hiver polonais peu en offrir. Dans la mince tenue rayée réglementaire des déportés, tunique et pantalon, j'aurais du sentir le froid mordant, mais ce matin là, j'avais chaud et j'étais en nage.

(...)

Pendant les trois et quatre jours que dura mon séjour à l'hôpital, j'eus le temps de réfléchir. J'avais frôlé la mort et des instants de ce genre poussent à la concentration. J'avais dix-sept ans. Ma famille avait disparu j'étais seul au monde. Mais il n'en avait pas toujours été ainsi. Autrefois - un passé distant de quatre ans à peine -, j'avais vécu une époque magique où personne ne parlait de la mort, ni même ne l'imaginait. Une époque de vie qui avait constitué mon enfance.
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La nourriture, rien d'autre ne comptait. Des civils tchécoslovaques se rassemblaient sur des ponts sous lesquels notre train s'annonçait par un sifflement pour nous jeter du pain. Les SS braquaient leurs mitrailleuses vers le ciel et dispersaient ces bons Samaritains d'une rafale ; ils abattaient des gens qui tentaient de nous donner à manger. Ils retournaient aussi leurs armes contre nous, arrosant quiconque s'était emparé d'un morceau de pain. Nous étions victimes d'un processus de surextermination, car déjà en train de nous entretuer dans ces wagons. La loi de la jungle qui régnait à Auschwitz-Birkenau et Fürstengrube s'était établie dans ce train. Nous nous battions, nous bousculions, nous balancions des coups de poing, nous arrachions les yeux, envoyions des ruades avec l'énergie du désespoir, celle des affamés. C'était la lutte pour la vie. Les plus costauds, les plus forts, les plus méchants, arrachaient leur ration de pain. Les plus faibles et les plus petits se repliaient en eux-mêmes, soulignant leur impuissance.
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C'est à ce moment-là que je vis pour la première fois l'homme qui hante mes cauchemars aujourd'hui encore. Une taille au-dessus de la moyenne, massif, les cheveux ras - la coiffure des aryens. Il avait peut-être trente-cinq ans et portait une casquette à bord souple, que les SS appelaient Schiffchen, avec un aigle et un insigne à tête de mort. Une seconde tête de mort, au cas où on aurait manqué la première, figurait sur le côté droit de son uniforme de Waffen-SS vert-de-gris - encore un symbole de mort - et du côté gauche, une étoile. Je ne le savais pas à l'époque, mais cet insigne figurait son rang dans la hiérarchie, Unterscharführer, caporal. S'il avait été soldat dans la Wehrmacht, il aurait été Unteroffizier, mais il était SS : ceux-ci possédaient leurs propres grades, leurs règles, et une attitude spécifique. Il s'appelait Karel Kurpanik.
J'allais mettre du temps avant de prendre la mesure des gardes SS à Auschwitz-Birkenau, et ce n'est que maintenant que je me rends compte du genre d'hommes qu'ils étaient. Des sadiques et des salauds - oui, cela va sans dire -, mais c'était infiniment plus complexe que ça. La plupart d'entre eux étaient trop vieux pour aller au front et les plus jeunes avaient été en général blessés et n'étaient plus valides pour les unités de combat. Beaucoup d'entre eux étaient des Volksdeutsche, en suspens entre deux mondes. Même s'ils s'étaient portés volontaires, la Wehrmacht n'en aurait pas voulu parce que non-aryens. Ironiquement, si l'on réfléchit à l'obsession raciale des SS, ils n'avaient pas ce genre de tabous et recrutaient ces hommes pour les affecter aux camps de travail et de concentration toujours plus nombreux.
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Ca ne lui demanda que quelques secondes. Son doigt pointa vers la gauche. La chambre à gaz. Le four crématoire. Le néant. Est-ce que la pensée de rejoindre ma famille, de les revoir dans l'au-delà me traversa l'esprit pendant ces quelques instants terribles ? L'idée que ce malheur allait bientôt prendre fin ? Peut-être. Mais le désir de vivre était le plus fort ; voir une aube nouvelle ; manger encore une croûte de pain. Je fondis en larmes, me jetai à ses pieds, laissant précipitamment échapper quelque chose sur mon désir d'être fusillé et non gazé. Je crois même avoir embrassé les bottes de Mengele, toujours impeccables, cirées au point qu'on s'y reflétait comme dans un miroir.
Les bottes s'éloignèrent. Et aujourd'hui encore, je ne sais toujours pas pourquoi.
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