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Critiques de José Carlos Somoza (421)
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Le mystère Croatoan

La gratuité est-elle un idéal qualitatif à rechercher à tout prix ? La gratuité d'un bien de consommation nous réjouit tandis que celle d'une insulte ou d'une sanction nous afflige. Qu'en est-il des fins d'un roman ? L'insoutenable gratuité d'un roman comme aurait pu l'écrire Milan Kundera… Il arrive à mon mari et à mes amis de me charrier gentiment sur le fait que je ne lise à peu près que des « vieux trucs ».



Qu'en est-il de la nouveauté après la gratuité ? Est-ce encore un autre mythe mélioratif ? Le nouveau s'oppose à l'ancien. Il est clair que quand on parle d'ordinateur, de démarreur automobile, de paire de chaussettes usagées, de sac d'aspirateur plein, on voit sans peine l'intérêt de la nouveauté. Mais en terme d'art ? et de roman en particulier, qu'en est-il ? Ô, insoutenable légèreté de la nouveauté, ne me regarde pas comme ça, j'essaie juste de te mettre au banc d'essai…



Partons d'un postulat simple : nous ne disposons que d'une vie. À un rythme moyen de lecture de 20 pages à l'heure, à supposer que l'on puisse allouer sans défaillir 2 heures par jour en moyenne à la littérature, on arrive au bout d'une année à un total de 14600 pages lues. Si l'on suppute que la taille moyenne d'un roman format poche tourne autour de 200 pages, on arrive à la conclusion qu'il nous est théoriquement possible de lire 73 livres par an. Certains lecteurs sont au-delà mais je crois savoir que la majorité se situe en deçà.



Sachant qu'à chaque rentrée littéraire, c'est de l'ordre de 600 nouveaux romans qui paraissent, on voit de suite que la lutte pour se maintenir au fait de la nouveauté est un combat perdu d'avance. D'ailleurs, sur les 600 (environ) romans parus il y a 10 ans, mettons, combien font encore aujourd'hui l'objet d'une petite vague d'intérêt (et donc de lecture) ? Je serais curieuse de savoir ne serait-ce que le nombre de ceux qui sont encore édités…



Bref, la course au nouveau a depuis longtemps cessé de m'intéresser et ce n'est certainement pas celui-là qui va me faire changer d'avis. Les classiques sont des nouveautés qui ont passé victorieusement l'épreuve du temps et, en terme d'intérêt littéraire, même si ce n'est pas une vérité absolue, au moins est-ce un indicateur assez fiable.



Donc, faisant entorse à ma ligne de conduite ordinaire, je me suis laissée berner à lire une nouveauté. Ce livre m'a été offert car, connaissant mon passé d'éthologiste et attirés par une quatrième de couverture affriolante, mes amis ont cru que ce roman pourrait être dans mes cordes. (La fameuse théorie des cordes…)



Abandonnant séance tenante d'authentiques chefs-d'oeuvre anciens pour me lancer à corps perdu dans cette nouveauté, j'en ressors, non pas affligée, mais pas loin tout de même. On y découvre en effet un florilège de toutes les erreurs à ne pas commettre en tant qu'auteur si l'on souhaite que son livre ait une chance de franchir la redoutable épreuve du temps.



D'abord et avant tout, premier écueil à éviter, la gratuité : Pourquoi l'auteur a-t-il écrit ce livre ? Peut-être est-il là le vrai mystère croatoan, car même en l'ayant lu attentivement de bout en bout, à l'heure qu'il est, je n'en ai pas la moindre idée. Selon moi, ça n'a, pour ainsi dire, ni queue ni tête, or, ce me semble, l'objectif de l'auteur n'était pas de faire dans l'absurde à la manière d'un Ionesco.



Ensuite, impératif numéro 2 : créer des personnages vis-à-vis desquels on éprouve quelque chose. Ici, en ce qui me concerne, c'est l'indifférence totale. Ils crèvent ? Je m'en fiche. Ils survivent ? M'en fiche aussi. Empathogramme plat de bout en bout : Carmela, Nico, Mandel, Laredo, Enrique, Fatima, Logan et consorts ne m'ont rien fait ressentir mais ce qui s'appelle rien. C'étaient des marionnettes en papier grossièrement découpées.



Grave problème numéro 3 : l'écriture scolaire. Bon, en soit, qu'il n'y ait absolument aucun style, si la mécanique fonctionne bien, cela passe très bien. Ici, il n'y a aucun style, ça déjà c'est réglé, mais surtout, on lit avec un coup d'avance toutes les ficelles que va employer l'auteur pour entretenir maladroitement un suspense poussif. Bien consciencieusement un petit cliffhanger à la fin de chaque chapitre, dès que quelque chose doit devenir menaçant, mouche, souris, gamin ou autre, on l'évoque comme en passant et bing, deux pages plus loin, ça devient un monstre, ça ne rate jamais. Quel ennui…



Erreur rédhibitoire numéro 4 : créer des personnages, nous en imposer la filiation et l'univers, pour finalement les abandonner en cours de route sans qu'on en comprenne la raison. C'est le cas par exemple de toute l'histoire du super flic Laredo. Or, c'est volumineux en terme de pages qui lui sont consacrées et pour finalement quoi ? Que dalle, nada, peau de balle. Merci pour nous Monsieur Somoza mais notre temps est précieux.



Résumons-nous : des personnages inintéressants, une intrigue construite en kit qui ne débouche sur rien, des personnages importants ou supposés tels qu'on ne suit plus à partir d'un moment. Qu'est-ce qui peut encore sauver le soldat Somoza ? Le pouvoir de persuasion de son histoire ?



Là, chapeau bas José Carlos, dans le genre bidon branlant absolu on pouvait difficilement faire mieux. Allez, juste pour rire, je n'en prends qu'un exemple. Deux des personnages (je ne vous dis pas lesquels pour ne pas être injustement taxée de gâcher une histoire qui s'en charge bien toute seule) sont à un moment dans la campagne et se font submerger par, devinez quoi ? Une tornade ? Non. Un tsunami ? Presque, vous brûlez… Mais non décidément. Il s'agit bien d'un genre de vague en effet, une vague de terre, haute d'au moins 4 mètres et résultant du… (c'est à peine si j'ose l'écrire tellement c'est grotesque !) … du mouvement incontrôlable des vers de terre et autre micro faune du sol ! Bon là, pas d'erreur possible, question crédibilité, vous comprenez que vous êtes en de bonnes mains avec Monsieur Somoza.



En somme, l'auteur surfe sur toutes les tendances actuelles et si possible racoleuses : des zombis, du gore, du détraqué mental et/ou sexuel, des grandes épidémies et/ou du terrorisme à l'échelle globale, du complot des puissants, de la science-fiction et de l'intrigue policière. Bref, tout y est sauf l'essentiel : ce qui fait d'un roman un bon roman.



