Il ne s'agit pas ici de fiction, mais d'un ensemble de textes qui ont la mer pour dénominateur commun, j'aurais envie de parler de chroniques ou de causeries.
La mer est abordée par différents aspects: le départ et l'arrivée d'un bateau suite à un voyage de plusieurs mois, les différents vents marins, anecdotes de voyages, les différences entre les bateaux à voiles et à vapeur etc. Conrad nous communique toute sa passion pour la mer et la navigation, ce métier de marin qu'il a choisi dès le plus jeune âge.
C'est certes un écrit mineur par rapport à ses grandes oeuvres de fiction, mais la lecture en est plaisante, grâce à son style fluide et élégant et aussi à la sincérité évidente de l'auteur qui parle de quelques chose qui le passionne, sans la distance qu'entraîne forcement un récit romanesque.
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Certains extraits font partie des plus belles pages que j'ai lues sur la mer, de celles qui sont une source d'inspiration et que j'essaie de partager ? Elles sont un résumé, ou plus exactement une synthèse de Conrad et des questions qui traversent son oeuvre : la mer (et les voyages qui y sont intimement liés) : monde de paix ou de violence? Humanité, civilisée (ayant le sens du devoir, selon Conrad) ou brute ? Nature élémentaire, clémente ou cruelle ? Liberté ou destin ?
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Personne ne revient jamais d'un navire "porté disparu" pour raconter à quel point la mort du bâtiment a été dure, et soudaine et écrasante l'ultime angoisse de ses hommes. Personne ne peut dire quelles étaient leurs pensées, leurs regrets, les paroles qu'ils avaient sur les lèvres quand ils moururent. Mais il y a quelque chose de beau dans le trépas de ces cœurs soudain délivrés de ce paroxysme de lutte, de tension et d'effrayant vacarme, et qui passent de la furie immense et sans repos de la surface à la grande paix de ces profondeurs qui dorment paisiblement depuis le début des temps.
Le Vent d'Ouest règne sur les mers qui cernent les côtes de nos royaume; et de l'entrée des chenaux, du haut de promontoires comme du sommet des tours de guet, d'estuaires de fleuves comme à partir de poternes, de passes, anses, détroits et baies écossaises, la garnison de l'île de Wight et les équipages des navires qui partent et qui rentrent regardent vers l'ouest pour apprécier, d'après les splendeurs diverses de son manteau au couchant, l'humeur de ce gouverneur arbitraire.
Il avait un aspect lamentablement hirsute et une expression sauvagement douloureuse. Sans la candeur inextinguible de ses yeux bleus, dont le regard malheureux et fatigué cherchait à tout instant son brick abandonné et en train de sombrer, comme s'il ne pouvait trouver de repos nulle part ailleurs, il aurait donné l'impression d'être fou. Mais c'était un homme trop simple pour devenir fou, trop simple, de cette simplicité virile qui seule permet à des hommes de traverser indemnes d'esprit et de corps un combat avec la folâtrerie meurtrière de la mer ou avec sa fureur moins abominable.
Déjà je regardais la mer avec d'autres yeux. Je la savais capable de trahir l'ardeur généreuse de la jeunesse, aussi implacablement que, indifférente au mal et au bien, elle aurait trahi l'avidité la plus vile ou l'héroïsme le plus noble. L'idée que je me faisais de sa grandeur magnanime avait disparu. Et je regardais la mer vraie: la mer qui joue avec les hommes jusqu'à ce que leur cœur se brise, et qui use de vaillants navires jusqu'à la mort
Heureux qui comme Ulysse a fait un aventureux voyage : et pour d'aventureux voyages, il n'y a pas de mer qui vaille la Méditerranée, la mer intérieure que les Anciens trouvaient si vaste et si remplie de merveilles. Et, elle était en vérité, terrible et merveilleuse : car c'est nous qui, conduits par l'audace de nos esprits et l'agitation de nos coeurs, sommes les uniques artisans de tout le merveilleux et de tout le romanesque du monde.
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Un navire de croisière qui s'échoue. le commandant qui prend la fuite. Une trentaine de passagers qui perd la vie. Ca c'est passé il y a quelques années, vous vous en souvenez. Pour un marin, déserter le bord c'est le déshonneur suprême. Et pour un romancier, c'est l'occasion de sonder les abysses de l'âme humaine.
« Lord Jim » de Joseph Conrad, un classique à lire chez Folio.
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