AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Marcel Aymé (598)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


Le passe-muraille

« Le passe muraille » est sans aucun doute la nouvelle la plus connue de Marcel Aymé. C’est aussi le titre du recueil publié en 1943, qui comprend, outre la nouvelle éponyme, neuf autres textes, mais commençons par le commencement :

« Le passe muraille » : l’histoire d’un fonctionnaire employé au Ministère de l’enregistrement, Dutilleul, dont la vie va se transformer en enfer avec l’arrivée d’un nouveau « chefaillon ». Il utilisera son don de passe-muraille pour harceler celui-ci, apparaissant à travers le mur de son bureau… mais l’amour le perdra.



« Les Sabines » : point d’enlèvement ici... Simplement Dame Scenna, dotée du don d’ubiquité qui lui permettra d’être à la fois l'épouse Métivier, la maitresse de Théorème, jeune peintre montmartrois et Lady Burburry en épousant un riche Anglais…



« La carte », où le journal intime de Jules Flegmon : on traite ici des cartes de rationnement pendant l’Occupation.



« Le décret »… et si on décidait d’un saut dans le temps pour « atterrir » la guerre terminée ?



« Le proverbe » où l’histoire d’un père tyrannique qui apprend le même jour qu’il vient d’obtenir les palmes académiques et que son fils n’a pas fait son devoir de français pour le lendemain…



« La légende poldève », une espèce de conte fantastique, où l’on tourne en dérision la guerre, les belligérants et les bigots à travers l’entrée au Paradis de la demoiselle Marichella Borboïé.



« Le percepteur d’épouses » ; un percepteur obtient de l’avancement de la part du ministre pour avoir « mis en recouvrement » les épouses de ses contribuables…



« Les bottes de sept lieues » : une histoire de bottes magiques qui permettront à un jeune garçon de sortir de la misère.



« L’huissier » : l’histoire de l’huissier Malicorne, mort et ressuscité pour faire le bien avant une deuxième tentative d’entrée au Paradis.



« En attendant » : pendant la guerre de 1939-1972, devant une épicerie, quatorze personnes sympathisent et décident pour des raisons diverses et variées de ne plus se quitter.



Dix nouvelles qui témoignent, sous la plume de Marcel Aymé, de l’exaspération des français pendant l’Occupation, face à une guerre qui n’en finit pas ; des français soumis à des tracasseries administratives aussi diverses qu’idiotes, voire condamnables…

Une langue, certes un peu désuète, mais tellement attachante.

Commenter  J’apprécie          360
Les contes rouges du chat perché

Tellement chou d'aller replonger dans ces contes, et surtout dans l'édition joliment illustrée qui m'avait été offerte pour mes 7 ans il y a ... un certain nombre d'années.



J'en avais gardé un souvenir assez désagréable, une sorte de malaise face à la violence des parents de Delphine et Marinette, la rouerie du chat., la rusticité de moeurs campagnards d'avant-guerre bien éloignés de mon quotidien de petite urbaine aux racines paysannes perdues.



Quelques décennies plus tard, c'est un bonheur de les retrouver à travers quelques histoires aussi pittoresques qu'édifiantes où l'auteur se moque gentiment des superstitions (La patte du chat), des préjugés (Les vaches), de l'obsession citadine du paraître (Le paon), ou encore quand il s'amuse des bienfaits de l'instruction en envoyant toute la basse-cour à l'école, et fait un lettré d'un boeuf débonnaire.

Délicieux!
Commenter  J’apprécie          351
Les contes bleus du chat perché

Les parents avaient beau crier au loup...

Mais, pendant leur absence, quand la bête se présenta à la fenêtre, Delphine et Marinette prirent pitié, car dehors, il faisait un froid de loup. Le "marlou(p)" était attendrissant, avec sa patte blessée et sa démarche chaloupée...



Le loup charmait les fillettes, avec sa promesse d'histoires drôles, sur 3 lapins de la lisière des bois. Elles lui reprochèrent celle avec l'agneau et le chaperon rouge, mais le laissèrent entrer...

Il leur raconta des histoires si drôles sur le renard, l'écureuil et la taupe, qu'il dut recommencer encore et encore...

Le Loup fit le cheval, et ils jouèrent jusqu'au soir. le troisième jour, le "filou(p)" revint et Delphine proposa de jouer au Loup...



Vous vous souvenez de la chanson de votre prime jeunesse ? "Promenons nous dans les bois, tant que le Loup n'y est pas. Loup, y es-tu? M'entends tu? Que fais tu? "

Le Loup mettait son caleçon, puis son ceinturon et...

prit son sabre.... Que pensez vous, qu'il advint?



" Le loup change de poil, mais point de naturel", cependant je ne veux pas hurler avec les loups...

Nous sommes chez Marcel Aymé, avec son sens de la parodie et son art du récit ! Lisez ce classique, même si vous avez grandi et retrouvez le cerf et le chien, le mauvais jars, ou encore l'âne et le cheval...

