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Critiques de Philippe Claudel (2649)
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Fantaisie allemande

♫Pour une longue dame brune

J'ai inventé

Une chanson au clair de la lune

Quelques couplets

Si jamais, elle l'entend, un jour

Elle saura

Que c'est une chanson d'amour

Pour elle et moi♫

-Barbara / Moustaki- 1967-

---♪---♫---SS...---...SOS...---...SS---♫---♪---

D'Allemagne

Variations sur le thème d'un cavalier bleu

Incohérence de l'Histoire, tu et moi , les enjeux

Le romantisme est plus violent

Les violons jouent toujours plus lent

Nous, nous avons nos matins blêmes

Et l'âme grise de CLAUDEL,

Eux c'est la mélancolie même,

Tout l'écrit, les SOS ou le rappel à l'Haydn.

O faites que jamais ne revienne

Le temps du sang et de la haine

les guerres sont des bétises

Un manque de matière grise

Faut-il-y voir que les aigles en noir ?

Une armée brune, Viktor, une lueur d'espoir

Victoire ou simple revanche

Tout biographe a le droit de réinventer la vie sur laquelle il se penche...

Bonnes Nouvelles

que celles de Monsieur Claudel 😀













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La petite fille de Monsieur Linh

Un viel homme et sa petite fille ont fui leur pays en guerre. Ils ont maintenant le statut de réfugiés et doivent vivre loin de leur terre d'origine.

Un petit bijou d'écriture. Il se dégage de cet ouvrage bref et intense : sensibilité, délicatesse, empathie, poésie et douceur. La lecture du dernier chapitre a fait naître une petite larme au coin de mes yeux ......

Une exquise découverte !
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La petite fille de Monsieur Linh

Monsieur Linh a tout perdu, hors sa toute petite fille.

Pour elle, le vieil homme a qui la guerre a tout pris va embarquer pour l'occident lointain... Et débarquer dans un pays dont il ignore la langue. Une contrée sans odeurs.

L'histoire est simple, belle et poignante, humaine comme le malheur et l'accablement... Comme la joie qui surgit aussi, parfois.

Monsieur Linh, toujours chargé de sa petite fille, va faire une rencontre qui à elle-seule aura valu le voyage: Un ami, un vrai. Une amitié dont le langage ne passe pas par des mots. Une amitié pour effacer ou atténuer les peines et les chagrins.

Le récit est simple, touchant. Chacun fait de son mieux pour accueillir "Oncle" et lui trouver une belle chambre...dans un château... Château dont Monsieur Linh ne peut vouloir, puisque cela signifie ne pas revoir son ami.

Son ami qui lui a offert une robe magnifique pour sa toute-toute petite fille

Sang Diû...

La petite fille de Monsieur Linh, c'est une ode à la vie et à sa force. La force et le courage d'un vieillard qui choisit la vie et l'inconnu et qui trouve le trésor de l'amitié.

... Et je m'en veux un peu d'avoir deviné la vérité de l'histoire bien avant de quitter Monsieur Linh, sa petite fille et son nouvel ami.

Tant pis, et tant-mieux puisque cela n'a rien enlevé à mon émerveillement.
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Compromis

Denis, comédien raté vend un vieil appartement. Pour la signature du compromis de vente, il fait appelle à la présence de son ami Martin, dramaturge jamais joué, jamais publié, sous prétexte qu'il a une gueule rassurante qui rassurera l'acheteur plus que sa " belle tête d'assassin". Martin n'en est pas convaincu et cherche la petite bête dans la vente.....quand à rassurer l'acheteur, il va vraiment le RASSURER......

Normalement je ne lis pas de théâtre, je vais en voir, et j'adore. Mais parfois je fais des exceptions si le texte ou l'auteur m'attire, et c'en est une, l'attirance étant bien sûr dû à Philippe Claudel.

Eh bien le temps de la signature d'un banal compromis de vente, le dramaturge et le comédien ratés vont jouer la comédie de leur Vie, avec l'acheteur, totalement déboussolé, en plein dans leur jeu, malgré lui ("Je ne sais même pas si vous jouez avec moi, ou si vous vous jouez de moi, ou si vous jouez entre vous." ) !

C'est une histoire d'amitié à la sauce Claudel. L'écrivain nous signe une comédie noire sur l'Amitié qui se nourrit aussi bien de vérités que de mensonges ( pas méchants) et ne peut survivre qu'avec des compromis.

J'aurais voulu voir la pièce sans l'avoir lu, car bien qu'intéressant comme texte, une fois lu et en en connaissant la dynamique narrative qui est assez simple, je n'en vois plus l'intérêt de la voir jouée. Donc je conseillerais de la voir en premier sur scène si vous en en avez l'occasion et l'envie.



"L'amitié se nourrit de compromis. Et ces compromis ne sont pas des reniements, ni des trahisons comme tu le penses. Ce sont des preuves d'amour."





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L'arbre du pays Toraja

Si vous décidez d’ouvrir ce livre, d’écarter les larges feuilles vertes sur fond bleu turquoise de la couverture qui accroche l’oeil, sachez que vous entrerez symboliquement dans l’arbre du pays Toraja, c’est à dire dans la sépulture destinée aux très jeunes enfants de ce pays. Oui, carrément !

