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Critiques de Milena Agus (659)
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Mon voisin

Sous le soleil écrasant de Cagliari, elle fixe sans retenue le beau visage de son voisin lorsqu'elle le croise dans la rue. Mais le voisin ne la remarque même pas. le reste du temps, « Elle a[...] l'intention de consacrer son énergie à une bien meilleure idée de suicide, quelque chose que tout le monde prendrait pour un accident. » Mais un jour, le fils du voisin vient lui rendre visite et elle lui prépare un œuf à la coque. Un petit plaisir simple, comme une renaissance…

C'est l'Ultra moderne solitude chantée par Alain Souchon, celle d'une femme quittée par son mari et désemparée face à son petit garçon handicapé qui ne parle pas, celle de deux voisins désemparés face à leurs enfants, séparés par un mur couvert de tessons de verre et envahi par la végétation. Une belle métaphore de leurs relations, si délicatement décrite. Des mots, des regards, comme une caresse… Miléna Agus a de la tendresse pour ses personnages, elle ne force jamais le trait mais va à l'essentiel, capte les fêlures et la fragilité des êtres, la douceur des échanges, les rires dans la torpeur de l'été, lorsque tout vacille dans la vie de quatre êtres en quête d'amour.

Une nouvelle sombre et joyeuse, sensuelle et morbide qui laisse un souvenir vivifiant.





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Prends garde

Milena Agus,romancière,et Luciana Castellina,essayiste et figure de la gauche italienne,raconte tour à tour un drame réellement survenu le 7 Mars 1946 à Adriana,dans la région des Pouilles en Italie,dans un roman publié tête-bêche.

Agus raconte l'histoire des sœurs Porro se glissant dans la voix de leur unique amie(?)qui les fréquente.Les sœurs Porro,riches propriétaires terriens vivent cachées dans leur "palazzo" au coeur de la ville d'Adriana.Alors que dehors,au lendemain de la guerre,le chômage et la misère atteignent des niveaux désespérants,les sœurs y restent indifférentes,n'entendent rien de la politique,ni de la famine.Le 7 mars 1946,sur la place centrale d'Adriana se tient un meeting communiste d'ouvriers.La foule rassemblée attend le chef syndical.Un coup de feu qui part du toit du Palazzo Porro va déclencher le drame,l'irréparable.

Luciana Castellina,elle,parcoure l'histoire de ces années-là,en insérant la mort dramatique des sœurs Porro dans le contexte de ce qu'il faudrait appeler "la guerre civile dans Les Pouilles,1943-1948".Une histoire quasiment inconnue dans le reste de l'Italie.

Le roman et l'histoire sont bouleversantes,d'autant plus que le drame des sœurs Porro n'était pas unique de son temps:"les massacres dans les Pouilles étaient aussi naturels que les grosses averses,mais juste un peu plus fréquent".Mais celle des sœurs Porro apparut comme la plus terrible,la plus incompréhensible.Ce mouvement de folie collective me rappelle le livre D'Elias Canetti,"Masse et Puissance",où il pose de multiples questions:Poussée d'irrationnel?Explosion d'un fond primitif mal avoué?Resurgence d'une panique collective jamais analysé?.C'est probablement tout ca à la fois.

J'ai d'abord lu le roman,l'histoire ensuite.Je ne sais pas si c'est la meilleure façon de le lire,mais en tout cas c'est un livre trés fort,trés réussi.
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Quand le requin dort

Je découvre Milena Agus avec son premier roman, écrit en 2005.

L’action se déroule en Sardaigne. La narratrice est une jeune lycéenne à côté de ses pompes, comme toute sa famille. Chez les Sevilla-Mendoza, Ils courent tous après quelque chose désespérément et se réfugient dans le ventre du requin. La mère a peur de tout, elle s’est enfuie de la vie comme elle se sauvait du cinéma quand les scènes étaient trop dures ». Elle peint là-haut dans le jardin qu’elle a aménagé sur le toit de l’immeuble. Le père est beau, drôle, séducteur, rassure la mère tout en rêvant de travailler dans l’humanitaire en Amérique du Sud. Il se fait la malle souvent. La belle tante pulpeuse et rigolote collectionne les amants mais ne réussit à en retenir aucun malgré tous ses efforts croquignolets. Le frère adolescent traîne un mal être comme la mère et se réfugie dans la musique. La grand-mère cerne bien ce petit monde avec un humour caustique. Elle est la veuve d’un survivant des camps. Quant à la jeune narratrice, elle se réfugie chez un personnage terrible et plus vieux qu’elle qu’on ne voit pas mais qui ressemble bougrement à un requin baleine.