Alors si vraiment vous n'avez rien d'autre à lire et que vous êtes incarcérés à la prison de la santé ou coincés dans les transports en commun, pourquoi pas, mais franchement, rien qu'en fermant les yeux, vous verrez dans votre imaginaire mille choses plus belles et plus intéressantes. Bien entendu, ce n'est qu'un croatoan Krakatoan croate-infâme mystérieux avis, c'est-à-dire pas grand-chose puisqu'on va tous crever, comme c'est écrit dans le livre.



P. S. : Et comme vous n'avez qu'une seule vie, ne la gaspillez pas trop à lire ce machin-là car il y a tout plein de livres bien parmi les moins nouveaux voire même les franchement anciens.
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La Théorie des cordes

José Carlos Somoza a intitulé son roman « Zigzag », titre traduit en français « La théorie des cordes ». Après l’avoir lu, je me demande encore bien pourquoi. Ce titre-alibi permet certes de colorer d’un vernis scientifique un techno-thriller dont l’action se déroule dans le milieu très sélect de la recherche fondamentale. La véritable théorie des cordes est une théorie encore en construction, mystérieuse, peu connue du grand public, se déclinant en multiples variantes, s’appuyant sur des conjectures et un formalisme essentiellement mathématique ; la théorie des cordes ne peut s’enorgueillir aujourd’hui d’aucune vérification expérimentale. On peut donc en dire ce que l’on veut…

José Carlos Somoza s’engouffre dans une double brèche : l’inexistence de projets expérimentaux, et le vide béant laissé par l’absence de roman explorant le sujet. Dans son roman, il lui suffit de renommer « théorie du séquoia » une nième théorie des cordes, qui peut bien s’accommoder d’une variante de plus, pour permettre à l’un de ses personnages d’en revendiquer la paternité, puis de donner une vague explication sur la lecture des cordes du temps – qui n’ont aucun rapport avec la véritable théorie, mais permettent à bon compte de visualiser le passé – et le tour est joué !

Je rassure définitivement celles et ceux qui se sont émus du titre français, se demandant s’il fallait s’y connaître un chouia en science physique pour pouvoir apprécier le roman et avoir un diplôme d’Harvard ou du M.I.T. en poche pour le comprendre… Que nenni !

Ce roman, au titre si « scientifique », est en fait un thriller de science-fiction. Mais quel thriller !

Il s’agit de mon premier Somoza. Et si le reste de sa production tient aussi bien la corde, ce ne sera sans doute pas le dernier.

Elisa Robledo peut se prévaloir de deux domaines d’excellence : la physique et… son physique. Sorte d’Angelina Jolie dotée du cerveau d’Einstein et d’Hawking réunis (non, ce n’est pas mon fantasme, mais c’est visiblement celui de Somoza), cette bombe atomique se balade plus souvent qu’à son tour en tenue légère, façon Lara Croft en débardeur et minishort, bravant la chaleur et le danger dans des laboratoires surchauffés situés au beau milieu de l’océan indien, dont la clim comme par un fait exprès tombe régulièrement en panne suite aux catastrophes en série dictées par le scénario. Sa mission : sauver sa peau et celle de ses camarades…

Or, Elisa n’était pas destinée à assumer le destin d’une aventurière provocante. Sa devise au début du roman pourrait être « pour vivre heureuse, vivons cachée ». Elle reste d’ailleurs un mystère pour ses collègues et amis qui ne comprennent pas pourquoi une personnalité si brillante et si parfaite se contente de donner des cours dans une (minable) école privée pour étudiants blasés. Elle tente de se faire oublier et occulte son passé.

Mais alors qu’elle croyait échapper à ce passé, celui-ci va ressurgir brutalement à la lecture d’un simple article de journal qui lui saute au visage tel un petit Alien Facehugger bondissant de son œuf, et qui va bouleverser la suite de son existence. Car elle se sent désormais en danger de mort et décide de reprendre un combat abandonné dix années plus tôt.

José Carlos Somoza revisite avec panache le mythe de Frankenstein, qui lui-même revisitait le mythe de Prométhée (vous me suivez ?). Avec le « Prométhée moderne » de Mary Shelley, l’homme défie Dieu en créant la vie, et la Créature se retourne contre son créateur. Somoza reprend le même thème et invente l’une des créatures les plus terrifiantes – et je pèse mes mots – de la science-fiction actuelle : j’ai nommé Zigzag, qui peut faire passer le Gritche d’Hypérion pour un vulgaire assemblage de boîtes de conserves et les monstres de la mythologie lovecraftienne pour une famille d’aimables batraciens annonçant la météo. Zigzag est un être pervers et cruel, d’origine mystérieuse, aux desseins insondables, aux pouvoirs illimités, qui semble être doué d’ubiquité et développer une inexplicable addiction aux carnages sanguinolents, ciblant notre groupe de scientifiques de haut niveau.

Les scientifiques ont ouvert la boîte de Pandore, et ils vont s’en mordre les doigts.

Les commanditaires de l’opération ont évalué les profits potentiels d’une telle arme de destruction massive, et ils souhaitent ne pas en rester là, il suffirait de poursuivre les recherches, de maîtriser la bête et tout ira bien. Humm… à votre avis ? Zigzag mettra rapidement fin à ces illusions.

Mais d’où vient ce Zigzag ? Qui l’a créé ? Jusqu’au bout, on ne saura presque rien sur son origine, et c’est bien sur cette ultime énigme que les scientifiques survivants devront se pencher s’ils veulent parvenir à sauver leur peau. Une seule certitude : Zigzag est le fruit de leurs expériences passées sur la théorie du séquoia. Mais la recherche de la vérité va s’avérer d’autant plus complexe et difficile à mener que les chercheurs en question seront décimés les uns après les autres.

Avant d’embarquer dans la lecture de ce roman, assurez-vous de la fermeture de vos portes et de vos fenêtres, et glissez le plus gros couteau de votre cuisine sous votre oreiller. La théorie des cordes est un roman qui accroche d’emblée le lecteur et propose plusieurs niveaux de lecture (le thriller proprement dit, une réflexion sur l’éthique scientifique, une autre sur la nature humaine…) ; José Carlos Somoza aime les intrigues bien ficelées et possède assurément plusieurs cordes à son arc.
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La Caverne des idées

José Carlos Somoza est né à La Havane en 1959. Il est psychiatre. « La Caverna de las ideas » (en français, La Caverne des Idées) est édité en espagnol chez Alfaguara, Madrid. Traduit en français par Marianne Million, le livre est publié chez Actes Sud (en 2002).