Ahou, ahou, ahou!
Commenter  J’apprécie          353
Le puits aux images

« le puits aux images » est un recueil de nouvelles très diverses, tant par leurs sujets que par leurs traitements. J'en retiens deux qui ont en commun de se dérouler à la campagne et d'être sombres. La première, qui donne son titre au recueil, raconte l'histoire d'une paysanne tourmentée par un mari violent qui part assister à sa première séance de cinéma. Le spectacle va-t-il étancher sa soif d'évasion? La seconde intitulée ‘'les mauvaises fièvres'' montre un mari qui annonce le décès de son épouse acariâtre avec un peu de précipitation… Ces nouvelles ont une noirceur qui peuvent rappeler notre cher Maupassant. D'autres récits ont un tour plus merveilleux et on s'amuse à voir une fée sur son attelage de lapins verbalisée par un gendarme. Plus saisissant encore, une horde de clochards qui passant la nuit dans une station de métro s'enivre de l'illusion d'une pluie d'or. On s'amuse également à suivre Diogène le Cynique déambuler dans les rues d'Athènes une lanterne à la main, mais son apostrophe « Je cherche un homme » est loin de rencontrer l'accueil escompté,



« le puits aux images » est le premier recueil de nouvelles de Marcel Aymé. On y voit déjà la touche de cet auteur capable d'emprunter au réalisme comme au merveilleux, d'exprimer une douce ironie ou de prendre des accents plus graves.
Commenter  J’apprécie          350
Les contes du chat perché

Je connaissais les contes du chat perche par le dessin anime que je regardais quand j’étais petite dans les années 90. J'avais donc envie de découvrir le livre.

Dans mon souvenir, les contes étaient plutôt mignons (ou alors ma mémoire me joue des tours) mais j'ai trouve ce recueil assez dur! les parents déjà sont complétement abominables avec leurs petites filles et aussi envers les animaux qu'ils font obéirent a coup de pied. Alors quand on lit des contes, il faut savoir lire entres les lignes pour en ressortir une morale ou comprendre le message qui s'y cache mais la pour moi, impossible de faire abstraction de ces horribles parents et de cette cruauté.
Commenter  J’apprécie          340
Le chemin des écoliers

Pendant l'occupation Antoine Michaud, jeune lycéen de 17 ans, se livre avec son ami Paul Tiercelin au marché noir. Il entretient une maîtresse, Yvette, dont le mari est prisonnier en Allemagne.

Le père d'Antoine s'inquiète des sorties trop nombreuses de son fils et questionne le père de Tiercelin, qui tient un restaurant dont la clientèle est essentiellement constituée d'allemands et de collaborateurs avec l'occupant. Tiercelin père livre Charles Michaud aux mains d'Olga, "une créature de rêve"...

Ce roman est passionnant et profondément humain.

Bourvil tient dans l'adaptation cinématographique le rôle de charles Michaud, le jeune Alain Delon y figure son fils et Lino Ventura Tiercelin. Ce film à la distribution prestigieuse tient toutes les promesses de ce magnifique roman.
Commenter  J’apprécie          341
La Jument verte

Surprenant, paillard et jubilatoire!

Même s'il est vrai que le premier chapitre est au-dessus de la suite, pour ma part j'ai continué à me pourlécher les babines et me rincer l'oeil à la lecture de cette chronique rurale qui sent bon le terroir et le cul des vaches (et pas que des vaches), qui voit s'affronter les deux familles Haudouin et Maloret, rivales pour l'éternité depuis que le fils de la seconde a conduit au viol de la mère de la première par un soldat prussien.

Double idée géniale que de peindre le tableau sociologique du village de Claquebue à travers les moeurs sexuelles de ses habitants, et de faire exposer ces moeurs par une jument, verte et lubrique de surcroit, et coincée dans un tableau! Position hautement frustrante mais poste d'observation de premier ordre pour reluquer par le trou de la serrure les moeurs douteuses de la famille Maloret dans laquelle la pratique de l'inceste se transmet de génération en génération, celles très libres de la famille d'Honoré Haudouin, celles à l'inverse corsetées à l'extrême de Ferdinand Haudouin dont les tentatives pour juguler les mauvais penchants de ses enfants sont à mourir de rire.

Un roman très drôle, un peu lourdingue certes mais qui ne mâche pas ses mots, beaucoup plus réfléchi qu'il n'y parait, qui encapsule un petit peu de notre patrimoine socio-politique national.
Commenter  J’apprécie          324
Le passe-muraille

Nouvelles de l’arrière du front



Publié en 1943 au plus fort de l’occupation allemande pendant la seconde guerre mondiale, ce recueil de dix nouvelles dépeint, tantôt par le biais du fantastique, tantôt par celui du surréalisme, la France des années 40, celle de la province et celle de Paris, et les français, des pauvres, des bourgeois, leurs grandeurs et leurs bassesses.

