AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Bouffanges (117)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


Triumvirat

Autopsie d'une trahison grandeur nature !



J'ai choisi de découvrir l'univers de Bouffanges avec ce livre peu chroniqué sur Babélio : Triumvirat dont le sujet me plait étant joueuse amatrice d'échecs et ayant participé à quelques tournois dont les souvenirs me laissent un arrière-gout de souffrance, de grande concentration, de moments entre parenthèse complètement hors du temps, de lutte acharnée, de petites joies et d'immenses déceptions. Une période durant laquelle les nuits furent visitées de rêves, mais le plus souvent gangrenées de cauchemars, bien entendu échiquéens ; les conversations tournaient en boucle sur les notions d'ouverture, de finale ; les pensées toutes tournées constamment vers les 64 cases. Une obsession, d'autant plus inutile qu'il s'avère que je fus bien piètre joueuse. J'ai arrêté pour ne jouer que pour le plaisir, désormais l'unique objectif, mais voilà le pourquoi du choix de ce livre parmi la bibliographie très éclectique de Bouffanges.

Le jeu de stratégie dont il est question est en effet assez proche du jeu d'échecs et le héros, Jacques Leroux, participe à un tournoi de niveau mondial, lui qui n'est que débutant…de quoi prendre mon rêve pour la réalité par procuration. le pied !



J'ai vraiment cru que ce jeu existait tant la présentation, détaillée et érudite, qui en est faite est brillante. Il nous est ainsi expliqué par le concepteur du jeu, passionné d'histoire romaine, que le nom de ce jeu provient du Triumvirat de Lépide, Marc-Antoine et Octave, union des héritiers politiques de César face aux sénateurs qui ont proclamé Antoine et Lépide ennemis publics, et aux républicains, partisans des meurtriers du dictateur.



« Cette histoire m'a inspiré l'idée d'un jeu où deux joueurs dirigeraient chacun une armée à un bout du tablier de jeu, et devraient s'allier contre une armée blanche centrale, qu'ils contrôleraient conjointement. L'alliance perdurerait jusqu'à ce qu'un des deux alliés trahisse l'autre, moment à partir duquel l'adversaire prendrait seul le contrôle de l'armée blanche. Ce n'est en réalité qu'un jeu où les alliances se font et se défont ».



La trahison comme pilier central du jeu…Deux joueurs, trois zones de combat, une bleue, une rouge et une blanche en centre, cette dernière seule pouvant éliminer les pièces adverses encore faut-il en avoir le contrôle, avec chacune un roi, des pièces totalement différentes de celle des échecs en termes de noms (les reines bleue et rouge ont ainsi les étonnants noms respectivement d'Amante et de Mante), en termes de déplacement, des pièces sacrificielles notamment une pièce ultime à dégainer en cas de panique totale en contrepartie d'un grand déshonneur puisque ça rend la partie nulle alors que, lorsque vous la dégainez, c'est par désespoir : le sablier, pièce au centre du plateau en losange, un temps dénommé le livre de sables (tiens tiens, Bouffanges nomme une pièce du jeu du nom d'un livre de Borgès, comme c'est étrange…). Un jeu en 5 rounds…

Il me semble que le jeu est bien plus subtil que le jeu d'échecs, une sorte de mélange d'échecs et de poker où la collaboration précédant la trahison, le moment du passage de l'un à l'autre, a toute son importance.

Pas de panique si vous ne comprenez pas immédiatement les règles, à chaque fois qu'une pièce ou une stratégie est mentionnée, un petit chapitre de l'ars Triumviratus est présenté de façon très pédagogique. Tout s'éclaire peu à peu. Les grandes lignes du moins et c'est largement suffisant pour suivre l'histoire. Pas la peine d'être joueur de jeux stratégiques pour comprendre et aimer l'histoire.



« Il est perdu, c'est une évidence. Les stratégies de Leroux me font penser au football américain : dès le sifflet, tous les joueurs se mettent à courir dans tous les sens, comme un essaim d'abeilles, mais au fond, la plupart font juste n'importe quoi, et ce ne sont là que brouiller les pistes, seuls deux ou trois joueurs étant vraiment censés jouer la balle. Leroux joue ainsi : il bouge ses pièces en tous sens, un peu n'importe comment, pour couvrir un plan de jeu somme toute simpliste ».



Jacques Leroux, surdoué français des mathématiques combinatoires, prépare sa thèse. Il est passionné de triumvirat et après s'être qualifié en ligne, il va participer au tournoi professionnel de Baltimore puis de Tokyo. L'occasion pour lui, alors totalement inconnu, de découvrir tous les joueurs de renommée internationale. A son plus grand étonnement, non seulement il n'aura pas à rougir de sa position de débutant, mais il va s'apercevoir que les limites du jeu dépassent largement le seul cadre de l'échiquier. Tout d'abord il reçoit régulièrement des mails d'un certain Quircus qui lui donnent quelques conseils qui s'avèreront judicieux, ensuite il découvre tout un ensemble de stratégies à l'oeuvre depuis la main mise financière sur la fédération jusqu'à la volonté d'un de ses professeurs de développer une machine intelligente permettant de battre tous les joueurs de triumvirat ; enfin et surtout il découvre que chaque joueur joue un rôle et entre eux, les alliances se font et se défont, des stratégies se mettent en place, le jeu en lui-même étant soumis aux modulations proposées par les meilleurs joueurs, modulations qui consistent à proposer régulièrement de nouvelles règles rendant le jeu particulièrement mouvant et vivant. Jacques Leroux étant bien classé, sa voix compte et faire alliance avec lui revêt une importance croissante…jusqu'à la trahison ?



« Nous sommes tous les pions de quelqu'un, Jacques. A moins de vous faire ermite dans la montagne népalaise, dans chaque relation que vous entretenez avec les autres, il y a des échanges d'intérêts ».



Alors qu'il était venu uniquement pour le jeu et la victoire, le jeune homme va être embarqué dans un triumvirat grandeur nature. Quelle pièce occupe-t-il sur l'échiquier, nous allons peu à peu le comprendre. C'est un livre en tout cas passionnant, rendu fluide malgré la difficulté du jeu, grâce à l'alternance des chapitres de nature différente : chapitres dédiés à Jacques et son incroyable ascension, auxquels viennent s'intercaler ceux axés sur les extraits de l'Ars Triumviratus permettant de comprendre plus finement le jeu au fur et à mesure de l'avancée dans le livre, mais aussi des mails, des articles de journaux, des conversations téléphoniques, et surtout, élément très intéressant, des chapitres extraits d'un livre écrit par une journaliste « Autopsie d'une trahison » qui donne la parole à tous les protagonistes entourant Jacques Leroux : les différents joueurs, son ami Martin, sa copine Jeanne, les journalistes, ses professeurs. Cette alternance des styles, des points de vue, de niveau d'érudition apporte beaucoup de respiration et de dynamisme au texte et de subtilité à l'histoire.