L’histoire paraît simple : Vous êtes en pleine Grèce antique. Tramaque, étudiant à l'Académie, est retrouvé mort, déchiqueté par les loups alors qu’il était parti la veille au soir chasser dans les collines jouxtant Athènes. Diagoras, son mentor, pense à un assassinat et confie l’enquête à Héraclès Pontor, le Déchiffreur d’Énigmes. Héraclès note alors plusieurs points troublants : Tramaque ne figure pas sur les registres de sortie de la ville (donc, il n’a pas pu être déchiqueté par les loups) ; Tramaque fréquentait Yasintra, une prostituée, et il se rendait souvent avec Antise et Eunio, étudiants comme lui, dans une « école de nuit un peu particulière », un lieu où ils rencontraient Ménechme, sculpteur, amateur d’orgies et de jeunes modèles masculins. Héraclès se demande si Tramaque n’a pas été tué par quelqu’un qui fréquentait cette « école de nuit » et qui aurait maquillé son crime : Héraclès livre ses doutes au lecteur, en pied de page. Mais les choses se compliquent : d’abord, parce que les notes du traducteur (Marianne Million ?) sont de l’auteur (José Carlos Somoza ?) ; ensuite, parce que cette histoire est elle-même tirée d’un papyrus écrit en grec ancien, papyrus qui a été traduit (mais qui en a assuré la traduction ?) ; et puis parce que le texte original contient apparemment un message secret dont il faut deviner la clef, alors même que, par son propre travail de traduction, le traducteur –en quelque sorte également auteur- influe sur le sens de l’histoire tel que perçu par le lecteur ; et puis, parce que le traducteur –qui n’est pas certain d’avoir fait les bonnes hypothèses- se confie à son amie Helena et note ses précieux conseils afin que l’assassin soit démasqué … car le traducteur se « prend » (mais oui !) pour le Déchiffreur d’Énigmes ; enfin, parce que celui-ci découvre que l’auteur du papyrus -un certain Montalo- a donné un titre à son papyrus, le titre de « La Caverne des Idées » (ça ne vous rappelle pas le titre de l’ouvrage que vous avez entre les mains ?) ; si on y ajoute le fait que le traducteur (de qui s’agit-il ?) devient un personnage du livre, qu’il est tellement obsédé par son travail qu’il en fait des cauchemars, qu’il se prend parfois pour les personnages de l’histoire qu’il traduit, qu’il découvre que Montalo aurait été retrouvé mort, le corps déchiqueté par les loups (tiens, comme Tramaque !?), qu’il y a douze chapitres comme il y avait les douze travaux d’Hercule (tiens, notre Déchiffreur d’Énigmes s’appelle aussi Hercule !?) et que son propre père avait écrit un poème dans lequel le lecteur devrait trouver une partie de la clef de l’énigme, etc. Bref, le lecteur finit par se demander qui est qui, s’il est dans le rêve ou dans la réalité, dans la Grèce antique ou en train de lire un livre en plein 21ème siècle, si l’histoire ne cache pas plusieurs histoires et si l’enquête qu’il mène (comme Héraclès) ne cache pas d’autres enquêtes ! Je ne vous dirai rien. Je m’en tiendrai à l’instruction donnée en page 130 : « Lecteur, ne dévoile pas le secret que contiennent ces pages » !



Quel était l’intention de José Carlos Somoza ? Nous démontrer que lire un texte, c’est le lire au travers de son propre parcours, de sa personnalité et de ses représentations ? Que c’est accepter le risque de se heurter à un message caché qu’il faut s’efforcer de comprendre ? Que c’est naviguer dans une galerie de miroirs, de reflets et de trompe-l’œil, au risque de confondre alors la réalité et sa perception (une fiction ?), les mots et ce qu’ils évoquent (les images) ? Que c’est prendre le risque de perdre le sens commun (la raison) et de sombrer dans la folie (souvenez-vous que l’auteur est psychiatre !) ? Qu’un texte n’a pas toujours de clef ? C’est possible, et ça expliquerait le conseil qu’il donne au lecteur en dernière page : « Cessez de chercher des idées cachées, des clés de l’énigme ou des sens ultimes ! Cessez de lire et vivez ! Sortez du texte ! ».



J’ai apprécié ce polar antique pour son côté incroyable, original et addictif. Le scenario est très léché et envoutant. Les personnages (au caractère bien trempé) sont attachants. Il y a de fréquentes pointes d’humour. Athènes est « plus vraie que nature ». L’écriture est simple et fluide. L’érudition est présente, mais sans excès. Toutefois, l’ouvrage est atypique, déstabilisant et parfois gore. Mon conseil : lisez-le, sauf si vous n’aimez pas la mythologie grecque, si vous avez peu de goût pour les polars, si vous détestez la complexité et si vous vous refusez à consommer de l'ergot de seigle fermenté pendant votre lecture.
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La Caverne des idées

Pas facile de résumer 'La caverne aux idées' ! Disons que c'est un polar philosophique expérimental où un Déchiffreur d'Enigmes enquête sur la mort d'un jeune éphèbe disciple de Platon... cette enquête relatée sur un papyrus mystérieux est mise à notre portée par le 'traducteur', qui ne peut s'empêcher au passage de commenter dans de longues notes en bas de page tous les symboles mythologiques qu'il croit distinguer... jusqu'à ce que ces notes en bas de page occupent tant de place qu'elles deviennent une histoire indépendante, celle de la vie, des obsessions, des amours et des angoisses du traducteur... à moins que les 2 histoires, celle d'Athènes et celle d'aujourd'hui, soient liées plus et autrement qu'on croit...



Bizarre ? Sans aucun doute ! Mais aussi exigeant, compliqué, parfois agaçant, souvent obscur. Quel régal pourtant ! Car c'est avant tout intéressant, intelligent, bien pensé, fin et même brillant. Je conseillerai donc à tous ceux qui auraient comme moi du mal au début avec l'éidesis, les pages manquantes, les notes interminables ou le vocabulaire athénien de s'accrocher, car il y a une belle récompense au fond de la caverne aux idées.



Alors, si vous avez envie d'en savoir plus sur les 12 travaux d'Hercule, sur le rôle d'un traducteur, sur la vie dans l'Athènes antique, sur la mise en abime dans un roman, sur la philosophie platonicienne, sur les choreutes, les hétaïres ou les éphèbes, ce livre est fait pour vous.
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La Caverne des idées

Il est des livres dont l'on parle aisément , sans forcer et d'autres qui demandent un effort beaucoup plus soutenu lorsque vient le temps du bilan . La Caverne des Idées fait , sans conteste , partie de ces derniers...



Tramaque , ephebe brillant de l'Académie ( le premier qui dit : des Neufs en arborant le p'tit sourire extatique du ravi de la creche , aura une tapette ;) , est retrouvé mort , dévoré par les loups . Petit probleme , il n'a ni galette , ni petit pot de beurre et ne ressemble en rien à un certain Rouge , Petit Chaperon de son prénom . L'enquete s'annonce plus difficile que prévue . Pour ce faire , Diagoras , son mentor , plus enclin à envisager la these du meurtre que celle du casse-croute animalier , théorie semblant déja faire l'unanimité , décide de faire appel à Héracles Pontor , le Déchiffreur d'Enigmes ! Terme legerement pompeux qui prendra tout son sens au fil du récit...