Mais non, votre lecture ne sera pas triste, morne et larmoyante, bien au contraire. C’est un arbre symbole de vie et d’espoir d’un pays où la mort côtoie la vie naturellement, où elle est longuement célébrée, contrairement à chez nous.



« Une cavité est sculptée à même le tronc de l'arbre. On y dépose le petit mort emmailloté d'un linceul. On ferme la tombe ligneuse par un entrelacs de branchages et de tissus. Au fil des ans, lentement, la chair de l'arbre se referme, gardant le corps de l'enfant dans son grand corps à lui, sous son écorce ressoudée. Alors peu à peu commence le voyage qui le fait monter vers les cieux, au rythme patient de la croissance de l'arbre. »



Le ton est donné dès le début : le style est beau, direct, l’histoire énigmatique et simple à la fois. Un quinqua cinéaste, le narrateur, s’interroge à la mort de son meilleur ami et producteur sur la place qu’il occupait dans sa vie, sur sa nouvelle « présence » auprès de lui, sur la force des liens amicaux même au-delà de sa disparition physique.



« Le texte est devenu l'arbre du pays Toraja. »

La métaphore, même évidente, est belle. Philippe Claudel a déposé dans son arbre-hommage des lambeaux d’âmes défuntes, des souvenirs de vie et de magnifiques interrogations sur les rameaux qui poussent…après, car la vie continue et doit continuer, car « Vivre, en quelque sorte, c'est savoir survivre et recomposer. »

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Parfums

Ma Lorraine, ma terre, mes parfums, je le sais maintenant, je les partage avec d'autres et notamment Philippe Claudel.

J'ai achevé la lecture de cet ouvrage depuis quelques mois déjà mais j'ai attendu pour voir ce qui allait se déposer dans ma mémoire, je ne suis pas déçue.

Hugo le disait, la mémoire olfactive est la plus fidèle de toutes. Quand un parfum est entré dans votre narine et surtout s'il est accompagné d'une charge affective importante, il reste à jamais gravé dans votre tête.

Philippe Claudel égrène les parfums comme un canevas de souvenirs et nous livre un portrait intime très émouvant.

Il parlera encore plus à ceux qui dans l'enfance ont humé dans la cave les parfums de mirabelle. Le parfum de ces petites prunes dorées est si puissant qu'il hante encore les lieux alors que nous n'en stockions plus depuis des années!

Il résonnera dans le cœur de ceux qui se souviennent avoir humé les vêtements de l'être cher, trop tôt disparu en cherchant des mois après le parfum et la douce chaleur de son corps.

Le parfum ne rime heureusement pas qu'avec la mélancolie et la recherche d'un paradis perdu: il peut être renaissance du désir,de la sexualité et de la vie.

Les odeurs nous renvoient à tout, à la vie, au plaisir et à la mort.

Merci à Philippe Claudel qui nous donne preuve en est que les hommes ne sont pas que des visuels, ils sont comme les femmes doués d'une grande sensualité!

Un livre que j'aurai plaisir à revisiter!
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Les âmes grises

Le narrateur omniscient, adresse sur un cahier des lignes de confessions à sa femme Clémence décédée il y a fort longtemps, des confessions comparables à des plaies douloureuses, ouvertes sur des remords, des ressentis et des aveux.

Le narrateur nous retrace par le biais de ses écrits, une période noire d’un petit village de Province où un matin d’hiver 1917, on découvre le corps d’une petite fille de 10 ans tuée par strangulation.

Le récit gravite autour de ce macabre assassinat, le narrateur un policier témoin observateur de l’enquête, nous transporte dans cette sombre affaire. Il décortique au fil de la lecture l’ambiguïté de cette tragédie, et nous décrit également la vie tourmentée des petits gens et les notables du village.

En parallèle, ce roman nous amène à certaines réflexions sur différents cas de figure, les atrocités de la 1ère guerre mondiale et ces jeunes garçons poussés sur le front sans expérience, sans préparation psychologique, traumatisés par les horreurs d’une guerre sanglante et barbare, ces soldats déserteurs, fusillés pour avoir fui les responsabilités d’une patrie, ces jeunes garçons qui ne veulent pas devenir assassins d’une guerre qu’on leur impose, une guerre qu’ils ne comprennent pas. C’est une réflexion sur la peine de mort, des têtes tranchées sous l’épée d’une justice stricte, rigide et malveillante. C’est un regard sur la ségrégation des classes sociales, où la haute bourgeoisie traite avec condescendance le petit peuple, d’ignorants. La bourgeoisie et ses inspecteurs, ses juges, ses procureurs et ses notables qui s’octroient des droits et du pouvoir sous prétexte d’instruction et d’éducation, et qui révèlent des faces cachées de pourritures et d’injustices, trouvant des coupables idéaux pour classer des affaires dérangeantes.

Et parmi cette réalité, il y a « Belle de Jour », la fillette assassinée à l’âme pure, que « le Mal qui rend les Hommes si laids », ne possédera pas !

L’auteur sous la main d’une jolie plume, expose les douleurs, les lâchetés, les injustices, des uns et des autres, un roman bouleversant où les protagonistes sont comme cités dans le texte par Joséphine amie du narrateur « Ni salauds, ni saints, ni tout blanc, ni tout noir c’est le gris qui gagne. Les Hommes et leurs âmes c’est pareil... » Nous sommes juste des âmes grises.

