AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Chloé Royer (Traducteur)
EAN : 9782714493231
338 pages
Belfond (01/06/2023)
  Existe en édition audio
3.48/5   499 notes
Résumé :
Après Les hommes ont peur de la lumière, Douglas Kennedy poursuit sa fresque d’une Amérique plus divisée que jamais. Un roman choc, glaçant de réalisme, le constat effrayant de ce que pourraient devenir bientôt les États-Unis…

2045. Les États-Unis n’existent plus, une nouvelle guerre de Sécession en a redessiné les frontières.
Sur les côtes Est et Ouest, une république où la liberté de mœurs est totale mais où la surveillance est constante. Da... >Voir plus
Que lire après Et c'est ainsi que nous vivronsVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (114) Voir plus Ajouter une critique
3,48

sur 499 notes
Divorce à l'américaine.
Dès qu'un évènement survient aux states depuis quinze ans, il y a toujours un journal français pour inviter Douglas Kennedy à s'exprimer sur la politique et la société de son pays. C'est un peu comme Line Renaud à chaque décès de célébrités. Il a un forfait illimité pour donner son avis éclairé. L'avantage avec Douglas, c'est que nous l'avons toujours sous la main puisque ses romans ne se vendent pas dans son pays et qu'il parle français pour critiquer le yankee et flatter nos égos.
Alors Oui, j'ai lu un roman de Douglas Kennedy. Je l'ai même acheté. Je pourrai mentir et dire que je l'ai trouvé sur la table de nuit de ma moitié, mais non, elle ne supporte plus ces histoires de ruptures amoureuses et de mariages ratés entre gens bien élevés. Je n'ai pas d'alibi. Je ne vous ferai pas croire davantage qu'un ami me l'a offert pour ma collection de clichés littéraires ou que souffrant de vertige, j'ai fait une cure de littérature plate.
C'est la trame du roman qui m'a permis de botter les fesses de mes idées immobiles (un peu borné l'ODP parait-il !) et de vraiment apprécier cette dystopie autour d'une nouvelle guerre de sécession qui opposerait en 2045 les états puritains nostalgiques du Mayflower et les états progressistes, wokistes biocoopisés des côtes américaines à la liberté plus que surveillée. Un futur hélas plausible.
Dans la confédération théocratique, team Jesus, impossible de sécher le catéchisme, d'avorter, de divorcer, de copuler avant le mariage, de blasphémer (même quand on se coince un doigt dans une porte, nom de D… !), de darwiniser, de dire amen à la science, de permettre à Monsieur de s'appeler Madame et vices versa. C'est pas Ibiza ! Tenues correctes exigées, rien de visible au-dessus des genoux, pulls enroulés sur les épaules et socquettes blanches obligatoires, avec une soumission aveugle aux 12 apôtres qui détiennent le pouvoir de la secte. Deux principes chrétiens y sont un peu négligés : la tolérance et le pardon. C'est le problème des conditions de vente avec les mentions en petits caractères que personne ne lit jamais. Même dans la Bible. Au menu, barbecues à l'orléanaise pour les mécréants, rebelles tatoués écorchés comme des crevettes, athées hâtés de transhumer à l'étranger.
Dans l'autre camps, une république de façade qui affiche une totale liberté de moeurs, un libéralisme décomplexé mais qui impose une surveillance généralisée même au sein du foyer pour prévenir tout comportement rétrograde ou violent. Les individus sont pucés, la vie privée surveillée, souriez, vous êtes filmés, l'histoire jugée et le présent dans les mains d'un président milliardaire, sorte de clone d'Elon Musk et de Jeff Bezos à l'intelligence trop artificielle. Ne me gardez pas les petits s'ils en font.
Au centre de cette Amérique qui n'a pas attendu le grand tremblement de terre pour se séparer, la ville de Minneapolis se retrouve coupée en deux, murée comme Berlin durant la guerre froide. Ces états désunis qui se déchirent comme un couple se surveillent par le biais de services secrets chargés des basses besognes et d'entretenir la haine réciproque.
Peste ou choléra, n'exagérons pas. On va dire, chtouille ou crise de foi. Derrière cette toile de fond, le pamphlet politique laisse la priorité (à droite !) à un roman d'espionnage efficace truffé de rebondissements. Samantha Stengel, la narratrice, espionne au service de la République est chargée de s'infiltrer en territoire ennemi pour assassiner une tueuse redoutable. Surprise à la Kennedy : la cible concernée n'est autre que sa demi-soeur, qui exerce le même métier pour l'autre camps. Les coïncidences, tout de même.
Les doutes existentiels du personnage de Samantha Stengel apportent la nuance nécessaire à une histoire volontairement binaire mais qui ne manque pas de justesse au regard du jusqu'au boutisme ambiant.
Il est vrai que dans le concours de crétinisme, difficile de départager ceux qui déboulonnent les statues, réécrivent l'histoire et les romans d'Agatha Christie ou de Roald Dahl de ceux qui paradent dans le Capitole avec une tête de bison ou multiplient les autodafés dans les bibliothèques scolaires de Floride pour empêcher l'enseignement de l'évolution naturelle et du changement climatique.
J'ai vu que Douglas Kennedy s'était déjà attaqué au fondamentalisme chrétien dans « Au Pays de Dieu (2004) ». Il faudra que je me le procure maintenant que j'ai dépassé mes préjugés concernant cet auteur.
Futur conditionnel.
Commenter  J’apprécie          12814
Il suffit de quelques années pour qu'un monde en crise évolue vers le cauchemar que les plus avertis pressentaient : Les Etats-Unis, dans l'univers que dépeint Douglas Kennedy, sont devenus la caricature d'eux-mêmes. Séparés en deux communautés ennemies, les frontières qui les séparent sont hermétiques. Sam Stengel, dont les talents ont été repérés (et comment ne pas sélectionner les meilleurs sujets quand le moindre cycle de leur respiration, les calories ingurgitées ou dépensées et les déplacements les plus minimes sont immédiatement récupérés par les banques de données alimentées par des puces implantées sous la peau, rejetant au statut d'antiquités les montres ou smartphones du passé) a rejoint le réseau d'agents spéciaux chargés de lutter contre la confédération, un conglomérat d'états républicains. Elle est chargée d'une mission bien précise, éliminer une femme activiste et dangereuse. Elle découvrira rapidement que cette femme n'est pas une étrangère pour elle …

