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Citations de Asli Erdogan (389)


"Schizophrénie paranoïde". J'ai aimé l'étiquette qu'ils m'ont collée, car l'être humain aime tout ce qui lui appartient. Et j'ai pensé que toutes ces choses - les guerres, les prisons, les femmes battues, etc. etc. - n'étaient qu'hallucinations. Donc, ce n'était pas le monde qui était en cause, mais mon imagination débridée.
JOURNAL D'UNE FOLLE.
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Tu t'ouvres aux funestes sentiers de la nuit, à ses obscurs rougeoiements. Hors d'un long puits tu t'éveilles aux ténèbres, à ce destin dont tu as tant retardé l'avènement. L'horizon où plonge ton regard est imaginaire, et le vent qui souffle de la mer, si violent qu'il sèche toutes tes larmes. Il fait claquer à toute volée les portes du passé derrière toi.
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Je pense qu'il veut sortir des sentiers battus et qu'il se fait un devoir sacré de me conduire au bonheur et à la résurrection. Mais prétendre faire renaître quelqu'un de ses cendres, c'est aspirer à un pouvoir sans limite, c'est vouloir être Dieu. Ce n'est pas plus innocent que de vouloir l'arracher à la souffrance ou à la mort. Mais, après tout, peut-être est-ce moi qui ressentais toute forme d'altruisme comme une agression. Je suis incapable de dessiner la frontière qui sépare le désir de protéger de celui de régner. (p. 76)
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Il devait bien avoir quelque part une conviction, un rêve, un être pour lesquels la vie valait d'être vécue. C'est toujours avec cette nostalgie, cette conviction naïve et dangereuse que j'ai couru d'une rue à l'autre, d'un livre à l'autre, d'un regard à un autre. J'ai traversé le monde pas à pas et, tendant les mains, j'ai fouillé avec soin ...
UNE VISITE SURGIE DU PASSE
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Demain le 29 décembre a lieu le procès d'Asli
Une lecture pour "on n'enfermera pas sa voix"

