AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782070263516
48 pages
Gallimard (17/07/1981)
4.08/5   136 notes
Résumé :
« J'écris ces lignes à un moment où le monde, tel qu'il tourne en ce dernier quart de siècle, pose à un écrivain, avec de plus en plus d'évidence, une question mortelle pour toutes les formes d'expression artistique : celle de la futilité. De ce que la littérature se crut et se voulut être pendant si longtemps - une contribution à l'épanouissement de l'homme et à son progrès - il ne reste même plus l'illusion lyrique. J'ai donc pleinement conscience que ces pages pa... >Voir plus
Que lire après Vie et mort d'Emile AjarVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (15) Voir plus Ajouter une critique
4,08

sur 136 notes
5
4 avis
4
8 avis
3
2 avis
2
0 avis
1
0 avis
Mais qu'ai-je entre les mains, un livre, vraiment ?
Un gros article, plutôt, non ?
Un texte extrêmement intéressant, certes, mais quand même un peu léger pour du Gary !

Ça, c'est ma toute première impression.

De quoi s'agit-il, exactement ?
De la publication programmée à titre posthume de ce récit de Romain Gary, le vrai, où il justifie l'invention du personnage de Emile Ajar à qui il a attribué la paternité de quatre de ses derniers romans.

La genèse d'une entourloupe littéraire qui lui a, au passage, permis de recevoir deux fois le prix Goncourt, ce qu'en interdit catégoriquement le règlement.

Et cette genèse a de quoi séduire : vouloir que ce soit à la qualité du texte qu'un éditeur décide de le produire plutôt qu'étant la énième rédaction d'un auteur à succès dont ni la légende ni la notoriété ne sont plus à prouver.

Redevenir vierge de toute existence littéraire, bien sûr mais aussi médiatique.
Parce qu'ils en prennent pour leur grade, les critiques littéraires, parisiens de surcroît !
L'entre soi, les petites vengeances, les combines ou les jalousies sont ici épinglés qui dirigent le sens des papiers de presse accompagnant la sortie d'un livre nouveau plutôt que le pur sentiment généré par sa lecture.

Et, entre les lignes, se pose aussi la question du lectorat : dans quel état d'esprit suis-je quand je commence une lecture ?
Suis-je naturellement plus indulgent lorsque j'ouvre le dernier ouvrage d'un écrivain qui me plait.
À contrario, ne suis-je pas plus exigeant et plus acerbe lorsque la plume est tenue par un auteur dont la personnalité ou les oeuvres précédentes me déplaisent ?

Cette virginité espérée était le désir d'un Gary-Frankenstein qui a finalement vu sa créature prendre sinon son envol, au moins simplement vie lorsqu'il fut question de lui donner un visage, pour la presse justement, en l'occurrence celui de son petit cousin qui n'avait pas l'envergure du rôle.

Quelques explications donc, sur ce scénario qui lui échappe et la duplicité de l'auteur qui, dans la production éditée sous pseudonyme, jonchait son travail de petots cailloux blancs tel un petit Poucet désireux en secret que ce secret soit éventé et que la farce éclabousse le petit milieu littéraire français qui l'avait déjà enterré pour élire de nouvelles idoles fraiches à adorer.

Un très court texte en guise d'adieu surtout puisque sa mort il l'avait décidée,
un mot laissé posé sur la table de la cuisine au moment du départ définitif et choisi,
un post-it fluorescent collé à la porte blanche et métallique du frigo américain qui fera office de codicille quand son corps, à lui, sera refroidi.

Un document en fait !
 
Commenter  J’apprécie          287
Dans le courant des années 70, alors qu'il était décrit par la critique comme un écrivain fini, asséché, Romain Gary publie quatre romans : « Gros-Câlin », « La Vie devant soi », Pseudo et « L'Angoisse du roi Salomon ».
Les média ont besoin de concret : le rôle d'Emile Ajar sera endossé par Paul Pavlovitch, un parent éloigné de l'auteur ; en fait, son petit cousin.

« Vie et mort d'Emile Ajar » est le récit de cette supercherie qui permit à Romain Gary d'obtenir le Goncourt pour la deuxième fois en 1975 avec « La vie devant soi ».
Rédigé en mars 1979, et transmis à son éditeur le 30 novembre 1980, « Vie et mort d'Emile Ajar » ne sera publié qu'après sa mort par suicide le deux décembre de la même année…

Un récit qui se termine par ces mots : « Je me suis bien amusé. Au revoir et merci. »… Salut, l'artiste !
Commenter  J’apprécie          270
Un titre posthume que je découvre à la fin de celui que je viens de terminer avec Pseudo.
Je me dois donc de le lire et d' y poster un petit billet car j'avoue que c'est une très belle confession de la part de ce Monsieur, si bon écrivain du XXè siecle.
Ce court texte est très sérieux contrairement à Pseudo et pour cause, les multiples personnalités de Gary lui ont permis d'être un merveilleux personnage à lui tout seul. Je lui tire mon chapeau et reviendrai encore sur certains de ses titres que je n'ai pas encore découverts, par ignorance ou encore déception du 1er que j'avais lu de cet auteur (La promesse de l'aube) comme quoi je ne dois pas m'arrêter sur un titre.
Commenter  J’apprécie          220
"La date à laquelle ces révélations seront faites sera déterminée par Robert et Claude Gallimard en accord avec mon fils."