« C'est fou : comment peux-tu être si bon au Triumvirat, et aussi nul pour comprendre la façon dont marche ce qui va autour. Ce n'est jamais qu'une partie grandeur nature ».



Le livre pose la question du raisonnement logique et mathématique par rapport à l'affect et à l'intuition dans la prise de décision, il nous fait réfléchir aux rapports humains non dénués de calculs stratégiques (la copine de Jacques dans le livre, semble être la référence pure, la voix de la conscience, l'éthique personnifiée), à leur sincérité, à la quête de sens dans la vie entre responsabilité et passion…C'est un livre très riche sous des dehors ludiques tant dans le thème choisi que dans la façon dont est construit le livre. Impossible par ailleurs de ne pas être touché par la passion, la passion du jeu, qui est abordé bien entendu dans le livre et qui me fait penser au livre « le Joueur d'échecs » de Stefan Zweig :



« Il ne jouait pas son armée, il en était le Triumvir, sur le tablier, au côté de ses pions. Plus d'une fois, il m'avait fait penser à ce film avec Robbin Williams, jumanji, dans lequel des enfants absorbés par un jeu y endossaient le rôle de leur pion. Leroux vivait ses parties intensément, et quand tous les journalistes s'étaient offusqués de sa manoeuvre inélégante face à Blckbone, j'avais, moi, compris ce qui l'avait poussé à jouer ainsi : la panique, simple et véritable, du guerrier sur un champ de bataille qui craint de mourir, et qui tente de sauver sa vie ».



Quelle riche et belle entrée dans l'univers de cet auteur qui me semble avoir beaucoup de cordes à son arc si j'en crois la diversité de ses livres, allant de la science-fiction au fantastique, en passant par le policier, l'anticipation, l'érotique, ou la littérature intimiste ! Prolixe, imaginatif et intelligent, me voilà sous le charme…je me suis faite bouffanger à mon tour…



Commenter  J’apprécie          8770
Vétos d'Avent : 25 contes de Noël pour enfants

J'ai eu la chance d'avoir ce recueil entre les mains, et je dois dire que je l'ai trouvé excellent.

.

Je vous entends d'ici penser : Mais tu détestes Nowel !

Ce à quoi je répondrai : Et alors ?

Je sais, je suis super forte en réparties.

.

Et donc le jour même de la sortie du chef-d'oeuvre (comment ça j'en fais un peu trop ?), je ne peux m'empêcher de vous en parler.

.

Ce recueil, amoureusement concocté par Bouffanges, que beaucoup d'entre vous connaissent déjà pour l'avoir lu dans Zombies, Père Noël Inc., Rodden Eiland, Triumvirat, etc., et sa complice dont je tairai le nom par souci d'anonymat, est proposé dans les temps pour fournir à nos chères têtes blondes un conte pour chaque soir de l'Avent.

.

Encore une fois je vous entends murmurer : Toujours pour les enfants, et nous alors ?

Eh bien rassurez-vous, un lutin m'a dit à l'oreille qu'un recueil pour Adultes n'allait pas tarder à suivre.

.

Parlons contenu :

Les 25 contes assortis d'une magnifique illustration pour chacun d'eux, ont la particularité d'avoir été écrits exclusivement par des vétérinaires et auxiliaires vétérinaires (pareil pour les dessins).

Les histoires sont variées. Bien entendu, les animaux sont à l'honneur, ainsi que le père Noël, ses lutins, ses rennes.

.

Si vous aimez l'originalité, des contes qui sortent de l'ordinaire, drôles, émouvants, surprenants, c'est tout ce que m'ont apporté ces nouvelles.



Tous les récits m'ont vraiment emballée et j'espère qu'il en sera de même pour vous.

.
Commenter  J’apprécie          82123
Zombies

Je continue à apprécier la plume et la variété des thèmes abordés par Monsieur Bouffanges, et si parler de zombies n'est pas original en soi, le faire de cette façon l'est bel et bien.

Pour commencer, il y a le contexte franco/français de cette histoire, et le rôle qui va être assigné à ces non-vivants, ces êtres revenus... à la vie ? pas vraiment, et c'est là l'un des aspects intéressants de cette lecture, car les problèmes engendrés par ce phénomène vont soulever beaucoup de questions, et surtout énormément de problèmes.

Sujet de curiosité minoritaire et par conséquent très bien supporté et toléré au début, le cas des zombies ne va pas tarder à entrer dans une autre dimension quand les cas de "retours" à la vie vont se multiplier de façon exponentielle jusqu'à devenir un sujet de crise au niveau national.

Crise politique, crise sanitaire, crise de conscience, l'auteur va s'en donner à cœur joie, car au-delà de cette histoire se cache une caricature pas toujours tendre de notre société, critique souvent facile même si talentueuse que je ne commenterai pas ici.

La question que je me suis posée tout au long de cette lecture est de comprendre le rôle dévolu aux zombies dans cette histoire aux différents niveaux de lecture, je ne suis pas sûr d'être entré dans la tête de l'auteur pour pouvoir le définir.

En fait peu importe, ce qui compte c'est qu'une fois de plus, Bouffanges a réussi à me captiver et à me garder attentif jusqu'au bout, et ça, j'apprécie toujours.
Commenter  J’apprécie          7915
Calamity Zombie

Calamity Zombie est une sorte de Spin Off de Zombies, autre roman de l’auteur.



Tandis que Zombies était un roman informatif, nous relatant de manière détachée les évènements de cette ingérable pandémie, ( comme le drôlissime 1.2.3… Zombies de Caprez), Calamity Zombie a une approche plus humaine ressemblant au premier abord aux romans de S.G Browne, où nous suivons les revendications d’Andy, le zombie en quête d’affection et d’acceptation.

Et il ressemblera beaucoup au Zombie Nostalgie de Oystein Stene, qui aborde les réflexions d’un zombie emprisonné en quête d’humanité et d’évasion, posant ainsi dans sa forme plus existentialiste la question : qui est le monstre ?

