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EAN : 9782080441096
192 pages
Flammarion (17/01/2024)
3.6/5   366 notes
Résumé :
Silvia, une jeune villageoise, refuse les honneurs et les richesses que lui offre le prince au nom de l'amour qui l'unit à Arlequin. Mais ce dernier se laisse séduire par une autre femme. "C'est un cristal, Marivaux, c'est dur, ça a des arêtes et des côtes, c'est coupant." (Louis Jouvet).
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Une lecture délicieuse, légère, légère... de la bonne humeur, de l'amour. Une pièce de théâtre classique fidèle à l'état d'esprit du 18 ème siècle. Un moment agréable, très divertissant.
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Créée en 1723 par les Comédiens Italiens, comme la plupart des comédies de Marivaux, c'est une des pièces parmi les jouées et étudiées de son auteur. Elle est en trois actes et en prose.

Sylvia, une jeune paysanne, a été enlevée par le prince, qui veut l'épouser. Mais Sylvia est fiancée à Arlequin, elle l'aime et ne veut pas entendre parler du prince, qu'elle pense n'avoir jamais rencontré. Arlequin est aussi amené au château, il réclame de pouvoir épouser Sylvia et rentrer chez lui. le prince se désespère : il ne veut personne d'autre que Sylvia, qu'il a rencontré en se baladant incognito. La fille d'un domestique, Flaminia, va essayer de manipuler les deux jeunes gens, qui sont autorisés à se voir. le prince va courtiser Sylvia sans avoir l'air de le faire sous les traits d'un jeune officier, et Flaminia, sous prétexte de soutenir l'amour d'Arlequin, va essayer de lui faire oublier Sylvia.

C'est très simple et complexe à la fois, comme toujours chez Marivaux. L'intrigue à proprement parlé peut se résumer en un petit paragraphe, alors qu'on écrit des volumes entiers d'analyse sur la pièce. J'ai envie de parler d'un aspect pas toujours mis en avant en premier, celui du jeu de la tentation. Arlequin et Sylvia sont soumis à une tentation, si on veut faire savant, d'une tentation de second ordre d'après la définition de St Augustin, celle dans laquelle il y a déception ou séduction, la sollicitation d'un agent corrupteur. Cet agent corrupteur propose de transgresser un interdit, un loi morale, et provoque donc un conflit psychique chez l'individu soumis à la tentation. Et il s'avère impossible d'y résister. Mais il faut que le corrupteur soit suffisamment habile pour sauvegarder les apparences, laisser au tenté l'illusion qu'il ne trahit pas ses principes, pour qu'il puisse ne pas perdre l'estime de lui-même, une illusion, un mensonge se construit à deux.

Mais il y a une dissymétrie fondamentale : Arlequin et Sylvia sont des simples paysans, et ils ont à faire à un prince, et à toute une cour qui cherche à les tenter. Sous les allures délicates et subtiles il y a une vraie violence : Sylvia a été enlevée, elle n'est pas là de son propre gré. L'art consiste ensuite à lui faire dire qu'elle a envie d'y rester, et à persuader Arlequin de donner son accord. de les rendre complices en somme. Il y a une opposition énoncée au départ, entre les faux semblants, les fausses valeurs de la cour, et la sincérité, l'honnêteté des jeunes paysans, qui plutôt que des biens et les possessions jugés dérisoires, préfèrent l'amour vrai et authentique. C'est à cela finalement qu'ils doivent renoncer, en succombant à un nouvel partenaire, et en abandonnant l'ancien. On peut se demander combien de temps le prince va trouver amusante cette petite paysanne qu'il s'est donné le caprice d'épouser, et combien de temps Flaminia va s'amuser du naturel d'Arlequin.

Je ne suis pas sûre que le terme de comédie convienne forcément si bien à Marivaux.
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Une journée aura suffi pour briser l'engagement amoureux d'Arlequin et de Silvia.
Le Prince, aidé de Flaminia, une femme rusée et manipulatrice, se fixe comme objectif de conquérir l'amour de Silvia, une jeune fille qu'il a rencontrée à plusieurs reprises dans un temps antérieur à la pièce (il faut bien faire jouer la vraisemblance pour justifier le retournement final de ladite jeune fille !). Pour cela, il lui faut évincer Arlequin, son rival et amant de Silvia, qui en est lui-même très amoureux - et réciproquement.