TON ULTIME PAYS LIBRE p.39-42
Le Bâtiment de pierre - Asli Erdogan

Tu te traînes sur le ventre, tu rampes sur des
pierres de la couleur de l'homme, tu cherches
une main amicale, un mot auquel t'agripper
pour te hisser, un fleuve qui t'emporte. Un
fleuve qui mette fin au silence. Tu cherches un
mot, une main ... en gémissant, en tremblant, en
claquant des dents ... Tu laisses des empreintes
tout le long du mur, roses qui se fanent sitôt
écloses, avec leur rouge intense, leurs replis et
leur parfum ... Tu voudrais être mort, devenir
un être ailé, ne jamais être né. Que n'y a-t-il un
dieu auquel tu puisses dire: "Pourquoi m'as-tu
abandonné ?" Tu rampes sur les genoux, sur
les coudes, tu sors de ton corps comme une
rivière se retire de son lit asséché. Tu fermes
les yeux pour les rouvrir dans un autre monde.
Un monde pas encore mort, pas encore créé ...
Tu avances lentement, à grand-peine, dans
cette nuit toujours semblable, vers la fenêtre au
bout du mur, vers ce visage humain émacié et
étrange que reflète la vitre embuée ... Couvert
de taches, disloqué, intemporel. Tu chemines
vers le monde extérieur dont les contours indécis
apparaissent derrière ton reflet. Vers l'appel
bleu comme la glace de l'étoile du berger - ton
étoile, désormais - qui t'attend à l'horizon ...
Tu prends appui sur le rebord de la fenêtre, tu
te lèves lentement, comme la lune nouvelle se
lève sur les ruines. Tu voudrais gravir l'escalier du
ciel, te changer en une clarté d'un or pâle et faire
pleuvoir tes rêves sur la nuit, sur les eaux ténébreuses,
sur le long sommeil agité des hommes,
sur les forêts incendiées. On ne distingue plus
l'obscurité de la pierre de celle de la nuit, la nuit
de la pierre de celle de l'homme. (Pégase est né
de la tête fracassée de la Méduse, du sang le plus
ancien, des veines de la pierre, et il s'est changé
en étoile. Or les étoiles n'appartiennent qu'aux
défunts, la Voie lactée dessine leurs visages.) Sans
mot dire, tu tournes tes regards vers le bas, tu
vois les toits brillants d'humidité, les rues où nul
ne remarque ton absence, les places, les ponts, les
lumières sophistiquées, indifférentes, indécises,
de la ville... Horizons qui ne promettent qu'une
nouvelle disparition. Tout seul, à grand-peine, tu
te mets debout, par-delà l'espoir et le désespoir,
le bien et le mal, tes bras sans force pendent à
tes côtés comme des ailes brisées. Dans un courant
d'air froid, ton ultime pays libre te fouette
le visage, un vent chargé d'éternité disperse tes
cheveux, mais il rassemble tes morceaux épars et
te rend ton visage. Sur tes yeux privés de sommeil
passent doucement les doigts du clair de
lune, ils te montrent la vie comme un miracle
et se posent sur tes paupières sans te faire mal.
Désormais ton corps tout entier est invulnérable,
il vibre comme un arc tendu, il attend aux portes
du monde son dernier exil. Ton voyage n'est
plus qu'une paire de battements de cœur d'un
horizon à l'autre, l'étoile du matin, ton étoile,
te tend une corde pour la rejoindre, tu prends
pour la première fois conscience de ton innocence
en posant la tête sur la nuit épineuse. Seul,
vaincu et altier, tu t'appropries tous les destins
qui s'entrecroisent ici, en te balançant en silence
dans le vent, tu t'élèves, bien droit, au-dessus des
mensonges de la vie et de la mort. Une fois de
plus, la dernière, on entend les accents sublimes
du chœur, il débute doucement, puis s'amplifie
peu à peu, s'élève en vagues successives par-delà
les cieux et les nuits, dominant tous les bruits et
les silences du monde. "Ne t'arrête pas ! Saute !
Jette-toi dans le vide ! "Ce qui vous appelle, toi
et ta solitude, avec ta propre voix, c'est ce chœur
ineffable et somptueux, les tambours de la victoire
ou de la défaite, et le vent ... Le vent.
En remerciant les étoiles, dans ce matin sans
étoile où tu es mort dans une inexorable solitude,
d'un seul mouvement de ta tête affaissée,
tu as arrêté la nuit. Tu l'as arrêtée pour nous
tous. Très tôt, perché sur l'escalier de pierre qui
s'élève vers les cieux, tu as déployé tes ailes, l'une
vers la lumière, l'autre vers les ténèbres. Tu as
allumé la dernière bougie de ta résistance et en
souriant, peur-être, tu l'as offerte au jour naissant.
À cet instant-là une étoile est ressuscitée. Et
tu m'as laissé tes yeux pour que je puisse regarder
la vie comme un miracle.
Après tout la nuit finira, une aube nouvelle
éclairera le monde. La porte va s'ouvrir et la
grande parade des cieux, des déserts célestes, va
commencer.
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Comme l'a dit un écrivain : " une ville commence à vivre dès l'instant que s'y trouve quelqu'un que l'on aime". (p. 15)
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Je comprenais maintenant que ma vie avait toujours était pleine de la peur de voir les choses disparaître. Ce sentiment confus de perte est accablant et beaucoup plus douloureux qu'une perte véritable, car je n'avais aucune idée de ce que je perdais ni de ce que je cherchais.
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Asli Erdogan
suite - interview Asli Erdogan - le soir + 7.01.2017 Par Anne andlauer

Où voyez-vous la place de la Turquie aujourd’hui ?

Je suis de ceux qui pensent que la Turquie est entraînée très rapidement vers le Moyen-Orient. La Turquie est devenue ou devient un pays du Moyen-Orient. Je ne dis pas que la Turquie est semblable à l’Irak ou la Syrie, des États qui se désagrègent sous l’effet des guerres. Mais force est de constater que nous sommes loin de nos rêves de devenir un pays européen, de bâtir une démocratie européenne. Ce mythe n’existe plus sur ces terres. Pourtant j’ai cru en ce rêve. Pas dans le sens où j’assimilerais sans réserve l’Union européenne à la démocratie, mais dans le sens où j’aime l’idée européenne. L’idée de créer une identité supranationale, d’abolir les frontières, les États-nations… J’aurais voulu que la Turquie en fasse partie, y compris pour des raisons purement pragmatiques. Je pense que si la Turquie avait intégré l’UE dans les années 2000, nous n’en serions pas là. Peut-être même que le Moyen-Orient, et l’UE elle-même, seraient dans une bien meilleure position. La Turquie aurait pu être un facteur de stabilité. Mais ce train est passé, ne nous mentons pas.

L’UE peut-elle encore jouer un rôle positif en Turquie ? Ne s’est-elle pas mise hors jeu en n’encourageant pas sérieusement l’adhésion du pays et, plus récemment, dans la crise des réfugiés ?

