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Critiques de Ahmadou Kourouma (217)
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Les Soleils des indépendances

Les Soleils de Indépendances est le premier roman écrit par Ahmadou Kourouma, publié en 1968.



1968 : cela fait seulement huit ans que la Côte d'Ivoire est indépendante. La colonisation a pourtant laissé des traces dans le pays, Fama Doumbouya a payé pour le savoir. Ruiné par les Soleils des Indépendances, Fama n'a pas d'autre choix que de gagner sa vie en déambulant d'obsèques en obsèques. Ne vous étonnez pas, les obsèques dans certaines tribus africaines, durent quarante jours et tout le monde peut y participer. Y ont lieu des palabres sans fin et une distribution générale de nourriture.

Fama est donc un vautour. Quel sort amer pour ce dernier descendant d'une longue lignée de chefs de tribu malinké ! Salimata, son épouse, travaille dur pour le nourrir mais elle ne le supporte plus. Fama est incapable de lui faire un enfant, alors elle dépense tout son argent chez les marabouts. Quel triste ménage !

Alors Fama décide de retourner au village natal au fin fond des plaines arides et de reprendre les rênes de la tribu.

La suite, vous la saurez en lisant le livre !



Le style de ce livre est très particulier, Ahmadou Kourouma met la langue française au service de sa culture africaine malinké pour nous offrir ce roman. Ne passez pas à côté d'un des plus grand auteurs africains francophones !



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Les Soleils des indépendances

Dans son roman, Les Soleils des indépendances, A. Kourouma offre au lecteur une aventure au sein de la littérature africaine. Il mêle audacieusement le langage orale à son écriture, créant parfois un sentiment de malaise chez le lecteur. Toutefois, lors de la relecture de cette œuvre, le lecteur s'aperçoit de toute la richesse et du charme ainsi crée par l'auteur. La langue française et malinké ne font qu'une pour entraîner le lecteur dans le monde postcolonialiste de l'Afrique du Sud. Les termes étrangers aspirent le lecteur à la suite du personnage principal et complexe de Fama Doumbouya, un prince malinké déchu. L'auteur ne présente pas un héros, mais un homme tiraillé entre sa déchéance en tant que prince et son humanité qui le pousse à être parfois antipathique au lecteur. Il ne s'agit nullement d'une simple critique contre la colonisation, mais plutôt de l'héritage et des profonds bouleversements qu'elle a laissés derrière elle. C'est là une œuvre qui nous permet d'avoir un point de vue véritablement humain d'un homme qui a voulu profiter de l'ordre nouveau à bâtir, mais qui est nostalgique de son enfance princière.
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Les Soleils des indépendances

La référence de l'oeuvre de Kourouma. Un livre qui se lit en français et en dioula. Une certaine expérience de l'Afrique de l'ouest est surement nécessaire pour comprendre toutes les nuances linguistiques et culturelles de cet ouvrage qui retrace l'histoire d'un "prince" dérouté dans la période des indépendances africaines.
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Allah n'est pas obligé

L'Afrique est un continent qui m'a toujours fascinée. Ce roman retrace les événements marquants qui ont touché plusieurs pays d'Afrique de l'Ouest pendant les années 1990, en particulier le Liberia et le Sierra Leone.

Birahima est une jeune ivoirien de 10 ans. Il a été abandonné par sa mère et il quitte son village pour rejoindre, à pied, son unique famille, c'est à dire sa tante qui vit au Libéria.

Il va être enlevé en chemin par une bande redoutable, il va connaître l'horreur des camps d'"enfants-soldats", des colonels sanguinaires, des dictateurs ridicules, des religieuses qui manient la kalachnikov pour survivre.



C'est un récit qu'on n'oublie pas. Ces pages tragiques de l'histoire de l'Afrique contemporaine sont écrites et analysées par la conscience d'un enfant qui a prafois du mal à exprimer toute l'horreur des situations auxquelles il est confronté. Un enfant privé d'instruction, comme il y en a encore tant dans de nombreux pays et plus particulièrement en Afrique.

Le seul lien à la culture et même le seul accès à la culture et à l'instruction sera pour Birahima la lecture régulière d'un gros dictionnaire qui va aider le jeune enfant à mieux préciser ce qu'il ressent et les situations terribles qu'il traverse.

Quelle intensité, quelle brutalité dans ce livre! L'horreur et la violence à l'état brut. On compatit face au vécu de ce jeune enfant.

Ce livre vous marque, c'est un témoignage d'une force incroyable.