Le charme de ce roman, c’est ce mystère qui perdure sur « l’opacité de ce crime » qui nous laisse juge de choisir le coupable, ou tout comme le narrateur dans « le doute, la pénombre, l’hésitation, et l’absence de réponses et de certitudes »... Crime d’un pervers ou crime d’un martyr, est-il souhaitable de le savoir !

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Crépuscule

Avec Crépuscule de Philippe Claudel, nous voilà dans un village d’une province reculée située dans un empire imaginaire qui ressemble un peu à l’empire austro-hongrois, au début du XXe siècle.

L’histoire se déroule en hiver, sous un climat rude, un hiver qui semble sans fin.

Ce village presque arriéré est composé d’une majorité de chrétiens 1378 habitants et d’une petite communauté musulmane qui compte cinquante-quatre âmes, les deux religions cohabitant pacifiquement.

Deux enfants découvrent un cadavre, celui du curé retrouvé la tête fracassée par une pierre. Aussitôt la tension devient palpable…

Le binôme, constitué du capitaine Nourio aux pulsions sexuelles récurrentes et de son adjoint Baraj, deux hommes plutôt mal assortis aussi bien physiquement que moralement, est chargé de l’enquête.

Mais que peut-il se passer lorsqu’un prêtre, celui qui incarne la religion dominante d’un village, un de ses membres éminents, est assassiné ? C’est à cette question que tente de répondre Philippe Claudel.

L’auteur nous offre avec Crépuscule, à la fois un roman policier, un roman psychologique, un roman social, un roman noir, très noir, mais surtout, sous l’aspect d’un roman historique, un roman qui nous parle d’aujourd’hui.

Alors que de l’autre côté de la frontière, se trouve un pays dont la bannière est ornée d’un croissant d’or, bouillonnant de force vive, il est intéressant de voir, comment cet Empire qui commence à décliner, à s’éteindre, va prendre le prétexte de ce fait divers sanglant pour éradiquer de son sein cette petite communauté musulmane, naissante mais active, et la massacrer.

On assiste à la faveur du meurtre du curé, à la montée de la violence, de la haine, dans un engrenage irréversible et on découvre le comportement abject et corrompu du Maire, du Rapporteur de l’Administration, du Notaire, du Conservateur des archives, des trois Maîtres d’école, du Receveur, etc... Une scène de chasse à l’ours particulièrement épique met en avant leur complicité.

Impossible de ne pas voir dans ce mécanisme de la haine qui se met en place et cette recherche de bouc-émissaire des échos avec la période dans laquelle nous vivons, où on instrumentalise certains faits que l’on retourne, détruisant ainsi la vérité historique pour aller dans la direction souhaitée.

Dans Crépuscule, Philippe Claudel ne se borne pas à écrire une énigme policière, il raconte la fabrique d’une contre-vérité, une mécanique millénaire tellement actuelle, à savoir, trouver un ennemi commun, ce qui va souder la communauté.

Comme avec Le rapport de Brodech, La petite fille de Monsieur Linh, Les âmes grises (Prix Renaudot 2003) ou L’archipel du chien, je me suis à nouveau régalée avec la lecture de ce roman magistral et envoûtant, à l’atmosphère terriblement inquiétante, qu’est Crépuscule. De suspens en rebondissements, il m’a tenue en haleine du début à la fin, fascinée par ce questionnement on ne peut plus d’actualité.

Dans ce monde crépusculaire qui est décrit, le texte très visuel de Philippe Claudel permet une magnifique approche des personnages, des animaux et de la nature.

Les personnages sont solidement dépeints et leurs caractères finement analysés.

Si j’ai trouvé trop présentes et répétitives les pulsions sexuelles de Nourio, j’ai beaucoup apprécié son Adjoint, ce géant maladroit et méprisé par son Capitaine, déjà maltraité et moqué dans son enfance, le seul à ne pas courber l’échine, poète à ses heures mais dont les vers s’effacent au fil de leur création…

Crépuscule de Philippe Claudel est une sorte de fable politique, une réflexion remarquable, profonde et troublante, sur la nature humaine et sur la fabrication de la vérité historique.

De ne pas nommer précisément, ni le lieu où se déroule l’histoire, ni l’époque à laquelle elle se déroule, est une manière d’élargir le propos et de le rendre universel, une manière de dire : cela pourrait se passer ailleurs, aujourd’hui ou demain… Inquiétant...


Lien : https://notre-jardin-des-liv..
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Crépuscule

Qui a tué le curé que deux enfants viennent de découvrir en cette nuit d’un hiver glacial ?



Personne ne sait, mais la rumeur jette l’opprobre sur la communauté musulmane dont l’un de ses membres affolé s’enfuit … amplifiant les soupçons … car une fuite n’est elle pas un aveu ?



Aux médisances succèdent les incivilités puis les agressions … qui font place nette.