Certains faits sont incontestables. Certes, la Turquie peut agiter la menace migratoire. Mais d’un point de vue commercial, l’UE est essentielle pour la Turquie, avec qui elle réalise plus de 60 % de ses échanges. L’UE est donc en position de force, au point de pouvoir faire vaciller la Turquie, qui en est tout à fait consciente. En tant que citoyenne de ce pays, est-ce ce que je désire ? Non. Je défends le dialogue. Mais j’attends de l’Europe qu’elle s’engage davantage politiquement. Qu’elle ne se contente pas de formules creuses du genre « Nous condamnons ceci… Nous nous inquiétons de cela… » Par exemple, je voudrais qu’elle rappelle à la Turquie les engagements qu’elle a signés, notamment la Convention européenne des droits de l’homme. Et qu’elle envisage des mesures concrètes, telles qu’un embargo sur les armes. Qui devrait d’ailleurs – si vous voulez mon sentiment d’antimilitariste – s’appliquer au monde entier.

Êtes-vous inquiète de la montée des populismes en Occident, des États-Unis à l’Europe ? Lequel populisme s’accompagne souvent d’un discours de plus en plus décomplexé sur l’islam, assimilé au terrorisme, à l’heure où des groupes prétendant agir au nom de l’islam frappent de plus en plus…

Bien sûr. Le populisme est un mal généralisé, et ce cercle vicieux que vous décrivez est aussi un mal généralisé. Il s’applique également en Turquie. Chaque attaque terroriste du PKK amplifie la haine des Kurdes, le nationalisme, la rancune. Chaque bombe qui explose nous enfonce un peu plus dans l’État policier. C’est la même chose en Europe avec les attentats terroristes, qui renforcent le discours anti-islam et anti-migrants. Le terrorisme détruit tout sur son passage. En tant que défenseur des droits de l’homme, vous avancez millimètre par millimètre, et une seule bombe suffit à détruire vos efforts.

La Turquie des années 2000 était présentée comme un modèle de société majoritairement musulmane imprégnée de démocratie. Ce modèle existe-t-il encore ?

Je n’y ai jamais cru. Pour moi, c’était une vision orientaliste, occidentalo-centrée. C’était un modèle qui arrangeait bien l’Occident mais qui, à l’évidence, a vécu.
«Mon succès n’est pas une consolation»

Comment passe-t-on d’une carrière de physicienne spécialisée dans le boson de Higgs à la littérature et la défense des droits de l’homme ?

J’étais une enfant très solitaire. J’ai appris à lire et à écrire seule à l’âge de quatre ans, tout en grandissant dans un environnement violent. Je lisais énormément, c’était mon échappatoire, mais je n’avais jamais songé à devenir écrivain. C’est quand je travaillais au CERN (Organisation européenne pour la recherche nucléaire, à Genève, NDLR) que j’ai commencé à écrire. Je me suis aperçue que j’avais besoin de l’écriture pour survivre. Je ne dis pas ça pour me forger une légende. C’est la vérité : après 14 heures en laboratoire, je passais la nuit entière à écrire. C’était un besoin. Je faisais ça pour moi, dans mon coin. J’ai commencé par une chronique dans le quotidien Radikal. Tout s’est fait de fil en aiguille : un texte sur les filles kurdes victimes de viol, un sur les enfants torturés… Toujours sur des victimes. C’est comme ça que je me suis engagée dans la défense des droits de l’homme. Mais dans ce pays, cela a un prix.

Un recueil de vos textes vient de paraître en français (« Le silence même n’est plus à toi », chez Actes Sud). Ironie du sort, vous avez sans doute plus de lecteurs que jamais auparavant…

Comme tout auteur, je devrais me réjouir d’être lue davantage. En prison, les jours où je pensais ne pas en sortir vivante, je me disais qu’au moins, mes livres me survivraient. Un écrivain aime toujours ses livres plus que lui-même. Mais je me sens tellement morte à l’intérieur… J’ai le cœur en petits morceaux, comme de petits copeaux de bois. Le succès n’est pas une consolation, je n’arrive pas à en profiter. Peut-être que c’est ce qu’il me fallait apprendre… Que le succès n’a pas tellement d’importance, et à quel point la vie peut être cruelle et injuste.

« Le silence même n’est plus à toi. » Qu’avez-vous voulu dire ?

C’est une phrase tirée d’un texte qui parle de guerre et de défaite. Il y a tant de morts dans ce silence qu’on n’y retrouve même plus sa maison. C’est un poème, en fait.