Ce qui frappe , de prime abord , c'est l'intelligence narrative . Somoza maitrise et son récit et sa structure . Fin mélange de philosophie ( sans jamais etre rébarbative ! ) et de littérature léchée , Somoza l'orfevre fait dans le haut de gamme ! Il taille le mot , cisele le propos pour délivrer une enquete aussi aboutie que complexe ! Parfait rendu d'une Athenes plus vraie que nature . L'immersion est complete .

L'histoire déroule , aidée en cela par quelques notes judicieuses de bas de page généreusement mises à la disposition du lecteur par le gentil traducteur . Et là je dis , ATTENTION , entrée imminente dans la quatrieme dimension ! Le prétendu traducteur , qui n'est autre que ce fou-fou de Somoza , devient partie intégrante de l'histoire , sorte de poupée gigogne pour le coup , de récit dans le récit . S'appuyant sur l'eidesis...comment , pardon , késako ? Là , je me gausse , ne pas connaitre un tel procédé pourtant inculqué dès bac + 36 , s'en est presque risible....Je me LOL à donf !

Eidesis : technique littéraire inventée par les écrivains grecs classiques pour transmettre des clés ou des messages secrets dans leurs oeuvres . Répétition de métaphores ou de mots qui , isolés par un lecteur averti , forment une idée ou une image indépendante du texte originel . Fastoche non ?...C'est ainsi que le prétendu traducteur ( fou-fou Somoza ) , traduisant le texte millénaire qu'est La Caverne..en temps réel et nous faisant part de son ressenti en bas de page , en vient à développer ce sentiment prégnant qu'il fait partie intégrante de ce récit , qu'il en est un des maillons . Somoza entremele brillamment enquete et paranoia aigue pour faire de ce roman un véritable OLNI : objet littéraire...

Tout se tient , se recoupe et l'on ne peut que s'incliner devant la profondeur de l'auteur . Lecture à plusieurs niveaux , mise en abyme de haut vol !

Les pérégrinations de Pontor et Diagoras , sorte de Laurel et Hardy de la Grece Antique , leurs joutes verbales , leurs échanges philosophiques se boivent comme du p'tit lait . L'imbrication du traducteur et sa possible adhésion au récit scotche véritablement un lecteur tenu en haleine par cette nouvelle donne . La fin est cohérente tout en proposant une vision de la lecture tres loin d'etre inintéréssante !



Meme si j'avoue m'etre parfois égaré , cette caverne propose une expérience de lecture peu commune qui légitime pleinement sa découverte ! Entrée gratuite pour les enfants de - de 40 ans...

3.5 / 5
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Clara et la pénombre

Un étonnant mélange de polar et de dystopie artistique.



Une oeuvre d’art est assassinée. Oui, ce n’est pas une métaphore, cette oeuvre d’art est une jeune fille et elle a été sauvagement torturée.



C’est qu’au début du XXIe siècle, des artistes ont commencé à utiliser le corps humain comme toile, comme support pour créer une oeuvre en trois dimensions. C’est devenu de l’art HD (pour Hyper Dramatique). On a recruté surtout des jeunes filles et parfois même des enfants. On les recouvre de peinture, on leur fait prendre une pose dramatique. Ils sont exposés, souvent nus, parfaitement immobiles pendant plusieurs heures par jour. Ce métier de « toile » est devenu très sophistiqué, avec des écoles spécialisées et toute une variété d’exercices et de pharmacologie pour garder la pose.



Ce contexte imaginaire permet d’aborder quelques grandes questions. Les rapports entre l’art et l’argent : un tableau a-t-il une plus grande valeur artistique parce qu’il vaut beaucoup d'argent ? À quoi sert l’art, si ce n’est à rapporter de l’argent ?



L’art, peut-il se faire au détriment des personnes? L’art est-il plus important que les êtres humains ? Ou alors quel est le rôle de l’art dans la société moderne ?



Et puis, l’art moderne, vous y comprenez quelque chose ? «  Si c’est de l’art, il n’y a rien à comprendre », dit le policier…



Une lecture intéressante, qui amène ailleurs…

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Etude en noir

Anne McCarey est infirmière, sa relation avec son compagnon est toxique, elle a du mal à s’en défaire (mais le veut-elle ?) et elle accepte un poste d’infirmière à Portsmouth, dans une institution psychiatrique.



Lorsque l’on découvre son patient, le fameux Monsieur X, on ne peut s’empêcher de lui trouver des points communs avec Sherlock Holmes. Hormis pour la folie et la taille.



Alors qu’elle tente de trouver la manière pour s’occuper de ce patient bizarre, voilà que surgit, hors de la nuit, un médecin nommé Arthur Conan Doyle, qui tente d’écrire un roman policier. Son personnage se nomme Sherlock Holmes et il lui trouve des points communs avec cet homme étrange.



Ce roman noir historique ne fait pas que de rendre hommage aux romans de Conan Doyle. Il parle aussi des théâtres clandestins, véritables antres de perdition, où des enfants jouent nus…



Ce polar historique noir parle aussi de la misère, de l’exploitation humaine, de cette Angleterre victorienne, pas vraiment folichonne, où les écarts entre les différentes classes sociales avaient la largeur de gouffres. Soit, on pétait dans de la soie, soit on pétait au grand air, le ventre vide…



J’ai apprécié le rapprochement entre le monsieur X et le personnage de Holmes : X en étant une sorte de modèle. Malgré sa folie, malgré sa froideur, malgré le peu de choses que l’on saura sur ce monsieur X, il est assez facile de s’attacher à lui, ainsi qu’à l’infirmière Anne.



L’arrivée de Conan Doyle ajoutera du piment dans l’histoire, puisqu’il aidera monsieur X à résoudre les meurtres atroces qui ont lieu dans la ville de Portsmouth. Qui est coupable, quel est le mobile ?



Le bémol est que le rythme est assez lent… Pas d’ennui à l’horizon, on ne s’embête pas dans le récit. Cependant, le scénario donne l’impression, à un moment donné, d’être un peu trop touffu et de partir un peu dans tous les sens, avant de revenir dans les rails et de tamponner les lectrices et lecteurs avec un final exceptionnel ! Quel twist à Portsmouth.



Après Une Étude en Rouge, voilà Étude en Noir et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’avec ses ambiances gothiques, son côté récit d’épouvante dans un hôpital psychiatrique et ses meurtres glauques, ce roman a tout pour être le parfait compagnon un soir de pluie, avec du vent qui souffle, afin d’être bien dans le thème.



Il est parfait aussi pour la lecture au soleil, rassurez-vous !



Un roman noir aux ambiances et aux côtés historiques parfaitement bien décrits et qui donne un autre aperçu de la naissance, dans la tête de Conan Doyle, de son personnage le plus célèbre, même s’il le détestera ensuite.



Une chouette découverte ! Ah non, pardon, c’est un corbeau sur la couverture… Un "corbeau" découverte, alors !


Lien : https://thecanniballecteur.w..
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L’appât

Bon, je sens que je vais me faire des ennemis...