Le recueil s’ouvre sur la nouvelle éponyme « Le Passe-Muraille » cet homme ordinaire doué du pouvoir de passer à travers les murs, pouvoir dont il va user et abuser pour le plus grand plaisir du lecteur ! Suit « Les Sabines » l’histoire d’une femme prénommée Sabine qui possède l’extraordinaire don d’ubiquité ; et deux nouvelles que j’ai adorées, La Carte du Temps et Le Décret dans lesquelles Marcel Aymé joue avec la notion du temps… Les suivantes Le Proverbe, Légende Poldève, Le Percepteur d’épouses, sont un peu moins fantastiques mais le « message » philosophique de l’auteur est habillé par un humour grinçant ! Dans Les Bottes de Sept Lieues qui est sans doute la nouvelle la plus aboutie du recueil, Marcel Aymé décrit à merveille les aventures de cinq garçons dans le Paris des années 30. Enfin, pour conclure, L’huissier (celle que j’ai le moins apprécié) et En attendant, la rencontre poignante de quatorze personnes dans la queue devant une épicerie de la rue Caulaincourt, quatorze personnes qui racontent leurs petites et grandes misères dues à la guerre évidemment, une nouvelle qui résonne étonnamment aujourd’hui…

Il y a bien longtemps, j’avais lu La Vouivre et, il y a plus longtemps encore, les Contes du Chat Perché, je n’avais donc qu’un lointain souvenir de la plume de Marcel Aymé… Et je suis ravie d’être revenue dans son univers par l’intermédiaire de ces nouvelles dont la lecture s’est révélée on ne peut plus distrayante !

Commenter  J’apprécie          321
La Rue sans nom

Dès cinq heures, la rue de ce quartier populaire résonne de l'écho des hommes qui partent au travail. Les portes des immeubles insalubres claquent, les semelles sont traînées dans la boue, des éclats de voix, de toux, et parfois des rires remontent le long des façades. Les premiers à partir sont les immigrés italiens. Ils sont maçons ou terrassiers et occupent les maisons les plus insalubres de la rue. Ils sont suivis par les ouvriers qui prennent le chemin de l'usine Té. Pour se réchauffer et vaincre le vague-à l'âme, ils s'arrêtent parfois au bistro de Minche boire un verre de liqueur et acheter un litre de rouge. Les journées de labeur se suivent et paraissent sans fin. le dimanche, les coeurs noyés dans le vin blanc se réchauffent au son des accordéons.



Méhoul partage la vie besogneuse du peuple de la « Rue sans nom » depuis plusieurs années quand son passé se rappelle brutalement à lui. Un soir d'hiver, il reçoit la visite d'un ancien complice, surnommé Finocle, qui lui demande de l'héberger. L'homme s'installe dans une des chambres du modeste appartement avec sa fille Noa dont il s'est très peu occupé jusqu'à présent. La beauté fatale de la jeune femme va déchainer les passions et bousculer la routine de la rue. Autre motif de trouble : les riverains apprennent que leurs immeubles vont être détruits pour permettre la construction de bureaux.



« La rue sans nom » est un roman populaire affranchi de toute idéologie ou mouvement littéraire. Marcel Aymé dépeint le prolétariat ouvrier qui trime durement et dont les conditions de vie sont miséreuses. Il décrit des hommes fatigués, résignés qui ne s'égaient que dans l'alcool ou dans la lubricité. Les femmes sont souvent battues et les enfants grandissent dans la rue où ils attrapent des typhoïdes qui leur sont fatales. L'auteur évoque la xénophobie latente contre les immigrés italiens accusés de faire baisser les salaires et de séduire le coeur des femmes. J'ai deviné quelques références à Germinal ; le patron du bistro, par exemple, m'a fait penser à l'épicier de la mine (Minche/Maigrat => Mince/Maigre, pour des hommes obèses). J'avais adoré la description burlesque du monde paysan dans la Vouivre. Ici le ton est plus grave pour parler du prolétariat mais c'est également l'apparition d'une femme enchanteresse qui va être à la source de nombreux événements. Ce n'est pas qu'un roman sur le monde ouvrier, il est question d'hommes qui fuient leur quotidien grâce à l'amour, la folie ou l'aventure. Un livre chaud d'humanité, moins connu dans la bibliographie de l'auteur, mais d'une très grande qualité.

Commenter  J’apprécie          320
La table-aux-crevés

A Cantagrel, un village de la campagne comtoise, on distingue les hommes des bois de ceux de la plaine. Les premiers vivent au hameau de Cessigney qui se situe au milieu de la forêt. Les hommes sont bucherons et se livrent au braconnage et à la contrebande. Les différends se règlent à la chevrotine. Les familles du hameau sont très croyantes. Leur foi mêle la doctrine catholique à des rites païens.

Quant au bourg, il s’étend au milieu des champs de blé. Les hommes de la plaine sont principalement des paysans cossus car la terre ici est riche. La politique a divisé le village deux groupes : les calotins attachés à l’Église et les Républicains, anticléricaux, qui gèrent la mairie.



Ces clivages vont être le moteur de deux intrigues qui tourneront autour d’un personnage : Urbain Coindet. C’est un paysan respecté pour sa vaillance, élu au conseil municipal sous l’étiquette républicaine. Un jour, en rentrant de la foire, il trouve son épouse Aurélie pendue à une corde. La défunte était très pieuse mais un suicide empêcherait une cérémonie religieuse. Sa famille cherche donc à convaincre les villageois qu’il s’agit plutôt d’un meurtre commis par son époux. Quelques semaines plus tard, le veuf envisage de se remarier avec Jeanne, une fille des bois. Mais son frère sorti depuis peu de prison le refuse. Il accuse Coindet de l’avoir dénoncé aux gendarmes et décide de se venger.