A tel point que mon amie américaine qui a vécu en Afrique de l'Ouest pendant cette période, me disait récemment qu'elle n'avait toujours pas pu finir la lecture de ce livre, tant elle retrouvait des situations dont elle-même avait aussi été témoin.

La galerie de personnages est absolument stupéfiante: les mots me manquent pour évoquer ce terrible colonel "Papa le Bon"!!! Un Papa qui recrute dans la violence ses enfants-soldats et qui les manipule en les abreuvant de hasch.

La soeur Gabrielle qui dirige d'une main de fer son couvent est absolument étonnante: elle n'hésite pas à donner une formation "militaire" à ses religieuses et a été auparavant une exciseuse très connue!

Les rivalités ethniques sont remarquablement analysées de même que les conflits entre les différents dictateurs en jeu.

Ainsi on peut découvrir les alliances entre plusieurs ethnies, alliances qui compliquent encore plus la situation: rivalités entre Bambaras (= "ceux qui ont refusé") et Malinkés en Côte d'Ivoire, le héros étant lui-même un Malinké et rivalités entre Krahns, Gyos au Libéria, ces deux dernières ethnies s'étant finalement alliées pour mieux lutter contre les descendants des esclaves noirs américains qui ont constitué au fil du temps une classe dirigeante très "fermée".



On apprend à cette occasion que les Gyos ont été soutenus par M. Houphouët Boigny, alors Président de Côte d'Ivoire et par le colonel Kadhafi.

Voilà les principaux tenants de cette terrible guerre tribale qui va commencer à Noël 1989 et qui va se prolonger tout au long des années 1990.

On y voit le parcours du très inquiétant Taylor qui a sévi longtemps au Libéria.

C'est un témoignage incomparable.

L'auteur, Ahmadou Kourouma, est né en 1927. Il était ivoirien. Il est mort en 2003. Il a obtenu le prix Jean Giono pour l'ensemble de son oeuvre.

Le livre "Allah n'est pas obligé" a obtenu, en 2000, le prix Renaudot, le prix Goncourt des Lycéens et le prix Amerigo-Vespucci.
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Les Soleils des indépendances

Quelques années après l’indépendance de la Côte d’Ivoire, le peuple sort de ses désillusions. Le départ des Français n’a pas apporté la prospérité ni la liberté. La situation au pays se détériore, le respect dû aux traditions et aux vieilles familles princières n’est plus ce qu’il était. Fama Doumbouya, un prince malinké déchu, erre dans la ville, d’un enterrement à l’autre. Même les griots (caste de poètes-musiciens, dépositaires de la culture orale) confondent l’histoire des grandes familles et improvisent des célébrations pour récolter quelques pièces.



Fama Doumbouya se rend compte de tout cela. On se rend compte de son destin tragique, dernier descendant d’une lignée de chefs de tribu, il n’arrive même plus à réaliser quelques profits au marché (ah… le temps des colonies…). Maintenant, il est presque contraint à mendier. Son combat entre sa déchéance et son honneur est triste et terrible. Justement, le roman constitue une longue, extrêment longue diatribe. En fait, ce n’est pas tant des récriminations qu’une lamentation. Écrit ainsi, ça peut paraître barbant mais j’ai bien apprécié cette lecture. C’est le premier roman d’Ahmadou Kourouma que j’ai toléré. Le style est moins décousu, on est loin du narrateur enfant-soldat qui crache un lot incohérent de paroles, sautant du coq à l’âne.



Lire Les soleils des indépendances, c’est être témoin de la lente agonie de ce monde, de ces griots et de ces chefs de tribu d’une autre époque et qui éprouvent de sérieuses difficultés à s’adapter à la modernité, au post-colonialisme. Maintenant, la corruption est partout et les politiciens sont davantage concernés à se maintenir en place et toute opposition est frappée durement. Le pauvre Fama, qui n’a pas sa langue dans sa poche, se retrouve ne prison. Insulte suprême ! Ahamdou Kourouma a bien rendu ce magistral chant du cygne. À lire.
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Les Soleils des indépendances

Une belle introduction à la culture africaine.
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Quand on refuse on dit non

On s’incruste dans la marche de Fanta et Birahima vers le nord du pays, fuyant les hostilités survenue dans la ville de Daloa qui se situe au sud du pays, car sur les pas de leur marche, Ahmadou Kourouma nous fait revivre toute l'histoire de la côte d'ivoire, de l'époque des explorateurs passant par la colonisation et le soleil des indépendance jusqu'à la grande période de l'arrivée de la démocratie, une ouverture qui donne la parole aux bêtes fauves qui s'acharnent autour d'une même proie, le pouvoir.