J'aime bien me faire un petit polar de temps en temps. Mais j'ai du mal à considérer les enquêtes policières comme autre chose qu'un pur divertissement. Je sais bien qu'il est d'usage de défendre la littérature noire comme un genre chirurgical, qui sonde les âmes et fouaille les corps pour diagnostiquer les maux de notre époque, voire comme un genre métaphysique qui révèle le Mal et les Péchés des hommes (avec plein de majuscules).

Alors sans doute ai-je parfois frissonné, touchée par l'aile du désespoir et de sa copine la déréliction, mais la plupart du temps je m'excite surtout sur le suspens somnivore et le coupable improbable, qui rendent la lecture ô combien plaisante et dispensable.

Tout ça pour dire que cela faisait un moment que ce roman de Somoza me faisait de l'oeil: dans un monde pas si lointain, la science a vaincu la technologie en découvrant le psynome, équivalent psychique du génome ; et notre ADN mental a été déchiffré, chacun de nous réduit à sa philia, soit la structure de son désir qui, une fois décodée, met son porteur sous l'emprise totale de qui l'aura activé. Les méchants ne sont donc plus arrêtés par un flic, l'arme au poing, mais par un appât, qui, expert en séduction, contraint le vilain pas beau à l'orgasme et à l'auto-élimination.

Mais comment apprend-on à évaluer la philia de l'ennemi? En jouant Shakespeare, pardi. Qui révèle dans chacune de ses pièces les principes de nos désirs avoués et inavoués sous l'égide de John Dee, grand maître des Illuminatis de l'époque (en gros).

Et comme ma philia, c'est plus ou moins tout-ce-que-vous-avez-voulu-savoir-sur-les-grands-textes-sans-avoir-jamais-osé-demander, c'est vous dire si j'étais partante pour être appâtée et happée. Shakespeare, psychanalyse et philosophie (La philia interdit-elle la liberté ? Vous avez 2 heures), l'extase, quoi.

Ben non (voir plus haut). « L'Appât » n'est jamais qu'un honnête divertissement avec psychopathes, courses-poursuites et twists multiples. C'est sympa mais pour sonder l'âme humaine faudra relire le grand Will et ne pas trop compter sur José Carlos. Le monde est peut-être un théâtre mais avec Somoza le masque est moins vénitien que jetable.

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Le mystère Croatoan

Étrange roman que ce Mystère Croatoan. C'est ce nom propre qui m'a attirée, me rappelant mes cours de licence sur les colonisations françaises et britanniques en Amérique aux XVIème et XVIIème siècles. Croatoan est le mot gravé sur un arbre de la colonie anglaise de Roanoke en Virginie où tous les habitants semblent s'être volatilisés vers 1590. Et voilà comment on achète un livre sur un mot du titre sans même regarder la quatrième (et puis le tableau ténébreux en couverture me plaisait aussi beaucoup).



Autant j'étais ressortie avec un avis mitigé de Tétraméron, autant cette seconde incursion dans l'univers fantasque de José Carlos Somoza m'a plus plu.

De bizarres phénomènes surgissent tout à coup un peu partout sur la planète, concernant animaux et êtres humains. Vu la vélocité de la propagation, beaucoup de questions se posent sur la nature du problème. Virus? Manipulations? Extraterrestres? Complot international? Impossible de répondre tant les choses évoluent vite.



Au jour J de ce changement, Carmela, jeune éthologue espagnole, ainsi que plusieurs de ses collègues, reçoit un mail mystérieux - un seul mot : Croatoan - de son vénéré professeur d'éthologie... suicidé deux ans auparavant. Comme si la situation n'était déjà pas assez complexe! A elle de réfléchir à ces étranges et nouveaux comportements qui se répandent partout.



José Carlos Somoza signe ici un roman inquiétant et fascinant. Je n'ai pas les connaissances nécessaires pour savoir si les thèses qu'il avance sont plausibles ou non. Toujours est-il que je me suis laissée facilement emportée par cette mystérieuse histoire. Si le terme "apocalyptique" résonnait au début dans mon esprit, je me suis rapidement aperçue qu'il s'agissait plus d'une vision de fin d'un monde plutôt que de fin du monde. Un champ d'interrogations intéressant à explorer.



Certaines scènes comportementales sont assez difficiles à lire et mettent mal à l'aise sans toutefois tomber dans le gore complet. Dans les personnages mis en avant, plus que les principaux Carmela et Nico, j'ai eu une nette préférence pour le jeune Sergi dont la schizophrénie lui fait entendre sans cesse des voix dans sa tête, ce qui n'enlève rien à son degré d'empathie et de positivité.



Finalement j'ai bien fait de céder à ma curiosité sur le mot Croatoan (et l'admiration pour la noire silhouette de la princesse Francesca Rupoli en illustration).
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Clara et la pénombre

« Les hommes une nuit d'horreur, inventèrent l'art »

Une petite phrase qui vous fait frissonner ? Alors bienvenue dans le monde de José Carlos Somoza et vous ne regarderez plus un Rembrandt de la même manière.



« Vous savez ce qu'est l'art hyperdramatique, détective ?

Je dirais que ce sont des personnes qui restent immobiles et dont les autres disent que ce sont des peintures, non ? Répondit-il

C'est tout le contraire. Ce sont des peintures qui bougent parfois et ressemblent à des personnes. Ce n'est pas une question de terminologie, mais de points de vue, et c'est celui que nous avons adopté à la Fondation. »

Voici en quelques lignes la dialectique du roman. Surtout quand une « toile » est découpée par un tueur... Qu'a-t-il découpé ? Une toile ou un individu ? C'est in fine la question que pose Somoza tout au long de son roman : « Mais qu'est-ce qu'un individu aujourd'hui ? »



Un Roman passionnant sur l'art : acheteurs, vendeurs, peintres, Maîtres disent certains, fondations pour promouvoir l'art et leurs arrières pensées vénales... et les toiles humaines, tendues pour donner ce que le Maître attend. Clara, pour ne citer qu'elle est touchante et excite notre curiosité, car elle vit l'art et tente de faire comprendre le point de vue de la « toile »: « Chaque fois que je suis un tableau, c'est comme si j'accouchais de moi-même, tu comprends ? » Oui Clara, j'ai compris jusqu'où vous pouviez aller pour l'art.



Un Roman dont l'intrigue policière tient le lecteur en haleine jusqu'à la dernière ligne.



Les deux se mariant à merveille.



Cet auteur est ''fantastique'', à tous les points de vue. J'ai adoré tellement de mots, de pensées, difficile de choisir un extrait, peut-être celui-ci que je trouve magnifique :



« L'obscurité est peuplée de choses : formes, odeurs, pensées... Et observez la lumière de cet après-midi d'été. Diriez-vous qu'elle est pure ? Regardez-là bien. Je ne parle pas que des ombres. Regardez entre les fentes de la lumière. Vous voyez les petits grumeaux de ténèbres ? La lumière est brodée sur une toile très obscure mais c'est difficile à voir. Il faut mûrir. Quand nous mûrissons, nous comprenons enfin que la vérité est un point intermédiaire. C'est comme si nos yeux s'accoutumaient à la vie. Nous comprenons que le jour et la nuit, et peut-être la vie et la mort, ne sont que des degrés d'un même clair-obscur. Nous découvrons que la vérité, la seule qui mérite ce nom, est la pénombre. »



Un Roman à regarder.