Ce roman d'anticipation glaçant, prend vite des allures de thriller, dont Douglas Kennedy maîtrise très bien les codes. On en arrive vite à tourner les pages à toute allure, ce que l'auteur déclare souhaiter : nous faire passer une nuit blanche sur ce livre !

C'est d'autant plus efficace que chacun a pu constater ces dernières décennies la vitesse à la quelle évolue en parallèle la technologie et la surveillance des individus. Rien de plus plausible que l'univers clos qu'il décrit.

Quand aux dérives obscurantistes évoquées, elle n'ont rien non plus d'un délire: on ne peut que constater la régression des droits acquis dans nos nations modernes.


Un excellent moment de lecture.

338 pages Belfond 1er juin 2023
Traduction (Anglais) : Chloé Royer
#DouglasKennedy #NetGalleyFrance

Lien : https://kittylamouette.blogs..
Commenter  J’apprécie          651
Ce n'est pas qu'un roman, mais une vision. Pas qu'une fiction, mais une anticipation. Douglas Kennedy regarde devant nous et imagine le futur, Et c'est ainsi que nous vivrons en 2045.

Deux décennies à peine, ce n'est rien du tout à l'échelle de nos sociétés, et pourtant le monde que décrit l'auteur est bien différent du nôtre. Ou plutôt, il en est l'extension, avec des curseurs poussés juste (beaucoup) plus loin.

Dans ce futur, place aux Etats-Désunis. Les anciens gendarmes du monde se sont repliés sur leur lutte intestine. Une guerre de sécession version 2.0 a morcelé le pays, au point d'y ériger des frontières comme autant de murs de Berlin version XXL.

Les côtes Est et Ouest et quelques états proches, d'un côté. de l'autre, les états de l'intérieur. Et deux modes de vie et de pensée opposés, démocratie autoritariste vs théocratie redneck.