A priori rien d’original…



Mais en fait si,

Car à l’inverse du roman d’Oystein Stene, Cal se souvient parfaitement de son passé, des gens qu’il a aimés, de son infirmité et surtout des conditions dans lesquelles il est devenu un non-mort. Et c’est par ce passé, que notre empathie face à sa souffrance de prisonnier, sera décuplée. Il est également différent des romans de S.G Browne car nous n’aurons pas de passages horrifiques et sanglantes, mais des descriptions de souffrance physique dû à sa condition. Ce qui amplifiera la sensibilité du contenu.

Et Cal a un chien d’aveugle… cette amitié me semble parfaitement exceptionnelle dans un roman de zombies.





Merci à Berni, sans qui je n’aurais pas pu le lire et faire cette chronique.

Commenter  J’apprécie          7525
Assassinat dans la rue Saint-Séverin

Je continue à apprécier Bouffanges, pour son style bien sûr, mais aussi pour la variété des sujets proposés.

Ici, si je considère le titre et le thème, ou encore le lieu et la période choisie, je pencherais pour un hommage à Edgar Allan Poe et son célèbre "Assassinat dans la rue Morgue". J'ai été séduit par cette énigme et par le cheminement logique qui nous donnera finalement la résolution de ce meurtre mystérieux. J'ai aimé le contexte de ce Paris de l'exposition universelle et ces personnages bien "brossés", beaucoup aimé aussi l'épilogue et sa morale.

J'ai surtout été impressionné par le talent de l'auteur pour cette efficacité en si peu de mots, la nouvelle est un art difficile, monsieur Bouffanges démontre une fois encore qu'il maîtrise cet exercice à la perfection, en tout cas selon mes critères.
Commenter  J’apprécie          757
Vétos d'Avent : 25 contes de Noël pour les plus..

Et hop, comme promis, le recueil de l'Avent pour Adultes est d'ores et déjà annoncé sur le site de vente.

.

Comme c'était le cas pour le recueil pour Enfants, j'ai dévoré avec avidité les contes pour Adultes.

.

Ces récits ont également été écrits et illustrés par des vétérinaires et auxiliaires vétérinaires.

.

Je me suis régalée avec tous sans exception.

De l'humour décapant, de l'émotion, du suspense... et bien entendu beaucoup d'animaux.

.

À déguster comme une friandise quotidienne, entre le brossage des dents et le dodo, en attendant, non pas Bojangles, qui de toute façon ne viendra pas, mais le père Nowel.

.

Notre ami Bouffanges est toujours aux manettes avec sa complice anonyme, comme pour la version destinée aux Enfants.

.

J'espère que comme moi vous vous laisserez tenter et sauterez sur ces deux recueils.

Bonne lecture !

.

.
Commenter  J’apprécie          7490
Votez Blanc

Je vais commencer par remercier Anne Sophie (dannso) pour m'avoir suggéré ce titre, mon plaisir de lecture a été immense, inversement proportionnel au nombre de pages, ce texte est très court, à peine une douzaine de pages au format numérique.

L'auteur, partant d'une discussion banale entre trois amis, va nous proposer une réflexion brillante sur les véritables enjeux du vote blanc. Une fois ce récit terminé, vous comprendrez pourquoi il n'est toujours pas question pour nos "politiques" de le valider.

Il s'agit d'un scénario de "politique fiction", mettant en scène des personnalités réelles dans des dialogues imaginaires mais néanmoins pertinents, j'avoue m'être réjoui de voir des idées qui me tiennent à coeur, être développées sur un ton léger, sans pour autant être dénuées de profondeur de vue.

En un mot comme en cent, j'ai adoré, mon seul regret étant que ce soit si court.

PS : Je n'ai pas pu m'empêcher de penser que l'auteur ait pu s'inspirer de Coluche et de sa candidature à la présidentielle.



Petite digression : Enthousiasmé par cette micro nouvelle, je suis allé voir les disponibilités au format numérique sur un site marchand. A ma grande surprise, j'ai pu acheter onze livres (dont quatre gratuits) de l'auteur au format epub pour la somme astronomique de... 15,93 euros, le plus cher m'ayant coûté 2.99 euros ! Donc merci monsieur Bouffanges de mettre à la portée de tous votre bibliographie, et merci aussi pour le plaisir à venir, ce dont je ne doute pas.
Commenter  J’apprécie          7434
Do androids fantasize about electric orgasm..

Qu'est-ce que l'orgasme sinon le plaisir de satisfaction obtenu ou encore la réponse à une phase d'excitation plus ou moins intense et prolongée ? Mais attention pour qu'il y ait plaisir de satisfaction obtenu il faut qu'il y ait plaisir de satisfaction demandé sinon point d'extase, que votre partenaire soit un humain ou un android...



Un individu comme Gérald Legrand, personnage principal de ce récit, ne tendrait-il pas à la satisfaction par le simple besoin d'évacuer les quantités d'excitation trop élevées qui affluent soudainement dans son appareil psychique si tant qu'il soit doté d'un cerveau puisque le sien semble avoir migré au niveau de son entre-jambe ? C'est fort probable et en même temps comment pourrait-il en être autrement à la vue de la sublime Lily qui n'attend que lui (elle est bien la seule), cuisine amoureusement, lascive, vêtue d'un simple chemisier laissant deviner une plastique irréprochable ; si habile et toujours disponible Lily, capable de mitonner un curry magistral et au même temps de gratifier n'importe quel mâle bien équipé qui aura lâché un beau paquet de billets, d'une fellation en guise d'apéritif de bienvenue ; Lily qui donnerait des complexes à n'importe quelle ménagère blasée et usée ? Vous croyez ? Certainement pas car dans cette nouvelle les bonnes ménagères ont bien mieux à faire que de s'occuper des parties génitales de ces Messieurs et c'est donc Lily le modèle Blue Orchid, 100% synthétique, 100% parfaite, échangeable en cas de panne moyennant une très grosse rallonge de billets qui s'en occupe, minaude à la perfection, râle, gémit, s'accroupit, se cambre, fournit à la demande car elle n'existe que pour combler les pulsions insatiables des mâles dominants et égocentriques comme Gérald.





Un petit bijou que cette courte courte nouvelle de Bouffanges tant elle nous donne à voir un monde qui pourrait bien être le notre demain si le marché des sex-robots et autres Honey-dolls (poupées réalistes) qui existent déjà dans des pays comme le Japon continuent de se développer, un monde dans lequel les hommes et les femmes en viendraient tout bonnement à ignorer les contacts physiques et charnels.



Do androids fantasize about electric orgasms ? Je ne sais pas mais une chose est certaine c'est que l'humain de demain ne boudera pas son plaisir mais il sombrera dans une très grande détresse émotionnelle.





