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Nathalie Bauer (Traducteur)
EAN : 9782714450067
228 pages
Belfond (01/09/2011)
3.38/5   13 notes
Résumé :
Italie, années 70. Deux hommes se rencontrent un été dans la ville de Turin écrasée de chaleur. Le premier est un ancien instituteur du Nord ; le second est un rustre Calabrais retraité. Alors que ce dernier fait preuve de courage et de sagesse dans les moments difficiles de la vie, l’autre, déçu de tout, du monde et de sa fille, est entraîné malgré lui dans un engrenage infernal et mortel.
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Critiques, Analyses et Avis (9) Voir plus Ajouter une critique
Critique réalisée dans le cadre de Masse Critique Babelio. Merci à Babelio et aux Editions Belfond.

Quand j'ai jeté un premier coup d'oeil sur la liste des ouvrages proposés par Babelio pour cette nouvelle édition de Masse Critique, il faut bien avouer que rien ne m'a sauté aux yeux. Mais la perspective de recevoir gratuitement un livre n'est pas à dédaigner en ces temps de précarité, et j'ai de nouveau réexaminé les choix proposés. Un titre m'a interpellée : "Mon frère italien". Auteur : Giovanni Arpino, inconnu pour moi. Adorant l'Italie, d'où est originaire une partie de ma famille, et le petit résumé de l'intrigue me paraissant vaguement attirant, j'ai coché la petite croix dans le cadre prévu à cet effet. Petit geste, grandes conséquences...

Lorsque j'ai reçu le livre, je m'étais renseignée sur l'auteur, ce qui m'avait laissé entrevoir des indices très prometteurs : il a écrit "Parfum de femme", dont a été tiré un de mes films cultes, avec Vittorio Gassman, le plus bel acteur que l'Italie ait porté.

Alors donc, me voilà sur le chemin de "Mon frère italien".
C'est un itinéraire tortueux, cruel, difficile, bien loin de l'image lumineuse que l'on pourrait avoir de l'Italie. Ici, nous sommes à Turin, ville industrielle du Nord, et cela a beau être l'été, ne suintent que la crasse et la désolation. Deux hommes se rencontrent. Deux vieillards, un intellectuel du Nord et un ouvrier du Sud, que tout en apparence pourrait opposer et qui ne sont finalement que les deux faces d'une même destinée. Les deux hommes entretiennent une relation difficile - et c'est un euphémisme - avec leur fille respective, et se voient investis d'une mission familiale, mission qui va les mener au bout d'eux-mêmes, et engendrer une amitié qui tient plus de la survie lors d'un naufrage que d'une relation mondaine... Leurs silhouettes m'ont fait penser aux deux vagabonds de "En attendant Godot" de Samuel Beckett. Ces deux italiens, au moment où nous faisons leur connaissance, ne sont rien d'autre que deux être en sursis, en attente de la mort, après une vie faite de désillusion et de labeur. Ils se rencontrent au cours d'une nuit angoissante, et sont tout à coup mis en demeure de trouver une énergie nouvelle pour sauver ce qui reste de leur famille. Par une entraide mutuelle, physique ou matérielle, ils scellent un pacte muet, traversent l'enfer ensemble dans une succession de scènes assez surréalistes et parfois insoutenables.
Le style de Giovani Arpino est ainsi agencé que nous ne savons jamais si nous sommes dans un rêve cauchemardesque ou dans la réalité. Ce que vivent les deux protagonistes est décrit avec maints détails crus et précis, mais leur environnement se nimbe de poésie. Chaque arbre, coucher de soleil, ruelle de Turin, paysage de campagne est présenté à l'aide de métaphores étranges, sensorielles, qui aèrent le récit parfois étouffant. le personnage de Staline, le chat de l'instituteur du nord, est un peu le contrepoint stable du récit qui ne cesse de vaciller et de nous déstabiliser. Cette juxtaposition d'univers antinomiques donne me semble-t-il la force et l'originalité de ce récit étrange qui m'a remuée. "Mon frère italien" a une fin bien déterminée, et pourtant, au terme de ce roman, l'impression demeure de quelque chose d'inachevé. Reste un hymne discret mais tenace à la solidarité, à l'amitié, à la paternité, recouvert d'une couche de tristesse dans la solitude d'une vieillesse qui ne veut pas mourir, ou alors, debout, fière, après un glorieux combat. "Mon frère italien" se clôt par ailleurs par un discret mais remarquable salut dans l'écriture.
Ecrit dans les années 70, ce roman n'a rien perdu de son actualité. Je suis curieuse de découvrir les autres oeuvres de cet auteur.
Petite anecdote personnelle pour terminer ce billet : après ma deuxième séance de lecture, d'une soixantaine de pages, ma nuit a été envahie d'un rêve dans lequel je déambulais dans Turin et parlais italien. J'ai pourtant lu ce livre en version française. Puissance évocatrice d'un auteur, réminiscence d'une lectrice...
Lien : http://parures-de-petitebijo..
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Le présent roman m'a été conseillé par une collègue, et, je n'ai pas régretté de l'avoir écouté.
Ne connaissant pas trop les romanciers italiens, ce roman fut pour moi une découverte.