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La Théorie des cordes

Achevé il y a plus d'une semaine, commencé avec la vague caniculaire de ce début d'été, reçu janvier 2019 pour mes 60 ans, noté août 2018 suite à la critique de Joséphine , pourquoi donc vouloir remonter le temps ? Et quelle idée de lui attribuer les pouvoirs d'un talisman, en lire des passages à haute voix comme autant d'incantations : malgré cette belle théorie des cordes toujours pas une goutte de pluie en mon petit pays pourtant réputé. Il ne faudrait pas prendre ce livre pour ce qu'il n'est pas : c'est une fiction ! Un excellent thriller fantastique, une plongée aux limites de la physique. Quelque chose comme le vingt mille lieues sous les mers du 21ème siècle ou le voyage au centre de la terre ou plutôt Frankenstein.





Une Pulp Fiction oserais-je avec une Elisa Robledo plus attirante par son que sa physique.(et c'est bien ce qui compte après tout pour le passage au film). Car l'intérêt du bouquin réside avant tout dans la peinture sociale des mondes académiques et de la recherche fondamentale, dans la description psychologique de ces êtres hors normalité et leur déconnection plus ou moins marquée du sens commun, dans leur incapacité à prendre en compte le bien-être (voire la survie) du genre humain face à leur insatiable plaisir égocentrique de la découverte. Et bardaf en jouant avec leurs accélérateurs (de particules) c'est l'embardée ! Une « chose » indomptable et terrifiante, l'ombre d'un humain arrachée à un moment paroxysmique de colère et de haine se promène assoiffée de sexe et de sang dans les cordes du temps. Nous v'la bien, c'est pire qu'Hiroshima c't affaire-là !





Franchement j'ai pris beaucoup de plaisir à cette lecture. Et pour le coup c'est bien écrit avec beaucoup de rythme et des caractères suffisamment développés pour ne pas être des caricatures, des failles apparaissent et la fragilité humaine aussi, le suspense monte crescendo et la fin ne nous dit pas s'ils furent heureux et eurent beaucoup d'enfants. Mais ce n'est pas un livre de vulgarisation scientifique (ouf diront peut-être la plupart) même si des physiciens sont nommés et s'il existe des théories des cordes, l'auteur est plus proche de Jules Verne que d'Hergé, par contre son histoire est des plus palpitantes sans descriptions superfétatoires ni l'utilisation de ficelles grosses comme des cordes pour maintenir le suspense à son comble. (Quoique c'est relatif car un peu trop d'annonces dramatiques viennent inutilement alourdir le récit à mon goût.)





Le livre tourne autour du temps, thème maintes fois exploré en science fiction mais voici une nouvelle approche qui ne manque pas de créativité pour revisiter avec succès le mythe de Prométhée. L'être non pas vraiment créé mais en sorte libéré consomme beaucoup d'énergie pour se déployer. Cela m'a fait penser au film Lucy de Luc Besson par association à la chanson Lucie d'Obispo et sa si belle définition du temps qui n'est pas marquée dans les livres, si ce n'est par ce lien.

https://www.youtube.com/watch?v=kjKawxIAeMM



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Pour les fans de physique je recommande ces deux vidéo de scienceétonnante excellente vulgarisation sur les deux voies poursuivies pour une théorie du tout c-à-d une loi unique applicable autant à l'infiniment petit (actuellement décrit par la physique quantique) et l'infiniment grand (actuellement décrit par la théorie de la relativité générale). La première que je n'aime pas beaucoup parce qu'elle se rapproche d'un tour de passe-passe mathématique pour (forcer à) faire marcher un modèle qui autrement coince (cela me rappelle trop les tentatives de complications des modèles du soleil tournant autour de la terre pour les faire coller à tout prix aux mouvements des planètes observés contredisant les prévisions du modèle de base). C'est ce qu'on appelle la théorie des cordes.

https://www.youtube.com/watch?v=rXhzeKh8yBk

L'autre approche plus radicale me paraît plus prometteuse c'est la gravité quantique à boucle.

https://www.youtube.com/watch?v=3MJJvXGuDag



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Etude en noir

Annie est infirmière et elle accepte un nouveau poste au sein d'une maison de santé accueillant des messieurs de qualité ayant des troubles mentaux.

C'est comme cela qu'elle va faire la connaissance de Monsieur X, un patient très particulier qui joue du violon imaginaire.

Parallèlement à son travail, Annie va s'intéresser aux meurtres de vagabonds qui sont commis dans la ville, car son patient semble y accorder une très grande importance.

L'histoire se déroule au 19ème siècle à Portsmouth et l'ambiance de l'époque est merveilleusement décrite.

Cette "étude en noir" est bien sûr un hommage aux romans de Conan Doyle, qui a écrit une "Etude en rouge", elle est plutôt réussie même si j'ai trouvé que l'intrigue était un peu trop embrouillée et qu'il y avait quelques longueurs sur la fin.
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Etude en noir

Etude en noir de José Carlos Somoza, est mon premier livre de cet auteur.



1882, Angleterre. Anne McCarey, veut quitter l’agitation londonienne et surtout Robert, une liaison toxique, avec un marin ivrogne et violent pour revenir dans la ville de son enfance, à Portsmouth.



Infirmière expérimentée, elle trouve très rapidement un poste, dans une institution psychiatrique, renommée sur la côte. Elle n’aura qu’un seul et unique patient : monsieur X, singulier et exigeant est déjà venu à bout de plusieurs infirmières.



Issu d’une famille puissante et richissime, l’homme a surtout un don particulier pour les déductions, cela lui permet de découvrir bon nombre de secrets, sur ceux qui passent la porte de sa chambre.



Dans cette atmosphère mystérieuse, une succession de meurtres commence à assombrir l’ambiance de cette ville.



M. X utilise ses dons de clairvoyance pour mener son enquête depuis sa chambre, avec l'aide du docteur Arthur Conan Doyle qui soigne notre « mentaliste », tout en peaufinant, le personnage principal de son futur roman, un certain Sherlock Holmes et de son infirmière privée.



Nous accompagnerons, ses trois compères dans l’avilissement des théâtres clandestins, où de jeunes enfants des rues, accompagnés de marginaux jouent des spectacles immoraux et interdits.



A la fois, une enquête policière, un conte cruel, une critique sociale.



Je n’ai pas détesté, mais beaucoup de lenteur et un manque évident de dynamisme. Ce n'est que mon avis.