Cela résume-t-il ce que vous ressentez aujourd’hui ?

Question douloureuse… (silence) Ce que j’ai voulu dire, je crois, c’est que quand les mots vous sont volés, à la fin, il reste le silence. Mais lui aussi vous sera volé. J’exprime une peur.

Ecrivez-vous en ce moment ?

Non. En détention, j’ai pris des notes, j’ai commencé un texte sur la prison. Mais j’ai peur de tomber dans le cliché, de céder à la facilité. Je ne veux pas gâcher cette matière que j’ai accumulée. C’était peut-être plus simple avant d’avoir connu la prison de l’intérieur… J’ai souvent fait des lectures en prison. Chaque fois que je lisais Le bâtiment de pierre (Actes Sud, 2013), qui raconte justement l’univers carcéral, les détenus me disaient : « Le livre est beau, mais on ne s’y retrouve pas. Il est clair que vous n’avez jamais fait de prison ! » Ils avaient raison. En détention, j’ai relu En attendant les barbares de J. M. Coetzee, un auteur que j’aime beaucoup. Dans un passage remarquable, il décrit une cellule. Eh bien je sais désormais que J. M. Coetzee n’a jamais été enfermé dans une cellule. J’aimerais écrire un livre sur ce que c’est d’être enfermée. Mais y arriverai-je ? En ai-je la force ?
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Du haut de la montagne de la mort, aride et pelée, je regarde le soleil se coucher en contrebas, et le crépuscule fait apparaître la vallée plus belle et plus profonde qu'elle n'est en réalité.
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C'était la première fois que je touchais un cheval, et j'étais enchantée, comme rassérénée, par la douceur inattendue du pelage (...) Entrer en contact physique avec un autre corps, une autre créature animée, est le meilleure remède contre la peur de mourir. (p. 61)
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La solitude est de la rouille s’infiltrant dans les veines, remontant des poignets jusqu’au coeur.
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Je prenais ma réponse pour de la franchise, or c’était de la cruauté, de la pure grossièreté. Je venais de briser d’un coup sec de faucille sa sensibilité aussi élégante et précieuse qu’une orchidée.[…] J’étais habituée à combattre, à souffrir, à trimer pour obtenir tout ce que la vie me concédait, et m’étais si bien endurcie que je ne savais plus reconnaitre la valeur des cadeaux qu’elle me faisait. J’avais le cœur calleux.
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Le coeur humain est un miroir, disaient les anciens. Un miroir vieux comme la pierre, quêtant une image qu'il voudrait conserver à jamais. Dur comme le diamant, regorgeant de mystères.Pétri dans la même glaise que le coeur de la terre...
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J'essaie désespérément de me rendre invisible, de me fondre et de m'évanouir dans l'obscurité pâlissante, de me mêler aux ombres, à la pierre, à la terre, de m'enrouler dans un ultime bout d'étoffe arraché aux lambeaux de la nuit...
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présentation : Le Bâtiment de Pierre Asli Erdogan actuellement emprisonnée et ce depuis août 2016 pour ses écrits et en attente de son procès le 29 décembre 2016

Au coeur de l’onirisme, à la frontière du visible et de l’invisible, entre mémoire, rêve et cris, une femme se souvient du Bâtiment de pierre. Dans cette prison, des militants politiques, des intellectuels récalcitrants à la censure, des gosses des rues – petits voleurs de misère – se retrouvaient pris au piège.
De ce monde de terreur véritable, la narratrice de ce récit est pourtant revenue et sa voix, en une étrange élégie, se fait l’écho d’un ange, un homme qui s’est éteint dans cette prison en lui laissant ses yeux.

Ce livre est un chant dont la partition poétique autorise le motif en lui donnant parfois une douceur paradoxalement inconcevable. Un texte rare sur l’un des non-dits de la vie en Turquie.

http://www.actes-sud.fr/catalogue/societe/le-batiment-de-pierre
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Notre relation pouvait ressembler à une amitié de prisonniers ou de recrues du service militaire, du moins était-elle animée par la loyauté, mais elle était aussi issue de la rencontre de douleurs identiques, de passés semblables, d'un esprit commun. Nous étions tantôt deux miroirs où chacune trouvait son reflet, tantôt un prolongement de l'autre, et ainsi réussissions-nous parfois à survivre rien qu'en insufflant à l'autre ce qu'il nous restait de forces. (p. 16)
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Où que j'allasse dans le vaste monde, ils me retrouvaient. Les morts m'écrivaient, m'expliquaient les choses que je n'avais pas encore pu déchiffrer, me rappelaient vers un lieu où je finirais toujours par revenir. Si d'aventure je sortais de mon récit, ils me mettaient en garde contre la vie. Ils savaient que la seule chose à faire était de déchiffrer l'avenir et le passé où je m'étais réfugiée. Le seul, l'éternel visiteur de ma cellule, de mes ténèbres intérieures, était le spectre dépaysé de mon passé. Il m'attendait...
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Asli Erdogan
des nouvelles d'Asli - Procès juin 2017
Levée d'interdiction de voyage pour la romancière turque Asli Erdogan