Je remercie chaleureusement Nicola grâce à qui j'ai eu le plaisir de découvrir l'auteur et cette nouvelle, je remercie aussi Louis (Aléatoire) dont l'excellente critique (lue hier soir) sur "Essais de psychanalyse" de S. Freud m'a semble-t-il fortement inspirée.

Commenter  J’apprécie          7363
Abîmés

Je découvre réellement Bouffanges avec ce recueil de dix nouvelles, et je dois dire que je suis conquis.

Pour commencer j'ai aimé l'écriture et le style, ensuite j'ai apprécié la variété des histoires et leurs tonalités, je me suis usé les neurones à trouver un terme qui pourrait résumer l'ambiance générale, autant le dire, j'ai renoncé.

Il y a selon mon ressenti tantôt de la poésie, de la mélancolie, une certaine beauté et même de la colère, mais ce qui est sûr, c'est que l'auteur nous emmène à chaque fois dans une spirale temporelle particulière, j'ai aimé cette sensation.

J'ai particulièrement apprécié "Le gardien de phare", le "Silence de la chouette" et cette confrontation de deux mondes, ou encore "Algologie" pour cette communion avec l'animal (un chat, ce qui ne pouvait que me parler).

Toutes ces nouvelles m'ont intéressé, "Se souvenir d'Elise Gervais" pour la mémoire et le souvenir, ou encore "Impunité" pour la colère, "Sonate pour un piano seul" pour sa touche de fantastique, "L'arbre dans le métro" pour sa solitude mélancolique, bref, un très bon recueil.

Il me reste à remercier Nicola pour m'avoir fait découvrir ce recueil que je n'aurais pu lire sans elle et pour le plaisir que cette lecture m'a procuré.
Commenter  J’apprécie          7121
Rodden Eiland

Une robinsonade moderne, pour les vacances, ça vous dit ?





Tout commence comme la série LOST par un crash d'avion sur une île qui semble déserte (mais qui sait ?), avec un ou des survivants (vous verrez bien), et la découverte d'un bunker dans la jungle profonde… La référence à Robinson Crusoé ne tarde pas à se faire sentir, notamment dans les tentatives d'organisation de la survie en attendant les secours (mais viendront-ils seulement ?) : hutte, recherche de nourriture, domestication d'animaux… et jusqu'à vendredi, mais que se passe-t-il vendredi ? C'est le noeud du roman, qui certainement vous surprendra.





J'y ai retrouvé aussi une problématique que Robert Merle a déjà exploré dans « l'Ile », roman que j'emporterai sans hésiter sur une île déserte : Une réflexion sur l'organisation sociale et la suprématie ou pas de la démocratie. Il faut dire que le personnage principal a le temps de cogiter. J'ai aimé le fait que sa réflexion le mène à explorer une autre piste que Robert Merle justement, une piste qui nous donne un espoir pour l'humanité, même si au final, il se pourrait que tous les chemins, si pleins d'espoir fussent-ils, mènent aux mêmes impasses humaines.





Vous trouverez probablement avec plaisir dans ce roman autant de références possibles que vous aurez lu de livres sur le thème (sa majesté des mouches, etc…). Pour autant ne vous y trompez pas : Ce roman ne ressemble en réalité à aucun autre de ceux à qui il rend hommage. Fidèle à ce que j'ai lu de l'auteur pour l'instant, il vous offre une fin surprenante qui donne tout le relief au roman, et lui apporte tout son intérêt. C'est agréable à lire, le personnage, aussi fataliste que sarcastique, apporte la touche d'humour. Il est néanmoins plein de ressources et attachant : Dynamique et débrouillard, il représente l'essence même de l'instinct de survie qui sommeille en chacun nous. Son amour de la vie et son désir de vivre sont contagieux.





Puis quand vous finissez par vous demander si tout cela n'est pas juste une compilation modernisées de récits plus ou moins connus, vous vous offusquez soudain de la fin bâclée que vous sentez poindre à l'horizon, avant de vous rappeler qu'il s'agit de BOUFFANGES mais là, il est déjà trop tard : En moins de temps qu'il ne faut pour le lire, il vous retourne, vous et la situation, comme deux pancakes. Et vous êtes là, pantelant, souriant de vous être fait avoir, mais heureux qu'on ne vous ai finalement pas laissé en plan. La vague est passée, elle vous a brassé, lessivé avant de vous laisser échouer là, sur la plage où vous lisez, coquillages et crustacés.





Serveur ! Un verre de vin blanc sec s'il vous plaît !





« Dans de cruelles circonstances,

Je n'ai ni gémi ni pleuré,

Sous les coups du hasard,

Ma tête saigne mais reste droite.





En ce lieu de colère et de pleurs,

Se profile l'ombre de la mort,

Et bien que les années menacent,

Je suis et je resterai sans peur.





Aussi étroit soit le chemin,

Nombreux les châtiments infâmes,

Je suis le maître de mon destin,

Je suis le capitaine de mon âme. » (Invictus)
Commenter  J’apprécie          6861
Père Noël, Inc.

Si vous cherchez un conte original racontant la naissance de Noël et du Père Noël, de cette fête pleine d'amour et de magie, je vous conseille « le quatrième roi mage » d'Antonio Exposito, une aventure de 500 pages d'une fantasy remarquable.

.

Mais si vous cherchez un conte moderne expliquant avec humour et lucidité l'émergence et le développement des Noëls commerciaux que vous déplorez peut-être, alors plongez-vous dans le tendre cynisme de Bouffange et de sa petite entreprise qui ne connaît pas la crise : Père Noël, Inc.

.

Le Père Noël en effet est dépassé et s'essouffle, montre des signes d'inadaptation complète aux marchés actuels : travail des enfants, massacre écologique, jouets démodés et pas aux normes ; Surtout, il souffre d'une maladie qui pourrait bien l'empêcher de réaliser ses futures tournées… Il devient temps de passer la main !

.

Gabriel Whitaker est le chef d'entreprise qui visualise tout le potentiel des portes que ça lui ouvre : A lui l'entreprise du Père Noël, nul doute qu'il saura la rentabiliser mieux que personne à l'aide de son réseau de communication, de ses idées révolutionnaires mâtinées de traditions ancestrales.

.

Nous voici dès-lors entraînés dans les affres des négociations, magouilles financières et commerciales, publicitaires etc, pour reprendre les… rennes du vrai Père Noël en remplaçant la magie par la technologie. Et witaker ne manque pas d'idées, à tel point qu'on se demande s'il ne se prendrait pas au jeu du vieux bonhomme !

.

Alors Noël, vulgaire entreprise commerciale, ou Witaker aurait-il finalement un bon fonds même s'il est de commerce…?