Savoir qui a tué le curé n’a aucune importance car la vérité, dans l’empire, doit être efficiente et répondre aux voeux (aux ukases) de l’empereur et de ses gouverneurs. Et ceux ci apprécient les fonctionnaires dociles, serviles, prêt à tout pour gagner une décoration, une promotion, une invitation à une chasse et contrôler un peuple espionné par les « mille oreilles » d’un big brother orwellien : « L’Empire qui était un monstre à 100 têtes et à 100 corps savait que du contrôle de la moindre de ses provinces reculées dépendait sa survie. Aussi, les élites qui le gouvernaient avaient-elles favorisé depuis des temps anciens des canaux de surveillance reposant d’une part sur les structures feuilletées de l’administration, mais aussi sur une entité plus officieuse baptisée, on ne sait par qui, les Mille Oreilles, grâce à laquelle était écouté et transmis tout ce qui pouvait se dire dans les bavardages des rues, les cafés, les marchés les ports ou le réseau encore embryonnaire des chemins de fer. »



Débutant comme un polar, ce roman dérive vers un essai politique sur la mort des empires, l’emprise de la pensée unique, et la stigmatisation des indésirables ; vaste programme !



Mais l’intrigue souffre de longueurs, sombre dans le manichéisme en encensant les musulmans et en vilipendant les chrétiens et se délecte des viols du policier pédophile. D’où une déception d’autant plus grande que les romans précédents de Philippe Claudel m’avaient enchanté et comment apprécier une intrigue dont aucun acteur n’est sympathique ?
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L'Archipel du chien

Je me suis précipitée sur le dernier roman de cet auteur dont j'apprécie la sensibilité, le style et la variété des thèmes abordés : universels, existentiels, comme sociétaux ! Celui-ci est bien sombre, interpelle sur un drame mondial actuel, le sort de tous les Migrants...



"Des papiers d'identité les auraient reliés au monde, à un pays, une administration humaine, une histoire, une famille. Mais là, rien. Rien qui permettait de savoir leur nom, leur âge, le pays qu'ils avaient fui. Rien qui pût dire de qui ils étaient les fils, les frères, les maris, les pères." (p. 54-55)



L'histoire est tragiquement simple : quelques notables d'une île découvrent sur l'une des côtes de leur île, trois cadavres de jeunes hommes noirs... Ils sont préoccupés, soucieux de cacher ce sinistre événement , car le maire est en pourparlers, et en négociations commerciales pour le projet de Thermes...Une perspective de prospérité et de développement pour leur

île...qu'il ne veut surtout pas compromettre !!...



Le curé, le maire, le Docteur, un pêcheur, l'ancienne institutrice à la retraite, et le jeune instituteur, en fonction...vont se réunir pour savoir ce qu'ils doivent faire...

Tous veulent oublier et surtout cacher les corps de ces trois jeunes hommes noirs, sauf l'Instituteur qui veut dire la vérité et enterrer dignement ces "malheureux" !..

L'instituteur dérange au plus haut point... et comme il n'est pas, comme les autres "décideurs" , originaire de l'île... il deviendra le bouc-émissaire , et subira une machination honteuse... pour discréditer sa parole !... Je n'en dirai pas plus long !!



"Qu'est-ce que la honte, et combien la ressentirent ? Est-ce la honte qui rattache les hommes à l'humanité ? Ou ne fait-elle que souligner qu'ils s'en sont irréversiblement éloignés ? "(p. 243)



""Vous êtes pourtant intelligent. Je comptais sur vous. Et je suis certain que vous êtes un homme bon.

- Je suis surtout un homme lâche, lui avait-il répondu.

-Un homme lâche ? avait repris, songeur, l'Instituteur.

-C'est presque un pléonasme, non ? " avait conclu le Docteur. (p. 268)"



Un roman oppressant , présentée comme une fable qui met au centre la lâcheté des hommes... ainsi que leur besoin de bouc-émissaire pour échapper à leur pleine responsabilité...et leur culpabilité...lors de choix complexes...



Une angoisse, une tension allant crescendo au fil du récit...La vie d'une île où vivent pêcheurs, paysans, quelques notables : le Docteur, le Curé, le Maire ... Il est question de Morale, des combats constants, universels entre le Bien et le Mal, la cupidité, l'égoïsme, le racisme...et les luttes d'une minorité pour mettre en accord ses convictions et ses actions, en dehors d' intérêts personnels....



Des scènes marquantes, terrifiantes...dont cette gigantesque pêche au thon, annuelle, qui se prolonge par des festivités et le couronnement du Roi (Le pêcheur le plus adroit) de cette pêche quasi mythique...

Des descriptions hyper-réalistes dont celles des odeurs, qui se communiquent littéralement et physiquement à nous...Impressionnant....



Un roman marquant... nous interpellant sans ménagement...dans les choix médiocres [ humainement], les dérapages multiples , que nous pouvons faire...dans une sorte de confort personnel et banalisation de certains actes... Fable dérangeante qui parle des "salauds ordinaires" !!!....





[ *****pour achever ces lignes, l'envie de signaler Une jaquette des plus réussies, réalisée par Lucille Clerc]

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Fantaisie allemande

Dans son dernier opus Philippe Claudel nous revient avec cinq nouvelles qui se passent dans une Allemagne de fin de guerre et suite, d'où son titre, et semble avoir comme fil rouge commun, Viktor. Un Viktor, bourreau SS de la seconde guerre mondiale , un Viktor employé d'hôpital psychiatrique.....



La première histoire, où Viktor est seulement évoqué, m'a plue avec sa chute.