Le roman est remarquablement construit et écrit ; on ne peut que s’étonner de sa faible notoriété. La vie campagnarde est décrite avec une ironie mordante et un grand souci de réalisme. Il est question d’amour, d’amitié, de jalousie, de commérages et de vengeance. Tout débute avec une scène d’une grande force. L’histoire conserve ensuite une grande intensité et il faut attendre les dernières pages pour en connaitre le dénouement. « La Table-aux-crevés » est un véritable chef d’œuvre que je vous recommande vivement.

Commenter  J’apprécie          310
Brûlebois

« Brûlebois » est un trésor d'esprit et de drôlerie. le style est finement ciselé puisant aussi bien dans le registre argotique que dans la langue classique. L'intelligence est partout, aussi bien dans la description d'une société provinciale que dans le récit comique d'épisodes triviaux. J'y vois la pleine illustration de l'esprit français : une belle langue accouplée à une verve gauloise, un regard froid et pertinent et surtout, du sarcasme.



Et quel est le personnage principal d'une telle oeuvre? C'est un vieux pochard nommé Brûlebois. Ancien sous-préfet, une déception amoureuse l'a envoyé sur les quais d'une gare où il attend l'arrivée des trains pour porter des valises. Ses pourboires, il les utilise dans leur sens premier, pour boire. Il accepte son sort, « se laisse pénétrer par la vie sans se préoccuper des relations de cause à effet » et n'a d'autre souci que de choisir le rythme et la nature de ses consommations. Cette âme sans méchanceté va être chaperonnée par un autre marginal, la «Lune » qui mène une vie oisive consacrée à sa passion : la pêche. Ils vont côtoyer un autre fanatique de pêche : Charles Reboudin, fils d'un bourgeois frivole et neveu d'un excentrique qui cherche à révolutionner la métaphysique. Ces personnages cossus vont donner lieu à une satire politique et sociale cinglante. A chacun son taquet : les planqués de la Grande Guerre, la bourgeoisie étriquée de province, les coureuses de dot, les amateurs d'élucubrations politiques ou théologiques…



Un récit vif et comique d'une lecture réjouissante où Marcel Aymé exprime toute sa tendresse pour les hommes simples. Brûlebois est attachant par sa bonté, sa résignation et sa sagesse d'ivrogne. Je garderai en mémoire un échange particulièrement poignant entre Brûlebois et la Lune, une scène qui vous arrachera une petite larme.



Un livre écrit il y a quatre-vingt-dix ans, édité en poche il y a maintenant quarante ans, qui j'espère connaîtra prochainement une nouvelle vie.
Commenter  J’apprécie          313
Les contes rouges du chat perché

Ce deuxième recueil de contes du chat perché publié comprend 4 contes publiés seuls dans les années 30 et 4 autres contes publiés dans les années 40. Comme les précédents ils mettent en scène Delphine et Marinette, deux fillettes qui vivent dans une ferme avec leurs parents toujours un peu bougons et un peu terre-à-terre. Elles ont toujours la même proximité avec les animaux. J’avais découvert beaucoup des contes de ce recueil à l’école primaire et j’ai pris beaucoup de plaisir à relire ceux-ci. C’est toujours aussi frais, intemporel, à hauteur d’enfants.

Les Bœufs (1934) Delphine et Marinette , très bonnes élèves à l'école, décident d'apprendre à lire aux deux bœufs de la ferme. Les conséquences ne seront pas celles qu’elles attendent.

Le Chien (1934) En revenant des courses, Delphine et Marinette rencontrent un chien aveugle qui les supplie de l'adopter. Ce conte a la structure d’un conte classique, c’est un conte moral à la façon de certains contes de fée.

Le Paon (1938) Delphine et Marinette veulent devenir aussi élégantes que leur cousine Flora. Le cochon lui, veut devenir comme le splendide paon d’un château voisin.

Les Boîtes de peinture (1941) Un matin de vacances, Delphine et Marinette se rendent dans le pré, avec leurs boîtes de peinture, cadeau de l'oncle Alfred. Elles décident de faire le portrait des animaux de la ferme. Mais le résultat n'est pas du goût de ceux-ci et a des conséquences imprévues.

Les Vaches (1942) Delphine et Marinette ont égaré les vaches qu'elles devaient mener au pré. Une enquête est lancée par le cochon pour retrouver les disparues.

La Patte du chat (1944) Après une bêtise les deux petites filles sont menacées d'aller faire un séjour chez leur tante Mélina. Le chat Alphonse les aide à résister grâce à son don de provoquer la pluie en passant la patte derrière son oreille.

Le Problème (1946) Les parents de Delphine et Marinette sont très en colère car celles-ci sont incapables de résoudre leur problème d'arithmétique, et il faut qu'elles y arrivent avant le soir. Pas de panique : les animaux sont prêts à les aider. Désopilant !
Commenter  J’apprécie          293
La Jument verte

Lorsque parut le livre "La jument verte", on critiqua beaucoup l'écriture de Marcel Aymé et il obtint une réputation d'écrivain salace.

Chronique amoureuse et familiale, qui s'étend à la fin du second empire à la période du boulangisme, est entrecoupée des réflexions de la fameuse jument verte (élément fantastique qui met le réel en relief). La campagne et les moeurs rurales sont évoquées avec une gaillarde bonne humeur, simplicité et naturel. L'auteur mêle réalisme et poésie, et joint à une connaissance réelle du monde paysan, de ses querelles, de ses clans, de ses haines et de son existence rythmée par les saisons, des dons d'observateur lucide et une psychologie compréhensive des hommes mais sans illusions.