.

« Ma petite entreprise, connaît pas la crise

Épanouie, elle exhibe des trésors satinés

Dorés à souhait

J'ordonne une expertise mais la vérité m'épuise

Inlassablement se dévoile

(…)

Le lundi, le mardi, le mercredi, le jeudi, le vendredi

De l'aube à l'aube

Une partie de la matinée

Et les vacances abstinence

Ma petite entreprise, ma locomotive

Avance au mépris des sémaphores

Me tire du néant

Qu'importe l'amour importe

Qu'importe l'amour s'exporte

Qu'importe le porte à porte

En Crimée au sud de la Birmanie

Les lobbies en Libye au Laos

L'Asie coule à mes oreilles

Ma petite entreprise ne connaît pas la crise

S'expose au firmament

Suggère la reprise

Embauche, débauche

Inlassablement se dévoile

(…)

Qui fait que je toque

À chaque palier

Escalier C, bâtiment B

(…)

Le lundi, le mardi, le mercredi, le jeudi, le vendredi

De l'aube à l'aube

De l'aube à l'aube » (Bashung)

.

Vite lu, vite oublié je ne sais pas mais en tout cas plaisant à lire comme intermède de saison à mon pavé en cours.

.

Joyeux bientôt Noël à tous !
Commenter  J’apprécie          6631
Rodden Eiland

Je vais ajouter ma perle au collier, ou plutôt pour rester dans l'ambiance mon île à l'archipel. Merci à Paul, Patrick, Nicola et Sarah qui m'ont donné envie de découvrir ce livre, et merci spécialement à Nicola qui l'a partagé avec moi.



Rodden Eiland : ile baptisée ainsi par Édouard Hythlodée en l'honneur de son meilleur ennemi et néanmoins collègue, Piet de Band, de nationalité néerlandaise. Édouard Hythlodée est un poissard. Déjà imaginez porter un nom pareil : quel cauchemar à chaque rentrée scolaire quand il faut remplir quelques dizaines de fiches avec son nom correctement orthographié (c'était encore le cas quand mes enfants étaient scolarisés, peut-etre internet les a fait disparaitre). Cela ne l'a pas empêché de devenir vétérinaire, et pas des moindres, puisqu'il est une des sommités de la chirurgie vétérinaire et ainsi invité à un congrès au Japon. ce qui lui vaut, comble de la poisse, de se retrouver enfermé dans les toilettes d'un avion que personne ne réussit à ouvrir.



Il ne sait pas encore que cet énième déboire va lui sauver la vie, quand l'avion va s'abimer en mer;



Notre anti héros, seul dans ses toilettes, va se retrouver tout aussi seul sur son ile après le crash de l'avion. Il va devoir s'adapter, déployant des trésors d'ingéniosité, espérant dans les premiers jours l'arrivée des secours. Espoir déçu soir après soir, mais demain est un autre jour...



Je ne vous en dirai pas plus, de peur de déflorer le sujet. Sachez que j'ai beaucoup apprécié cette lecture, l'écriture sans fioritures et efficace de l'auteur, les questions soulevées par les diverses situations dans lesquelles se retrouve notre Robinson qui nous poussent à réfléchir, les références littéraires nombreuses.



J'ai cru deviner une fin, qui m'aurait un peu déçue. Il n'en est rien. La chute est surprenante et m'a beaucoup plu.



Un roman et un auteur à découvrir.
Commenter  J’apprécie          6435
Abîmés

J’allais écrire un truc disant que ce recueil était porté par l’écriture poétique de Bouffanges et puis je me suis dit que ce n’était pas tout à fait ça. Écriture poétique, le terme ne me convenait pas. En y réfléchissant (oui ça m’arrive, je vous entends d’ici!) je me suis dit que Bouffanges était plutôt un poète de rue. Ne faites pas cette tête c’est un compliment.



Un poète de rue, avec une gouaille particulière. Si on sent l’érudition derrière les mots, on sent aussi l’humilité de celui qui ne fait pas d’effets de manches parce que, finalement, ce qu’il veut c’est s’adresser à nos cœurs, nos âmes, pas à notre tête. Un poète de rue à l’esprit vagabond capable encore de s’émerveiller devant une pousse d’arbre dans un métro. Symbole de résistance, de rêve, d’échappatoire.



J’ai beaucoup aimé l’ensemble de ces nouvelles qui portent des messages forts pour les rêveurs, qui, comme moi, se sentent parfois étrangers à ce monde. Dépassés par une société dans laquelle ils ne se reconnaissent pas. Des bouteilles jetés à la mer murmurant qu’il est encore possible de penser différemment, de s’arrêter, de sortir de la masse, de regarder. Des questionnements sur bien des sujets, mais aussi des histoires, parce qu’on aime tous qu’on nous raconte des histoires. De petits éclats de rêves posées sur du papier.



Je n’arrive pas à décider si ma préférée est Le silence de la chouette ou Le gardien de phare mais une chose est sure, je les ai toutes aimées.
Commenter  J’apprécie          6256
Abîmés

Salut à toi lectrice, lecteur, toi qui aime t'ennivrer avec des mots! Salut à toi l'auteur, l'autrice, toi qui aime jouer avec des écrits! Salut à toi babeliote et babeliot, toi qui aime écrire autant que lire, et Salut à toi qui aime les Bérus, car sans eux, il n'y a point de salut!

Je sais, c'est complètement hors propos, mais j'en avais juste très envie!

Ceci dit, je vais vous parler d'un recueil de nouvelles que je viens de terminer et qui ne m'a pas laissé indifférent, loin de là!

Quelle est la spécificité d'une nouvelle : Sa courtitude (comme dirait Ségolène) sa densité et souvent sa chute qui n'a rien à voir avec ses reins!

Abîmés, ce titre cache un écrin dans lequel trainent quelques bijoux d'écriture car c'est bien cela que l'on remarque en premier : la qualité de l'écriture, c'est du ciselé artiste, du grand art de rédaction.

Bouffanges, limousin de coeur, (c'est près de chez moi, ça), nous régale de quelques nouvelles assez différentes quant aux thèmes abordés, qui touchent parfois au fantastique mais dont le point commun reste la beauté de la langue.

Certaines sont empreintes de poésie et de grâce et tout comme mon amie babeliote qui a commenté juste avant moi ce même recueil, j'aurai une petite préférence pour la nouvelle intitulée "Le gardien du phare". Je l'aime beaucoup , très beaucoup, celle-ci!

la dernière, "Impunité" est très très dure et même plus que ça, j'aurais des choses à redire quant à la conclusion de cette histoire : je la trouve plutôt discutable mais je n'en parlerai pas, je préfère vous la laisser découvrir.