Au début, les deux jeunes amoureux se cherchent, oserai-je dire, désespérément : Silvia a été "enlevée" contre son gré et est retenue dans la demeure d'un Prince dont elle ignore jusqu'à l'aspect (celui-ci s'était fait passer pour un simple officier). Leur amour est touchant, ils semblent si fidèles et attachés l'un à l'autre ! Mais bientôt Silvia montre des signes de coquetterie et d'amour-propre qui n'ont rien du charme de la simplicité que loue son admirateur "secret", on la sent glisser vers l'inconstance, et ce sentiment se confirme lors de son premier entretien avec son "officier" : elle montre en effet un sérieux penchant pour lui.

Du côté d'Arlequin, il devient la proie amoureuse de Flaminia, qui semble réellement avoir un penchant pour lui, à tel point que je doute encore si la marionnettiste ne s'est pas emmêlée les fils dans sa propre rouerie... Elle demeure du moins la maîtresse du jeu, et conquiert rapidement l'amitié et l'amour du jeune paysan (je crois bien qu'il est paysan).

Peu à peu on observe la distance entre nos deux "amoureux" du départ : les pensées qu'ils ont l'un pour l'autre se font plus espacées et, surtout, plus encombrantes...
C'est ainsi que se crée une double inconstance : Silvia délaisse Arlequin, et Arlequin oublie Silvia.

Certains critiques ont parlé de meurtre en parlant de cette pièce : ce serait alors considérer que l'amour d'Arlequin est Silvia était aussi pur que sincère, et c'est sans doute vrai, car le premier acte les rend touchants d'inquiétude l'un de l'autre.
Néanmoins, comme il est dit plus haut, ce bel amour avait déjà commencé à mourir avant la pièce : Silvia avait déjà rencontré le Prince, et des sentiments avaient déjà eu le temps de naître dans son coeur. du côté d'Arlequin, on pourrait prétexter à son inconstance la simplicité de son caractère, sa rusticité - qui fait, soit dit en passant, tout le sel comique (et aussi un peu tragique) de la pièce.

En effet, je trouve savoureuses les scènes avec Arlequin, il a une franchise et une répartie des plus hilarantes ! Quand il martyrise le pauvre Trivelin, notamment, je dois dire que j'ai bien ri! J'ai une franche sympathie pour ce personnage.

J'en ai en revanche moins pour celui de Silvia, dont la coquetterie et la fierté exacerbée évincent chez elle tout le charme de la simplicité. Ce que je veux dire, c'est que je n'aime pas sa manière de raisonner et de traiter son premier amant, je la trouve froide et cruellement indélicate. Mais ce n'est qu'un ressenti personnel.

Bien que ce soit une comédie, j'ai cru sentir une certaine tristesse s'échapper du fil de cette histoire, et plus particulièrement lors de la scène qui confronte Arlequin au Prince (III, 5) : cette scène est plus (à mon sens) du ressort tragique que comique. Les deux amants de Silvia font état de leur peine et prennent pitié l'un de l'autre. Cela (cette tristesse) me fait rapprocher cette lecture de celle du Misanthrope de Molière, où Alceste, pris au milieu d'une comédie qui le place comme "bouffon", demeure assez malheureux...

Ma conclusion : la Double Inconstance joue un double jeu de comédie et de tragédie (le mot est certes un peu fort).
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La pièce de théâtre « La double inconstance » de Marivaux raconte l'histoire de deux jeunes villageois, Sylvia et Arlequin, qui s'aiment mais sont séparés par la volonté d'un prince. Ce dernier a fait enlever Sylvia puis Arlequin. Il les retient dans son palais et cherche à se faire aimer de Sylvia sans dévoiler son identité. Il charge le valet Trivelin ainsi que Lisette et Flaminia, deux femmes de sa cour, de briser le lien amoureux qui les unit. Si leurs tentatives maladroites échouent, la machination mise en place par Flaminia mettra un terme à l'amour des deux inconstants.