Les narrateurs se succèdent : la jument puis un narrateur externe. Les changements de focalisation sont prévenues par un "les propos de la jument", personnage intérieur à l'histoire qui nous apporte des faits qu'elle seule a pu voir! C'est dans ces passages que l'on trouve un bon nombre de passages érotiques sur la manière dont la famille Haudoin faisait l'amour.

Heureusement, le livre ne comporte pas tout le temps ce genre de réflexions qui ne sont nullement indispensables à la compréhension du livre. L'auteur aurait pu s'en passer. C'est dommage car cela enlève un peu le charme de cette famille et de leurs soucis.
Commenter  J’apprécie          299
La Tête des autres

En 1950, cette pièce causa un scandale retentissant.

La tête des autres, c'est avant tout un réquisitoire contre la peine de mort, à une époque où la chose n'était pas franchement d'actualité. Mais c'est aussi, et là Marcel Aymé s'en donne à cœur joie, une charge contre la justice, telle qu'elle est pratiquée, c'est à dire de petits arrangements avec la vérité, dont on n'a que faire, du moment que l'on tient un coupable ! Il est peut-être innocent ? La belle affaire ! Ce qui importe c'est d'avoir un gibier.



En outre, n'oublions pas que la guerre n'étant terminée que depuis 5 ans, il y avait encore bien des comptes à régler …. et avant que beaucoup de turpitudes ne soient gentiment enterrées, Marcel Aymé s'offre la joie d'épingler les misérables crapules de la rue Lauriston, exécuteurs des basses œuvres des ordures de gestapistes français.

Passent également à la moulinette, outre les deux procureurs, aussi sinistres individus l'un que l'autre, leurs dignes épouses, la gourde et la garce !

Nous sommes, comme chez Feydeau, au théâtre de boulevard, mais ici, ce ne sont pas les portes qui claquent, plutôt les gifles et presque les coups de feu !

Il n'y va pas avec le dos de la cuiller Marcel Aymé dans son panorama des turpitudes humaines et il nous offre un spectacle débridé et plutôt épicé !

Finalement, le seul honnête homme dans cette farce, c'est le condamné à mort, évidemment innocent, qui s'écrie :

-Ah, Procureur, vous prenez facilement votre parti d'une injustice

-Que voulez-vous, c'est le métier, répond l'intéressé.



Et le spectateur, de quitter son fauteuil avec un rire grinçant !
Commenter  J’apprécie          284
Uranus

Marcel AYME aborde dans cette oeuvre caustique et lucide la période de l'épuration à la fin de la seconde guerre mondiale. Le retournement de situation consacre le temps de l'hypocrisie, celui où la majorité de la population, qui a vécu sans trop d'états d'âme le temps de Vichy, se tait et approuve l'exécution des plus compromis. On sent bien l'aversion de l'auteur pour le parti communiste et les résistants de la dernière heure, dont il dénonce le rôle actif, quoique quelque peu erratique, dans cette épuration.

Les traits du caractère humain sont rendus dans toute leur grisaille anthracite, mais aussi dans ses moments de générosité apeurée : on sent le malaise monter au fur et à mesure que sont présentés les évènements, tant les circonstances sont embrouillées, tant on prend conscience qu'il est difficile de rester une honnête femme ou un honnête homme quand on circule à vue dans un labyrinthe de mauvais sentiments et de motivations embrumées par les circonstances. Avec toujours la peur en toile de fond. Bien sûr, quelques personnages sortent du lot, résistants ou collaborateurs déclarés, mais ils ne sont pas le commun des mortels : dans la médiocrité et la veulerie ordinaires, les vrais héros et les fieffés salauds ne sont pas légion.

C'est une oeuvre très forte que j'ai détestée adolescente : il faut avoir un peu vécu pour admettre pour véridique ce camaïeu de couleurs sombres : une jeune existence ne peut le faire sans abandonner son élan vital. J'avais donc gardé la conviction que l'auteur éprouvait une haine forcenée envers le genre humain. Je sais aujourd'hui qu'il ne dépeint que la réalité, avec une lueur d'indulgence, incarnée par professeur de mathématiques Watrin, qu'une nuit de bombardement où la mort l'épargna, transforma en vrai sage un peu lunaire le jour et uranien la nuit.
Commenter  J’apprécie          283
Les contes du chat perché

Retrouvons notre fraîcheur d'enfant à la relecture de ces histoires pleines de fantaisie, où les animaux de la maison ou de la ferme parlent, agissent comme des humains.Ils entourent les deux fillettes, Delphine et Marinette, héroïnes malicieuses et attachantes, toujours prêtes à commettre des bêtises et que les animaux aident, lorsqu'elles sont confrontées aux adultes. La pluie tombe quand le chat passe sa patte au-dessus de ses oreilles, le boeuf veut apprendre à lire, le loup veut faire oublier sa mauvaise réputation, le canard , passionné de géographie, part en voyage... Tout un monde farfelu et fourmillant d'humour s'offre à nous. Et même si le contexte de l'histoire peut sembler démodé, le plaisir est toujours là, intact.
Commenter  J’apprécie          287
Le passe-muraille

Marcel Aymé est un excellent novelliste. Je m'en était déjà rendu compte avec les superbes recueils que sont "Le nain" ou, plus connu, "Les contes du chat perché". Mais c'est sans doute avec les dix nouvelles qui composent celui-ci qu'il a donné le meilleur de lui-même. Fantastiques ou non, ayant en commun Montmartre ou l'occupation allemande pendant la seconde guerre mondiale, toutes sont magnifiquement ciselées et contées avec un humour élégant. Et comme en plus l'auteur sait, à l'occasion, introduire ce qu'il faut d'émotion, le résultat est proprement superbe et c'est un régal que de découvrir :



- "Les sabines" : une femme douée du don d'ubiquité se dédouble à l'envie et finit par devenir innombrable.