Un tribunal turc a levé jeudi l'interdiction de se rendre à l'étranger imposée à la romancière Asli Erdogan, poursuivie pour "propagande terroriste" dans une affaire emblématique des restrictions de la liberté d'expression en Turquie.

Saluant une "mesure positive", Asli Erdogan a une nouvelle fois rejeté les accusations. "Je suis innocente. On me fait payer juste parce que j'ai exprimé mon opinion au nom de la liberté d'expression", a-t-elle déclaré après l'audience.
Toujours passible de la prison à perpétuité

Même après la levée de cette interdiction, l'auteure n'est pas sûre de pouvoir se rendre à l'étranger, souligne son avocat, rappelant que les passeports des personnes jugées pour des activités "terroristes" étaient confisqués ou annulés par les autorités sous le régime de l'état d'urgence en vigueur depuis le putsch manqué du 15 juillet.

De plus, Asli Erdogan n'a pas été acquittée et risque, avec 8 autres personnes, la prison à vie. Le procès a été ajourné au 31 octobre.

Elle avait été remise en liberté sous contrôle judiciaire fin décembre après 132 jours de détention pour avoir collaboré avec le journal prokurde Ozgür Gündem, fermé par décret-loi en octobre, car accusé de "propagande terroriste".

afp/ami
https://www.rts.ch/info/monde/8724908-levee-d-interdiction-de-voyage-pour-la-romanciere-turque-asli-erdogan.html
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Nous rirons plus tard, pour l’instant je vais
vous emmener dans le bâtiment de pierre. Arrivé
à l’angle de l’édifice, vous aurez l’impression
d’être dans une impasse, mais droit devant, au
pied de l’escalier, la rue tourne à gauche. Vous
vous arrêterez là pour dire adieu au monde des
hommes. Le chemin qui nous a menés ici est
sans retour. Dedans, nuit et jour, la lumière est
allumée, tout est exposé à une clarté violente et
impitoyable et chacun est réduit à son ombre.
À chaque question, il faut faire une réponse
brève, une destinée tient en quelques phrases.
Il faut avouer. Le temps n’a plus d’autre sens.
L’homme est le plus vieux des mystères, c’est de
la matière qui parle.
Autrefois, j’ai aimé quelqu’un. Il est parti en
me laissant ses yeux. Il n’avait personne à me
laisser. Aimer... Ce mot-là, je l’ai trouvé en
fouillant dans mon cœur, en sondant inlassablement ces épaisses ténèbres. Mais personne
ne m’a dit que “chacun tue celui qu’il aime” !
Nous étions ensemble dans l’édifice de pierre.
J’ai longtemps prêté l’oreille aux bruits. Quand
mon tour est venu, le jour n’était pas encore levé.
Bien sûr, vous ne me croyez pas. Vous pensez
que ce bâtiment est issu de mon rêve ? Mais
nos rêves ne sont-ils pas le levain de la pâte dont
nous sommes pétris ? Finalement, l’aube va
naître, des traînées rouge sang vont apparaître à
l’horizon... Dans le ciel tendu, terne, tout plat,
les étoiles vont se solidifier et disparaître l’une
après l’autre. La dernière laissera pendre une
corde vers le bas, vers nous. Ta nuit muette, tes
mots coupés en deux et ensanglantés, tes ombres
errantes, privées de leur maître, tes rêves couleur
de cœur dont personne ne veut, tes mots
ailés vont pouvoir y grimper... Tous tes rêves,
venus vivre parmi nous et repartis sans crier gare,
vont pouvoir se hisser vers les profondeurs...
Dans les tréfonds où se perdent tout homme
et toute chose...
Mais vous ne m’entendez pas ? J’aurais peut-
être dû faire mon récit au passé. J’ai attaqué
ma chanson dans le mauvais sens, par la mauvaise
note.
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Nous faisions l'amour en dansant, la nudité en moins, plus fortement et plus passionnément encore que si nous avions vraiment fait l'amour.
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