A qui revient la chaise du pouvoir après la mort du vieux Houphouët Boigny ? Tout le monde veut sa part du gâteau, en même temps chacun ne veut pas du tout partager avec l'autre, et on assiste à une série de coups bas qui conduit à la déchirure du tissus social, à des guerres tribales, au carnage des peuples d'un même coin, à la rébellion. ça se joue entre Conan Bedié, Robert Guéï, Laurent Bagbo, Balla Keïta et Allassane Ouattara



L'histoire est refaite par Fanta, fille instruite, étudiante, qui prend le temps d'instruire le petit Birahima sur la vie politique de son pays, un ancien enfant soldat, qui n'a jamais fini son cursus scolaire primaire, mais n'empêche qu'il soit amoureux de Fanta...



A travers cette histoire de la côte d'Ivoire, on retrouve aussi l'histoire de l'Afrique entière avec des conflits politiques qui engendrent des guerres tribales par-ci par-là, les mouvements des coups d'état et des rebellions, les portées d'une démocratie encore embryonnaire qui au lieu d'apporter la lumière sur la manière de gérer la cité...hé bien non, son arrivée entraîne la métamorphose des hommes en des bêtes fauves...



Des choses graves décrites dans un langage d'un enfant soldat et analphabète, qui d'ailleurs reprend certaines idées ou définit autrement certains mots avec son propre dictionnaire...c'est vraiment amusant et très agréable à lire!
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Allah n'est pas obligé

Birahima, jeune garçon malinké de dix ou douze ans, a quatre dictionnaires pour raconter son blabla, sa vie de merde: le dictionnaire Larousse et le Petit Robert pour "chercher et expliquer les gros mots français aux noirs nègres indigènes d'Afrique", l'Inventaire des particularités lexicales du français d'Afrique pour la même raison mais dans l'autre sens, pour nous; et enfin le Harrap's pour nous expliquer le pidgin.



Car Birahima a beaucoup à nous dire sur sa vie d'enfant soldat, et il nous joint tout de suite, avec son insolence et son "parler petit nègre" à nous asseoir, à l'écouter et à noter tout ça.

Commence alors le récit de ces horribles années, la mort de sa mère, son enrôlement dans la guerre civile, son kalachnikov, la drogue, la mort, les massacres.

L'écriture est riche, orale, percutante, insolente comme ce gamin, et on en oublierait presque que c'est ce vénéré, ce grand et vieux Ahmadou Kourouma qui se cache derrière ce récit.

Les premières lignes surtout nous entraîne et une fois qu'on les a lues, ferré, on ne peut plus abandonner ce livre. Et tant mieux. Car en dehors de son indéniable qualité littéraire, il nous entraîne tout droit dans ce cauchemar qu'endurent des milliers d'enfants-soldats totalement déboussolés et manipulés dont on ne parle, bien souvent, qu'une fois le conflit apaisé.



A lire, absolument.

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Allah n'est pas obligé

Je viens de relire « Allah n'est pas obligé ». Au fur et à mesure, les émotions de la première lecture me revenaient quasiment intactes. Le récit de cet enfant-soldat est stupéfiant. Il relate son embrigadement et sa participation aux effroyables massacres du Liberia et du Sierra-Leone dans les années 90. Rien ne nous est épargné. Je repense souvent au passage des « manches longues » et « manches courtes ». (Il me semble d'ailleurs avoir vu ces scènes dans un film, je ne me souviens plus lequel.)

Il faut être préparé pour lire ce livre. Mais qu'on se rassure, l'Afrique n'a pas le monopole de la barbarie, loin de là !
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Allah n'est pas obligé

Birahima est comme beaucoup d'enfants de ce coin d'Afrique , délaissé par son père et orphelin de mère .Alors comme d 'autres , ils tombent entre les mains de marabouts , grigri man ou multiplicateur de billets à deux balles et c'est la fin , symbolisée par une kalach et des gris gris fétiches.



A travers l'histoire de cet enfant soldat, l'auteur revient sur l'histoire mouvementée du Liberia et de la Sierra Leone . C'est culturellement très intéressant et humainement effroyable !

Un exemple : pour que des élections ne se tiennent pas un groupe rebelle s'évertua à couper mains et bras à tous ceux qui pouvaient mettre un bulletin dans une urne. Oui, dans ce livre aussi les limites sont repoussées.



