Un roman ou une chronique ? C'est l'histoire de plusieurs destins issus d'une "téci" dans le Nord pauvre, pas loin des camps clandestins pas même répertoriés. le destin de quelques jeunes qui souhaitent sortir de leur cité, échapper à leur noire destinée. Il leur faut lutter à contre courant pour ne pas s'enliser dans le fatalisme des habitants de la "tour". Selim qui rejoint la légion pour avoir ses papiers, Joséphine qui vient d'Afghanistan, Babeled ancien légionnaire, etc...
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Parcours en vrille et volonté d'en découdre dans un ghetto de banlieue sinistré, fin 2001. Un roman énergisant.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Le 12 novembre 2001, une jeune héroïne des temps modernes piétinait en compagnie d’autres héros et héroïnes des temps modernes sur l’esplanade de la Préfecture du Nord. Elle faisait la queue dans le froid d’une nuit finissante enchaînée à une longue file de personnes, tous âges, tous sexes, toutes nationalités, devant les guichets de la Préfecture, qui étaient tous fermés à cette heure, parce que l’heure, c’est l’heure, et que les guichets de la Préfecture du Nord, ça ouvre que pile après 8 h.
Personne ne connaît le véritable nom de cette jeune héroïne des temps modernes, si ce n’est son mari, qui était tout aussi jeune qu’elle, qui avait eu accès à sa véritable identité, en dépit de sa profonde ignorance de ce qu’avait été la vie de sa femme avant, quand, pour savoir, il aurait fallu voyager dans un pays où on voyage seulement armé de fusils d’assaut, de chars et de drones, ce qui ne l’avait pas empêché de continuer de l’appeler Joséphine, le prénom sous lequel elle s’était présentée à lui dans la vieille caravane où, si jeune, elle travaillait déjà dur pour se sortir, à force d’attraits, d’efforts et d’épargne, de la jungle humide du Nordaisis. Dans cette jungle humide, Joséphine avait atterri deux ans avant de rencontrer ce futur mari, qui n’était qu’un jeune marlou revêtu tous les jours gris de l’hiver et de l’automne du même manteau taillé en loden râpé, étonnant, en totale contradiction avec ses occupations sociales de jeune marlou faisant de toute sa vie une misère de trafics et de larcins au bord d’un canal déshérité, le canal du Nord, encore et toujours hébergé chez sa mère, encore et toujours créchant en jeune adulte dans l’unique chambre du F2 loué par sa mère sur les bords d’un canal depuis sa naissance.
À ce stade, il est encore trop tôt pour évoquer la mère du jeune marlou en loden râpé, une mère qui s’appelle Madame Dabritz et qui est, plus pour très longtemps, semble-t-il, secrétaire Admissions et Scolarité au Département de Français Langue Étrangère (FLE) de l’université du Nord, Département qui a vocation à enseigner la langue française à des étudiants étrangers, mais, puisqu’elle s’appelle Madame Dabritz, et puisque le jeune marlou, son fils, prénommé Guillaume, surnommé Loulou, porte son nom, cela fait que nous avons au moins ça, que, depuis qu’elle est mariée à Guillaume Dabritz, la jeune héroïne en attente sur l’esplanade de la Préfecture du Nord pour obtenir un rendez-vous à l’issue duquel elle obtiendra sans nul doute – c’est la loi – sa carte Vie Privée et Famille (VPF), Art. L313-11, Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, peut d’ores et déjà répondre au doux patronyme de « Joséphine Dabritz », dans la rue, à la banque, chez le médecin, à l’ANPE, au guichet de la Préfecture du Nord (« Madame Dabritz, que puis-je faire pour vous ? »), ou, hélas, bien avant de toucher au graal du guichet de Préfecture, au cours du contrôle d’identité qui allait funestement advenir sur l’esplanade en question, alors que la file qui faisait la queue était encore et toujours immobile occupée à se les geler, pieds et reste, dans le froid glacial de cette petite aube de journée d’automne.
