AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Philippe Guilhon (Traducteur)
EAN : 9782081226623
Flammarion (20/04/2009)
3.97/5   86 notes
Résumé :
Les textes ici rassemblés témoignent, par leur violence polémique d'une démarche provocatrice. Mais chez Pasolini la volonté de ne rien dissimuler dans sa recherche de la vérité est sa seule provocation. L'auteur de Théorème examine tour à tour le problème de l'avortement, le fascisme, l'antifascisme et surtout la société de consommation de masse qui conduit à la déshumanisation de la société et à la destruction de l'identité italienne.
Que lire après Écrits corsairesVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Je viens de terminer la lecture de ce livre. L'impression générale que j'en retire est que tout cela est terriblement italien et ancré dans la réalité des années 70. J'avoue avoir parcouru des passages entiers en diagonale, à la recherche d'un passage sur lequel m'accrocher. Et j'y suis arrivé parfois. Tout ce qui concerne la consommation reste exact, et même amplifié. Mais déjà, sa dénonciation du pouvoir télévisuel perd de sa force à notre époque où les réseaux sociaux semblent prendre l'avantage. D'ailleurs, qu'aurait-il pensé d'Internet ?
Pour autant, tout le reste me semble propre à la culture italienne héritée de l'après-guerre. Les vieux combats entre l'Église, la démocratie chrétienne et le parti communiste sont à remiser au grenier.
Ce qui n'a peut-être pas changé en revanche, et l'actualité nous le montre, c'est cette capacité qu'a la politique italienne, que lui permet les institutions et la constitution, de pouvoir s'adapter, pour le meilleur ou le pire, à force d' »arrangements ». le pays fonctionne comme cela !
Les révoltes et dénonciations de Pasolini paraissent aujourd'hui bien fades, et j'en suis bien déçu, mais ce recueil de textes nous le prouve. Hormis, encore une fois, et là, il fut visionnaire, sa dénonciation du fascisme de la société de consommation qui nivelle la société par le bas. Même si quelques voix éparses se lancent dans la décroissance ou le recyclage écologique.
Commenter  J’apprécie          295
Pasolini développe ici sa pensée concernant la société de consommation qu'il considère comme l'idéologie totalitaire par excellence. Il aborde le fascisme et l'anti-fascisme modernes démontrant que ces luttes, qui opposent des personnes appartenant au même monde, créent des oppositions stériles dont la seule fonction est de neutraliser notre pensée critique. Les intellectuels modernes ne sont pas épargnés... Il développe également une analyse de l'évolution de l'Eglise en tant que structure de pouvoir, de la religion catholique en tant qu'idéologie du peuple, de l'histoire de l'Italie pendant les années de plomb, et des critiques, certes provocatrices mais construites, concernant l'avortement, le divorce, l'homosexualité. Cocktail explosif! J'ai apprécié cet essai, bien que je n'adhère pas à tout son contenu, Pasolini est un intellectuel qui me semble "libre" de tout dogme et bien au dessus des clivages bien définis de notre époque.
Commenter  J’apprécie          110
Mutiné d'avance contre un millénaire qu'il voyait venir, un millénaire qui désacralise toute chose et la subordonne au pouvoir de l'argent, Pasolini voit sous ses yeux disparaître les multiples cultures de l'Italie de sa jeunesse, uniformisées par la société de consommation, absorbées dans le mondialisme totalitaire en provenance des États-Unis. L'auteur analyse le pouvoir dans ce qu'il a de foncièrement mauvais, et ce qu'il en dit n'est pas éloigné des considérations d'un Pierre Clastres dans La Société contre l'État.

Face à l'avènement de la société de consommation, les prétendues oppositions de droite et de gauche, figées dans des schémas archaïques, répètent en boucle les mêmes âneries et s'accusent mutuellement de fascisme ou de gauchisme. Tirant parti de ces luttes stériles, le pouvoir de l'argent progresse sans entrave.

L'Église elle-même, après un millénaire de règne sur l'Occident, s'est effondrée face au mondialisme consumériste. Nous voilà partis pour un nouveau millénaire : celui de la consommation.