- "Le ticket" : l'état a décidé de rationner le temps de vie des inutiles (il est à noter que les écrivains sont du nombre !). Une carte de rationnement mensuelle leur est remise et à épuisement de leurs tickets ils disparaissent pour ne réapparaître qu'au 1er du mois suivant. Mais le marché noir sévit et l'on murmure que certains vivraient des mois de cent jours et plus.

- "Le percepteur d'épouses" et "L'huissier" qui mettent en scènes des représentants de ces deux professions si mal aimées.

- "Légende poldève" : critique acerbe et amusante des grenouilles de bénitier et de la société 'bien pensante".

- "Le décret" : pour en finir avec la guerre, le gouvernement décide de projeter la France une dizaine d'années dans le futur.

- "Le passe-muraille" : où l'on se rend compte que le film avec Bourvil n'est pas tout à fait fidèle.

-  "Les bottes de sept lieues" : jolie petite fable sur la misère et l'incroyable imaginaire dont font preuve les enfants

-  "Le proverbe" : un père découvre que la vie d'écolier n'est pas une sinécure.

-  "En attendant" : quelques Montmartrois font état des misères sans nombre que leur cause la guerre.
Commenter  J’apprécie          284
Les contes bleus du chat perché

Ce premier recueil de contes du chat perché publié comprend 6 contes publiés seuls dans les années 30 et deux contes publiés dans les années 40. Ils ont tous en commun les deux fillettes, Delphine et Marinette, vivant dans une ferme avec leurs parents un peu bougons, un peu terre-à-terre (et surtout adultes, ayant perdu toute l’imagination enfantine). L’imaginaire des deux fillettes se nourrit de leur relation particulière avec les animaux avec lesquels elles discutent souvent. La société française a beaucoup changé mais ces contes n’ont pas pris une ride, même si sans doute les enfants d’aujourd’hui ne vivent plus guère dans ce genre d’univers. C’est frais, intemporel, proche à la fois des contes de fée, certains contes sont plutôt des contes de ruse (dans presque tous il y a d’ailleurs une bonne part de ruse, soit d’un animal, soit des fillettes pour sauver un animal), d’autres sont plutôt des contes moraux (Le mouton en particulier), d’autres relèvent plus du fantastique. Mais il y a une remarquable unité de ton à hauteur d’enfants. En tout cas j’ai retrouvé avec plaisir ceux que j’avais déjà lu (en particulier Le loup, et apprécié d’en découvrir d’autres.

Le loup (1934) Seules à la ferme, Delphine et Marinette s'ennuient un peu. Le loup toque au carreau et supplie qu'on lui ouvre. Un joli croisement très réussi entre Le Petit Chaperon rouge, Les sept chevreaux et la fable du Loup et de l'agneau.

Le cerf et le chien (1938) Un cerf poursuivi par des chasseurs se réfugie à la ferme. Delphine et Marinette comptent bien le protéger ainsi que l'un des chiens qui le poursuit. Un conte très anti chasse !

L'éléphant (1935) Encore seules, Delphine et Marinette décident de jouer à l'arche de Noé avec les animaux de la ferme. Une petite poule blanche se retrouve à jouer le rôle de… l'éléphant. Pas le meilleur conte.

Le canard et la panthère (1937) Les parents songent à cuisiner le canard, Delphine et Marinette lui conseillent de partir en voyage, puisqu'il s’intéresse à la géographie. Il part donc faire le tour du monde, et en revient quelques mois plus tard, avec une ... panthère.

Le mauvais jars (1935) Alors qu'elles jouent à la balle dans le pré, Delphine et Marinette se heurtent à un jars très méchant et très impoli. Aidées par un âne très malin elles lui donnent une bonne leçon. Ce n’est pas mon conte préféré, je l’ai trouvé un peu longuet, mais la chute est excellente.

L'âne et le cheval (1937) Avant de s'endormir, Delphine et Marinette font le vœu de se transformer l’une en cheval blanc et l'autre en âne gris. Quand elles se réveillent le lendemain, leurs souhaits se sont réalisés.

Le mouton (1940) Un mouton, ami de Delphine et Marinette, est troqué à un soldat comme nouvelle monture. Conte moral très réussi.

