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Thierry Laget (Éditeur scientifique)
EAN : 9782070387601
354 pages
Gallimard (26/10/1993)
3.64/5   64 notes
Résumé :
Première œuvre écrite, première œuvre publiée de Proust, Les Plaisirs et les jours parurent en 1896. Aujourd'hui, à travers la diversité même des textes qui composent ce recueil, on peut se demander si cet ouvrage de jeunesse ne constitue pas une ébauche encore imparfaite et schématique d'À la recherche du temps perdu, et surtout s'il n'existe pas déjà en lui-même, avec ses lois et ses beautés irréductibles

«Nouvelles mondaines, histoires tendres, ver... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Premier livre de Marcel Proust dans lequel il a voulu traduire toutes ses pensées de jeune homme qui chope des histoires par-ci par-là, il y émet un écœurant jugement sur les mœurs de l'époque qui la plupart du temps égarent l'homme. On trouve un fond d'histoire sur les deux premières nouvelles. Le vicomte de Sylvanie, dans La mort de Baldassare Silvande, philosophe sur le sens de la vie à travers son neveu, un adolescent en qui la vie est encore à naitre, à construire, alors que lui, sérieusement affecté par la maladie, voit sa vie s'enfoncer dans l'abime. La deuxième nouvelle est une forte étude de la personnalité comme quoi une fois qu'on ait gouté aux plaisirs du monde, surtout au plaisir du pouvoir, il est fort probable que sa personnalité ne voudra plus jamais revêtir le manteau de modestie. Ensuite ce sont de petites histoires ou pensées qui se développent parfois à partir d'un simple objet, d'un simple geste, d'un livre ou d'un personnage de l'histoire dont la toile de fond est le snobisme. C'est un livre un peu cru, éparpillé, moins structuré, évasif, mais on y retrouve déjà la poésie, la force des mots de celui qui va impacter le monde littéraire avec A la recherche du temps perdu!
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Si j'étais snob, je m'intitulerais proustienne en disant que j'ai lu la Recherche - sans avoir besoin de rajouter la suite du titre, comme pour suggérer que je fais partie de la caste des initiés, des spécialistes. Si j'étais une invitée d'un dîner mondain, entre une duchesse aux beaux yeux mélancoliques du faubourg saint-Germain, un riche banquier parvenu, un vieil écrivain conservateur, et une maîtresse de maison devant laquelle je voudrais briller pour être présentée à de nouveaux personnages influents, je ne pourrais me contenter de mon charme personnel destiné à faner et devrais montrer les qualités de mon esprit. J'étalerais donc mes connaissances de l'oeuvre de Proust, pour expliquer en quoi ce recueil annonce la Recherche du Temps perdu par son style, ses thématiques, ses qualités littéraires.
Si j'ai bien lu effectivement la Recherche du Temps perdu, je n'ai aucune prétention à savoir analyser la somme proustienne. Je vais donc me concentrer sur ce recueil-ci, où on trouve déjà effectivement beaucoup de thématiques chères à Proust. Dans mon précédent paragraphe, j'ai insisté sur les dîners mondains, car il me semble que au moins deux tiers des récits ou nouvelles tournent autour de cette notion et celle du snobisme, qui, pourrait-on dire, est analysé - mais pour le railler avec humour : les personnages se rendent dans des dîners dans le seul but d'obtenir quelque chose qui les fasse progresser dans le monde. Proust se moque donc des nouveaux riches, des parvenus, des personnes peu spirituelles mais qui cependant croient l'être en accumulant les poncifs et les idées reçues de la société.
Outre les salles à manger, les lieux sont donc le Bois, les plages de Trouville ou de Biarritz ; avec une originalité chez l'auteur, une description de paysages des Alpes, plus précisément de lacs italiens et des glaciers. En ce qui concerne les thématiques, on retrouve des idées très proustiennes de l'amour et du désir, du désir de l'absente rêvée plus que la femme présente, du rapport à la mère, à la mort, à l'art - peinture hollandaise, musique, avec des poèmes en alexandrins, genre que je n'étais pas habitué à lire chez Proust.