Voir la critique complète :
Lien : https://www.senscritique.com..
Commenter  J’apprécie          20
Visionnaire !
Commenter  J’apprécie          30
Commenter  J’apprécie          20

Citations et extraits (40) Voir plus Ajouter une citation
Une bonne partie de l'antifascisme d'aujourd'hui, ou du moins ce qu'on appelle antifascisme, est soit naïf et stupide soit prétextuel et de mauvaise foi. En effet elle combat, ou fait semblant de combattre, un phénomène mort et enterré, archéologique qui ne peut plus faire peur à personne. C'est en sorte un antifascisme de tout confort et de tout repos. Je suis profondément convaincu que le vrai fascisme est ce que les sociologues ont trop gentiment nommé la société de consommation, définition qui paraît inoffensive et purement indicative. Il n’en est rien. Si l’on observe bien la réalité, et surtout si l’on sait lire dans les objets, le paysage, l’urbanisme et surtout les hommes, on voit que les résultats de cette insouciante société de consommation sont eux-mêmes les résultats d’une dictature, d’un fascisme pur et simple.
Commenter  J’apprécie          860
Aucun centralisme fasciste n'est parvenu à faire ce qu'a fait le centralisme de la société de consommation. Le fascisme proposait un modèle, réactionnaire et monumental, mais qui restait lettre morte. Les différentes cultures particulières (paysannes, sous-prolétariennes, ouvrières) continuaient imperturbablement à s'identifier à leurs modèles, car la répression se limitait à obtenir leur adhésion en paroles. De nos jours, au contraire, l'adhésion aux modèles imposés par le centre est totale et inconditionnée. On renie les véritables modèles culturels. L'adjuration est accomplie. On peut donc affirmer que la "tolérance" de l'idéologie hédoniste voulue par le nouveau pouvoir est la pire des répressions de toute l'histoire humaine. Mais comment une telle répression a-t-elle pu s'exercer? A travers deux révolutions, qui ont pris place à l'intérieur de l'organisation bourgeoise : la révolution des infrastructure, et la révolution du système d'information. Les routes, la motorisation, ect., ont désormais uni les banlieues au centre, en abolissant toute distance matérielle. Mais la révolution des mass media a été encore plus radical et décisive. Au moyen de la télévision, le centre s'est assimilé tout le pays, qui était historiquement très différencié et très riche en cultures originales. Une grande oeuvre de normalisation parfaitement authentique et réelle est commencée et - comme je le disais - elle a imposé ses modèles : des modèles voulus par la nouvelle classes industrielle, qui ne se contente plus d'un "homme qui consomme" mais qui prétend par surcroît que d'autre idéologies que celle de la consommation sont inadmissibles. C'est un hédonisme néolaïque, aveuglément oublieux de toute valeur humaniste et aveuglément étranger aux sciences humaines.
Commenter  J’apprécie          171
Nous n'avons rien fait pour qu'il n'y ait pas de fascistes. Nous les avons seulement condamnés, en flattant notre conscience avec notre indignation; plus forte et impertinente était notre indignation, plus tranquille notre conscience.
En vérité, nous avons eu une attitude fasciste envers les fascistes (je parle surtout des jeunes) : nous avons hâtivement et impitoyablement voulu croire qu'ils étaient prédestinés à être fascistes par leur race et que, face à cette détermination de leur destin, il n'y avait rien à faire. Et ne nous le dissimulons pas : nous savions tous, dans notre vraie conscience, que quand l'un de ces jeunes décidait d'être fasciste, c'était purement fortuit, ce n'était qu'un geste sans motifs et irrationnel ; un seul mot aurait peut-être suffi pour qu'il en allât différemment. Mais jamais aucun d'entre nous n'a parlé avec eux, ou ne leur a parlé. Nous les avons tout de suite acceptés comme d'inévitables représentants du Mal, tandis qu'ils n'étaient sans doute que des adolescents et adolescentes de dix-huit ans qui ne connaissaient rien à rien, et qui se sont jetés la tête la première dans cette horrible aventure par simple désespoir.
Mais nous ne pouvions pas les distinguer des autres (je ne dis pas des autres extrémistes, mais de tous les autres). Voilà notre épouvantable justification.
Le staretz Zossime (littérature pour littérature!) a tout de suite su distinguer, parmi ceux qui s'étaient rassemblés dans sa cellule, Dimitri Karamazov, le parricide. Alors il s'est levé de sa chaise et est allé se prosterner devant lui; il a agi ainsi (comme il devait par la suite l'expliquer au plus jeune des Karamazov) parce que Dimitri était destiné à faire la chose la plus horrible et à éprouver la douleur la plus inhumaine qui soit.
Pensez (si vous en avez la force) au garçon ou aux garçons qui sont allés déposer les bombes sur la place de Brescia. Ne fallait-il pas se lever et se prosterner devant eux?
Commenter  J’apprécie          141
Les Italiens ont accepté d'enthousiasme ce nouveau modèle que leur impose la télévision, selon les normes de la production qui crée le bien-être (ou, mieux, qui sauve de la misère). Ils l'ont accepté, ce modèle, oui, mais sont-ils vraiment en mesure de le réaliser?