Donc, restons en au style de cet auteur et surtout au maillage de ses mots qui est l'apanage de cet auteur : Bouffanges.



Allez, osez l'aventure Bouffanges, vous ne le regretterez pas, vous découvrirez un sculpteur de langage!



Et Zuuuuut, j'ai oublié de remercier la principale héroïne, celle sans qui tout cela n'aurait pu être possible! Je parle de Nickie, Nicola, qui m'a permis de découvrir ce recueil, merci à toi camarade babeliote, bien entendu sans papillotes!
Commenter  J’apprécie          6143
Rodden Eiland

Quand on s’appelle Hythlodée Édouard rien n’est jamais simple surtout quand on est poissard, il pourrait même servir de mètre étalon comme monsieur Richter ou monsieur Murphy et sa célèbre loi. Prendre l’avion pour se rendre à un congrès de vétérinaire pour une personne lambda est chose courante et peut sembler anodine mais pour monsieur Hythlodée c’est un aller simple vers la tragédie. Parfois des journées qui s’annonçaient bien peuvent vite dégénérer en cauchemar.

Un réveil douloureux sur une île inconnue, un manque total de repères, et surtout un instinct de survie à retrouver. C’est pas koh -lanta c’est pire.

Édouard après moult péripéties aperçois l’étrave d’un voilier s’approchant de la plage.

Fini la solitude et retour à la vie en société avec son cortège de problèmes, car dans un groupe il y a toujours un mâle alpha voir deux et les divisions arrivent inévitablement.

Alors vivre seul ou mal accompagné ?

Rodden Eiland de Bouffanges commence comme une farce . Une "Robinsonnade ” comme celle de Daniel Defoe pour finir comme le roman de Robert Merle.

Un roman que l’on pense léger mais qui laisse à réfléchir sur une société où le moindre petit grain de sable peut vite devenir un enfer. Voici une belle découverte d’un romancier et de son œuvre grâce à Nicola.

Commenter  J’apprécie          6027
Do androids fantasize about electric orgasm..

Excellente, cette nouvelle de Bouffanges, qui ne cesse de nous retourner en une quinzaine de pages seulement (trente si l'on compte la traduction anglaise). Mais moi qui aime vous mettre dans l'ambiance des histoires que vous allez lire, là, je suis bien embêtée, parce que dire quoi que ce soit serait déjà révéler la surprise du début ou, pire, la fin… Alors je me contenterai de dire que l'auteur excelle tout d'abord à nous enflammer par la sensualité d'une relation amoureuse qui semble parfaite, puis il brise l'ambiance en mille morceaux choisis avec une réaction masculine qui nous interroge, enfin la poussant à son paroxysme, il interroge sur les rapports homme-femme, homme-androïdes, et plus si affinités … Paradis ou enfer ? A vous de juger, en commençant par répondre à la question posée par le titre ! Alors quoi, les androïdes fantasment-ils sur les orgasmes électriques ? Les dialogues sont excellents. Intelligent et explosif, pas besoin de lubrifiant, ça passe tout seul !

Commenter  J’apprécie          6064
Rodden Eiland

Édouard Hythlodée se considère comme l'une des personnes les plus malchanceuses au monde. Et il semblerait que le destin ne cesse de lui donner raison. Tenez par exemple, lorsqu'il prend l'avion avec plusieurs de ses collègues pour se rendre à un colloque, il se retrouve enfermé dans les toilettes. La porte est coincée, et l'hôtesse, mal à l'aise, l'informe qu'il devra prendre son mal en patience puisqu'il faut attendre que l'avion ait atterri pour qu'on vienne lui débloquer la porte. Il reste deux heures de vol... Mais pendant ces deux heures, l'avion traverse plusieurs zones de turbulence. Pas attaché évidemment, il a beau s'agripper à ce qu'il peut, il ne cesse de se cogner partout... Puis arrive le moment où le commandant de bord informe les passagers qu'il va devoir amerrir suite à une avarie, il leur dit de surtout bien rester attachés et d'enfiler les gilets de sauvetage à leur disposition sous leur siège... Ça lui fait une belle jambe à Édouard, qu'une ultime secousse assomme. Quand il reprend connaissance, il est toujours dans ses toilettes, en queue d'avion, seul morceau qui a survécu à l'amerrissage. Édouard est le seul rescapé, perdu sur une île déserte...



Ne pourrait-on pas dire qu'il a eu de la chance dans sa malchance ? Tout dépendra de lui finalement...



Les secours tardant à venir, il lui faut apprendre et s'adapter au plus vite...



Au premier abord, on pourrait se croire dans une robinsonnade quelconque mais grâce à la plume quelque peu sagace de Bouffanges, on a tôt fait de se rendre compte du contraire. L'auteur se démarque avant tout par son style de narration, ou devrais-je dire plutôt ses styles de narration. Car, en effet, le récit se découpe en trois parties narrées chacune d'une manière différente.



La première partie, narrée à la première personne, nous relate le moment du crash et les jours qui suivent. Nous sommes dans la peau d'Édouard et nous vivons avec lui son désappointement, l'attente des secours et sa résignation. Nous l'accompagnons dans ces premiers jours de survie sur l'île, que nous découvrons avec ses yeux.



La seconde partie, dont les événements se situent deux ans plus tard, est narrée à la troisième personne, comme une invitation à percevoir plus loin que ce que le regard d'Édouard nous permettait de voir jusque-là. Ce dernier connaissant désormais l'île sur le bout des doigts, c'est comme s'il nous offrait une vision entière, sur plusieurs perspectives, de son lieu et mode de vie.



La troisième partie, qui se projette huit ans plus tard, est très particulière, puisqu'elle nous est relatée sous forme d'émissions radiophoniques. C'est un peu déstabilisant sur le moment puisqu'on se demande bien comment ce genre d'émissions peut être possible sur une île déserte. Mais tout s'explique rapidement, nous permettant de rentrer facilement dans le jeu...



Le ton donné est subtilement cynique. Là encore, comme avec "Zombies", on aime à lire entre les lignes. Et puis on aime aussi les petits clins d'œil à l'actualité, glissés ici et là comme des petites piques ou des rappels (comme les drames de Malaysia Airlines de 2014, ou encore les régimes capitalistes). Les références culturelles, littéraires notamment, arrivent toujours à point nommé.