J’ai aimé surtout le début du roman. L’autrice a le don de portraiturer des personnages haut-en-couleur et fragiles en quelques lignes. Le drame arrive sans prévenir comme dans la vie au milieu du quotidien. J’ai sauté les pages sado-maso de plus en plus épouvantables au fil du récit. Elles n’apportent pas grand-chose et ont un côté fanfaron assez horripilant. Et puis le récit s’essouffle et tourne en rond comme un requin dans un aquarium.



En bref, c’est pas mal mais j’attendrai un peu avant de lire un autre roman de Milena Agus.

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Mal de pierres

Comme quoi il n’est pas nécessaire d’écrire 1000 pages pour offrir un beau roman.



Quand j’ai tenu pour la 1e fois Mal de pierres, ma réaction a été l’étonnement, suivie de l’inévitable déception. Les résumés que j’avais lus m’orientaient vers un pavé bien fourni, m’imaginant une vraie saga italienne sous le soleil sarde. 150 pages sont, comme vous vous en doutez, un peu limitées pour développeur l’aspect roman fleuve/saga romanesque. Soit.



Le deuil fait, je me suis donc plongée le temps d’une après-midi dans ce récit (un brin sceptique pour être honnête), pour en ressortir conquise et apaisée. Rien d’extraordinaire ne s'y passe pourtant mais que voulez-vous, la magie a opéré.



La narratrice nous raconte sa grand-mère. Trop belle et sensuelle pour l’époque, trop exaltée (voire foldingue, cela dépend des points de vue) et romantique pour les bien-pensants et les grenouilles de bénitier du village, aspirant au grand amour et non à l’étroitesse d’un mariage sans passion, cette femme fait fuir tous ses prétendants, effrayés par tant de mystère et de fougue (leur écrire des lettres enflammées n’arrangent rien à son affaire). Nous sommes en Sardaigne dans les années 30 et être vieille fille à presque 30 ans fait jaser le village. Désespérés, les arrières grands-parents « vendent » leur fille à un veuf de 40 ans, réfugié chez eux durant les bombardements américains sur Cagliari, la capitale sarde. En reconnaissance de leur bonté, l’homme accepte de prendre pour épouse la fille devenue encombrante. Si elle ne veut pas de lui et le rejette, l’homme s’en accommodera car les filles de passe remplissent parfaitement leur besogne en satisfaisant monsieur comme un mâle doit l’être. La grand-mère de la narratrice finit par accepter son sort, résignée à ne jamais connaître le grand amour, celui qui exalte et rend fou. Folle est l’est déjà à sa façon. Et puisqu’il faut bien assouvir aussi certains besoins physiques, elle se résigne à remplir avec sensualité et imagination la libido débridée de monsieur : elle sera sa catin, se soumettant avec docilité aux scenarii coquins les plus tendancieux. En dépit du manque d’amour, le besoin de donner la vie détruit cette femme qui ne peut enfanter à cause de son mal de pierre comme on dit. Pour conjurer la malédiction, elle part sur le continent, elle l’insulaire, pour une cure destinée à soigner ce mal qui la ronge. Elle y rencontrera l’Amour sous les traits du Rescapé, figure charismatique, sensuel et passionné, érudit et mélomane qui envoûte notre Sarde à la vie étriquée. Entre eux, une évidence qui scellera leur destin. Revenue de cure, la grand-mère tombera enceinte et donnera naissance à son unique enfant, le père de notre narratrice.



Quelle joie de tenir entre les mains un roman si simple en apparence mais qui se révèle au grand jour d’une belle complexité ! Car nul besoin de fioritures et autres salamalecs pour sortir un texte dont la justesse de ton et la fluidité de l’écriture servent à merveille cette héroïne tragique. Seul le talent suffit et Milena Agus, injustement méconnue en Italie, en a à revendre. Et quel personnage que celui de la grand-mère : sensuelle et libre, une femme faite pour l’amour, née à la mauvaise époque, personnage sombre sous le soleil implacable de la Sardaigne. Comme si tant de lumière couvait forcément en son sein les plus tragiques des destins. Comme un pied de nez. Ce serait péché que de passer à côté d’un petit bijou de lecture, surtout quand il se lit en une après-midi. Et si vous passiez à côté du livre, le film avec Marion Cotillard sera bientôt sur vos écrans. Donc pas d’excuses les amis !
Lien : http://www.livreetcompagnie...
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Mal de pierres