Non. Ou bien ils le réalisent matériellement seulement en partie et en deviennent la caricature, ou ils ne parviennent à le réaliser que d'une façon si réduite qu'ils en deviennent victimes. Frustration ou carrément désir névrotique sont désormais des états d'âme collectifs. Prenons un exemple : les sous-prolétaires, jusqu'à ces derniers temps, respectaient la culture et n'avaient pas honte de leur propre ignorance ; au contraire, ils étaient fiers de leur modèle populaire d'analphabètes appréhendant pourtant le mystère de la réalité. C'est avec un certain mépris effronté qu'ils regardaient les "fils à papa", les petits-bourgeois, dont ils se différenciaient, même quand ils étaient forcés de les servir. Aujourd'hui, au contraire, ils se mettent à avoir honte de leur ignorance : ils ont abjuré leur modèle culturel (les très jeunes ne s'en souviennent même plus, ils l'ont complètement perdu), et le nouveau modèle qu'ils cherchent à imiter ne prévoit ni l'analphabétisme, ni la grossièreté. Les jeunes sous-prolétaires - humiliés - dissimulent le nom de leur métier sur leurs cartes d'identité et lui substituent le qualificatif d'"étudiant". Bien évidement à partir du moment où ils ont commencé à avoir honte de leur ignorance, ils se sont également mis à mépriser la culture (caractéristique petite-bourgeoise, qu'ils ont immédiatement acquise par mimétisme). Dans le même temps, le jeune petit-bourgeois, dans sa volonté de s'identifier au modèle 'télévisé" - qui, comme c'est sa classe qui l'a créer et voulu, lui est essentiellement naturel - devient étrangement grossier et malheureux. Si les sous-prolétaires se sont embourgeoisés, les bourgeois se sont sous-prolétarisés. La culture qu'ils produisent, comme elle est technologique et rigoureusement pragmatique, empêche le vieil "homme" qui est encore en eux de se développer. De là vient que l'on trouve en eux une certaine déformation des facultés intellectuelles et morales.
Commenter  J’apprécie          71
Aucun centralisme fasciste n'est parvenu à faire ce qu'a fait le centralisme de la société de consommation. Le fascisme proposait un modèle, réactionnaire et monumental, mais qui restait lettre morte. Les différentes cultures particulières (paysannes, sous-prolétariennes, ouvrières) continuaient imperturbablement à s'identifier à leurs modèles, car la répression se limitait à obtenir leur adhésion en paroles. De nos jours, au contraire, l'adhésion aux modèles imposés par le centre est totale et
inconditionnée. On renie les véritables modèles culturels. L'abjuration est accomplie. On peut donc affirmer que la "tolérance" de l'idéologie hédoniste voulue par le nouveau pouvoir est la pire des répressions de toute l'histoire humaine. Mais comment une telle répression a-t-elle pu s'exercer ? À travers deux révolutions, qui ont pris place à l'intérieur de l'organisation bourgeoise : la révolution des infrastructures, et la révolution du système d'information. Les routes, la motorisation ect., ont désormais uni les banlieues au centre, en abolissant toute distance matérielle. Mais la révolution des mass média a été encore plus radicale et décisive. Au moyen de la télévision, le centre s'est assimilé tout le pays, qui était historiquement très différencié et très riche en cultures originales. Une grande oeuvre de normalisation parfaitement authentique et réelle est commencé et - comme je le disais - elle a imposé ses modèles : des modèles voulus par la nouvelle classe industrielle, qui ne se contente plus d'un "homme qui consomme" mais qui prétend par surcroît que d'autres idéologies que celle de la consommation sont inadmissibles. C'est un hédonisme néolaïque, aveuglément oublieux de toute valeur humaniste et aveuglément étranger aux sciences humaines.
L'idéologie précédente voulue et imposé par le pouvoir était, comme on le sait, la religion : le catholicisme était en effet formellement l'unique phénomène culturel qui "unifiait" les italiens. Aujourd'hui, il est devenu concurrent de ce nouveau phénomène culturel "unificateur" qu'est l'hédonisme de masse, aussi, en tant que concurrent, le nouveau pouvoir a déjà commencé, depuis quelques années, à le liquider. Il n'y a en effet rien de religieux dans le modèle du jeune homme et de la jeune femme proposé et imposé par la télévision. Ce sont deux personnes qui ne donnent de valeur à la vie qu'à travers les biens de consommation (et, bien entendu, ils vont encore à la messe du dimanche : en voiture). Les italiens ont accepté d'enthousiasme ce nouveau modèle que leur impose la télévision, selon les normes de la production qui crée le bien-être (ou, mieux, qui sauve de la misère). Ils l'ont accepté, ce modèle, oui, mais sont-ils vraiment en mesure de le réaliser ?