Douglas Kennedy a pensé, théorisé, ce demain avec minutie. Pas juste en en dessinant les grandes lignes, mais en le réfléchissant avec nombre de détails. Allant parfois bien au-delà du continent américain, élargissant parfois le spectre au monde entier.

L'auteur donne le « choix » entre deux idées sociétales qui s'entrechoquent. Entre l'état de Big Brother ou la dictature de l'Inquisition.

Rien de farfelu, ce roman d'anticipation est clairement un prolongement de ce que l'on est en train de vivre à travers un pays et un monde qui se désagrègent. Et où la remise en cause des droits fondamentaux est devenue la nouvelle norme.

Qu'on soit clair, le roman n'est pas un pamphlet politique ou une thèse, mais bien un vrai thriller, avec une intrigue fouillée. de l'art de faire passer des messages forts à travers un genre dit de divertissement. Un mélange détonnant qui prend aux tripes, se révèle haletant après 1/3 de mise en place, tout en mettant mal à l'aise et faisant réfléchir.

Clairement, ce n'est pas un livre qu'on oublie lorsqu'on le pose sur sa table de chevet. Il embolise les pensées, continue son cheminement intérieur.

La partie thriller met en scène une agente secrète de la partie République (celle des deux côtes) qui doit infiltrer le camp adverse, via la Zone Neutre, pour éliminer une cible. Sauf qu'elle va se retrouver personnellement et émotionnellement impliquée dans cette mission.

Cette partie offre son lot de surprises, et le contexte ambiant rend l'intrigue sacrément addictive et singulière.

Ce que décrit Kennedy n'est rien de moins qu'un démocraticide. Par les deux parties.

D'un côté dans la Bible Belt étendue, sous couvert de croyances religieuses moyenâgeuses, les droits sont bafoués, la différence ou la dissension sont passibles de mort par le feu.

De l'autre, la démocratie est totalement encadrée, tout est fliqué, pour une réelle sécurité apportée mais au détriment de la notion même d'intimité.

L'écrivain américain a clairement choisi son parti, on le sent très vite, mais ça ne l'empêche pas d'être critique et d'alerter. Oui, ce roman est clairement engagé, il y tire à boulets rouges sur la génération Trump et l'avancée de l'obscurantisme au détriment de la liberté et de l'égalité.

La diatribe est vive contre ces états de l'intérieur qui « écorchent leur salmigondis de dogmes hypocrites », dixit l'auteur.

Le plus terrifiant sans doute, pour moi, est que ce propos visionnaire, avec sa foultitude de détails, correspond beaucoup à ma manière de voir les choses… Pessimiste clairement, alarmiste assurément. Pour tenter d'éveiller aussi les consciences sur ce possible avenir. Un monde qui fonctionne autrement, mais à quel prix ?

Et c'est ainsi que nous vivrons, une affirmation, tant Douglas Kennedy s'engage sur ce futur proche qu'il a pensé avec minutie. Une vision d'une division qui est déjà en marche, aussi effrayante que fascinante et éclairante, à travers le jeu du thriller d'espionnage.

Avec une intrigue prenante et engagée qui porte le propos tout en faisant défiler les pages devant nos yeux écarquillés. Pour mieux les laisser grands ouverts sur ce qui risque de nous attendre ? Un roman épatant et important.
Lien : https://gruznamur.com/2023/0..
Commenter  J’apprécie          544
Dans quel monde voulons nous vivre dans vingt ans ?

Vingt ans , c'est demain et la vision que nous propose Douglas Kennedy dans son nouveau roman sorti en avant première en France fait plutôt froid dans le dos .
Ici, il n'est pas vraiment question de changement climatique, c'est le glissement de nos rapports sociaux, de nos politiques, de notre catégorisation de plus en plus intolérante aux différences .
Et cela aboutit à la scission des États Unis en deux pays irréconciliables : une théocratie , Confédération du Centre caractérisée par une reprise en main religieuse à base de valeurs chrétiennes intégristes et une démocratie , la république des 2 côtes où tout le monde est surveillé faisant penser bien sûr au roman de Georges Orwell , 1984 : Big Brother is watching you ..."