Signé Romain Gary, 30 nov. 1980.
Deux jours plus tard, l'auteur quittait volontairement ce monde.
La reproduction de ce mot manuscrit figure en exergue d'un texte posthume publié le 17 juillet 1981. Cette brève explication de la supercherie a fait l'objet d'un nouveau tirage, simultanément à la diffusion de L'enchanteur, téléfilm très réussi avec Charles Berling, plus Gary que nature et la pétillante Claire de la Rüe du Can, pensionnaire très jeune de la Comédie-Française.
Dès lors, j'ai eu envie d'en savoir davantage sur les motivations du grand écrivain à se tirer une balle dans le pied. Je suis à peine plus savant après lecture. Néanmoins, j'ai retenu quelques arguments et raisons d'être, noyés dans la critique acerbe (à juste titre) du parisianisme et dans le flot de citations produites par des lecteurs attentifs ayant reconnu Gary dans Ajar, à l'inverse de critiques piètres lecteurs. Je n'en citerai qu'un, sous peine de griller l'essence de 43 pages que l'on peut classer comme document historique :

"J'étais las de n'être que moi-même."
Ce moi-même façonné par sa mère, dont il a réalisé toutes ses projections. Au point peut-être de se défaire d'un destin tracé et de s'inventer un double original, sacré par un Goncourt.
"Recommencer, revivre, être un autre fut la grande tentation de mon existence."
Disparaître pour mieux réapparaître, quel beau thème de roman, ou le grand fantasme de l'éternel recommencement.
Commenter  J’apprécie          151
Ce livre très court est l'explication publique de Romain Gary sur son utilisation du pseudoEmile Ajar. Encore aujourd'hui, cette affaire continue d'avoir du retentissement. L'actualité de Paul Pavlowitch y est sans doute pour quelque chose. C'est émouvant de lire Romain Gary à titre posthume. Cela m'a touché de constater le ressentiment qu'il éprouvait pour ce parisianisme qui l'a tant maltraité médiatiquement.
C'est une lecture très instructive qui prouve à quel point cet auteur était un visionnaire et avait organisé en main de maître sa propre renaissance littéraire, jusqu'à la justification post-mortem.
Commenter  J’apprécie          140

Citations et extraits (12) Voir plus Ajouter une citation
J'écris ces lignes à un moment où le monde, tel qu'il tourne en ce dernier quart de siècle, pose à un écrivain, avec de plus en plus d'évidence, une question mortelle pour toutes les formes d'expression artistique: celle de la futilité. De ce que la littérature se crut et se voulut être pendant si longtemps - une contribution à l'épanouissement de l'homme et à son progrès - il ne reste même plus l'illusion lyrique. J'ai donc pleinement conscience que ces pages paraîtront sans doute dérisoires au moment de leur publication, car, que je le veuille où non, puisque je m'explique ici devant la postérité, je présume forcément que celle-ci accordera encore quelque importance à mes œuvres et, parmi celles-ci, aux quatre romans que j'ai écrits sous le pseudonyme d’Émile Ajar.
Commenter  J’apprécie          110
Car il n'y a pas que la critique parisienne, laquelle a autre chose à faire qu'à étudier sérieusement les textes: il y a aussi tous ceux qui ont le temps de lire et qui ne se bornent pas à patiner à la surface de l'actualité.
Commenter  J’apprécie          70
J'étais las de n'être que moi même. J'étais las de l'image Romain Gary qu'on m'avait collée sur le dos une bonne fois pour toute depuis trente ans, depuis la soudaine célébrité qui était venue à un jeune aviateur avec Education européenne [...]
Commenter  J’apprécie          60
C'était une nouvelle naissance. Je recommençais. Tout m'était donné encore une fois. J'avais l'illusion parfaite d'une nouvelle création de moi-même, par moi-même.
Commenter  J’apprécie          70
J'écris ces lignes à un moment où le monde, tel qu'il tourne en ce dernier quart de siècle, pose à un écrivain, avec de plus en plus d'évidence, une question mortelle pour toutes les formes d'expression artistique : celle de la futilité.
Commenter  J’apprécie          30

Videos de Romain Gary (68) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Romain Gary
"Un monument ! Une biographie indispensable pour (re) découvrir Romain Gary, cet auteur incroyable ! " - Gérard Collard.
Dans le Jongleur, Agata Tuszyska peint un portrait unique de Romain Gary, unique auteur à avoir reçu deux fois le Prix Goncourt (pour Les Racines du Ciel et La Vie devant soi), diplomate, scénariste, pilote de guerre, voyageur; et montre comment son personnage va au-delà des limites de la pirouette artistique et des responsabilités humaines.
À retrouver en librairie et sur lagriffenoire.com https://lagriffenoire.com/le-jongleur.html
autres livres classés : canularsVoir plus
Les plus populaires : Littérature française Voir plus


Lecteurs (541) Voir plus



Quiz Voir plus

Tout sur Romain Gary

Dans quelle ville est né Romain Gary ?

Kaunas
Riga
Vilnius
Odessa

12 questions
609 lecteurs ont répondu
Thème : Romain GaryCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..