C'est drôle, féroce, facile à lire pour ceux qui ne seraient pas familier du style de Proust car ce sont des récits assez courts, sans personnage récurrent, certains font même moins d'une page. Proust s'amuse à écrire certains textes, comme d'ailleurs dans Pastiches et mélanges. Il y a ainsi un véritable pastiche de Bouvard et Pécuchet.
Je mets à part les différents textes à l'intérieur de la très belle session des "Regrets", dont le titre évoque Du Bellay, et donc un sentiment de mélancolie, de douleur face au temps qui passe. Moins d'humour ici, mais plus de poésie douce et tendre, car il est question du rêve d'une femme, de la beauté d'un soleil couchant ou d'une plage sous la lune, d'une musique entendue de façon fugace... le Narrateur songe souvent depuis sa chambre ou face aux beautés de la Nature. Et, tandis que les phrases s'allongent, cette partie convoque le rêve, les souvenirs fugitifs et donc la mémoire re-créatrice...
Ne serait-ce pas finalement ce sur quoi je devrais insister si j'étais une snob proustienne ?
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Le recueil s'ouvre sur une nouvelle dans la veine du symbolisme et du "décatentisme", avec de grandes figures aristocratiques joliment poétisées et, en personnage de premier plan, un jeune prince rongé par la maladie, que regarde avec admiration son neveu d'abord dévoré d'angoisse puis gagné par les petis soucis de l'adolescence ...
Vient ensuite une nouvelle aux allures de conte moral qui met en scène une jeune et belle princesse des années 20 ou 30, laquelle va se laisser prendre aux séductions stériles, aux " vanités" de la vie mondaine...
Ça y est: le thème est lancé! Dans une bonne partie du recueil il sera ensuite repris, modulé, amplifié. Variations sur le snobisme, sur la mondanité, sur la passion des arbres généalogiques qui "plongent leurs racines dans la plus antique terre française", avec pour corollaires l'obsession du "chic" ou de la pose "artiste", et la petite comédie des rivalités, des masques, des réputations usurpées... Vient alors une série de courts portraits, féminins d'abord, dont chacun développe un aspect particulier des travers mondains [Avec leurs improbables noms à la grecque, ou inspirés par la Comédie dell'arte, ces charmants monstres sociaux ne sont pas sans rappeler les "Caractères" de la Bruyère!].
Après cela encore, un pastiche de Flaubert: avec l'inépuisable sérieux qui les caractérise Bouvard et Pécuchet y examinent, entre autres, les codes de la conversation de salon: propos sur la littérature, manière de se tenir ou de se présenter, etc. etc.
Puis une série de poèmes, qui sont autant de portraits versifiés de peintres ou de musiciens (pastiche de Baudelaire?) , après quoi des évocations de lieux célèbres qui sont autant de poèmes en proses, pleins de charme et de mélancolie. Aussi,
une tragique confession de jeune fille qui passait pour un ange de pureté, et que sa mère a surprise dans une scène d'ébats amoureux (confession intime transposée au féminin?).
Et de plus en plus souvent, au fil des pages qui s'égrènent, l'impression d'entendre comme le galop d'essai de nombreuses pages de la Recherche . On pense à Swann malade, dans le regard du narrateur enfant... A l'amour du narrateur pour Gilberte... Par exemple lorsque, dans Les Rivages de l'Oubli, le narrateur évoque un amour de jeunesse ("Nous savions seulement qu'elle ne nous rendait pas notre amour, nous comprenons maintenant qu'elle avait pour nous une véritable amitié")....
Ou bien encore dans La Fin de la jalousie (la dernière nouvelle) ) quand il explore les tourments éprouvés par Honoré dans son amour pour la belle et tendre Françoise Seaune, tortures dont il ne sera délivré que sur son lit de mort, après qu'il aura été renversé par un cheval et qu'il confondra dans la même tendresse distanciée, bienveillante, toutes les personnes présentes à son chevet..
On notera, pour la forme, que le recueil qui s'était ouvert sur la maladie et la mort se referme sur l'accident et sur une mort apaisée, réconciliatrice...