Mais déjà avec la deuxième je suis en froid avec le texte dû au contexte et détails d'une première expérience sexuelle farfelue ( grâce à Viktor) dont se rappelle un vieillard légèrement sénile. Au troisième où débarque un autre vieillard là tout à fait sénile, qui est un Viktor même, je suis carrément en froid. Stationné dans une maison de retraite, c'est le père du maire de la ville. Une gamine en pleine crise d'adolescence est mise à sa disposition pour s'occuper de lui. Claudel réussit a y insérer aussi le cliché d'un cuisinier turc qui farfouille les fesses de la gamine ( L'Allemagne fait automatiquement penser à des turcs, Dieu sait pourquoi, pourtant y vivent d'autres nationalités à forte majorité ), détail qui accentue mon amertume. Je suis à la moitié du livre avec une forte envie d'abandonner, mais la quatriéme histoire avec le peintre Franz Marc, chef de file du mouvement expressionniste allemand « Die Blaue Reiter » me relance. Ici réapparaît un Viktor, dont l'identité fait perdre le fil rouge, et l'histoire inventée de Franz Marc se basant sur l'idéologie des nazis concernant l'Art, manque de substance. Avec la dernière histoire l'errance désespérée d'une petite fille juive orpheline, en fin de la deuxième guerre mondiale Claudel ferme la boucle, mais moi j'ai déjà perdu tout enthousiasme pour une fantaisie qui n'en ai pas une.



Note de l'éditeur:

“C'est un livre virtuose, une oeuvre de fiction autour des thématiques chères à Philippe Claudel : tout d'abord celle de l'incohérence de l'Histoire et des rôles que les hommes y jouent mais aussi celles de la culpabilité et de la mémoire. Il faut entendre le terme fantaisie présent dans le titre, dans son acception musicale et poétique" .



Mon dégoût et désintérêt pour ce livre sont allés en crescendo. Malheureusement je n'ai décelé aucune virtuosité dans cette fantaisie allemande. Il ne m'est restée qu'un fort sentiment de malaise pour une nation qui n'est pas pire qu'une autre. Claudel à la fin de son livre s'adressant à nous lectrices et lecteurs, en donne une explication claire et sincère mais qui malheureusement ne m'a pas convaincue , vu que c'est un pays que je connais aussi très bien et que j'y ai vécu.
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Le rapport de Brodeck

Au lendemain de la Seconde Guerre, dans un petit village frontalier de l'Allemagne, un drame est survenu.

Le meurtre d'un homme, un étranger, venu s'installer quelques mois plus tôt dans le village.

Parce qu'il a fait quelques études, Brodeck, le narrateur, est chargé par les villageois d'écrire un rapport sur les évènements qui ont conduit au drame.

Alors, endossant la charge de la parole collective, Brodeck écrit.

Consciencieux à l’extrême, il ne veut rien cacher de ce qu’il a vu.

Sous sa plume, peu à peu la vérité se dévoile, un ballet macabre se met en mouvement, le ballet des villageois capables des pires agissements quand la peur les anime, le ballet de la cruauté des hommes et de la collaboration.

Brodeck déroule ainsi le fil de la culpabilité, des crimes collectifs et des responsabilités individuelles, et montre toute l’ambivalence des liens entre l’écrivain qu’il est obligé d’être et la communauté qui le pousse à écrire tout en ayant peur du pouvoir de ses mots.



Philippe Claudel continue de scruter le visage du mal en approfondissant le thème de la haine de l’autre, et du mal infligé au nom de cette haine.

Formidablement construit, d’une écriture simple, limpide et poétique, « Le rapport de Brodeck » pose la question de l’altérité et de la confrontation au collectif.

Qu’est-ce qu’une foule ? Qu’est-ce qu’une société et comment une société nous regarde-t-elle ? Comment intègre-t-elle, expulse-t-elle ou sacrifie-t-elle celui qui est différent ?

L’auteur met en roman le groupe, comment il se conduit et comment il devient inhumain.

Ni le mot Juif, ni le mot Shoah n’est ici évoqué et pourtant on comprend très vite que la catastrophe qui vient de se produire est de cette nature.

L’auteur, sans jamais rien nommer, ni la guerre, ni le problème de la différence, donne une portée universelle à son propos et explore le moment où une partie de l’humanité décide de façon génocidaire d’en supprimer un autre.

Tout le talent de Claudel consiste à toucher le lecteur par la suggestion plutôt que par l’évidence.

Ainsi la guerre l’est en arrière-plan, non de manière frontale mais de façon indirecte, intuitive, sensorielle, dans la suggestion et la mémoire. Le lecteur est d’autant plus touché qu’il ne l’est pas de plein fouet mais plutôt par une sorte de perspicacité, d’empathie.

L’émotion est d’autant plus intense que l’action se déroule dans un petit village champêtre, au cœur d’une nature d’une exceptionnelle beauté. Claudel construit ainsi un roman de la nature, une histoire d’hommes souffrant au milieu du plus bel endroit du monde et par ce biais, montre l’abominable surgissant au milieu du beau.



Peintre exceptionnel, l’auteur s’intéresse aux gens du quotidien et comme avec « Les âmes grises », dresse une galerie de portraits saisissants de réalité.

Les évènements s’entrelacent dans une chorégraphie admirable. Le village, la vie quotidienne, sa nature, ses couleurs y sont décrits au plus fin pinceau.

Certes, le roman est grave, son atmosphère sombre, la noirceur des âmes et l’opacité des consciences soulignées à grand trait charbonneux.

Cependant, derrière le pessimisme et le tragique, émergent de belles lueurs d’espoir.