Cette femme n'écrit pas avec de l'encre, mais avec du sang et un coeur palpitant, c'est une alchimiste, qui n'a pas peur de présenter à la lumière du réel ses mélanges aux couleurs surprenantes d'innocence, d'humour audacieux et de zônes sombres de l'âme , pour nous offrir l'histoire d'une vie vibrante de vie, comme on offrirait une pleine brassée de fleurs sauvages à un être aimé ...! Quelle belle surprise !
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Mon voisin

" Le voisin, elle l'avait rencontré un jour alors qu'avec son petit elle rentrait de promenade. Il était très beau. Et ensuite, toujours à la même heure. Elle arrêtait la poussette et le fixait sans retenue. Mais lui ne les voyait pas, même quand la rue était vide.



Ainsi commence Mon voisin. Une novella de 50 pages à peine, servie par une plume chaleureuse et pleine d'humour qui nous fait voyager dans une Italie de carte postale - sur les côtes.

Au départ, j'ai pensé que ce serait une histoire comme "La lettre d'une inconnue" de Stefan Zweig, jusqu'à ce qu'apparaissent les envies suicidaires de la jeune femme. Envies qu'on ne prend pas tellement au sérieux à cause du ton détaché de l'auteur.



Mais derrière l'écriture assez légère de Milena Agus, l'auteur cache des douleurs très modernes de notre époque. Celles de la solitude, de la perte de confiance après une séparation, des bouleversements que peuvent amener une naissance dans un couple, de la peur de l'inconnu après la déception, de la féminité qu'on ne sait plus exprimer et qu'on tente de ré-apprivoiser lorsqu'on veut plaire à nouveau.



Et bien sûr, l'histoire du voisin, c'est l'histoire de beaucoup de femmes (et d'hommes) qui s'empêchent vivre pas seulement par peur de l'inconnu, mais parce qu'ils s'attendent à trop de bonheur et oublient de saisir les petits moments anodins du quotidien qui nous manquent tant lorsqu'ils disparaissent.



Un petit moment de lecture drôle et plein de tendresse.

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Quand le requin dort

Quand le requin dort, ses dents s’entrouvrent et la mer et le ciel sont calmes…Métaphore de l’espoir d’une fuite toujours possible vers un horizon meilleur.



La tendre voix d’une jeune adolescente raconte par petites touches son originale famille faite de bric et de broc, de tendresse et de difficultés : un père toujours absent pour engagements humanitaires, une mère artiste qui peu à peu se dessèche dans l'attente, un frère accroché à son piano, une tante volage en mal d’amour et en éternelle déception sentimentale.



Et puis il y a Lui, l'amant, sans tendresse ni attentions avec qui elle vit une aventure juste sensuelle, en sexualité inavouable.



C’est une triste mais envoûtante petite musique que Milena Agus nous joue ici, fantasque, provocante, enfantine, cruelle, et au final extrêmement poignante. Sa simplicité de ton s’apparente au conte, avec des personnages savoureux et décalés. Il flotte dans ces courts chapitres de vie beaucoup de tendresse et de poésie, un parler franc candide pour s’autoriser le langage le plus scabreux et une philosophie heureuse et positive.



J’ai lu ce livre en audio et la douceur de phrasé de Audrey d’Hulstère fait des merveilles pour cet univers sensuel. C’est un livre très reposant à écouter, décoré de quelques touches d’humour, qui dépayse, dans cette Sardaigne entourée de mer et de ciel. Un livre à la tonalité très italienne par cette présence en monolithe de la famille.



Milena Agus nous entraîne dans la quête de l'Amour et du bonheur et cela fait un bien fou…

Il y a toujours un moment où le requin dort, il faut juste saisir sa chance.

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Terres promises

Terres promises (2017) raconte avec brio les rêves, les espoirs brisés ou non d'une famille sarde sur trois générations, en trois parties (l'après-guerre, les années 60, aujourd'hui) sur trois espaces différents (le continent, l'île, l'Amérique).

La terre promise échappe aux personnages dès qu'ils pensent pouvoir la saisir. Ils sont entravés par l' Histoire, les contraintes collectives, les conventions sociales ou simplement leur personnalité. Certains se résignent. D'autres, plus chanceux, trouvent le courage de faire ce qu'ils veulent réellement dans la vie. Mais ils sont souvent déçus. Ils s'adaptent tant bien que mal à la réalité et reportent sur la génération suivante le soin de réaliser leurs rêves brisés.