NOTA BENE: c'est pour moi-même, pour m'en souvenir , que j'ai pris ces quelques notes, et les ai faites si détaillées...
Ami Lecteur, si tu as pris la peine de me lire jusqu'ici, c'est sans doute que tu es un amateur éclairé de l'oeuvre de Proust. Auquel cas tu n'as sans doute pas besoin de guide pour lire ou pour relire Les Plaisirs et les jours....
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C'est un jour de pluie, pendant un cours de grammaire universitaire, que j'ai découvert Marcel Proust... Autrement dit, ce fut de très loin, la pire approche au monde pour aborder toute la Beauté de ce génie littéraire !

Mais récemment, en lisant Les Plaisirs et les jours, je suis l.i.t.t.é.r.a.l.e.m.e.n.t tombée amoureuse de ce cher et tendre Marcel ; de son style, mais aussi de la façon dont il perçoit le monde. Car Marcel Proust, c'est avant tout une sublissime et touchante poétique du détail, auquel il invite le Lecteur à en faire l'expérience. Il possède le don de déplacer notre attention vers un rayon de soleil sur le carreau d'une fenêtre, de nous attarder sur la simplicité des sentiments que nous procure la simple vue de l'être aimé, de nous faire apprécier toute la nostalgie de l'écho d'un ancien souvenir... le temps s'arrête, il semble se suspendre durant la lecture. Et les détails, aussi banals qu'ils soient au quotidien, deviennent sacrés, apportent cette exquise sensation d'apaisement et de paix.

Lire Proust peut paraître effrayant, car l'auteur exige du Lecteur une concentration absolument gargantuesque ! Je ne vais donc pas vous mentir, il faut s'accrocher. Mais la poésie que l'on retrouve dans Les Plaisirs et les jours est présente absolument PARTOUT dans À la Recherche du temps perdu : la lecture devient délicieuse, exquise, apaisante, magnifique, éclatante, et extraordinaire !

Dans un monde où la contemplation n'a plus sa place, où s'arrêter pendant un instant sur le souvenir de la douceur d'un baiser devient impossible, Proust nous rappelle à quel point la Vie se cache dans ces plus petits détails : « [La paix], c'est une chose que l'on peut trouver dans les plus petits détails de la vie ; dans une caresse sur la main. » - La Créature de Frankenstein in Penny Dreadful.
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J'ai apprécié de découvrir ce livre de l'un de mes écrivains favoris, composé dans sa jeunesse.

Il s'agit pour moi de "Proust en devenir", tant sur le fond que sur la forme, et cela lui donne un côté touchant.

Par contre, la lecture de certains passages en fut un peu ardue, davantage que les longues phrases de "La Recherche du temps perdu."
Alors que la plupart d'entre eux s'élèvent et ont en eux une certaine poésie comme "Les Rêveries couleur du temps".
Et je donne une mention spéciale à la nouvelle intitulée "La fin de la jalousie".
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Citations et extraits (20) Voir plus Ajouter une citation
Les mystérieuses avenues qu’il y a entre chaque être humain et au fond desquelles se couche peut-être chaque soir un soleil insoupçonné de joie ou de désolation l’attiraient.
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Seule l'indifférence de Pia, petite princesse syracusienne, qu'il aimait encore avec tous ses sens et avec son cœur et qui s'était éprise pour Castruccio d'un amour invincible et furieux, le rappelait de temps en temps à une réalité plus cruelle, mais qu'il s'efforçait d'oublier. Jusqu'aux derniers jours, il avait encore été quelquefois dans des fêtes où, en se promenant à son bras, il il croyait humilier son rival ; mais là même, pendant qu'il marchait à côté d'elle, il sentait ses yeux profonds distraits d'un autre amour que seule sa pitié pour le malade lui faisait essayer de dissimuler. Et maintenant, cela même il ne le pouvait plus.