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La Théorie des cordes

Fascinant ! Elisa Robledo, belle, sensuelle, intelligente, super intelligente, donne des cours dans une université de Madrid. Pourquoi n’est-elle pas dans un grand laboratoire scientifique ? Elle vit seule, elle est très secrète, personne ne lui connaît d’aventure. Que cache-t-elle ? C’est la question que se pose Victor, ami, le seul, d’Elisa.



Tout bascule le jour ou Elisa découvre un article dans le journal qui va la bouleverser et qui va changer définitivement le cours de sa vie. Le passé la rattrape, la prend dans ses filets et ne la lâche plus. Elle, mais aussi les scientifiques qui ont vécu un temps ensemble sur une île perdue au milieu de nul part, à découvrir, grâce à un consortium puissant, le mystère de la théorie des cordes.



Ils ont joué les apprentis sorciers. Ils ont voulu défier « Dieu » et ils le payent maintenant. Ils sont remontés dans le temps. C’était fabuleux, mais, après ces expériences, quelque chose de prégnant les poursuit encore aujourd’hui. Quoi ? Arriveront-ils à mener jusqu’au bout leurs expériences ?



Je me suis laissé porté par ce roman. Il prend aux trippes, et même s’il aborde la théorie des cordes, il est facile à lire. J’ai adoré !

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L’appât

« - Sherlock Holmes est déjà trop ''élémentaire'', dear Watson, remarqua Nacho. Aujourd'hui chaque crime est une équation que résolvent les ordinateurs quantiques.

- Les détectives, policiers, médecins légistes... c'est fini, compléta Monte, sentencieux. Place aux ordinateurs, profileurs, appâts et Shakespeare. »



Diana est un appât. Elle a été entraîné pour cela et c'est l'une des meilleures. Elle souhaite cependant mettre un terme à ce métier si particulier, elle chasse les psychopathes grâce à ses qualités développées pendant son entraînement avec le docteur Gens qui fait un lien étroit entre le théâtre de Shakespeare et la représentation que l'appât doit jouer pour capter l'attention d'un tueur en touchant son désir.



« (...) ce que nous sommes, pensons et faisons dépend exclusivement de notre désir et nous exprimons ce désir à chaque fraction de seconde par les gestes, les mouvements de yeux, la voix... »



Dans cette unité spéciale, les appâts sont tenus secrets afin de ne pas effrayer la population.



« Qu'une drogue vous provoque des hallucinations est une chose, mais c'en est une autre bien différente qu'un geste, un ton ou la vision fugace d'une partie du corps puissent vous rendre fou. »



José Carlos Somoza pose le problème de la liberté dans ce roman, l'action se situant dans un futur proche dominé par les progrès de la technologie et la peur du terrorisme.



« On ne peut pas immoler un innocent pour apaiser le monstre. C'est barbare et inhumain. »



C'est un roman étonnant, un très bon thriller qui évoque également les relations entre Diana et sa sœur Véra. « Sa sœur. Son univers. Son ciel et son enfer privés. Il lui arrivait de penser que toute sa vie était centrée sur Diana. » Orphelines très jeune suite au meurtre de leurs parents, elles n'ont pas pu surpasser cette atrocité à laquelle elles ont assistée.

Cela explique en partie leur volonté de devenir des appâts. Mais l'aînée veut toujours protéger Véra et le jour où Véra part chasser un psycho de toute première classe, Diana a peur et veut l'en empêcher, par tout moyen. Mais le désir est plus fort que tout.



« Le psynome est comme un poulpe invisible : il étend ses tentacules et te palpe. Il touche ta sexualité, ton inconscient, tes pensées. »



Lorsque Véra disparaît, Diana est persuadée qu'elle seule pourra la sauver. Elle reprend l'entraînement pour trouver le masque parfait qui pourra neutraliser le tueur par une « disruption ».



« La disruption est une explosion du désir : tu plonges tellement dans le psynome que c'est comme si tu perforais la terre et, soudain, tu vois monter le pétrole comme un vomissement noir et visqueux. »



Et oui, c'est un thriller noir.



Sera-t-elle assez forte ? Qui trompera l'autre en premier ? Quelle pièce jouer ? ...est-ce un jeu ?



« Que j'admette l'existence du psynome ne signifie pas que je pense que nous manquions de liberté de choix. (...) Nous pouvons tous changer. »
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Clara et la pénombre

Je publie ma critique augmentée de Clara et la Pénombre, la première étant, à mon goût, un peu incomplète et obscure. C'est donc un roman policier de science-fiction aussi essai sur l'art, ovni littéraire assez incroyable, comme on aimerait en lire plus souvent, en tout cas à lire pour les amateurs ne serait-ce que de l'un des trois genres!



Il recèle de références littéraires, picturales, notamment à Rembrandt, mais on peut en trouver plein d'autres (Alice au pays des merveilles...) Oeuf très riche, développant un monde cohérent, aussi biscornu qu'il soit, où l'on déniche, en revenant sur des passages, toujours plus de parallélismes artistiques, un bonheur pour les comparatistes! Que sa taille ne vous rebute pas, il se lit très vite, cela reste un thriller. Après, il n'est pas parfait, évidemment. Personnellement, malgré l'efficacité de la rhétorique de Somoza, liant l'art à la mort, quand on est transporté par l'art, littéraire, musical et autres, au quotidien, on grimace devant un tel propos. Il a beau être pertinent et appuyé, on s'y oppose forcément.



Le principe de base : dans le futur, les tableaux ne sont plus des toiles... Mais des êtres humains!! Rémunérés pour poser, leur corps est entièrement peint, et en découlent évidemment toutes les questions morales de réification des individus, considérés non plus comme tels, mais comme de simples objets, supports. Le roman va jusqu'au bout, et installe une hiérarchie, des grands modèles peints par les grands artistes, aux gens les plus modestes qui se prêtent à une servitude volontaire pour poser en tant que chaise, table de design! Et comme si ce n'était pas assez, il y a aussi les "art-shocks", forme illégale dont on devine qu'elle recèle prostitution et tout ce qui s'ensuit. Lorsqu'un tueur en série se met à assassiner des modèles/toiles, le débat se pose au sein de ce futur fou : meurtre ou vandalisme?



Le personnage principal, Clara, comme son nom l'indique, est candide, transparente, et va évidemment subir ce lavage de cerveau progressif pour qui veut arriver à être la toile suprême de l'artiste ultime (Van Tysch), de sorte qu'au final, on s'identifie et se soucie peu d'elle. L'intrigue elle-même passionne bien plus, dans la construction effarante de ce monde musée. Hirum Oslo, artiste retiré dans son jardin fabuleux, exilé en pleine lande anglaise, effaré, loin du monde, obsédé par sa muse (certes la détestable Mlle Wood) m'a davantage conquis.