Résumé (avec des spoilers) :

Ester a attendu son fiancé pendant les cinq années de guerre espérant toujours qu'il l'éloignerait du morne village sarde loin de sa vieille mère épuisée par le travail de la terre et qui n'a jamais ressenti la joie de vivre de toute sa vie. Mais, lorsqu'elle revoit Raffaele, elle le reconnaît à peine. Celui-ci a connu la guerre et les camps. de leur amour il ne reste plus grand-chose. Lui rêve de voyage, d'océan, de New York et de jazz et puis il en aime une autre. Mais il a promis. Il est le seul qui parle au frère d'Ester Felice qui a été fait prisonnier par les Anglais et qui voudrait émigrer chez Les Russes. Raffaele et Ester se marient, émigrent sur le continent industrialisé, à Gênes d'abord puis à Milan ensuite. Mais Ester n'est pas heureuse. Elle a le mal du pays. Ils ont une fille Felicita, la bien nommée, la plus libérée et la plus optimiste des femmes de sa famille. En Sardaigne, elle sera vue comme une étrangère, mais c'est elle la rêveuse, débordante d'imagination, qui emmènera sa grand-mère tremper ses pieds dans la mer. Et puis elle aura un fils musicien qui ira à New-York...



J'ai bien aimé ce livre court mais dense et chaleureux, plein de compassion pour les personnages.

Et de petits détails sur cette Sardaigne si proche et si méconnue.
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La comtesse de Ricotta



Je retrouve toujours avec plaisir l’univers de Milena Agus. Elle raconte de roman en nouvelle, depuis sa Sardaigne méconnue et légèrement décalée des histoires de famille plutôt grises avec des percées de couleurs vives. Les personnages féminins et aussi les enfants ont tous un petit grain qui les rend bigrement attachants. Ils sont sur un fil, sauvés par la fantaisie et l’espérance. Et cette Comtesse de Ricotta (2009) ne fait pas exception.

Trois sœurs, descendantes d’aristocrates, occupent trois appartements dans l’ancien palais familial en décrépitude à Cagliari. Il a fallu céder les autres morceau par morceau. Elles tentent toutes les trois de s’adapter à cette dure réalité qui s’impose sans renoncer à leur rêves. Noémie l’aînée, glaciale magistrate, occupe le dernier étage et souhaiterait racheter l’intégralité du palais, appartement par appartement. Maddalena la cadette rêve d’enfants plein la maison. Elle vit à l’étage noble avec son Salvatore. Ils s’échinent à essayer de procréer et élèvent un chien. La troisième, une enseignante chahutée est surnommée La comtesse de Ricotta car la ricotta est un fromage de brebis très doux qui a du mal à tenir le coup quand on le met dans un moule. Elle essaie de bien faire mais elle rate à chaque fois. Elle a un petit garçon Carlino qui semble retardé et qui n’a pas de copains. Arrivent une grossesse et deux hommes singuliers. Le premier Elias est le neveu de l’antique nounou récemment revenue au palais après en avoir été chassée. C’est un beau berger insaisissable, intéressé par l’architecture du palais et la porcelaine. Le second est un voisin, locataire fraîchement plaqué par sa femme violoniste. Il s’intéresse au petit Carlino. Conte de fée ? Hum...
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Battement d'ailes

Avec battement d'ailes ,je découvre l'écriture de Milena Agus et avec elle la Sardaigne.Si je le pouvais , je prendrais tout de suite un billet d'avion direction Cagliari ou plus exactement direction cette demeure en bordure de mer où l'on n' accède qu'à pied ou en calèche.Certes les conditions de vie y sont difficiles mais pour ceux qui y habitent rien ne vaut "ces lopins de terre arrachés au maquis,qu'on cultive entre leurs murets de pierre sèche "où" le printemps resplendit du blanc des fleurs des amandiers,l'été du rouge des tomateset l'hiver de l'éclat des citrons"

.

L'histoire nous est contée par une adolescente de 14 ans ;elle nous décrit ceux qu'elle aime et nous parle surtout de son grand-père, de Madame femme seule dans ce pays où il se doit qu'une femme soit mariée ,vivant comme elle peut de sa maison d'hôtes , de ses cultures mais refusant énergiquement de vendre sa terre aux promoteurs qui tels des requins la harcèlent.

En arrière fond il y a son Papa , parti brusquement , les créanciers aux basques et dont personne n'a de nouvelles, sa Maman restée depuis clouée dans son fauteuil .

