Une poignée de nouvelles qui célèbrent l'hiver, la montagne, la longue marche à l'aube avec le chien, la chasse et la lutte avec un animal plus malin que vous... C'est une langue d'une grande beauté que manie cet auteur, après tout l'un des grands auteurs de la seconde partie du vingtième. Pourtant, la littérature cynégétique, ce n'est pas ce que je citerais en premier dans mes favoris, mais c'est vraiment ici un grand auteur: il n'y a rien de surprenant à trouver à chaque détour de phrase une étrange poésie, simple et très parlante. C'est très humain, plein d'hommes bourrus d'un modèle à vrai dire plutôt disparu de nos jours, sauf à fouiller le fin fond du haut Doubs, et d'un lent rythme qui contredit le monde moderne, tout en l'acceptant, parce que finalement il n'y a pas beaucoup de choix.
Un profond amour de sa région natale, une grande plume, et au final beaucoup de plaisir pour le lecteur.
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C'est un livre qui est écrit comme on se promène sur le sentier d'un lieu qu'on a aimé, où on a grandi, aimé, chassé, dont la guerre vous a éloigné et où on est revenu, comme d'autres partis aux Amériques. Un lieu resté intact malgré le temps qui passe, la guerre qui détruit et le progrès qui emporte.
Un lieu où la chasse, attendue toute l'année, est une façon de vivre, de partager l'amitié et le tabac, de humer l'air et la neige, de se mesurer respectueusement à l'animal, ce malin, en intelligence avec les chiens.
Quelques nouvelles racontent ce lieu dans une ambiance d'hommes tranquilles, fidèles, taiseux.
C'est très simple et très beau.
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Je m'aperçus à cet instant que j'étais devenu un autre. La vie des hommes m'avait repris: le bureau, la famille, le foyer. Les objets de tous les jours: le journal, le livre, le lit avec les draps, la table avec la nappe, le poêle, la radio. Le changement s'était opéré lentement et je ne m'en avisais que maintenant. Aurais-je encore été capable de dormir sous la pluie ou la neige? Rester des jours entiers sans manger et avaler des kilomètres et des kilomètres? Travailler à la mine? Me révolter et lutter comme je l'avais fait?
Un matin d'octobre, le frère qui avait laissé sa famille là-bas repartit pour l'Amérique. Il avait acheté des souvenirs du pays pour pas mal de dollars et, dans un mouchoir blanc, au fond de la malle, il emportait une poignée de terre de la colline derrière l'église. C'était cela pour lui l'Italie. Ni Gênes, Milan ou Rome. Seulement cette poignée de terre.
"Altipiano ou cheminer avec Mario Rigoni Stern", Loïc Seron, éd. Rue d'ULM EDS
Un beau livre conseillé par Stéphane Nappez, co-fondateur de l'association Baraques Walden.
Entretien mené à l'Abbaye de Jumièges. (Département de la Seine-Maritime)
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