Samantha Stengel est un agent secret de la République, elle est chargée d'aller éliminer dans le territoire confédéré une femme qui est à l'origine de l'arrestation et de la mise à mort d'indics , et Sam va l'apprendre au tout début de sa mission, sa cible est en fait sa demi-soeur .
L'intrigue est assez simple , sans véritable enjeu et ne représente pas , à mon avis, l'essentiel de ce roman .

L'écrivain a beaucoup cogité sur ce que pourrait être cette sécession, visiblement marqué par le passage de Trump à la Maison Blanche .
La description de cette partie de l'Amérique est assez courte puisque son héroïne n'y fait qu'un court séjour avec quelques surprises comme la persistance de bibliothèques et de librairies .
Il est à remarquer que la culture résiste bien de chaque coté , en particulier le cinéma avec de nombreuses références de films.

Il s'étend plus sur la République unie, avec une liberté très limitée puisque chacun est muni d'une micro-puce et d'une montre connectée ne permettant pas d'écart.
Mais les rapports humains ne concernent principalement que le milieu particulier des agents secrets ce qui est tout de même limité , on connait peu la vie et l'opinion des gens ordinaires ...

Pas d'échappatoire si ce n'est d'être seul , plus aucune trace de fraternité , la confrontation entre les demi-soeurs est à ce titre caractéristique : une envie de se connaitre à travers un même père mais une réconciliation impossible entre deux camps opposés et le lecteur ne se pose pas la question de savoir où il voudrait vivre car aucun camp n'est enviable... Chacun reste seul : constat amer ...

Un futur pour notre monde qui fait frémir et même si Douglas Kennedy est francophile , sa vision reste pour moi celle d'un américain . Peut-être est-ce ma défense pour ne pas imaginer qu'un tel avenir est possible ?
Avec mes remerciements à NetGalley et aux Éditions Belfond
Commenter  J’apprécie          424
J'ai lu un Kennedy. de son vivant. Pourquoi?
Parce que quelques amis "bien sous tous les rapports" en ont entendus parler abondamment, ont fait de même avec moi et donc...
Il est vrai que cela se laisse lire, c'est fluide comme tout bon accrolivre. En fait je dois l'avouer, c'était en plus un test personnel. Je connaissais en gros la dystopie proposée par l'auteur : les états-désunis d'Amérique qui réalisent physiquement la rupture perceptible aujourd'hui dans la tête des habitants de l'Empire. Et moi dans tout ça ? Je voulais tester ma préférence. Ma préférence à moi...
Pas besoin d'être grand Clerc pour comprendre que le résultat est un peu biaisé puisque le narrateur et l'héroïne de trouvent d'un côté. Suggestion : une double narration aurait été une idée certes plus chronophage mais porteuse d'une dimension supplémentaire intéressante.
Nous avons donc, là-bas, deux états qui se sont constitués autour des fractures économiques et morales contemporaines.
D'un côté le modèle libéral sociétal woke LGBText.
De l'autre le modèle puritain, retour aux textes religieux.
D'un côté, un gourou transhumaniste, un must...
De l'autre une confrérie qui fait appliquer les règles du bon vieux livre sacré des chrétiens ; pas de déviance sexuelle, de relations avant et hors mariage, de blasphème, d'évolution etc...
Je note cependant que l'auteur s'est débarrassé du problème économico-social dans les deux camps, ce qui est certes habile mais consiste à ce niveau en une manipulation dommageable.
Pour les libéraux, plus de chômage, niveau élevé de prise en charge sociale complètement à rebrousse-poil de la tendance actuelle...
Pour les puritains, moins d'informations mais cela à l'air de rouler pour l'emploi revenu à des choses apparemment simples et entraînant un moindre développement technologique. le modèle ex-soviétique continue de laisser son empreinte mentale dans les représentations des systèmes collectivistes. La Chine n'a pas encore implémenté cette grille de lecture.
Donc une fois évacués les problèmes de l'emploi, du logement, de la santé, de l'éducation, l'auteur focalise sur les moeurs. Les règles de vie personnelle choisies par les deux sociétés.
Il greffe sur ce fond diffus dystopique une histoire d'espionnage à Minneapolis, sorte de Berlin futur, entre ces entités par l'intermédiaire de deux personnages qui ne devraient pas s'affronter.
Je n'irais pas plus loin pour ne pas divulgâcher mais ce petit roman se laisse lire et met le doigt sur une question qui se pose réellement : jusqu'où pouvons-nous faire société ensemble ?
Commenter  J’apprécie          422