Mais je me rends compte que je n'ai pas encore parlé du fond. On est certes dans une robinsonnade et les références sont nombreuses, notamment en ce qui concerne l'organisation sociale et la nature humaine qui revient au galop dès lors que l'on n'est plus seul. Pourtant le parcours d'Édouard prendra un tout autre chemin, qui lui permettra de s'en démarquer. Difficile d'en dire plus sans prendre le risque de divulgâcher, je vous invite donc à le découvrir par vous-même.



Et que dire d'Édouard ? Un peu décrit comme un anti-héros, il a clairement la guigne mais sait finalement s'en accommoder. Il est débrouillard, un rien sarcastique également. Il n'hésite pas à jouer d'autodérision pour mieux se relever de sa dernière poisse. Édouard est un personnage aussi intéressant qu'original.



J'en arrive maintenant à la fin, que je pressentais décevante et baclée au fur et à mesure que je m'en approchais. C'était évidemment sans compter sur le retournement des toutes dernières lignes, nous offrant finalement une fin aussi inattendue que sensationnelle. Ça, je ne l'avais pas vu venir !



"Rodden Eiland" est un livre qui fait réfléchir par les différents sujets abordés (organisation sociale/sociétale, idéologies utopiques, vivre-ensemble, nature humaine). Mais c'est aussi un livre subtilement drôle, ironique et perspicace.



On le referme avec cette question en tête et dont on peine à trouver la bonne réponse : Sur une île déserte, vaut-il mieux y vivre seul ou mal accompagné ?



Je remercie une nouvelle fois @NicolaK, sans qui je n'aurais jamais découvert l'univers de Bouffanges.

Commenter  J’apprécie          5919
Votez Blanc

J'ai trouvé l'antidote à ma lecture laborieuse de Faulkner : une petite nouvelle de Bouffanges, à la fois réjouissante et incitant à la réflexion.

.

Nouvel an 2016 : Un groupe d'amis parle des prochaines élections présidentielles. L'un, Noël, mentionne la nécessité de comptabiliser les votes blancs. Et quelques mois plus tard, il se présente à l'élection, revendiquant sa neutralité politique et sa volonté de reconnaissance du vote blanc. Son slogan est simple :

« Vous voulez protester ?

Vous ne vous reconnaissez dans aucun parti, n'adhérez à aucun programme ?

Vous ne voulez pas soutenir un extrémisme qui ne vous correspond pas ?

Vous voulez voter blanc ?

VOTEZ Noël BLANC ! »

.

Dans une trop courte nouvelle, au style qui rappelle un peu Zombies, par des résultats de sondages, des interviews, des citations d'homme politiques, l'auteur nous raconte l'irrésistible percée de Noël Blanc dans les sondages jusqu'au jour où …

.

On retrouve dans cette fable politique tout le style, la verve , le don pour épingler les travers de notre société de l'auteur. Les paroles des hommes politiques sont plus vraies que nature et révèlent l'évolution de leurs sentiments vis-à-vis de cet adversaire, qui leur parait d'abord bien inoffensif et qui pourtant grignote des places dans les sondages. Ils envisageront diverses solutions pour le contrer, le mépris et condescendance dans un premier temps, la dérision, une tentative d'invalider sa candidature, la proposition d'alliances. Cet homme qui au départ ne voulait que récolter les votes de ceux qui ne voulaient plus de ce que la politique traditionnelle ou extrémiste leur proposait, va même sous la pression, proposer un programme, simple, concis, mais qui pourrait être efficace. On ne le saura pas …

.

Un triste tableau de la vie politique et des comportements de ces messieurs-dames qui jouent dans leur pré carré, et n'aiment pas qu'un trublion vienne troubler leur autosatisfaction. C'est troublant de vérité, plein d'ironie, et hélas très court. J'aurais aimé que l'auteur développe un peu plus le sujet.

Commenter  J’apprécie          5928
Zombies

Mon tour est enfin venu de découvrir Bouffanges, grâce à "Zombies", livre que j'ai vu passer un certain nombre de fois parmi mes amis babelionautes. Je remercie tout particulièrement @NicolaK, qui s'est proposée spontanément de m'envoyer quelques ouvrages de l'auteur. Après quelques couacs de La Poste (ça m'apprendra à préférer lire sur papier plutôt qu'en numérique), et maintenant que j'ai enfin terminé mes emprunts à la bibliothèque, je peux désormais m'y consacrer. Je n'avais pas prévu de commencer par celui-ci, mais le thème du mois d'octobre voulant que je lise un livre avec des créatures fantastiques/surnaturelles (défi mensuel de Booknode), "Zombies" s'est donc finalement retrouvé tout en haut de ma pal prioritaire.



Dans une petite ville de Corrèze, au domicile de la famille Grelon, Sylvain est en train de mater "Z comme Zombie" à la télé lorsqu'on frappe à la porte. Il ouvre et se retrouve nez à nez avec sa grand-mère... qui a été enterrée quelques jours plus tôt... Admise aux urgences de l'hôpital de Limoges, les médecins ne comprennent pas comment cette petite vieille dame de 73 ans peut être autant en forme et avoir un tel appétit alors que son système cardiaque et respiratoire ne fonctionne plus... Madame Grelon est le premier thanatorésistant recensé, bien d'autres après elle sortiront de leur tombe. Leur nombre devient préoccupant : il y en a des centaines de milliers...



À noter en premier lieu et essentiellement l'originalité du style de narration : comme une sorte de reconstitution ou d'état des lieux, les faits sont relatés sous forme de rapports et de compte-rendus, d'articles de journaux ou de revues scientifiques, de flash infos radiophoniques ou télévisuels, d'extraits d'émissions TV diverses, d'interviews ou de débats politiques, etc. C'est assez impersonnel, puisqu'il n'y a en fait pas de personnages, bien que certains reviennent assez souvent. C'est assez inhabituel, mais finalement très réussi et ingénieux. Cela nous permet de suivre les événements de points de vue très divers : médical et scientifique, politique et gouvernemental, médiatique, sociologique et économique, religieux, sanitaire, moral et éthique également.



Le ton donné se veut ironique et satirique, pour peu qu'on sache lire entre les lignes (ou pas, ce n'est pas toujours nécessaire). C'est subtilement et intelligemment bien construit. Je n'ai d'ailleurs pu m'empêcher de faire un parallèle avec la gestion de la crise sanitaire due à la Covid-19 (alors que ce livre est paru en 2015...) ou encore faire le rapprochement entre les centres de rétention administrative qui accueillent les immigrés et les centres d'accueil dans lesquels sont parqués les thanatorésistants...