Car c’est aussi un roman de l’amour dont il s’agit.

L’amour entre Brodeck et sa femme Emélia sans qui il n’aurait pu surmonter l’atrocité des camps, cet amour qui est le sel même de la vie et qui fait tenir bon malgré tout.

Enfin le but ultime de ce roman n’est pas de montrer une humanité noire mais de souligner la noirceur pour justement l’éclaircir.

Que le lecteur fasse alors un travail sur lui-même, vis-à-vis des autres et du monde, pour dissiper cette abominable noirceur.

Brodeck nous dit à la fin de son rapport « de grâce, souvenez-vous ».

Assurément nous n’oublierons pas.

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Crépuscule

En se plongeant dans ce conte cruel qui sonde la noirceur des hommes, Philippe Claudel nous entraîne sur des chemins d’abîme avec un réel talent de conteur. J’aime la prose et l’imagination de l’auteur et j’avoue avoir pris beaucoup de plaisir à dévorer cette histoire sombre.

Tout commence par un meurtre, celui du vieux curé d’une ville reculée dans une Province perdue aux confins de l’Empire. Du nom de cette cité et de son pays, on n’en saura pas plus, tout au plus qu’ils se situent dans les Balkans.

Qui a bien pu tuer le curé Pernieg dans une ville où chrétiens et musulmans vivent en harmonie ? C’est le Policier Nourio, et son adjoint, un bon géant plutôt naïf, qui sont chargés de l’enquête.

Très vite, on s’enfonce dans les turpitudes des hommes. Et si ce crime réveillait de mauvais démons, comme le craint l’imam ?

Les personnages sont pour la majorité, des hommes : notables, religieux, petits nobles, représentants zélés de l’Administration Impériale. On s’épie, on s’observe, on feint de bonnes relations mais dans les têtes bouillonnent vanité, vices et désir de puissance.

Les femmes quant à elles, sont peu représentées. On croise l’épouse du Policier, d’elle on ne connait pas le nom mis on sait que, chargée d’une nombreuse marmaille, elle doit subir en femme soumise les coïts frénétiques de son époux. Et puis il y a Lémia, la jeune fille qui a découvert le cadavre et reste le seul témoin du crime. La féminité naissante de cette fillette à l’âme pure et au sourire de madone éveille les bas instincts du Policier.

Et puis, il y a l’hiver, rude, long, trop long, qui façonne le caractère des habitants et les pousse à s’enfermer chez eux. La « rudjia », mélange de brouillard, neige et grésil, est suffocant.

« Ce météore singulier a aussi pour effet de rouler sans fin les pensées des hommes dans la plus poisseuse des morosités, et les enferme à double tour dans la prison angustiée de leur crâne, sans possibilité jamais de les voir s’en échapper. »

Dans cette atmosphère glaciale et angoissante, on suit les soubresauts de l’enquête qui va errer et s’infléchir pour s’accorder avec la vérité prônée par l’Empire tout puissant.

L’humour n’est pas absent de cette sombre épopée, et on y trouve une partie de chasse digne de Tartarin de Tarascon, rôle endossé par le Policier embringué bien malgré lui dans une chasse contre celui qu’on ne nomme pas : le « puissant aux mains griffues », le « grogneur », le « lécheur de miel »

« Crépuscule » est une fable effroyable qui raconte les arrangements de l’Histoire avec la vérité, la déchéance d’une humanité cupide et veule et l’exaltation des âmes pures. La puissance évocatrice de l’écriture de Philippe Claudel sert à merveille ce grand roman que j’ai adoré.







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Les âmes grises

C'est le deuxième livre que je lis de lui. » Philippe Claudel nous emmène très loin sur les considérations du bien et du mal. Le thème n'est pas nouveau, mais la manière dont il est traité ici est redoutable d'efficacité.

Entre l'amour et la mort, la fine frontière est palpable.

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Le lieu essentiel

“La montagne,....ne se confond pas avec un sport ou un « hobby ». Elle l’accompagne comme une terre de vérité, un lieu-refuge où l’on se sent enfin soi-même.” . Le « l’ » d’accompagne de la citation est Philippe Claudel, homme aux mille facettes et mille passions qui nous révèle ici un autre pan de sa personnalité, répondant aux questions de Fabrice Lardreau, écrivain et journaliste à La Montagne & Alpinisme. Claudel y ajoute vers la fin quelques textes avec commentaires, reliant montagne et littérature, qui l’ont touché, de Shelleys, d’A.Daudet, de Mario Rigoni Stern et de Ludwig Hohl.

Sa première image de la montagne remonte à son enfance. Une image littéraire, celle de la chèvre de Monsieur Seguin d’A.Daudet, qui malgré sa situation douillette dans la chévrerie, ressent l’appel de la montagne, hantée par le désir de l’ailleurs et de l’infini.

Adolescent timide, Claudel n’osant s’y aventurer, faute de moyens, une phrase simple de la réponse à la lettre qu’il ose envoyer à l’alpiniste René Desmaison , le lance à vie, à l’assaut des cimes, aussi bien au sens propre que figuré, “Quand on désire vraiment quelque chose, on peut y arriver.”........

Celles ou ceux qui ont lu et apprécié «  Les Huit Montagnes » de Cognetti, y retrouveront l’amour de la montagne, cette tentation de retrouver une forme de simplicité essentielle pour redéfinir ce que nous sommes et quels sont nos vrais besoins vitaux.