Les cygnes (1939) Alors que leurs parents s'absentent pour la journée, Delphine et Marinette emmènent un petit chiot orphelin au rendez-vous des enfants perdus, pour que les orphelins aient une nouvelle famille. Mais les cygnes qui organisent les adoptions les prennent toutes deux pour des orphelines.
Commenter  J’apprécie          270
Uranus

Ce roman est comme une fenêtre ouverte sur une période de notre histoire de plus en plus difficile à saisir, les témoins de ce monde se faisant de plus en plus rares. Uranus permet de le restituer dans sa complexité en nous situant au-delà des idées toutes faites qui, irrésistiblement, en simplifient la lecture.

Comme les tragédies de Shakespeare, Uranus est à la fois tragique et comique. Comme la plupart d’entre elles, il se refuse à poser l’héroïsme en absolu, et il le situe dans le champ du relatif, du contingent et du prosaïque. Etre un héros, c’est se détruire, et les personnages, assommés par six ans de guerre, veulent tout simplement vivre. Il leur faut un courage confinant à l’inconscience, ou alors une certaine marginalité, pour affirmer leurs convictions, en particulier lorsqu’il s’agit de prendre la défense d’un individu soupçonné, à tort ou à raison, de collaboration avec l’ex-occupant.

Dans une petite ville de l’après-guerre à demi détruite par les bombardements, les personnages sont saisis dans un quotidien redevenu ordinaire, mais toujours aussi imprévisible et dangereux. Ces individus charmants, naïfs, souffrants, parfois odieux ou simplement imbéciles, sont pris dans des situations inextricables où le sens de l’héroïsme se perd. Archambaut, l’ingénieur, est l’homme honnête qui a réussi. Ex-supporter du Maréchal (comme tant d’autres), il doit affirmer son soutien aux nouvelles autorités pour échapper aux soupçons….. Un soir, il rencontre par hasard Maxime Loin, un collaborateur traqué, et le recueille : non pas par sympathie idéologique mais par esprit de charité. Ai-je bien fait ? s’interroge-t-il. La question n’est pas vraiment qu’Archambaut ait mal agi, mais qu’il a mis sa famille en danger.

Car les dénonciateurs sont légions dans ce monde où communistes et gaullistes multiplient les coups tordus pour conquérir le pouvoir. Si Jourdan, un communiste venu des classes supérieures, prône une ligne dure, c’est pour être accepté par ses camarades ouvriers. Il lui faut, comme il le dit crûment, « des morts à son actif ». Dénoncer Archambaut serait pour lui le meilleur moyen de prouver son allégeance à son parti. Gaigneux, qui quant à lui est un communiste ordinaire, défend les intérêts de sa classe et se soucie peu de politique. C’est lui qui finalement enverra Loin devant les juges. Découvert par hasard, Loin protège à son tour son protecteur, en déclarant à Gaigneux qu’il vient de pénétrer chez Archambaut, alors qu’il s’y était réfugié depuis plusieurs jours….. qui peut dire si Gaigneux n’aurait pas dénoncé ce dernier, connaissant la réalité ? Et le mensonge de Loin, qui évite sans doute la prison à Archambaut, ne fait-il pas de lui une sorte de héros ?

La plupart de ces personnages, dont les habitations ont été détruites, vivent chez les Archambaut. Ce qui fait que la politique est éclipsée par des quiproquos de vaudeville. Gaigneux se retrouve épris de la fille d’Archambaut, tout comme Loin, qui se retrouve finalement dans les bras de Madame Archambaut! Cette tonalité légère se retrouve chez Watrin, le professeur idéaliste, qui est lui aussi hébergé chez Archambaut. Chaque jour, Watrin admire la beauté du monde et affirme détenir la formule du bonheur, s’isolant ainsi (assez artificiellement) de ce milieu sordide. Mais le dernier bombardement avait détruit sa maison et tué sa femme dans les bras de son amant, de telle sorte qu’il souffre d’anxiété et d’insomnie. Chaque nuit, il sent la présence d’une force obscure autour de l’existence humaine – Uranus.

Même si la politique est discréditée, certaines valeurs morales subsistent dans le roman : le pétainisme d’Archambaut et les opinions nazies de Maxime Loin n’ont aucune crédibilité. Monglat, collaborateur enrichi, est un personnage faustien qui paie le prix de son pacte avec le Mal nazi. Plus rien ne compte désormais pour lui que de convertir son magot mal acquis en valeurs sûres, afin de faire oublier son triste passé. Il fait arrêter puis abattre Léopold, le cafetier alcoolique et poète, qui sous l’emprise de l’ivresse l’a dénoncé en place publique.

Une autre valeur subsistante est la tradition littéraire française, avec la tragédie racinienne. Andromaque revient en leitmotiv, soulignant la rémanence de la culture traditionnelle en dépit des déstabilisations apportées par la guerre. Les élèves doivent utiliser les cafés de la ville pour travailler, et c’est dans celui de Léopold que se déroulent les cours de français. Fasciné par le dramaturge, le cafetier se met à composer des vers de mirliton. C’est une preuve comique de la vitalité de cette culture. Mais Andromaque reflète aussi le dilemme qui s’impose à tous les personnages : celui de la conscience morale. L’héroïne cède finalement au chantage de Pyrrhus et l’épouse afin de sauver son fils Astyanax, sacrifiant sa fidélité à Hector, son défunt époux. Les personnages d’Uranus sont dans une situation analogue : pour survivre, ils sont poussés à trahir et à se trahir eux-mêmes. Ainsi affirment-ils avoir toujours été Gaullistes, allant jusqu’à rester immobiles devant le lynchage d’un soi-disant traître par les FFI. Cette passivité est dénoncée comme veule et indigne. Mais en même temps, un autre message se superpose : tout le monde n’a pas l’étoffe des héros, et tout le monde ne peut pas se le permettre….