Loin des zombies qu'on a l'habitude de voir ou de lire, ceux de Bouffanges sont juste des revenants sortis de leur tombe. S'ils ont un appétit vorace et qu'ils émettent une odeur quelque peu putride, ils ne sont pas méchants, ni violents, ils ne sont pas sanguinolents et décérébrés, ne se nourrissent pas non plus de chair humaine. Des êtres "normaux" si l'on peut dire, qui ne peuvent s'exprimer et cicatriser, mais qui gardent un esprit vif et ressentent la douleur. Pas d'horreurs, ni d'épouvantes donc. Pas de quoi nous dégoûter non plus. Très soft finalement.



Mais beaucoup de "politiquement incorrect" qui dénonce subrepticement un système gouvernemental incompétent, qui se fiche bien de son peuple et ne se préoccupe essentiellement que des prochaines élections présidentielles...



Un livre sans réelles émotions mais dont le style impeccable de l'auteur se suffit à lui-même : cruellement satirique.

Commenter  J’apprécie          5921
Zombies

Un célèbre copain, qui s'appelle Aristote, me confiait il n'y a pas si longtemps : « Il y a trois sortes d'hommes : les vivants, les morts, et ceux qui vont sur la mer. »

Et voilà qu'un certain Bouffanges, et néanmoins ami, propose une autre vision de l'humanité, un peu moins maritime certes : il y aurait donc selon lui les vivants, les morts et les non-morts.

Non-morts, c'est un doux euphémisme pour dire zombies, vous l'aurez compris au titre...

Jusqu'à présent je n'ai jamais vu de zombies sauf dans les films fantastiques et aussi en politique. Mais moi je vous parle ici de la vraie vie.

Dans ce récit, tout commence par un fait divers, puis un second, et un troisième qui va corroborer des faits convergents... Des personnes semblent revenir de la mort, frapper à la porte des vivants, de leurs proches... Les événements se traduisent tout d'abord par une forme d'incompréhension du milieu médical... Rapidement, reliés par les journaux locaux, ils prennent un retentissement médiatique sans précédent à l'échelle nationale...

Les premiers symptômes montrent bien que ce ne sont ni des vivants, ni des morts...

Le milieu médical va même les désigner sous le nom, le beau nom grave de thanatorésistants...

Au départ bien sûr, on cherche à minimiser les faits, à tous les échelons où des décisions se prennent, ou ne se prennent pas d'ailleurs...

Le pouvoir politique finit par s'affoler, - il met un peu de temps à réagir comme d'habitude, puis commence à être ébranlé. On appelle cela une crise.

Même l'Église s'en mêle... Il n'y a jamais eu autant de "fidèles" à aller à la messe. C'est un peu comme dans Manon des Sources, lorsque l'eau avait disparu...

Au début, ces zombies m'ont paru innocents, sauf à considérer que suspendre une cardiologue en milieu hospitalier dans l'exercice de ses fonctions, créer une crise politique majeure, soulever le couvercle posé sur le problème du financement public des hôpitaux, sont loin d'être innocents...

Dans les rares films fantastiques que j'ai vus et aussi sur la chaîne de Public Sénat, j'ai eu l'occasion d'observer des zombies... Ils se ressemblent tous dans leurs allures d'avancer...

Il y a souvent des zones d'ombre dans leurs territoires de prédilection, l'endroit d'où ils viennent aussi, des marécages, pour ne pas dire des marigots, ils se reconnaissent aussi à leur manière de se dévorer entre eux, surtout lorsqu'ils sont proches les uns des autres, dans le même clan... Je parle bien sûr des zombies, je dis ça pour qu'il n'y ait pas d'ambiguïté dans mes propos...

Le récit de Bouffanges se lit d'une traite, à la manière dont nous appréhendons aujourd'hui l'information. Des flashs infos courts, des dépêches de l'AFP, des reportages de chaînes locales ou nationales, des conférences de presse, des réunions interministérielles de crise...

À l'Assemblée Nationale on s'invective.

Chacun y va de sa petite musique...

Moi je préfère la petite musique de nuit de Mozart.

Des tombes se soulèvent, des êtres frémissent, s'élèvent, bougent, avancent...

Bientôt ils sont des milliers, on ne sait plus que faire pour les accueillir, les prendre en charge, les concentrer dans des lieux dédiés, les détruire peut-être comme le propose un célèbre parti d'extrême-droite... Au fond, ils étaient morts déjà, qu'est-ce que ça va changer ? argumentent-ils...

Ces lieux dédiés, on les appelle tout d'abord des centres de rétention, mais les chargés de communication des ministères ont trouvé que c'était mieux de parler désormais de centres d'accueil. Cela faisait plus propre sur le papier...

Dans cette bataille politique avec pour toile de fond les élections présidentielles, on oublierait presque que ce sont des pères, des mères, des frères, des enfants dont il s'agit, ce sont les morts ou plutôt les non-morts de ceux qui survivent dans cette société à la dérive, car c'est bien d'une société en déliquescence lâche et immorale dont on parle ici, une société qui s'effondre, une dystopie sociopolitique...

J'ai déterré ce texte entre les vivants et les morts...

Une ironie mordante voire caustique traverse le récit, et à chaque fois je me disais : tiens ça me rappelle quelque chose ! Je cherchais l'évocation d'un récit de fiction lointain qui me parviendrait parmi ces Mémoires d'outre-tombe... En vérité, brusquement le déclic me vint comme une claque : cet univers impitoyable se déroulait sous mes yeux, sous ma fenêtre... Cette société était bien la nôtre dans sa manière de traiter la différence...

La déliquescence du service public. Où commence où s'arrête la question du bien commun. Les intérêts privés quand le bien collectif n'est plus préservé et qui prennent le pas puisque la nature a horreur du vide... Tout était là sous mes yeux ahuris...

Comment ne pas voir ici une triste pantomime de notre société qui part en ... qui part en..., - vous mettrez le mot qui convient et qui vous pend aux lèvres...

C'est un récit court, morcelé au premier abord, construit sur un rythme addictif. Les découpages se couturent très vite en une logique implacable autour d'un fil conducteur tendu vers son dénouement. Un texte prenant, touchant, dérangeant, cruel, qui nous entraîne de gré ou de force devant le miroir que nous renvoie notre société...

Chapeau bas, Bouffanges !



Merci à toi Nicola de m'avoir invité à cette lecture !
Commenter  J’apprécie          5939




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Bouffanges (89)Voir plus

Quiz Voir plus

50 nuances de Grey (Trilogie)

Quel est le vrai prénom d'Ana?

Alicia
Anastasia
Alice
Emile

13 questions
235 lecteurs ont répondu
Créer un quiz sur cet auteur

{* *}