Ce qui fait le sel de ce roman est la prose de l'auteur qui s'appuie sur le narrateur , le jeune Birahima , qui s'exprime comme un enfant de 10 ans , avec des expressions puisées autant en Afrique qu'en Occident. Si cela n'atteint pas le niveau de la vie devant soi de Romain Gary, c'est quand même réussi. Et parfois drôle , puisque le jeune Birahima nous explique beaucoup de ses tournures , Faforo ! (bangala de mon père, c'est le sexe !).



Une lecture instructive , qui fait froid dans le dos et relativise certains problèmes occidentaux
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Allah n'est pas obligé

La guerre racontée par un enfant- soldat : orphelins, miséreux, ils sont enrôlés dans des « armées » pour ne pas mourir de faim. Peu leur importe pour qui ils tuent, ce qu'ils veulent, c'est manger. Ils sont affamés, ils sont drogués, on leur donne des kalashs, ils sont battus ou abandonnés en forêt.



Ils ont bien plus peur d'avoir faim que de la mort qu'ils côtoient au quotidien.

« et quand on n'a plus personne sur terre, ni père ni mère ni frère ni soeur et qu'on est petit, un petit mignon dans un pays foutu et barbare où tout le monde s'égorge, que fait-on ?

bien sûr on devient un enfant-soldat. »



Le Liberia , pays non colonisé par les Blancs, l'a été par les ex-esclaves Noirs Américains, qui ont pris le pouvoir en méprisant les « noirs africains nègres indigènes » et les ont colonisés.

Ils n'avaient connu que l'esclavage, alors, ils l'appliquent.

L'Indépendance en 1860 vis à vis de ces Noirs Américains riches n'a rien arrangé, car s'ensuit une tragique histoire du pays, entre Doe, Taylor, enfin le Prince Johnson, qui filme la séance de torture de Doe –fait rapporté par Ryszard Kapuscinski , dans Ebène, , et par le petit Birahima.

Tous des gangsters, dit-il.



Ahmadou Kourouma , pour donner à tous ces crimes, ces tortures, ces assassinats, un ton drolatique (fait rire par son pittoresque. )utilise, et trop me semble-t-il, un recours au dictionnaire Larousse, ainsi qu'à L'inventaire des particularités lexicales africaines, parfois trois fois par page, entre parenthèses comme je viens de le faire, comme si le petit Birahima avait un Larousse dans les mains alors qu'il est presque nu.

Bien entendu, c'est un recours stylistique pour noter l'ignorance totale de ce petit qui n'a aucune conscience qu'il tue.



Il fait comme tout le monde, point.



Le titre complet : « Allah n'est pas obligé d'être juste dans toutes les choses qu'il fait sur terre », ironise : la croyance non seulement en un dieu, mais aussi dans les féticheurs censés protéger ces petits avec des amulettes, dans les séances de désenvoutement de femmes un peu pornographiques, rien ne vaut.

Personne n'est obligé.

Parce qu'en fait, le nerf de la guerre, ce sont l'or et les diamants, tout s'éclaire enfin dans cette sombre suite de violence lorsque notre meurtrier inconscient de l'être arrive en Sierra Leone.



Déjà, au Liberia, trouver une pépite est un des plus grands malheurs qui puisse vous arriver : le propriétaire vous décompte les prêts, prend la pépite et vous limoge.



La faim vous attend.



La guerre tribale fait rage, l'or n'arrange rien.

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Les Soleils des indépendances

Je me rends compte en observant mes lectures que je lis très peu d'auteurs africains. Quelques auteurs du Maghreb, mais quasiment aucun d'Afrique noire. J'ai souvenir de certaines lectures que j'avais trouvé trop "verbeuses" cherchant à atteindre un français encore plus précieux que celui des grands auteurs classiques, comme une sur-correction pour prouver à l'ancien colon que l'auteur africain sait manier la langue. Je comprends la démarche qui amène à ces choix, mais j'avais du mal à entrer dans ces lectures.



Pas de ça ici. Pour mon premier auteur ivoirien , la pioche est particulièrement bonne. Ahmadou Kourouma est un concentré d'Afrique à lui tout seul. Né en Côte d'Ivoire de parents guinéens, ayant fait une partie de ses études supérieures au Mali, envoyé comme tirailleur sénégalais en Indochine... Bref, un auteur tout indiqué pour écrire sur ses Indépendances qui bouleversèrent l'Afrique où il a grandi. Son premier livre, publié en 1968, avait donc son sujet tout trouvé.