Et Madame, son repère ,son idole qu'elle aime passionément qu'elle soutient, qu'elle protège du haut de ses jeunes années .Ne croyez surtout pas que ce texte soit triste,mélancolique ,certainement pas c'est tout le contraire ; laissez-vous charmée par Madame et ses amis ,écoutez le bruit de la mer et des vagues ,chut là vous y êtes......
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Prends garde

Ce livre original comprend deux parties.

La moitié est un roman écrit par Milena Agus , à partir d'un fait divers dans la petite ville d'Andria. Quatre femmes, les soeurs Porro, vivent dans une somptueuse demeure, d'où elles ne sortent pratiquement jamais. Elles sont riches, très riches, mais "comme il faut", elles ont de bonnes manières, ne sont pas dépensières," il faut préserver le patrimoine", suivent les règles de leur classe sociale et font des dons pour les pauvres.

Et des pauvres, dans les Pouilles, à la fin de la seconde guerre mondiale, il n'y a pratiquement que ça! Des pauvres sans avenir, qui manifestent un soir sur la place devant la demeure des soeurs Porro. Un coup de feu éclate et l'inimaginable arrive. "C'était terrible, mais ça n'a pas duré plus d'une heure".



L'autre moitié du livre, écrite par Luciana Castellani décrit le fait divers du 7 mars 1946 à Andria en moins de sept pages. Elle développe par la suite, la situation des Pouilles à la fin de la guerre, " à l'époque du débarquement des alliés en Italie du Sud et de la dissolution du partie fasciste", quand des réfugiés affamés déferlent dans la région avec la faim qui se transforme en violence. "L'histoire de la région resta à part. Ici, la paix n'était pas arrivée, ici se poursuivait une guerre civile plus cruelle que la précédente".



Ce livre , très bien écrit, a le mérite de faire connaître la situation de cette région d'Italie à la fin de la seconde guerre.

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Sens dessus dessous

Il y a de l'amour à tous les étages chez Milena Agus : pour soigner les misères de l'existence elle a soudain, un remède miracle :

«  Devant la mer, tout paraît plus léger, chaque problème arrive avec les vagues qui le remportent en se retirant . » 

Tout en haut chez les Johnson, comme tout en bas chez la modeste Anna et sa fille, un peu farouche, il est vrai.

Monsieur Johnson, soixante- dix , ans , violoniste célèbre vit dans le plus bel appartement du dessus , avec vue sur la mer et sur le port.



De loin, il porte beau mais de près, lacets défaits, vestes en loques, poches déchirées , il parait vraiment négligé et ne sent pas toujours la rose...



Ces détails font pourtant flancher la belle Anna , facilement amoureuse, du fond de son entresol obscur, privé de lumière .Anna gracieuse et légère malgré ses douleurs aux jambes et son poids ...



Elle tombera amoureuse comme dans les contes de fées, deviendra une fois , chaleureuse cuisinière, une autre femme de ménage ou encore couturière et chanteuse pour son beau musicien : Ah, avec la musique l'âme s'envole », affirme Anna...

Au sujet d'Alice, mère cinglée et père suicidé : elle tient une place discrète au sein de ce monde cul par dessus tête, cette bande d'énergumènes , peu conformistes , malgré les blessures familiales et de coeur, ce livre léger comme une plume nous emporte , aiguillonnés par le petit oeil curieux de l'héroïne, pétri de bienveillance ..



Grain de folie , douceur , poésie , personnages si particuliers, non lisses avec leurs secrets , leurs désirs Cagliari la blanche et bleu outremer , ses odeurs et ses couleurs , son ambiance , l'auteure , dotée d'un ton faussement naïf réussit encore une fois à nous faire vivre une histoire émouvante et sensible .

Le charme opère , au coeur de la Sardaigne , teinté de mélancolie ,d'un brin de folie frondeuse , d'une grande humanité !

Une chronique faite des petits riens de l'existence , un tendre éloge de l'amitié et de la drôlerie !

Un roman fantasque qui fait du bien !

Il m’a fait penser à «  L’Immeuble Yacoubian » version sarde!

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Mal de pierres

Je remercie mes amies AnnaCan, Bruidelo et Sachka pour avoir insisté : ce roman de 2006 m’a beaucoup plu. La narratrice nous conte sa grand-mère, dont on ne saura pas le nom. Le portrait nébuleux au début se dévoile peu à peu, subrepticement, grâce à d’autres regards familiaux jusqu’à la révélation finale qui vous arrachera un sourire doux-amer. Un bel hommage anticonformiste et plein de fantaisie à nos secrètes grands-mères mais aussi à la Sardaigne sauvage et mystérieuse.