La mort de Baldassare Silvande, vicomte de Sylvanie
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Mais la plus aimable convive était la jeune duchesse de D…, dont l’esprit alerte et clair, jamais inquiet ni troublé, contrastait si étrangement avec l’incurable mélancolie de ses beaux yeux, le pessimisme de ses lèvres, l’infinie et noble lassitude de ses mains. Cette puissante amante de la vie sous toutes ses formes, bonté, littérature, théâtre, action, amitié, mordait sans les flétrir, comme une fleur dédaignée, ses belles lèvres rouges, dont un sourire désenchanté relevait faiblement les coins. Ses yeux semblaient promettre un esprit à jamais chaviré sur les eaux malades du regret. Combien de fois, dans la rue, au théâtre, des passants songeurs avaient allumé leur rêve à ces astres changeants ! Maintenant la duchesse, qui se souvenait d’un vaudeville ou combinait une toilette, n’en continuait pas moins à étirer tristement ses nobles phalanges résignées et pensives, et promenait autour d’elle des regards désespérés et profonds qui noyaient les convives impressionnables sous les torrents de leur mélancolie. Sa conversation exquise se parait négligemment des élégances fanées et si charmantes d’un scepticisme déjà ancien.
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Baldassare reposait, les yeux fermés, et son cœur écoutait les cloches que son oreille paralysée par la mort voisine n’entendait plus. Il revit sa mère quand elle l’embrassait en rentrant, puis quand elle le couchait le soir et réchauffait ses pieds dans ses mains, restant près de lui s’il ne pouvait pas s’endormir ; il se rappela son Robinson Crusoé et les soirées au jardin quand sa sœur chantait, les paroles de son précepteur qui prédisait qu’il serait un jour un grand musicien, et l’émotion de sa mère alors, qu’elle s’efforçait en vain de cacher. Maintenant il n’était plus temps de réaliser l’attente passionnée de sa mère et de sa sœur qu’il avait si cruellement trompée. Il revit le grand tilleul sous lequel il s’était fiancé et le jour de la rupture de ses fiançailles, où sa mère seule avait su le consoler. Il crut embrasser sa vieille bonne et tenir son premier violon. Il revit tout cela dans un lointain lumineux doux et triste comme celui que les fenêtres du côté des champs regardaient sans le voir.
Il revit tout cela, et pourtant deux secondes ne s’étaient pas écoulées depuis que le docteur écoutant son cœur avait dit :
– C’est la fin !
Il se releva en disant : – C’est fini !
Alexis, sa mère et Jean Galéas se mirent à genoux avec le duc de Parme qui venait d’arriver. Les domestiques pleuraient devant la porte ouverte.
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Chopin

Chopin, mer de soupirs, de larmes, de sanglots
Qu’un vol de papillons sans se poser traverse

Jouant sur la tristesse ou dansant sur les flots.
Rêve, aime, souffre, crie, apaise, charme ou berce,
Toujours tu fais courir entre chaque douleur

L’oubli vertigineux et doux de ton caprice
Comme les papillons volent de fleur en fleur ;

De ton chagrin alors ta joie est la complice :

L’ardeur du tourbillon accroît la soif des pleurs.
De la lune et des eaux pâle et doux camarade,

Prince du désespoir ou grand seigneur trahi,

Tu t’exaltes encore, plus beau d’être pâli,

Du soleil inondant ta chambre de malade

Qui pleure à lui sourire et souffre de le voir…

Sourire du regret et larmes de l’Espoir !
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Vidéo de Marcel Proust
MARCEL PROUST / DU CÔTÉ DE CHEZ SWANN / LA P'TITE LIBRAIRIE
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