Non. Ou bien ils le réalisent matériellement seulement en partie et en deviennent la caricature, ou ils ne parviennent à le réaliser que d'une façon si réduite qu'ils en deviennent victimes. Frustration ou carrément désir névrotique sont désormais des états d'âme collectifs. Prenons un exemple : les sous-prolétaires, jusqu'à ces derniers temps, respectaient la culture et n'avaient pas honte de leur propre ignorance, au contraire, ils étaient fiers de leur modèle populaire d'analphabètes appréhendant pourtant le mystère de la réalité. C'est avec un certain mépris effronté qu'ils regardaient les fils à papa, les petits-bourgeois, dont ils se différenciaient, même quand ils étaient forcés de les servir. Aujourd'hui, au contraire, ils se mettent à avoir honte de leur ignorance : ils ont abjuré leur modèle culturel (les très jeunes ne s'en souviennent même plus, ils l'ont complètement perdu), et le nouveau modèle qu'ils cherchent à imiter ne prévoit ni l'analphabétisme, ni la grossièreté. Les jeunes sous-prolétaires – humiliés – dissimulent le nom de leur métier sur leurs cartes d'identité et lui substituent le qualificatif d'étudiant. Bien évidemment, à partir du moment où ils ont commencé à avoir honte de leur ignorance, ils se sont également mis à mépriser la culture (caractéristique petite bourgeoise, qu'ils ont immédiatement acquise par mimétisme). Dans le même temps, le jeune petit-bourgeois, dans sa volonté de s'identifier au modèle "télévisé" – qui, comme c'est sa classe qui l'a créé et voulu, lui est essentiellement naturel – devient étrangement grossier et malheureux. Si les sous-prolétaires se sont embourgeoisés, les bourgeois se sont sous-prolétarisés. La culture qu'ils produisent, comme elle est technologique et rigoureusement pragmatique, empêche le vieil "homme" qui est encore en eux de se développer. De là vient que l'on trouve en eux une certaine déformation des facultés intellectuelles et morales.
Dans tout cela, la responsabilité de la télévision est énorme, non pas, certes, en tant que moyen technique, mais en tant qu'instrument de pouvoir et pouvoir elle-même. Car elle n'est pas seulement un lieu à travers lequel circulent les messages, mais aussi un centre d'élaboration de messages. Elle constitue le lieu où se concrétise une mentalité qui, sans elle, ne saurait où se loger. C'est à travers l'esprit de la télévision que se manifeste concrètement l'esprit du nouveau pouvoir.
Nul doute (les résultats le prouvent) que la télévision soit autoritaire et répressive comme jamais aucun moyen d'information au monde ne l'a été. Le journal fasciste et les inscriptions de slogans mussoliniens sur les fermes font rire à côté : comme (douloureusement) la charrue à côté du tracteur. Le fascisme, je tiens à le répéter, n'a pas même, au fond, été capable d'égratigner l'âme du peuple italien, tandis que le nouveau fascisme, grâce aux nouveaux moyens de communication et d'information (surtout, justement la télévision), l'a non seulement égratigné, mais encore lacéré, violée, souillée à jamais...
Commenter  J’apprécie          20

Videos de Pier Paolo Pasolini (13) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Pier Paolo Pasolini
PIER PAOLO PASOLINI / UNE VIE VIOLENTE / LA P'TITE LIBRAIRIE
Dans la catégorie : Mélanges littérairesVoir plus
>Littérature (Belles-lettres)>Littérature italienne, roumaine et rhéto-romane>Mélanges littéraires (68)
autres livres classés : littérature italienneVoir plus
Les plus populaires : Non-fiction Voir plus


Lecteurs (261) Voir plus



Quiz Voir plus

Retrouvez le bon adjectif dans le titre - (5 - essais )

Roland Barthes : "Fragments d'un discours **** "

amoureux
positiviste
philosophique

20 questions
853 lecteurs ont répondu
Thèmes : essai , essai de société , essai philosophique , essai documentCréer un quiz sur ce livre

{* *}