La narratrice trace un premier portrait plein de caractère de sa grand-mère, pendant la deuxième guerre mondiale. A trente ans elle est encore célibataire. Et pourtant qu’est-ce qu’elle est belle avec ses longs cheveux noirs et ses yeux immenses ! Belle, passionnée, exaltée. Elle rêve d’Amour, d’une passion qui illuminerait son existence bien morne. Serait-ce ses calculs rénaux qui feraient fuir les prétendants ? Serait-elle dérangée comme on le prétend au village ? Un démon comme l’appelle sa propre mère qui a mis la main sur ses petits carnets plein de « cochonneries » ? Pauvre fille ! Obligée de se caser avec un réfugié sensuel et taciturne qu’elle n’aime pas. Elle lui offrira finalement des « prestations », par souci d’économie, comme à la maison close à laquelle il était demeuré fidèle. Mais elle n’a toujours pas d’enfant. Alors à l’automne 1950, on l’envoie en cure sur le continent pour soigner ce fichu Mal de pierres. Et là, elle rencontre le Rescapé, L’Amour de sa vie…

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Une saison douce

Je l’avoue : j’attendais avec impatience de lire un nouveau livre de Milena Agus – le souvenir de « Mal de pierres » ayant été un vrai coup de foudre littéraire.

Je l’avoue également : je suis toujours perplexe en ayant refermé ce livre depuis quelques jours.



Le thème avait pourtant tout pour me plaire : des migrants fraichement débarqués dans un petit village sarde, tout d’abord regardés avec beaucoup de défiance, puis gagnant peu à peu la confiance des villageois qui comprennent enfin l’intérêt de faire revivre le village avec du sang neuf – fût-il lointain. Tout démarre plutôt mal, puisque les migrants rêvent de Londres ou de Paris, et que pour eux ce petit bout de terre sarde n’a rien d’un paradis.

Est-ce l’emploi du « nous », censé porter la voix des femmes du village, celles qui au départ se répandent en commérages sur cet afflux de migrants, mais peu à peu se laissent gagner par leur enthousiasme ? Ce livre est pétri de bons sentiments et on suit bien volontiers ces personnages féminins, tour à tour agaçantes, irritantes, un brin bornées, et petit à petit curieuses, voire généreuses. Mais quelque chose ne prend pas pour moi et je reste en dehors du récit.



Trop de bons sentiments peut-être ? La vision idyllique d’un village s’emparant de ses migrants, jusqu’à regretter leur départ final pour les capitales européennes ne m’a pas convaincue, et j’en suis bien navrée. On voudrait y croire. Mais ce conte contemporain distille une utopie à laquelle je n’ai pas réussie à croire, la perplexité l’emportant sur l’adhésion : dommage, parce que Milena Agus est une très belle plume italienne, sans aucun doute.

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La comtesse de Ricotta

« Inutile de vous inquiéter. Je suis malheureux avec bonheur. Mais seul ! »



J’aime beaucoup l’écriture de Milena Agus. Découverte avec Mal de pierres, j’avais été surprise par sa manière très particulière de nous faire bondir dans l’histoire avec simplement quelques mots. J’ai fait des plongées, aussi soudaines que surprenantes, en compagnie des protagonistes dans leurs joies ou peines, et j'apprécie avec quelle facilité elle se livre à cet exercice. Milena Agus, c’est la Sardaigne sous toutes ses formes, un amour pour une terre et ses habitants et le souvenir de splendeurs passées (les descriptions des lieux, des paysages, des gens, de la vaisselle…). Mais surtout, Milena Agus, c’est l’amour tout court. « Parce que faire l’amour avec la personne qu’on aime, on a beau dire, c’est magnifique. » Milena Agus présente des personnages en mal d’amour, en mal d’enfant dans ce roman, avec beaucoup de sensibilité.



« Personne n’aime pour de vrai, et quand on aime ce n’est pas avec passion, c’est toujours pour une raison. »

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Mal de pierres

Je ne sais pas ce qui m'a poussé à choisir en librairie ce roman totalement inconnu pour moi à l'époque, je crois que la quatrième de couverture m'avait plu. Je l'ai commencé doucement, en m'attachant au récit, fluide, coulant sinueusement, puis peu à peu j'ai été accroché, au point de le lire d'une traite, moi qui est un zappeur de la lecture.