Il s'agit ici d'une chronique douce amère des habitants de Turin dans les année 71, au travers de deux portraits de vieillards que tout oppose (l'un est un instituteur à la retraitre de gauche, et, grand admirateur de Staline tandis que l'autre est un ancien ouvrier d'origine calabraise), unis à leur corps défendant par une promesse faite à chacun de leur proche.

Ce n'est pas le Turin des riches que l'auteur décrit, mais, celui des "petites gens" où malgré un certain désabusement, malgré un certain fatalisme, un certain cynisme, malgré les difficultés financières, il y a une envie de vivre afin de faire reculer la mort au maximun.

On assiste également à la naissance à une certaine "amitié" entre les deux héros, même si celle çi devient une entente afin de se proteger l'un et l'autre (en effet, la promesse qu'ils ont tout deux passé va aboutir à une action pas très catholique).

Enfin bref, Mon frère italien est un roman à découvrir, et, à lire de toute urgence.
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A travers une verve caustique qui dépeint avec beaucoup de fatalisme cette Italie des années 70 en perdition, Giovanni Arpino signe un roman d'une grande force narrative. Les protagonistes de ce roman sont deux vieillards à la retraite que tout oppose. L'un est issu de la classe ouvrière, l'autre de la classe intellectuelle. L'un est originaire du Nord, l'autre du Sud. Pourtant, les deux anciens se rallient dans leur désespoir et dans leur humiliation. Perdus dans cette Italie qu'ils ne reconnaissent plus et dont la lente dégradation leur laisse un goût amer, ils vont s'unir pour sauver leur « honneur » bafoué par leurs filles respectives, deux fiascos complets dont-ils ont honte…

Laver son honneur dans le sang, voilà qui semble bien digne des mafieux de Cosa Nostra où la dignité de la famiglia passe avant toute chose. C'est donc avec une extrême noirceur que Giovanni Arpino décrit ce Turin au soleil écrasant, où l'on bastonne les vieillards au détour des rues pour trois francs six sous. Une ville de petits malfrats où les honnêtes gens n'ont plus leur place, une ville de décrépitude morale et de décadence. L'auteur, en fin observateur des moeurs de son temps, nous narre la rencontre de deux âmes soeurs, vieillards figés dans l'attente de la mort salvatrice. La plume de Giovanni Arpino est évocatrice, écrasante et caustique, la narration légèrement syncopée donnant du cachet à l'oeuvre. On suit ce récit avec compassion et douleur, mais surtout avec consternation face au déclin du pays et de ses acteurs. Seule touche lumineuse, ancrée à la vie et à l'aspect immuable des choses, le chat Staline, éternel compagnon de Carlo Botero, qu'il appelle affectueusement « adjudant ». Digne comme un chat, le vieil instituteur semble finalement avoir plus de choses en commun avec cet ami à fourrure, qu'avec ses semblables.

En bref, « Mon frère italien » est un roman acerbe, servi par une très belle plume évocatrice. le portrait brossé de Turin par Giovanni Arpino est révélateur du déclin de ce pays, qui sombre sous sa corruption omniprésente. Giovanni Arpino se dresse en fin observateur des moeurs de ses pairs et signe une satire grinçante et juste, qui se révèle en tous points une incroyable découverte. Que je suis heureuse d'avoir faite.