Ou plutôt ces sujets car à travers le personnage principal de Fama, prince malinké déchu de son pouvoir par les colons comme par le nouveau pouvoir, Kourouma aborde de nombreux sujets qui traversent encore aujourd'hui l'Afrique. Apports et méfaits de la colonisation comme des indépendances, rapports à la fois complémentaires et conflictuels des religions traditionnelles des marabouts et de l'islam nouvellement implanté, place des femmes dans la société africaine, notamment via la question de l'excision... Ce livre aurait très bien pu avoir été écrit de nos jours, les questions qu'ils posent ne semblent pas réellement avoir trouvé de réponse.



Et pour revenir au style, qui servait de base à mon introduction, Kourouma choisit de créer son propre langage, s'affranchissant de la comparaison obligatoire avec l'auteur français. Se nourrisant du vocabulaire malinké, construisant ses phrases d'une manière très originale, multipliant les propos parfois outranciers l'auteur fait transparaître efficacement la colère, la frustration de ses personnages. Utilisant de façon métaphorique les animaux comme le paysage qui répondent en miroir aux indignations de ceux qui demandent à être respectés, il trouve une voix très personnelle et une musique particulière dans laquelle on prend un peu de temps pour se couler mais qui finit par rythmer notre lecture de manière très agréable.



L'auteur connaitra la consécration par un prix De l'Académie Française et se consacrera ensuite au théâtre. Il ne reviendra au roman que 20 ans plus tard et attendra 2000 et son Allah n'est pas obligé pour atteindre la reconnaissance plus générale en obtenant le Renaudot et le Goncourt des lycéens. Un auteur que je suis heureux qu'un certain challenge (qui se reconnaitra forcément) m'ait permis de découvrir !

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En attendant le vote des bêtes sauvages

Pour l'anniversaire de ses trente années de présidence démocratique, six veillées sont organisées pour honorer le président Koyaga, six veillées qui retracent l'entièreté de son parcours. En digne fils de son père, Tchao, tirailleur qui« avait tué cinq Allemands pendant la Grande Guerre et avait été le premier homme nu à introduire l'habillement. En conséquence, le premier à introduire les débuts de la civilisation dans les montagnes. », Koyaga se bat dans l'armée française au Vietnam et en Algérie.



Il retourne dans son pays quand celui-ci accède à l'indépendance. À la faveur de la confusion générée par un coup d'état manqué, il prend le pouvoir. Sa présidence commence sous les meilleurs auspices : instauration d'un parti unique plébiscité à chaque élection, suicides en masse et automutilations de ses opposants politiques, attentats communistes qui échouent de peu et qui rappellent aux Occidentaux de renflouer les caisses de ce solide rempart contre la menace rouge. Koyaga peut également compter sur le soutien des dictateurs des pays voisins, qui lui apprennent toutes les ficelles du métier.



Véritable coup de cœur, à la fois sur le fond et sur la forme. L'écriture est savoureuse : riche, vivante, sous-entendus et dénonciations féroces derrière les flatteries affichées. Le récit mêle contes africains (les coups d'état sont décrits comme des combats magiques entre les prétendants, soutenus par leurs marabouts) et roman moderne. Sur le fond, on aborde la colonisation, l'escroquerie de la décolonisation et de l'indépendance, qui mène au pouvoir, souvent avec l'appui de l'occident, des dictateurs qui s'occupent plus souvent des intérêts des anciens maîtres, puis de leur famille proche, et seulement ensuite, si les caisses ne sont pas encore vides, de leur propre peuple.
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Les Soleils des indépendances

Dotée d'une écriture particulière (à la fois violente, vulgaire, mais poétique) ce roman de Kourouma permet une véritable immersion dans le pays qu'il a nommé Côte-des-Ebènes qui n'est autre que la Côte d'Ivoire. On y retrouve cette fameuse opposition ville-campagne, ou plutôt devrais-je dire brousse-ville dans ce cas-là. Le savoureux mélange entre la langue française et le dialecte régionale (ici le malinké) qui est le propre de la littérature francophone se révèle dans cette œuvre très intéressant, et parfois très drôle. Une livre à lire et à découvrir
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Quand on refuse on dit non

"Quand on refuse,on dit non",est un roman d' Ahmadou Kourouma . Ce dernier est un des grands écrivains africains ,il est anti-colonial et ne rate aucune occasion pour fustiger la période coloniale française et la période post-coloniale .Sa thématique accorde une grande importance à l'oralité , aux traditions africaines et aux divers rituels .Ce roman est inachevé .On lui doit aussi de très beaux romans tels :Allah n'est pas obligé ,Le Soleil des indépendances ,En attendant le vote des bêtes sauvages ...etc .