J'ai pris ce texte en pleine face: j'ai eu l'impression de flotter dans l'air, d'être en lévitation, comme envouté. Miléna Agus, que je découvrais, me donnais l'impression d'une romancière très propre, comme les romancières anglaises du 19e siècle: une femme raconte sa vie, ses problèmes de santé, son Italie, entre nord et sud, bref tout semble assez classique. Et puis tout d'un coup, au détour d'une phrase, un mot, une allusion, il faut même relire pour en être sûr: mais ce roman est plein de perversité! De succulentes drôleries et d'incroyables pensées!

J'ai vraiment été surpris par le style, rapide et énergique mais lent pour décrire, amusant et vivifiant mais sombre et triste quand il sagit d'analyser sa condition de femme. C'est un roman où je me suis retrouvé, et pourtant je ne suis pas femme, où j'ai pu comprendre l'adultère et son ressentiment.

Un roman que je conseillerai à tout ceux qui veulent découvrir une histoire particulière, osée mais merveilleuse et magnifiquement racontée.
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Mal de pierres

Ce très court roman est une très jolie réussite. Il commence avec l’histoire de la grand-mère de la narratrice, c’est le fil rouge du récit. Cependant la narratrice, seule confidente de la grand-mère, partie de l’histoire de trois, voire quatre générations avec les arrière-grands-parents, se retrouve dans une véritable quête de ses origines, à la recherche de ce qui se cache sous le vernis des certitudes transmises. D’autres en auraient fait un pavé, une saga familiale, un long roman sur la transmission intergénérationnelle, la quête des origines. Mais Milena Agus propose au lecteur un récit minimaliste au style délicat, parfois un brin mélancolique ou poétique, sur un rythme vif, avec des chapitres réduits parfois à à peine plus d’une page. La matière est riche, mais souvent subtilement suggérée, avec juste ce qu’il faut d’éléments historiques, de descriptions et de petites phrases en sarde pour instaurer l’atmosphère adéquate. Quant à la fin du roman, elle est surprenante. Un petit bijou de concision.
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Mon voisin

Ouvrir un livre de Milena Agus, c'est faire jaillir le soleil de la Sardaigne des pages qui se tournent, c'est être inondé de sa lumière et sentir la caresse de sa chaleur sur la peau ; c'est froisser quelques feuilles de thym ou de menthe, de sarriette ou de romarin et s'imprégner des senteurs comme une invitation au voyage pour un ailleurs ; c'est s'extasier des couleurs comme du rouge flamboyant des géraniums et en admirer le chatoiement.



C'est une ambiance qui se crée, qui transporte aussitôt dans une ruelle ombragée, un jour d'été trop suffocant, sur une plage face à une eau transparente et limpide à la recherche d'un peu de la fraîcheur du large.



Parfois, cela peut être l'évocation d'un jardin rendu à son élan sauvage, d'où, au milieu d'une végétation laissée à sa liberté, surgissent des personnages qui vont bousculer la vie d'autres qui ne faisaient que contempler ce coin de nature.





"Elle" n'attend plus rien de l'existence, presque décidée à la quitter. Son fils, enfermé dans le "silence de vie" de sa mère, ne parle, ni ne marche : à quoi bon puisque ce serait pour aller nulle part, ce serait pour ne pas trouver les mots qui pourraient donner, à cette mère qui vit en recluse, l'envie de vivre quelques jours encore...

Et puis, jailli de ce jardin d'herbes folles, de cet enchevêtrement sauvage, un petit garçon inconnu, à l'opposé du calme et de la retenue de cette petite famille murée dans le refus de vivre, et à sa suite son père - le voisin - qui vont bouleverser par leurs exigences, leurs questionnements l'existence de ces deux êtres qui n'habitent plus que le silence et les souvenirs.

Dès lors, au fil des jours, il devient facile d'échanger quelques mots avec l'étranger qui tente de travailler, il devient facile de "voir" le monde, comme une évidence qui était jusque là niée.



Le jardin comme un havre d'où surgissent, parmi toutes les nuances de verts, les couleurs d'une vie qu'on peut écrire plus gaie, plus proche des autres, dans lequel un petit garçon muet de voir sa mère s'éloigner un peu plus chaque jour trouve quelques balbutiements pour la retenir encore un peu.