critiques presse (8)
LeMonde
25 mars 2024
Roman d’anticipation aussi percutant que glaçant.
Lire la critique sur le site : LeMonde
LeJournaldeQuebec
24 juillet 2023
Dans ce captivant roman, Douglas Kennedy s’est projeté dans le futur pour nous montrer ce qui attend peut-être les États-Unis. Glaçant.
Lire la critique sur le site : LeJournaldeQuebec
LeFigaro
26 juin 2023
Dans cette dystopie, la Sécession règne aux États-Unis avec un pays coupé en deux.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
LeSoir
26 juin 2023
Un roman coup-de-poing de plus à ajouter à la liste des œuvres de Kennedy qui, depuis 25 ans, ne cessent d’autopsier la société américaine et de lui tendre un miroir pas très tendre.
Lire la critique sur le site : LeSoir
Liberation
19 juin 2023
A la fois politique, futuriste et politique, le dernier roman de l’auteur américain réunit tous les ingrédients pour devenir le best-seller de l’été.
Lire la critique sur le site : Liberation
LaLibreBelgique
16 juin 2023
Fin observateur du pays qui l’a vu naître, Douglas Kennedy signe avec "Et c'est ainsi que nous vivrons" un roman mordant qui déroule un scénario plausible.
Lire la critique sur le site : LaLibreBelgique
Bibliobs
06 juin 2023
Dans « Et c’est ainsi que nous vivrons », son roman le plus politique, l’écrivain américain imagine une nouvelle sécession dans l’Amérique de 2045, avec une démocratie sur les côtes Est et Ouest et une théocratie au centre.
Lire la critique sur le site : Bibliobs
LeMonde
05 juin 2023
L’écrivain prédit la dislocation des Etats-Unis dans une dystopie vraisemblable et caustique.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (52) Voir plus Ajouter une citation
NOUS SOMMES le 6 août. Dans le grand pays qui faisait autrefois partie du nôtre, ils s'apprêtent à brûler mon amie sur un bûcher.
Elle s'appelle Maxime. Elle travaille pour moi, en quelque sorte, et nous nous sommes rapprochées au fil des années, bien que, dans mon secteur, une telle camaraderie soit considérée comme peu professionnelle. La raison de son exécution : elle a osé plaisanter en public au sujet du Christ.
Telle est la faute de Maxime : un monologue comique où elle se demandait tout haut si le Fils de Dieu s'était chié dessus sur la croix. Puis, toujours plus loin dans la surenchère surréaliste, elle émettait l'hypothèse qu'après la crucifixion, les centurions avaient ôté sa couche à Jésus pour s'adonner à une bonne vieille orgie coprophile. J'ai connu mieux comme humour. Je dirais même que cela atteint des sommets de mauvais goût. Toutefois, de notre côté de la frontière, il est encore possible de faire ce genre de blague graveleuse sans le payer de sa vie. Nos anciens compatriotes, en revanche, sont loin de prendre à la légère tout ce qui touche de près ou de loin au blasphème. Pour aggraver encore les choses, l'autrice de ce récit alternatif du Vendredi saint est une humoriste transsexuelle, qui a joyeusement renoncé à son pénis pour s'épanouir dans sa nouvelle identité de femme - crime épouvantable pour les gens d'en face. Et, si cela ne suffisait pas, elle est l'archétype de la Juive new-yorkaise.
Je me sens mal, ce soir, à attendre de voir Maxime traînée jusqu'au bûcher. À vrai dire, je suis même effondrée, mais je sais pertinemment que je ne peux pas me permettre de le montrer.
Commenter  J’apprécie          166