"Quand on refuse ,on dit non" est une suite du livre ,"Allah n' est pas obligé

Dans ce dernier ,nous suivons les traces de l'enfant Birahima ,âgé d'à peine dix ans qui quitte son pays ravagé par la guerre civile et pour rejoindre le Libéria .En cours de route avec son accompagnateur ,Yacouba ,ils seront enrôles par les bandes rivales qui se font la guerre

"Quand on refuse on dit non", est un récit qui se déroule sur fond de guerre civile ,en Côte-d'Ivoire .Le jeune ,Birahima est sollicité par une fille ,Fanta ,une voisine qui lui demande de l' accompagner au nord du pays ,pour fuir les hostilités en cours .Fanta est une fille , âgée de dix-huit ans .Elle est belle et doué d' un esprit vif .Elle est bachelière .Birahima le protecteur de Fanta , est amoureux d' elle .Fanta ,fille instruite et cultivée décide de lui enseigner la géographie et l' histoire du pays ,au cours du voyage .

En cours de route ,Birahima apprend beaucoup de choses grâce à Fanta .

Ahmadou Kourouma use au cours de ce récit d' une très écriture mêlée à

une certaine poésie .Une écriture qui démontre l' importance de l' oral dans

la culture africaine .Ce roman est aussi un hommage à l' écrivain .











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Les Soleils des indépendances

Fama est le dernier des authentiques princes malinkés, il cherche à représenter véritablement son statut alors que pour leur peuple,c'est la fin d'une lignée... Ahmadou Kourouma fait de Fama, un homme victime d'un destin malheureux, il ne lui sera même pas accordé un héritier...

Kourouma, raconte d'une belle plume avec des scènes très difficiles à lire : le quotidien très dur de Fama et de son épouse, Salimata, et à travers eux, c'est l'époque d'une Afrique, les coutumes, les féticheurs, les tristes excisions des femmes... Apre, dur, l'auteur dénonce avec une féroce ironie la condition humaine de l'Afrique.
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Allah n'est pas obligé

"Allah n' est pas" obligé est un roman du vétéran des écrivains de l' Afrique sub-Saharienne Ahmadou Kourouma.

Ce dernier est un des grands écrivains ivoiriens .Il a à son

actif une importante bibliographie .

Ce roman a été publié au mois d' août 2000 et a reçu le prix Renaudot la même année .

Ce récit a pour cadre l' Afrique de l' Ouest au moment où la guerre civile entre des bandes rivales faisait rage dans des pays comme le Libéria , la Sierra-Leone ...

le principal protagoniste du récit est un jeune enfant ,

Birahima âgé d' à peine une douzaine d' année .Il vit en Côte-d' Ivoire avec sa mère .Cette dernière décède ,Birahima restant seul , on lui conseille de rejoindre sa tante établie auLibéria , pays voisin .Personne ne se dévoue pour lui tenir compagnie durant son trajet sauf , un jeune handicapé , Yacouba , le bandit boiteux .

Les voilà sur la route du Libéria . Très vite , ils sont enrôlés dans les différentes factions rivales qui se font une guerre sans merci .

Birahima devient soldat-enfant avec tout ce que cela entraîne : drogue ,meurtres , viols...Yacouba arrive facilement à se faire une place de féticheur auprès des

bandits , très croyants .

De péripéties en péripéties , Birahima et Yacouba vont

traverser la Guinée , la Sierra-Léone , le Libéria et enfin

la Côte-d' Ivoire .

La réalité et les épreuves qu' ont vécu ces jeunes enfants-soldats vont laisser sans aucun doute des traces

indélébiles et en seront marqués à jamais .

Une lecture dont on ne sort pas indemne .









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Les Soleils des indépendances

Un grand roman qui retrace l'espoir d'un soleil , on espérait bien, qu'il brisera les chaînes de la colonisation, et permettra à l'Afrique de progresser vers un avenir lumineux...il va s'avérer que ce soleil rêvé ne sera qu'un leurre. Ce livre pose la base de la question d''héritage de la colonisation pour les Africains. C'est comme si sous l'indépendance, la souffrance, le calvaire du peuple n'a fait que changer de forme. On le voit dans la vie de Fama Doumbouya, un prince héritier malinké qui devra désormais composer sa vie avec un déclin qui le rongera jusqu'aux os. Son foyer périclite, ses affaires chutent de tous les côtés, allant jusqu'à faire de lui, celui-là qui passe ses nuits dans des veillées mortuaires où les invités peuvent abonder sans qu'il y est un véritable contrôle. Les soleils des indépendances, C'est l'illustration de l'héritage des indépendances qui n'est que la misère pour les anciennes sociétés africaines qui se trouvent morcelées, des cultures se dégradent peu à peu. C'est une période de transition troublante entre les traditions africaines et la modernité...