Le récit fluide d’”un fou de montagne”, qui se lit avec plaisir et intérêt.



“L’alpiniste et l’écrivain, des conquérants de l’inutile ? Tous deux se rejoignent dans ce lieu essentiel, empreint de passion et d’humilité.”

Fabrice Lardreau
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La petite fille de Monsieur Linh

Un trésor d'émotions, de sensibilité... qu'une amie m'a offert, il y a un très , très long moment...Une relecture... d'un ouvrage d'un écrivain dont j'apprécie l'éclectisme des sujets, et l'empathie fréquemment perceptible, envers ses personnages...



Un roman poignant, qui prend aux tripes... parlant de déracinement, de deuils et pertes répétés, de pays en guerre, d'exil, d'amour fou entre un grand-père et sa petite-fille orpheline, d'Amitié dans un pays étranger....





"C'est un vieil homme debout à l'arrière d'un bateau. Il serre dans ses bras une valise légère et un nouveau-né, plus léger encore que la valise. le vieil homme se nomme Monsieur Linh. Il est seul à savoir qu'il s'appelle

ainsi car tous ceux qui le savaient sont morts autour de lui.

Debout à la poupe du bateau, il voit s'éloigner son pays, celui de ses ancêtres et de ses morts, tandis que dans ses bras l'enfant dort. le pays s'éloigne, devient infiniment petit, et monsieur Linh le regarde

disparaître à l'horizon, pendant des heures, malgré le vent qui souffle et le chahute comme une marionnette. le voyage dure longtemps. Des jours et des jours. Et tout ce temps, le vieil homme le passe à l'arrière du bateau, les yeux dans le sillage blanc qui finit par s'unir au ciel, à fouiller le lointain pour y chercher encore les rivages anéantis."



Une chute inattendue, insolite...qui démultiplie l'intensité dramatique...Reste cette fabuleuse lumière que représente l'amitié née entre ce vieux grand-père exilé et un veuf, perdu dans une solitude

éprouvante... Même avec la barrière de la langue, ces deux compères se réconfortent, ont des attentions touchantes l'un pour l'autre...et attendent avec impatience chacune de leurs rencontres !



De fort nombreuses critiques enthousiastes de ce petit bijou d'humanité...ce qui est grandement justifié !



"Monsieur linh essaie d'entourer de son bras l'épaule de son ami, sans y parvenir car son bras est trop petit pour la grande épaule. Il lui sourit. Il s'efforce de mettre beaucoup de choses dans ce sourire, plus de choses que n'importe quel mot ne pourra jamais contenir."
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Les âmes grises

Une ambiance lugubre dans ce village maudit

*

Mais alors quelle atmosphère brumeuse et mélancolique dans ce roman rural. Tout au long de ma lecture, je me suis sentie comme une petite souris qui se faufile dans les maisons et espionne tout ce petit monde. Le narrateur est un vieux gendarme, le "shérif du coin", déversant ses Confessions, se centrant sur l'Affaire.

Qu'est-ce donc cette Affaire? Ah mes chers lecteurs, vous l'apprendrez bien tôt si vous entrouvrez ce "fait-divers régional" (fictionnel) qui a défrayé la chronique d'un village de province durant l'hiver 1917.

Vous l'aurez compris, cette tragédie se déroule durant la 1ère guerre mondiale. Une période bien sombre qui fait écho avec ce crime sordide.

*

Plutôt que de présenter l'enquête sous une forme classique, l'auteur a préféré nous raconter la vie de ces villageois dans leur quotidien avec leurs faiblesses et leurs vices. Les notables, les soldats déserteurs, les "petites gens", tout le monde y passe. Ni noire, ni blanche, mais grise. Oui, l'âme grise. Une noirceur tapie au fond de chacun, dans d'infinies nuances de gris.

*

Une écriture tellement juste, si imagée que j'ai visualisé les scènes. Il paraît qu'une adaptation en film a été faite, mais je n'en ai pas eu besoin.

Malgré un début un peu lent, je me suis laissée emporter par la voix du narrateur. Je suis passée par de l'incompréhension, au doute, à la peur, à la pitié, à la colère. Mais pas à la quiétude.

*

Noir, sombre, inquiétant, troublant, mais authentique.

Oui, la petite souris a appris, a réfléchi et a mal digéré la fin (émouvant).

Et ce crime qui n'est pas résolu (m'enfin!)
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L'arbre du pays Toraja

Une suite de hasards m'a fait lire Philippe Claudel... dans des registres très différents.. Des "Ames grises" à ce texte particulier, en passant tout dernièrement par son avant-dernier texte, recueil facétieux , intitulé "De quelques amoureux des livres", publié par les éditions Finitude...



Ce texte me semble très distinct des autres écrits de Philippe Claudel. La mort prématurée du meilleur ami de l'écrivain provoque chez lui la nécessité de faire une pause, d'aborder une large réflexion sur l'appréhension de la mort au sein de nos quotidiens actifs ,agités ainsi que dans nos sociétés qui ont des réticences pour en parler...