Puis on passe à la vitesse supérieure avec ce qu'ils surnomment le Troisième Grand Éveil : l'âge d'or des télévangélistes dans les années 1980, qui coïncide avec les mandats présidentiels de Rinald Reagan et George Bush père. Ce dernier est particulièrement admiré pour avoir vaincu son alcoolisme grâce à sa foi retrouvée. S'ensuivent les horreurs du sécularisme sous les administrations Obama et Biden : l'activisme pro-LGBT, l'avortement légal, la corruption de la jeunesse par le biais de l'éducation sexuelle et de la contraception accessible aux mineurs, l'immoralité d'un pays tolérant les sexualités « déviantes » - soit tout ce qui diverge des relations hétérosexuelles traditionnelles -, etc. Une salle est tout entière consacrée à Donald Trump, décrit comme un homme dépravé et déchu, mais responsable tout de même de la nomination de trois juges ultraconservateurs à la Cour suprême, ouvrant ainsi la voie à l'interdiction de l'avortement et au « retour à une morale chrétienne ».
Commenter  J’apprécie          80
À l'image des cellules biologiques qui nous composent, il est dans notre nature de nous diviser. L'histoire de l'humanité, individuelle et collective, n'est qu'une longue succession de schismes de ruptures. Nous brisons nos familles, nos couples. Nous brisons nos nations. Et nous rejetons la faute les uns sur les autres. C'est un besoin inhérent à la condition humaine : celui de trouver un ennemi proche de nous, afin de l'exclure en prétextant, ne pas avoir le choix. Vivre, c'est diviser.
Commenter  J’apprécie          150
À l’image des cellules biologiques qui nous composent, il est dans notre nature de nous diviser. L’histoire de l’humanité, individuelle et collective, n’est qu’une longue succession de schismes et de ruptures. Nous brisons nos familles, nos couples. Nous brisons nos nations. Et nous rejetons la faute les uns sur les autres. C’est un besoin inhérent à la condition humaine : celui de trouver un ennemi proche de nous afin de l’exclure en prétendant ne pas avoir le choix.
Vivre, c’est diviser.
Commenter  J’apprécie          100
Je m’avance jusqu’à la frontière. De là où je me tiens, j’aperçois tous les barbelés qui surmontent le mur de l’autre côté, derrière l’immense portail barrant l’accès au territoire ennemi. Bien sûr, j’ai déjà vu d’innombrables photos de cet endroit. Nos journaux regorgent toujours de récits de citoyens confédérés – le plus souvent des dissidents – abattus alors qu’ils tentaient de traverser pour se réfugier chez nous. La CU a des caméras pointées sur cet endroit en permanence afin d’observer tous les gens qui s’en approchent. De notre côté, ni barbelés ni mur de quatre mètres de haut. Juste un portail, des pointes conçues pour jaillir du sol et déchiqueter les pneus de n’importe quel véhicule jugé dangereux, un rideau métallique pare-balles et anti-explosion capable de s’abaisser en moins de trois secondes, et des blocs de ciment aux couleurs de la République – bleu et blanc – soigneusement disposés afin de parer aux attentats-suicides à la voiture piégée : il y en a eu deux au cours des mois qui ont suivi la Sécession. Des soldats de notre armée sont postés un peu partout, leurs armes à portée de main. Mais ce que je trouve le plus impressionnant, c’est que Chadwick ait ordonné la construction d’une réplique exacte de Checkpoint Charlie de notre côté du mur. Le message est clair : nous sommes le monde libre.
Commenter  J’apprécie          20

Videos de Douglas Kennedy (83) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Douglas Kennedy
Créaterview 🎧 Douglas Kennedy
autres livres classés : dystopieVoir plus
Les plus populaires : Polar et thriller Voir plus


Lecteurs (1244) Voir plus



Quiz Voir plus

Douglas Kennedy

En quelle année parait son premier roman Cul de Sac (parfois titré Piège nuptial)?

1973
1987
1994
2003

10 questions
216 lecteurs ont répondu
Thème : Douglas KennedyCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..