En clair, un roman si original qu'il vous reste longtemps en mémoire... Et je n'ai pas tout dit. Seul le dénouement de l'intrigue policière, un peu prévisible (comme ce qui arrive à Clara) parmi les quelques solutions qui s'offraient au lecteur, peut légèrement assombrir le tableau, c'est le cas de le dire, mais au final, on en garde un souvenir vivace, comme si Somoza avait peint notre cerveau de toute cette histoire et de ce cosme qui a franchi une limite faisant frissonner.



Si ça vous donne envie, sachez que Jose Carlos Somoza adore ça et ne fait que ça : des polars hybrides, mêlés à un autre monde, fictif, complètement fou. La quatrième de couverture de CHACUN de ses romans pousse à l'achat compulsif!!
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La Dame n°13

Parce qu'ils font toutes les nuits le même cauchemar qui les terrorise, un professeur de littérature au chômage et une mystérieuse clandestine hongroise se retrouvent plongés dans une histoire fantastique des plus terrifiantes.

Assistés d'un vieux médecin, ils découvrent l'existence d'une secte millénaire de sorcières qui utilisent la poésie pour assouvir leur soif de destruction.

Projetés dans une réalité qui les dépasse ils devront faire face à la cruauté inouïe des "13 Dames" du Verbe…



Une œuvre singulière et fantasque, pleine d'une imagination débridée et fantaisiste.

On se laisse pleinement envoûter par ce suspense fantastique où la poésie devient arme de torture et de destruction, où le pouvoir des mots est synonyme de barbarie cruelle et raffinée, où la réalité se désagrège sous les vers de Shakespeare ou de Keats.

Le psychiatre espagnol José Carlos Somoza, à qui l’on doit l’étourdissante « Caverne des idées », excelle dans la construction des univers troubles, déformés, surréalistes, un peu comme si l’on naviguait, ébahi, dans une toile de Dali, avec cette impression de réalité altérée, truquée, modifiée par l’emploi d’un fantastique échevelé qui vient fausser la donne d’un réel terne et immobile.

Porté par une écriture fluide et colorée, un style imagé très visuel, un sens du rythme effréné, « La Dame n°13 » est un roman pour le moins original qui tient totalement en haleine.

Aussi, l’on ne saurait trop reprendre à son compte ces quelques vers de Dante pour avertir le lecteur : « Vous y entrez ici, laissez toute espérance »…

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Tétraméron

Je découvre l'univers de Somoza avec Tétraméron et j'en ressors assez mitigée. Certes on m'avait parlé de lui comme d'un auteur singulier mais je me demande si ce titre était une bonne idée pour faire sa connaissance...



Je reconnais que Somoza possède de grandes qualités stylistiques. Les phrases et le vocabulaire ne piquent pas les yeux. Quant au fond, j'ai la sensation d'être passée à côté. De plus, j'ai trouvé les contes et les exigences de ce cénacle de plus en plus glauques et malsains. La conception de l'auteur du passage de l'enfance à l'âge pubère pour son héroïne Soledad - sorte d'Alice espagnole - m'a mise mal à l'aise.



Malgré des envies de lâcher le livre à plusieurs reprises, j'ai lutté pour aller jusqu'à la dernière page. Je n'en ai pas été plus avancée... En tout cas, bravo aux éditions Acte Sud pour la belle illustration de couverture. Belle et étrange.



Je redonnerai sans doute une autre chance à cet auteur de me charmer. Mais pas tout de suite.
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La Théorie des cordes

Superbe roman de Somoza, magnifiquement construit, dans lequel tout commence par un article qui nous ramène dix ans en arrière, alors que l'on pouvait contempler le passé et trouver des réponses à des questions qui n'ont jamais cessé de tarauder l'humanité.

Véritable thriller, plein de suspense et de rebondissements, la Théorie des Cordes nous fait voyager dans plusieurs univers et on se laisse porter par le génie narratif de Somoza jusqu'au dénouement final.

L'un de mes préférés de cet auteur qui a rendu la clef de l'abîme si décevant...
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Clara et la pénombre

En ce début du XXIème siècle, le marché de l'art a développé un commerce artistique très lucratif : l'Art Hyper Dramatique.

Désormais, ce sont sur des toiles humaines que les peintres expriment leur talent.

Juin 2006. Jolie jeune toile de 24 ans, Clara Reyes doit participer à la nouvelle exposition du génie de l’art HD, Bruno VanTysch ; une exposition se déroulant à Amsterdam, qui promet d’être grandiose et que tout le monde attend avec la plus vive impatience.

Mais une série de destructions d’œuvres du maître vient jeter le trouble au sein de la fondation VanTysch et de son service de sécurité.

Des cadavres de modèles sont retrouvés aux côtés d’enregistrements aussi terrifiants qu’énigmatiques « …dans ton sacrifice final repose le sens de la création….parce que l’art qui survit est l’art qui est mort… »

Au fil d’une enquête éprouvante, l’agent de sécurité Lothar Bosch pénètre l’univers extravagant, fantasmatique et inquiétant des marchands d’art, des artistes et des toiles humaines…



Quand le génial psychiatre espagnol José Carlos Somoza s'attaque à l'art pictural cela donne une œuvre dense, riche et subtile, toute en atmosphère, relief, ambiance et clair-obscur.

Dans ce roman à la lisière de la science-fiction, la peinture est devenue une perversion artistique, un art dégénéré.

Avec un style très visuel, quasi graphique, une narration fluide, où l’utilisation des couleurs, des détails, des architectures et des espaces nous baigne sans effort dans un climat troublant et envoûtant, Somoza dépeint une réalité infléchie, parabolique, ni tout à fait différente, ni tout à fait semblable à notre réel, à l’orée de deux mondes, celui d’aujourd’hui et celui d’un demain proche.

Dans cet hypothétique - et toutefois fort plausible - monde de demain, le corps humain se manipule comme n'importe quel matériau, décliné selon les besoins en œuvres d'art, objets de décoration ou d'artisanat. Une nouvelle forme d’Art est en place avec ses codes, ses côtes, ses valeurs, ses estimations et ses représentations ; un courant créatif extrêmement lucratif conduisant à tous les excès…

Mais si les éléments de « Clara et la pénombre » sont fictifs, ils ne sont pourtant guère éloignés de la réalité.

La peinture corporelle - body-art ou body-painting - existe depuis la nuit des temps, depuis l’aube de l’humanité.

Si nos ancêtres recouraient à cette expression par esprit d’appartenance, pour des impératifs de guerre, par signes distinctifs ou rites tribaux, l’époque contemporaine a érigé cette pratique picturale en expression artistique.

José Carlos Somoza dit : « J’ignore si la situation changera dans l’avenir, mais j’ai tendance à penser que si quelqu’un découvre comment gagner de l’argent par ce biais, ce ne seront pas les considérations morales qui empêcheront un tel marché humain de se dérouler de façon aussi spectaculaire ou plus que dans mon livre. »

Il nous en livre ici une variante des plus effarantes avec ce thriller philosophique intense, reflétant, tel un miroir de l'horrible, les déviances de nos sociétés.



« Le Beau n’est que le commencement du terrible », Rainer Maria Rilke

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