Lorsque, en 1723, Marivaux écrit « La double inconstance », il s'interroge sur l'organisation de la société, sur les rapports entre maîtres et sujets, sur le rôle des hommes et des femmes ou sur la place du désir et du bonheur dans l'amour.

J'ai vu cette pièce en 2011, jouée par la Compagnie Léonard Cobiant qui regroupe des adultes qui désirent s'exercer à l'art dramatique. J'ai vraiment appréciée la mise en scène contemporaine de la pièce qui a été rendue possible par la modernité des thèmes abordés par Marivaux.
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Dans cette pièce, Marivaux ne se contente pas de "marivauder". Au-delà du jeu des sentiments cachés-révélés, il propose quelques réflexions bien senties sur le jeu social. Les répliques d'Arlequin, en particulier, mettent à nu les ridicules des grands, de ceux qui se disent "honnêtes hommes" et ne sont que des fripons.
L'histoire galante entre le Prince et Sylvia paraît finalement assez fade et n'aurait que peu d'intérêt si elle ne servait ainsi de prétexte à cette critique et à cette réflexion sur le pouvoir, l'arbitraire, l'opportunisme, etc.
Arlequin joue pour une fois un rôle plus profond que celui de simple bouffon lâche et ivrogne. Il incarne plutôt l'homme simple et honnête, quoique toujours un peu porté sur la bonne chère. Il est celui qui dit tout haut ce que l'auteur semble penser tout bas.
Enfin, on retrouve le style simple et élégant de Marivaux, ses répliques qui fusent et rebondissent les unes sur les autres.
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Citations et extraits (37) Voir plus Ajouter une citation
TRIVELIN, s'arrêtant comme affligé - Flaminia ne saurait se passer de vous? Ah! la plume m'en tombe des mains.
ARLEQUIN - Oh! oh! que signifie donc cette impertinente pâmoison-là?
TRIVELIN - Il y a deux ans, seigneur Arlequin, il y a deux ans que je soupire en secret pour elle.
ARLEQUIN, tirant sa batte - Cela est fâcheux, mon mignon; mais en attendant qu'elle en soit informée, je vais toujours vous en faire quelques remerciements pour elle.
TRIVELIN - Des remerciements à coups de bâton! je ne suis pas friand de ces compliments-là. Eh! que vous importe que je l'aime? Vous n'avez que de l'amitié pour elle, et l'amitié ne rend point jaloux.
ARLEQUIN - Vous vous trompez, mon amitié fait tout comme l'amour, en voilà des preuves.

Il le bat.

TRIVELIN s'enfuit en disant - Oh! diable soit de l'amitié!

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ARLEQUIN revient sur le théâtre - Ces marauds-là! J'ai eu toutes les peines du monde à les congédier. Voilà une drôle de façon d'honorer un honnête homme que de mettre une troupe de coquins après lui : c'est se moquer du monde.