En somme, le roman présente des personnages ordinaires égarés ou aveugles, qui doivent se situer dans le champ de force d’idéologies émergentes (communisme, gaullisme) contre lesquelles ils ne peuvent rien. Ils subissent en même temps la pression d’idéologies périmées mais persistantes (pétainisme et même, pour Loin, nazisme.) Et surtout, ils ont leur propre vie à vivre. Le symbole le plus pertinent et le plus drôle (car ce roman pétille d’humour, en dépit d’une tonalité argumentative parfois assez lourde) en est sans doute le passage où Archambaut saisit le costume qu’il va porter pour la cérémonie marquant le retour des prisonniers de guerre. Ce n’est autre celui qu’il avait revêtu pour la visite du Maréchal. Que voulez-vous, il faut bien retourner sa veste !

Le seul « héros » du livre, finalement, c’est l’auteur lui-même. En 1948, Marcel Aymé a mis en cause un mythe gaulliste qui était en train de supplanter le pétainisme. Il ne s’agit pas d’une dénonciation du premier, ni d’une réhabilitation du second. Comme le suggère le nom du pro-nazi « Loin », le roman met à distance un « Gaullisme » (d’ailleurs concurrencé par un « Stalinisme ») officiel qui dissimule la complexité de l’héroïsme. Il critique cette langue de bois qui accepte toute délation sans la vérifier par la preuve parce qu’elle sert un projet politique, celle qui refuse de considérer que derrière un collaborateur, même avéré, il y a un être humain qu’il faut respecter. Tout ceci au profit d’axiome manichéen : « nous sommes tous Gaullistes ». Et, hypocrisie suprême, cet axiome procède à une relecture simpliste du passé trouble de l’Occupation : «nous l’avons tous toujours été». Un esprit fanatique aussi irrationnel et destructeur que l’ « Uranus » qui a rendu Watrin insomniaque.

Uranus nous aide à comprendre une période déjà lointaine, et à la perpétuer dans la mémoire collective. En dénonçant ce mythe d’un Gaullisme universel, le roman préfigure même l’immense travail d’interprétation de cette époque qui a été effectué par les historiens, les sociologues, et même les juges dans la seconde partie du vingtième siècle. Et comment considérer ce livre comme périmé alors qu’aujourd’hui, des idéologies politiques et religieuses extrémistes reviennent en force, menaçant de suspendre la liberté d’expression, et que nous peinons à nous positionner efficacement par rapport à elles en tant que citoyens. Il nous faut respecter, et surtout faire respecter, l’idée qu’il existe des croyances et non une seule, un ensemble de situations possibles et non une seule. Nous devons défendre les notions de conscience morale et de tolérance, si nous ne voulons pas nous retrouver un jour dans une situation comparable à celle décrite dans Uranus.

Commenter  J’apprécie          271
Le Vaurien

Pierre et Bernard se rencontrent par hasard dans une rue de Paris et découvrent qu'ils ont un point commun : ils ont tous les deux vingt-cinq ans et se sont brouillés avec leur père le même jour. Ils se lient d'amitié et Pierre aide Bernard à s'installer à Paris. Bien vite, ils logent dans le même immeuble et fréquentent le même groupe d'amis. Mais les deux garçons vont se fâcher et rester en froid. Un hasard va amener Bernard à travailler pour le père de Pierre, un homme d'affaire véreux, qui va le prendre en affection. Quant à Pierre, il va rencontrer le père de Bernard, un politicien tout juste élu député, dans un cabaret parisien. Drôle de chassé-croisé qui peut nous amener à nous demander s'il n'est pas préférable de se choisir un père. Mais l'existence de Bernard va brusquement se compliquer sur tous les fronts.



Le roman traite des rapports entre père et fils. Un père rejette un fils qu'il trouve trop indolent et un fils renie un père qui s'est spécialisé dans l'escroquerie. L'amour filial ne consisterait-il pas plutôt à accepter son parent tel qu'il est, avec indulgence ? Les personnages secondaires sont attachants : on croise un noctambule souffreteux, un loufoque qui combine poésie et statistique, une gentille gourgandine et un chien. Le fantastique fait ses premiers pas dans ce roman et laisse le lecteur en plein doute. D'où vient la confusion de Bernard? S'agit-il d'événements surnaturels? Est-ce lié au vertige de la folie ou au délire de la fièvre ?

On retrouve dans ce roman tout le talent de Marcel Aymé : du réalisme mâtiné de fantastique, de l'ironie, de la fantaisie, et la démonstration de l'importance d'une éthique basée sur le bon sens et l'humilité.

Commenter  J’apprécie          260




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Listes avec des livres de cet auteur
Lecteurs de Marcel Aymé Voir plus

Quiz Voir plus

Marcel Aymé

En quelle année est né Marcel Aymé?

1880
1897
1902
1910

10 questions
60 lecteurs ont répondu
Thème : Marcel AyméCréer un quiz sur cet auteur

{* *}