Une nouvelle de quelques pages pour dire l'importance du regard de l'Autre pour apprendre à voir la beauté de ce qui est proche, l'importance des paroles d'un "voisin" pour trouver, dans le dialogue, des mots comme autant de mains qui se tendent vers celui qui fuit une existence, dans laquelle il ne pense plus avoir sa place.
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Une saison douce

Au coeur des terres sardes dans un trou perdu dont tout le monde se fichait bien , habitants d'un village de bicoques et de rues délabrées , de vieilles baraques rafistolées , là où même le train ne s'arrêtait plus——- il passait en sifflant, en ignorant le hameau ——- où la plupart des habitants sont de vieux couples ne substituant tant bien que mal , plutôt mal , de la monoculture d'artichauts , un jour «  Les Envahisseurs » débarquent, et personne , sur le coup ne veut de cette caravane de Migrants Exilés ……



C'est qu' «  avant l'invasion du village par ces migrants et les humanitaires blancs , qui les accompagnaient , il y avait eu celle des aides - soignantes étrangères » , venues d'Europe de l'Est que les derniers célibataires du lieu avaient épousées , fascinés bien sûr par leur blondeur et la finesse de leur taille …

Alors cette fois, c'est non.



Pourtant , ils vont rester …Car où aller ?



Cinq ans après «  Sens dessus dessous  » l'auteure se saisit à nouveau de la tragédie des migrants . …..de manière directe …



Ils vont rester grâce à la volonté des femmes narratrices : les migrantes et les villageoises , car la place principale est donnée aux femmes …dans «  Une saison douce  » .



Dans l'état de torpeur et d'abandon où les villageoises étaient , elles auraient pu se laisser aller à la paresse, au contraire , elles ne jetteront point l'éponge .

Elles trouveront une nouvelle raison de vivre , de rêver , de s'activer, reprenant goût au potager partagé , sachant de nouveau écouter la nature, instaurer un rapport d'amour et de solidarité avec les végétaux qu'elles cultiveront avec «  les noirs et les noires » , elles sauront se rendre utiles auprès de ceux qui avaient eu beaucoup moins de chance qu'elles .



Jusqu'à engager un labeur frénétique en faisant mûrir à nouveau oranges , mandarines , citrons , tomates et pommes de terre , en sauvant un local dit «  La Ruine » en rebouchant les trous , à l'aide de leurs hommes, en remplaçant les portes pourries, fenêtres et volets .



Le village vivra une nouvelle vie , redeviendra une communauté par la force de l'échange, bien qu'au départ rempli de défiance, maris et femmes se réconcilieront , les moments d'inquiétude et de vide se feront moins vifs .



Mais certains «  grincheux noirs » se refusaient tout même à parler la langue car ils désiraient à tout prix rejoindre la véritable Europe , leur place , estimaient - ils n'était pas ici …..

Un jour ? Ils repartirent au grand désarroi des villageois …..



Bien sûr , l'angoisse et la peur , la défiance ne diminueront pas tout à fait .



Conte moderne? , fable humaniste ?.



Ton drôle malgré la douleur du sujet , dynamique des échanges mis en place , remises en question, et renouveau , originalité du traitement de ce sujet si polémique ,méfiance puis entraide acceptation douce , sourires , haine qui cède parfois le pas à l'empathie, genre comédie «  merveilleuse ».



Bienveillance et engagement discret de l'auteure , rêves et condition humaine, c'est tout cela à la fois ce nouvel opus .



Un agacement ,pour ma part trop de pages consacrées à la religion .

Mais ce n'est que mon avis , bien sûr !
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Mal de pierres

La narratrice qui nous raconte le Mal de pierres de sa grand-mère a choisi de faire ressembler son récit à un conte moderne, sur fond des ravages de la Seconde Guerre mondiale. Peu de personnages se sont vus attribués un nom, ce qui permet de mettre tous les projecteurs sur l'histoire.



Mal de pierres parle de regrets, du Destin et d'amour. Des thèmes universels, et qui n'ont fait qu'ajouter à la sensation de lire un conte. De l'estropié sort la beauté et tout arrive pour une raison, à chacun revient la responsabilité d'accepter, de comprendre et agir en conséquence.

Milena Agus s'arrange pour laisser un flou sur le personnage principal jusqu'au dénouement final : est-elle engoncée dans les normes sociales et de ce fait trop "choquante" pour son époque ? ou est-elle tout simplement folle ?



Un petit roman sur la magie des histoires, des tours de force de l'écriture et bien d'autres choses encore. Bien que je n'y ai pas retrouvé la fraîcheur et la légèreté qui m'avaient tant plu dans Mon voisin, ce roman n'en reste pas moins une lecture sympathique. Agréable sans être transcendante.
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