Il se retourne et voit Trivelin qui revient.
Mon ami, est-ce que je ne me suis pas bien expliqué?
TRIVELIN, de loin - Ecoutez, vous m'avez battu : mais je vous le pardonne, je vous crois un garçon raisonnable.
ARLEQUIN - Vous le voyez bien.
TRIVELIN, de loin - Quand je vous dis que nous ne méritons pas d'avoir des gens à notre suite, ce n'est pas que nous manquons d'honneur; c'est qu'il n'y a que les personnes considérables, les seigneurs, les gens riches, qu'on honore de cette manière-là : s'il suffisait d'être honnête homme, moi qui vous parle, j'aurais après moi une armée de valets.
ARLEQUIN, remettant sa batte - Oh! à présent je vous comprends; que diantre! que ne dites-vous les choses comme il faut? Je n'aurais pas les bras démis, et vos épaules s'en porteraient mieux.
TRIVELIN - Vous m'avez fait mal.
ARLEQUIN - Je le crois bien, c'était mon intention; par bonheur ce n'est qu'un malentendu, et vous devez être bien aise d'avoir reçu innocemment les coups de bâton que je vous ai donnés...
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LISETTE - Pourquoi me demandez-vous cela?
ARLEQUIN - Eh! pour le savoir.
LISETTE, d'un air naturel - Je serais bien sotte de vous dire la vérité là-dessus, et une fille doit se taire.
ARLEQUIN, à part les premiers mots - Comme elle y va! Tenez, dans le fond, c'est dommage que vous soyez une si grande coquette.
LISETTE - Moi!
ARLEQUIN - Vous-même.
LISETTE - Savez-vous bien qu'on n'a jamais dit pareille chose à une femme, et que vous m'insultez?
ARLEQUIN, d'un air naïf - Point du tout : il n'y a point de mal à voir ce que les gens nous montrent; ce n'est point moi qui ai tort de vous trouver coquette, c'est vous qui avez tort de l'être, Mademoiselle.
LISETTE, d'un air un peu vif - Mais par où voyez-vous donc que je le suis?
ARLEQUIN - Parce qu'il y a une heure que vous me dites des douceurs, et que vous prenez le tour pour me dire que vous m'aimez. Ecoutez, si vous m'aimez tout de bon, retirez-vous vite, afin que cela s'en aille; car je suis pris, et naturellement je ne veux pas qu'une fille me fasse l'amour la première, c'est moi qui veux commencer à le faire à la fille, cela est bien meilleur. Et si vous ne m'aimez pas, eh fi! Mademoiselle, fi! fi!
LISETTE - Allez, allez, vous n'êtes qu'un visionnaire.
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Silvia

Eh bien ! Mon serviteur, qui me vantez tant les honneurs que j'ai ici, qu'ai-je affaire de ces quatre ou cinq fainéantes qui m'espionnent toujours ? On m'ôte mon amant, et on me rend des femmes à la place ; ne voilà-t-il pas un beau dédommagement ? Et on veut que je sois heureuse avec cela ! Que m'importe toute cette musique,ces concerts et cette danse dont on croit me régaler ?
Arlequin chantait mieux que tout cela, et j'aime mieux danser moi-même que de voir danser les autres,entendez-vous ? Une bourgeoise contente dans un petit village vaut mieux qu'une princesse qui pleure dans un bel appartement. Si le prince est si tendre, ce n'est pas ma faute, je n'ai pas été le chercher ; pourquoi m'a-t-il vue ? S'il est jeune et aimable, tant mieux pour lui, j'en suis bien aise : qu'il garde tout cela pour ses pareils, et qu'il me laisse mon pauvre Arlequin, qui n'est pas plus gros monsieur que je suis grosse dame, pas plus riche que moi, pas plus glorieux que moi, pas mieux logé, qui m'aime sans façon, que j'aime de même, et que je mourrai de chagrin de ne pas voir. Hélas, le pauvre enfant ! Qu'en aura-t-on fait ? Qu'est-il devenu ? Il se désespère quelque part, j'en suis sûre, car il a le coeur si bon ! Peut-être aussi qu'on le maltraite...
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TRIVELIN - Mais, Madame, écoutez-moi.
SILVIA - Vous m'ennuyez.
TRIVELIN - Ne faut-il pas être raisonnable?
SILVIA, impatiente - Non, il ne faut pas l'être, et je ne le serai point.
TRIVELIN - Cependant...
SILVIA, avec colère - Cependant, je ne veux point avoir de raison : et quand vous recommenceriez cinquante fois votre cependant, je n'en veux point avoir : que ferez-vous là?
TRIVELIN - Vous avez soupé hier si légèrement, que vous serez malade, si vous ne prenez rien ce matin.
SILVIA - Et moi, je hais la santé, et je suis bien aise d'être malade; ainsi, vous n'avez qu'à renvoyer tout ce qu'on m'apporte, car je ne veux aujourd'hui ni déjeuner, ni dîner, ni souper; demain la même chose. Je ne veux qu'être fâchée, vous haïr tous tant que vous êtes, jusqu'à tant que j'aie vu Arlequin, dont on m'a séparée : voilà mes petites résolutions, et si vous voulez que je devienne folle, vous n'avez qu'à me prêcher d'être plus raisonnable, cela sera bientôt fait.
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« La double inconstance » de Marivaux, c'est à lire en poche dans la collection Etonnants Classiques.
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