HENRI : Tu as fait tes problèmes Jo ?
JO : Après dîner !
HENRI : Mouais... C'est toujours pareil, tu t'y prends à la dernière minute !
MAMAN : Jo, où as-tu rangé l'ouvre-boîtes ?
JO : Dans le placard, sous les illustrés.
MAMAN : Je ne le trouve pas. Jo, viens me retrouver cet ouvre-boîtes tout de suite !
JO : Ah mais ! Je ne peux pas écouter la radio tranquille ! Merde à la fin !
MAMAN : Quoi ?! Tu as fini de parler comme ça ? ! Va chercher le pain immédiatement !
JO : Attends une seconde, je...
HENRI : Tu vas faire ce que maman t'as dit, oui ou non ?!
JO : Sans déconner ! Je me demande parfois si on a vraiment gagné la guerre !
La Révolution est une histoire d’amour, inventée au fil des jours à venir par des enfants désormais grands et nostalgiques, perdus et amnésiques… et qui un jour enfin, se souviennent de leur possible éternité. (page 23)
Aller voir au dehors la vie d'un dimanche d'hiver. Il faisait froid et beau, et tout était calme, serein. La ville entière semblait s'étirer langoureusement sur un canapé confortable et cotonneux. J'ai décidé de prendre le bus pour aller jusqu'au port, voir la mer. La mer et son absence d'obstacle. J'ai longtemps marché le long des jetées. Bruits de filins s'entrechoquant et rires d'enfants. Cris des mouettes et souffle du vent. Molesse du sable, caresse du soleil. Mais rien de tout ça ne voulait m'envelopper. Je restais désespérément extérieur à tout ce qui m'entourait. Comme blindé au mal de vivre, clôturé de solitude, carapace d'une vie sans horizons.
On est con quand on a 18 ans. En guise de pudeur, on se forge l'armure qu'on peut.
- Calmez-vous, voyons ! Nous sommes tous frères… ou sœurs ! Je suis sûr que mon ami s’excuse déjà.
- Ah mais pas du tout ! Je lui pisse à la raie !
C’était un 12 novembre 1918, le premier jour de paix d’une ultime année de guerre.
De ce jour-là, mon père disait qu’on y avait enterré l’hiver d’un monde… mais sans savoir encore où était le printemps.
L’autre nom du purgatoire… The Yards, quartier des abattoirs.
Ici bat le cœur de la ville aux larges épaules… Ici se tiennent les bouchers du monde. Ici ploient sous la camisole les manutentionnaires d’un rêve assommoir. Pataugeant dans la fange d’une farandole immonde… Abattant, découpant, équarrissant, conditionnant…
Ici, rien ne se perd, pas même la sueur ou les cris. Quarante mille hommes, femmes et enfants, Vingt-cinq millions de bêtes par an… Deux troupeaux qu’on ne distingue guère, dont seules les gardiens diffèrent. (page 53)
Et vous, les artilleurs, vous avez appris à tirer chez des daltoniens aveugles ?! Réglez votre tir pour la prochaine attaque, ou bien c'est vous que nous chargerons !
Alors, mon vieux, vous aussi vous préférez parfois parler aux arbres, aux rivières et aux chevaux plutôt qu'à vos semblables ?
C'est absurde. J'ai onze ans et je ne connaissais aucun allemand. Comment peut-on être son ennemi ?!