Un automne particulier dans le monde. Des bords de l’Indus qui hydrate tout le Pendjab pakistanais jusqu’à la ville qui ne dort jamais, bâtie sur un ancien territoire indien à l’embouchure de l’Hudson sur l’Atlantique où, à 9 h 16 GMT / UTC-5 ce jour-là, un avion va s’écraser à nouveau, ça fait 5 avions maintenant, où, aussi, une jeune Française prénommée Blanche, 63 jours avant ce jour du 12 novembre 2001, était assise sur son canapé devant la téloche à regarder défiler des images de cratères fumants qui lui avaient fait se mordre la lèvre supérieure jusqu’au sang d’avoir migré au mauvais moment de l’autre côté de l’océan. Un automne particulier dans le monde entier. Dans le Nouveau Monde, dans l’Ancien Monde, jusqu’à Khwājah Bahā ud Dīn, province de Takhar, Afghanistan, une ville pas plus grosse que Béthune, en passant par Kaboul, même si le grand jour mondialisé de Kaboul n’allait advenir que dans 24 heures, le 13 novembre 2001, jour de l’entrée des Américains dans la ville, ville ouverte, ville soumise, à l’issue du contrôle de routine qui allait advenir sur cette esplanade de Préfecture du Nord, et il n’y aura donc pas ici l’injure écrite d’expliquer comment, pourquoi, à quelles fins, cet automne de l’année 2001 a été si particulier dans le monde pour tous.
Les circonstances particulières qui avaient conduit à la conception de Guillaume s’étaient traduites par l’écume sociale d’une vérité à jamais échappée des deux amants, à jamais échappée de leurs deux corps qui avaient fait follement l’amour trois nuits dans une chambre pas très luxueuse à l’arrière d’un hôtel de gare. Cette vérité avait percé l’obscurité qui accompagne les mystères de la Conception, mystères jamais disparus, qui s’étaient étendus à tous les individus même, alors qu’auparavant ils touchaient seulement les exceptionnelles naissances, type Jésus-Christ, Mahomet ou Kaspar Hauser. Et cette vérité était parvenue, par le biais de formulaires administratifs, à la connaissance des praticiens de l’Hôpital du Nord, ceux-là désormais doués d’un savoir incontestable sur ce que les deux amants étaient devenus à la suite de leurs trois nuits d’amour : un « parent isolé » + une « case vide ».
Après le 3 nivôse 1800, rapport à l’élimination des chefs de guerre, les méthodes avaient beaucoup changé.
Ainsi, les deux conspirateurs de l’attentat dit « de la machine infernale » ont voulu eux aussi infliger la mort à un chef de guerre despotique au nom honni par tous, et pour cause, et nous avons nommé Napoléon, mais ils ne voulaient pas pour autant sauter avec le despote dans leur feu d’artifice sanguinaire, ils ne voulaient pas finir avec le gros tonneau à vin bourré de poudre qui devait sonner la fin d’un despotisme d’autant plus unique qu’il tenait le langage de la liberté. Ils se sont donc enfuis, loin, très loin. Alors que les deux comparses qui ont réussi à faire sauter la tronche au grand loup gris à la cigarette fumante, Prince des montagnes et vallées reculées, chef militaire admiré des enfants, de l’Europe, le seul des chefs de l’histoire de tous les brigands du monde jamais convié à une table de négociation par Youri Andropov, eux, ils n’ont pas hésité à se faire sauter en bouillie en compagnie du chef de guerre au béret de laine des montagnes.
Comment s'emparer des enjeux qui traversent la société française ? Peut-on retraiter, avec humour, fantaisie et un brin de folie le sujet des violences policières ou encore la question du voile ? Que peuvent la littérature et l'humour quand ces débats enflamment les réseaux sociaux et la vie politique française ? C'est là l'origine du dialogue proposé par le Festival Effractions entre la romancière Dominique Dupart, maîtresse de conférences en littérature, spécialiste du lien entre littérature et démocratie, et autrice d'un roman puissant et débridé, La vie légale paru en janvier chez Actes Sud (2021) et l'humoriste français Haroun : que ce soit à travers ses sketches ou son livre Les Pensées d'Héractète, paru en novembre 2020 aux Equateurs, Haroun se veut un observateur pointu et sans concession des incohérences qui jalonnent notre société dans toutes ses facettes : racisme, politique, religion, écologie…
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