Un superbe livre,, plus structuré que les autres livres d'Ahmadou Kourouma, le style est assez recherché faisant ressortir l'esprit oral africain, la narration est percutante, envoutante!

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Quand on refuse on dit non

Ahmadou Kourouma écrivait ce roman lorsqu'il est mort en 2003. Ce livre fut donc publié à titre posthume et reste une œuvre inachevée.

On retrouve le petit Birahima, le jeune héros de "Allah n'est pas obligé", de retour en Côte d'Ivoire, son pays natal. Rappelons qu'il était un enfant-soldat au Liberia et en Sierra Leone. Malheureusement, il retrouve la guerre tribale, qui vient de s'allumer en Côte d'Ivoire et qui oppose les Bétés aux Dioulas. La belle Fanta, dont il est amoureux, lui demande de l'accompagner au nord du pays et de la protéger. Jeune bachelière très instruite, elle profite du voyage pour lui enseigner la géographie et l'histoire du pays. Birahima interprète ce qu'elle lui dit avec son expérience de soldat, mais il reste avant tout un enfant !

Dans ce livre, Kourouma nous délivre deux points de vue sur les raisons et les origines de la guerre tribale qui déchire son pays.

Une petite leçon d'Histoire et des remarques pleines d'humour...Un livre intéressant où l'on retrouve une thématique chère à Kourouma : la violence.

(déjà traitée dans ses précédentes œuvres). On a donc l'impression que l'auteur se répète un peu. Des expressions, des gros mots (Gnamokodé ! Faforo !), des proverbes que l'on retrouve dans tous ses livres, une sorte de signature.

Une écriture loin d'être académique, qui démontre bien l'importance de l'oral dans la culture africaine.

Rendons hommage à l'homme qui a permis à la littérature africaine francophone de se faire connaître.

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En attendant le vote des bêtes sauvages

« Retenez le nom de Koyaga, le chasseur et président-dictateur de la République du Golfe. » (p. 9) Ainsi s’ouvre la première des six veillées en l’honneur de Koyaga. « Retenez mon nom de Bingo, je suis le griot musicien de la confrérie des chasseurs. » (p. 9) Avec son répondeur, Tiécoura, Bingo écrit la geste de Koyaga, président-dictateur africain. Pour cela, il remonte au père de l’homme, à Tchao : « Le tirailleur Tchao avait tué cinq Allemands pendant la Grande Guerre et avait été le premier homme nu à introduire l’habillement. En conséquence, le premier à introduire les débuts de la civilisation dans les montagnes. » (p. 25) Koyaga est un fils des Montagnes, un chasseur, un homme nu. L’ambition et la transgression du père touchent le fils. Koyaga sera décoré en Indochine. De retour au pays, il ne veut qu’être que le plus puissant. Sa mère, Nadjouma, est une sorcière nue, belle et envoûtante. Avec le marabout Bokano, elle soutient les ambitions de Koyaga. De coup d’état en assassinats, Koyaga devient le nouveau président de la République du Golfe.

Koyaga est accompagné de son âme damnée, Maclédio, un être qui a trouvé son « homme de destin » en la personne du chasseur des montagnes. « Maclédio est devenu votre pou à vous, Koyaga, perpétuellement collé à vous. Il reste votre caleçon œuvrant où vous êtes pour cacher vos parties honteuses. Cacher votre honte et votre déshonneur. Il ne vous a jamais plus quitté. Vous ne vous déplacerez jamais plus sans lui. » (p. 123) Tout bon tyran a son homme dévoué. Maclédio est plus qu’une ombre, c’est un prolongement organique du dictateur, une expression incarnée de la soumission au démon.

Koyaga sait tout, maîtrise tout. Mais que faire quand tout n’est pas assez ? « La création de son parti unique et sa nomination comme président-fondateur et président à vie n’apportent qu’un éphémère moment de joie à Koyaga. » (p. 292) C’est Maclédio qui trouve la solution et qui crée « des groupes de choc qui partout et toute la journée griotteront, louangeront Koyaga. » (p. 292) En effet, que vaut un souverain qu’on ne vénère pas ? Que vaut une idole à laquelle on ne sacrifie pas ?

