Recueil pudique de lettres
imaginaires qui sont autant de portraits d'amis disparus, d'hommages, de souvenirs : les frères
Prévert, Lino Ventura l'autre Italien,
Simone Signoret, pour laquelle il porta le «Casque d'or» dans le chef-d'oeuvre de Jacques Becker (1952), et bien d'autres «immortels» comme
Edith Piaf, Picasso,
Albert Camus.
Artiste populaire, discret et humble, cette grande star qui refusait de l'être, avait acquis le statut et la stature du créateur qui passe les modes. L'homme a aussi traversé le temps. Né le 2 mai 1922, fils unique d'un coiffeur impécunieux chronique et d'une mère ouvrière qui fredonne à la maison des airs d'opéra,
Le talent de Reggiani, éclectique et fou, c'est aussi la chanson. Elle vient à lui, tardivement, à 44 ans. Comme un défi lancé à lui-même et à un ami qui trouvait dans sa voix vibrante et grave exhalant le tabac brun des Gitanes, un autre moyen d'émouvoir. Dans une France qui n'aimait pas encore le mélange des genres,
Jacques Canetti, découvreur de
Georges Brassens et de
Jacques Brel, patron des Trois Baudets, cabaret parisien des talents en herbe, lui propose d'enregistrer
Boris Vian. le disque est un succès (1966). La grande Barbara, qui lui trouve un petit chouïa d'aptitude pouvant en faire un chanteur, un vrai, avec de la voix, le fait travailler.
Georges Moustaki,
Serge Gainsbourg, Jean-Loup Dabadie, Albert Vidalle et
Henri Gougaud feront le reste. En quelques disques seulement (Le Petit Garçon, les Loups (1967), l'Italien (1968), Ma liberté), sa réputation de chanteur émouvant est faite et son répertoire respecté est vite célébré. C'était le temps d'Arthur, du Déserteur, de Sarah, Ma solitude, Ma liberté, en attendant Madame nostalgie, Venise n'est pas en Italie, le Barbier de Belleville, le Souffleur. Et comme Il suffirait de presque rien, d'autres auteurs viendront. Ainsi, Claude Lemesle, fidèle d'entre les fidèles, le pianiste Raymond Bernard,
Claude Roy et
Bernard Dimey. Mais aussi des poètes immortels
Apollinaire,
Baudelaire,
Verlaine et
Prévert.
Un livre prémonitoire annonçant le grand voyage de la Camarde. le sien, vers l'Eden des poètes, des acteurs et des chanteurs qui tutoient l'eternel pour avoir dispensé aux mortels que
nous sommes des bonheurs sublimes et parfois subliminaux !