Philippe Claudel part d'un voyage à travers le pays Toraja, en Indonésie, au

printemps 2012. Ainsi commence l'ouvrage:



"Sur l'île de Sulawesi vivent les Toraja. L'existence de ce peuple est obsessionnellement rythmée par la mort. Lorsque l'un deux vient à mourir, l'organisation de ses funérailles occupe des semaines, des mois, parfois des années. (...)Cela peut représenter des milliers de personnes dispersées sur l'ensemble de l'archipel indonésien, voire au-delà. Les faire voyager, les héberger, les nourrir incombe à ses proches. Il n'est pas rare que ceux-ci s'endettent durablement afin de pouvoir respecter la tradition" (p.9)



Cet écrit fait songer à une sorte de journal éclaté, bilan d'un homme au mitan de sa vie... frappé par la disparition prématurée de son producteur et meilleur ami. de très beaux passages sur l'Amitié et celle-ci , en particulier...



"La mort d'Eugène ne m'a pas seulement privé de mon meilleur et seul ami. Elle m'a aussi ôté toute possibilité de dire, d'exprimer ce qui en moi s'agite et tremble. Elle m'a également fait orphelin d'une parole que j'aimais entendre et qui me nourrissait, qui me donnait, à la façon dont opère un radar, la mesure du monde que, seul désormais, je ne parviens à prendre qu'imparfaitement. "(p. 141)





Des parenthèses sur son métier de cinéaste,sur les grandes différences entre l'écriture cinématographique et l'écriture d'un romancier...sur ses rencontres, les femmes aimées...La vie, les séparations passagères ou définitives, l'engagement amoureux, etc.





Loin d'être un texte mortifère, l'auteur rédige un récit multi-facettes, qui est avant tout une ode à la Vie, à l'amitié, à la création... mais aussi à l'amour.







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L'arbre du pays Toraja

Le narrateur a parcouru, durant le printemps 2012, l'île de Sulawesi, en Indonésie. C'est ici qu'il a pu voir un arbre particulier et majestueux. Un arbre où reposent les très jeunes enfants venant à mourir au cours des premiers mois. Au fil des ans, l'arbre se referme, gardant ainsi le corps de l'enfant dans son grand corps à lui.

De retour chez lui, ce cinéaste apprend tragiquement le cancer de son producteur et meilleur ami, Eugène. Un cancer ordinaire, un débutant selon lui, pris à temps. Malheureusement, il n'aura rien d'ordinaire. Bien au contraire. Puisqu'Eugène meurt moins d'un an plus tard.

Ce sera l'occasion pour cet artiste, depuis qu'il a perdu une part de bonheur et d'équilibre, de méditer sur la mort. Sur la place qu'elle occupe dans nos vies. Sur le vide qu'elle laisse en perdant ceux qu'on aime. Sur la peine qu'elle nous afflige.



Philippe Claudel, dans ce récit quelque peu autobiographique, donne à voir, à réfléchir et à (re)penser. Autant de réflexions sur la vie, la mort, l'amour, l'amitié, dans ce qu'elle de plus intense et sincère, l'absence, la vieillesse, le temps qui passe, le bonheur, la maladie, le chagrin ou encore le cinéma et la littérature. Autant de sujets abordés avec finesse, émotion, lucidité et poésie.

L'histoire émouvante d'un homme, au mitan de sa vie, qui s'interroge sur sa propre place dans le monde. Un homme partagé entre le passé et l'avenir, représentés l'un et l'autre par les deux femmes de sa vie. L'une jeune, l'autre plus âgée.

Un bel hommage de la part de l'auteur à Jean-Marc Roberts.

Un hymne à la vie dans ce qu'elle a de plus précieux, lumineux et inattendu.

Un roman sur la mort, paradoxalement gorgé de vie.
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L'Archipel du chien

Quels procédés permettent à ce récit de prétendre au titre de fable, de conte des temps modernes?



En premier lieu : l’universalité des thèmes abordés.



L’exil a mis les peuples et les individus en danger depuis la nuit des temps, quelle que soit la cause : fuite d’un danger, bannissement, rêve d’un ailleurs meilleur...mais ce qui le distingue des migrations anciennes , c’est l’exploitation de la détresse des déracinés , détresse qui alimente la cupidité de passeurs sans scrupules. C’est pourquoi dans L’Archipel du chien la fable prend des airs de faits divers bien présents dans l’actualité.



Puis la nature érigée au rang de personnage

Gaia , la terre mère qui se rebelle par l’entremise d’un volcan pétomane, dont les pestilences s’insinuent partout.



Enfin, la recherche d’un bouc émissaire, celui qui paiera le prix cher, juste pour masquer les odieuses pratiques des notables. A choisir de préférence parmi les plus récemment admis dans la communauté , cible désignée par la une fâcheuse propension à mettre le nez dans les affaires qui fâchent. Là aussi les légendes du monde grec et barbare n’ont pas fait mieux .



Mais Philippe Claudel n’a pas oublié que ses lecteurs sont bien ancrés dans le 21e siècle , à travers un personnage qui apporte un peu de légèreté au propos, et qui prend les traits d’un enquêteur peu banal, mais tout de même très évocateur de ces limiers des temps modernes, malins mais profondément asociaux voire psychopathes.

Drôle aussi la matérialisation d’un Dieu omniprésent et omniscient qui surveille ses ouailles de manière très technologique .



Tout cela est fort bien ficelé , avec un art de l’écriture qui n’a plus à faire ses preuves . Tout à fait à la hauteur du Rapport de Brodeck ou des Ames grises.


Lien : http://kittylamouette.blogsp..
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