Alors que Koyaga fête le trentième anniversaire de son arrivée au pouvoir, le pays est endetté et traverse une crise que renforcent l’insécurité et les soulèvements orchestrés par les « déscolarisés ». Le règne de Koyaga peut-il s’achever dans le sang et le meurtre ? D’aucuns lui font miroiter le contraire. « Vous briguerez un nouveau mandat avec la certitude de triompher, d’être réélu. Car vous le savez, vous êtes sûr que si d’aventure les hommes refusent de voter pour vous, les animaux sortiront de la brousse, se muniront de bulletins et vous plébisciteront. » (p. 381)

Le roman dénonce les régimes bananiers, mais il met en perspective les fautes et les ravages de la colonisation. « La transgression de Tchao ne déclencha pas la seule scolarisation des jeunes montagnards : elle entraîna le recrutement massif des montagnards comme tirailleurs. Elle fit des Montagnes un réservoir de tirailleurs dans lequel les Français puisèrent abondamment pour toutes les guerres. » (p. 27) L’Afrique sacrifiée, « terre aussi riche en violeurs de droits de l’homme qu’en hyènes » (p. 275) n’en finit pas de souffrir sur l’autel des guerres occidentales et internationales.

Néanmoins, Koyaga sait tirer profit des troubles mondiaux. Bien que son pays bafoue les droits de l’homme, il est une barrière au grand mal du vingtième, le communisme. Dans le pays de Koyaga se cristallisent les conflits du monde : « En moins de trois ans, trois tentatives perpétrées par le communisme international visant à la suppression physique de Koyaga ont été ourdies. Une persévérance ! Un réel acharnement qu’une seule et bonne signification pouvait signifier. Koyaga constitue un verrou important qui arrête le déferlement du communisme international sur l’Afrique. Koyaga est une pièce maîtresse de la lutte contre le communisme liberticide. L’Occident doit le savoir, le reconnaître, aider et secourir, soutenir beaucoup plus, beaucoup mieux son rempart, son bouclier. » (p. 287) La dictature de Koyaga est pleinement justifiée et encouragée par l’Occident capitaliste qui frémit devant le géant Rouge. Vaut-il mieux un dictateur sanguinaire, corrompu et avide de richesses ou un ennemi aux idéaux trop convaincants ? L’Histoire a fait son choix.

Les six veillées déroulent un conte traditionnel. C’est une véritable légende qui se raconte, entre magie et réalité : Koyaga est l’homme qui a vaincu une panthère, un buffle, un éléphant et un caïman. Il est homme que les bêtes sauvages redoutent et respectent. Des proverbes en introduction de chaque veillée annoncent les sujets classiques, les grands thèmes de réflexion que chaque homme doit aborder : la mort, la prédestination, l’apprentissage, la trahison, etc. L’existence de Koyaga est une tragédie africaine, un drame dans le désert. Mais c’est aussi un pamphlet au souffle brûlant, une critique acérée des régimes dictatoriaux africains. Toute louange est ici à double tranchant, vicieuse et serpentine puisque tout succès est issu du mal, de la haine et de la violence. Étourdi par les éloges et ivre de pouvoir, Koyaga n’entend pas le sifflement acerbe que modulent Bingo et Tiécoura. La célébration se fait portrait au vitriol et chaque touche du pinceau complète un hideux tableau.

Le roman d’Ahmadou Kourouma est exigeant et demande une concentration courageuse. Les récits qui s’égarent dans l’espace et le temps, les références historiques et le mélange des genres rendent le texte complexe. Mais également puissant et intemporel. Certes l’Afrique est ici mise au pilori, mais tous les continents ont leurs molochs. Peu importe que la République du Golfe n’existe pas : de vrais territoires souffrent de la même manière et l’exemple n’est pas assez puissant pour les pleurer tous.

Ahmadou Kourouma sait parler du continent africain. Dans une langue riche, parfois idiomatique, lourde de références, il célèbre une terre qu’on a violée, dépossédée de ses beautés sauvages et privée de ses traditions sainement barbares. Pantin entre les mains des autres, qu’ils soient Occidentaux ou Africains dévoyés, le continent n’en finit pas souffrir et de vomir des immondices par toutes ses plaies. En voilà une terre qui peut dire « Pourquoi m’as-tu abandonné ? » En attendant le vote des bêtes sauvages n’est pas un texte à refermer après lecture : c’est une réflexion qui ouvre, au-delà des mots, des infinis de questionnements humains.

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