Lu dans le cadre de l'opération « Masse critique » entre babelio et les éditions Belfond, que je remercie.
Lien : http://avideslectures.over-b..
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Ce livre a été pour moi une découverte, découverte d'un auteur que je ne connaissais pas. Les bibliothécaires font vraiment bien leur travail d'incitation à la lecture.Mais venons en au fait. Quel talent, quel style, quelle poésie ! Un soupçon de suspense, comment peut-on penser que Botero, instituteur à la retraite puisse vouloir tuer... Et le suspens renverse la vapeur, mais quoi ? Deux hommes, deux retraités, italien du nord, italien du sud. Deux mondes et pourtant leurs chemins se croisent s'associent, l'un jauge l'autre, l'autre comprend l'un. La route continue dans une ville écrasée de soleil, écrasée de malheurs aussi, où les prostituées et les drogués, les paumés et les gens de bien s'agrippent, se mêlent et se démêlent. La vie italienne comme seuls les vrais cinéastes nous l'ont fait connaître, dans les films des années 60/70, et que l'on retrouve ici sous la plume de Giovanni Arpino. On se croirait dans les scènes du film "heureux sales et méchants"...
Le talent de Arpino, est de nous introduire, de nous inclure tellement fort dans le récit et l'on craint que la fin soit autre.....
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J'ai pris ce livre au hasard à ma bibliothèque de quartier et ce fut une belle trouvaille ! Je ne connaissais pas cet auteur et n'avais pas vu les films qui ont été tournés à partir de deux de ses textes : « Parfum de femme » et aussi « Ames perdues ». Il a été scénariste et je comprends donc l'intérêt des dialogues qui émaillent le livre. Il sait raconter et raconter court mais prenant. Deux êtres vieillissants se rencontrent fortuitement, l'un portant secours à l'autre agressé dans une ruelle sombre de Turin. Ils se découvrent un point commun : une vengeance à accomplir pour sauver en quelque sorte leur honneur. Et ils se soutiennent mutuellement dans cette quête. L'un veut venger son honneur en tuant celle qui l'a mis à mal et l'autre a été poussé par sa propre fille à commettre un crime pour la venger. Ils n'ont pas une forme éblouissante. L'un se soutient à coup de Campari dilué dans un peu d'eau. L'autre a l'espoir qu'une fois son forfait accompli, il pourra couler des jours heureux loin de là auprès de son fils. le chat, Staline, est le témoin muet de leur entente cordiale. C'est amusant de voir ces deux sexagénaires flirter avec le juridiquement incorrect. J'ai passé un bon moment de lecture en compagnie de Carlo Botero et de Raffaelle Cardoso.
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critiques presse (1)
Bibliobs
16 septembre 2011
A travers cet étrange compagnonnage qui prendra l'allure d'une association de malfaiteurs et ne durera que le temps d'accomplir ce que ces deux infortunés estiment être leur devoir, Giovanni Arpino traduit avec une humanité saisissante cette lutte obstinée contre la vieillesse, les regrets et l'anéantissement.
Lire la critique sur le site : Bibliobs
Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
Il aurait bien aimé expliquer, dire : j'ai toujours cru dans le double décimètre, dans le compas, dans les lignes des cahiers, dans l'addition, la multiplication, la soustraction, dans les formes qui font de l'Italie une botte, l'Afrique une escalope à la milanaise, de l'Amérique du Sud un cornet de glace. Les formes indiquent, commandent, modèlent, répètent la Création. Avec les formes, nous commençons à comprendre. Les enfants : levez deux doigts de la main, des deux mains, Voilà que deux plus deux font quatre. Et le chiffre quatre devient idée, devient forme qu'on n'oublie pas. Les enfants à l'école comprennent quand on leur montre l'Amérique du Sud comme un cornet de glace. Ils rient, et ce rire aussi est une forme, grâce à laquelle ils n'oublieront plus. J'ai toujours cru en la grammaire, en les verbes "être" et "avoir", car la grammaire, y compris la conjugaison d'"être" et d"avoir", constitue une forme de justice, mais minuscule, pas celle que toi, Raffaele Cardoso, père et assassin, tu invoques - une déesse, statue dotée de balance, marbre stupide.
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-mon père à moi est mort au Venezuela. Il fabriquait des chaussures. Il nous envoyait un dollar par lettre. Un dollar américain. Je me rappelle le facteur, qui montait dans le village en criant : il y a votre dollar, femmes ! Notre région a toujours été une région de veuves.
- la chair italienne a engraissé l'univers. Sous la terre c'est notre langue qui est la plus parlée."
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"Un de mes fils a peut-être rencontré votre personne, répondit Saraceno, courroucé. Ceci est la maison de mes fils. Et ils ne l'ont pas encore vue. Monsieur l'avocat ne me les renvoie pas. Je le paie, je me saigne, mais mes fils continuent de respirer l'air de la prison. Pendant ce temps, Tomaso Nicastro savoure le vin des moines. Il savoure des chevreaux. Tomaso Nicastro rit. Tomaso Nicastro commande. Tomaso Nicastro suce des fraises à la crème. Moi, je fabrique des ricotte, et lui, Nicastro, vole le temps au paradis."
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Il sentit grandir en lui la conscience de sa culpabilité.
Elle se fraya un chemin parmi les brumes d'anciennes pudeurs, creva des toiles d'araignée de vacillements, de respects et de politesse obstinée, racla la moisissure de sa lointaine bonne volonté.
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Il attendit d'avoir parcouru des rues et des places pour jeter son fiel : "Ce Barabbas. Tout craché. Même quand il rit, il n'est que saloperie. Ces gens-là vous lèchent les pieds quand ils sont dans le besoin et jouent les maîtres du monde dès qu'ils ont l'odeur d'une lire sur la peau. Père de pute et fils de pute, voilà de quoi il m'a traité. Et dire que quand nous l'avions ramassé, il ne savait pas même distinguer une punaise d'une cerise...
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