Citations de Carl Gustav Jung (2499)
La psychologie occidentale ne parle pas de l’Esprit Unique, mais de l’inconscient qu’elle considère comme une chose-en-soi, un noumène, un « concept limite purement négatif », pour employer les termes de Kant.
William James […] remarque qu’un homme de science n’a souvent pas de croyance, mais que son tempérament est religieux.
[Introduction de Cazenave]
Un homme sans âme –ou plutôt un homme qui n’aurait pas reconnu la figure de son âme- est voué au pire destin : l’écrasement par l’inconscient qu’il aurait fini par oublier, l’aliénation de lui-même au pouvoir de la masse qui le submerge malgré lui.
L'acte de dénomination, comme le baptême, est quelque chose d'extrêmement important pour la création de la personnalité parce qu'on a, de tout temps, attribué au nom une puissance magique. Connaitre le nom secret de quelqu'un, c'est avoir pouvoir sur lui. Je rappelle, exemple connu de tous, le conte de Rumpelstilzchen.
La religion constitue une attitude instinctive propre à l'Homme, dont on peut retrouver les manifestations à travers toute l'histoire de l'humanité et de l'esprit. De toute évidence, une de ses fonctions est de maintenir l'équilibre psychique, car l'homme naturel sait tout naturellement que ses fonctions conscientes peuvent être à tout moment modifiées, affectées, contre-carrées, aussi bien de l'extérieur que de l'intérieur, par des facteurs incontrôlables.
[…] L’homme contemporain soutient sa croyance au prix d’un remarquable défaut d’introspection. Il ne voit pas que, malgré son raisonnement et son efficacité, il est toujours possédé par des « puissances » qui échappent à son contrôle. Ses dieux et ses démons n’ont pas du tout disparu. Ils ont simplement changé de nom. Ils le tiennent en haleine par de l’inquiétude, des appréhensions vagues, des complications psychologiques, un besoin insatiable de pilules, d’alcool, de tabac, de nourriture, et surtout par un déploiement impressionnant de névroses.
[…] Les religions enseignent une autre autorité, qui est opposée à celle du « monde ». Elles enseignent que l’homme relève du divin, suzeraineté aussi exigeante que celle du monde. Ces exigences divines, avec leur caractère absolu, peuvent soustraire l’homme au monde d’une manière aussi radicale que celle par laquelle il se perd à lui-même en succombant à la mentalité collective.
Et puis - qui donc de nos jours a la parfaite certitude de ne pas être névrosé?
Dans notre monde actuel, la conscience se sent perdue, désorientée. Cela provient en premier lieu de ce que l'homme a perdu le contact avec ses instincts, phénomène qui est dû au développement de l'esprit humain au cours des derniers âges de l'ère que nous vivons. Plus l'homme s'est emparé de la nature, et plus l'admiration qu'il ressentait pour son propre savoir et pouvoir lui est monté à la tête et plus s'est approfondi son mépris pour tout ce qui n'était que naturel et occasionnel.
On sait que le développement rapide des villes […] enlève aux hommes bien des occasions de se libérer de leurs énergies affectives. Le paysan avec son activité richement diversifiée, qui lui confère grâce à ses contenus symboliques des satisfactions inconscientes, […] la vie près de la nature, les beaux instants où le paysan, maître et fécondateur de la terre, pousse sa charrue à travers le sol, où d’un geste royal il lance la semence de la moisson future, son angoisse compréhensible en face des puissances destructrices des éléments, sa joie en face de la fécondité de son épouse, qui lui donne fils et filles, qui sont pour lui forces de travail augmentées et bien-être accru, -hélas !- nous autres, gens des villes, modernes machines citadines, que nous sommes loin de tout cela !
Je ne suis pas ce qui est arrivé, je suis ce que je choisis de devenir.
Il y a même lieu de supposer que, tout comme l’inconscient agit sur nous, l’accroissement de notre conscience a, de même, une action en retour sur l’inconscient.
Le conflit moral est « fondé […] sur l’impossibilité apparente d’acquiescer à la totalité de la nature humaine.
Le monde des dieux se manifeste dans la spiritualité et la sexualité. Les dieux célestes apparaissent dans la spiritualité, les dieux terrestres, dans la sexualité.
Ce qu'il y a au fond de l'âme, l'inconscient, n'est pas le fait des hommes, mais partie de la nature créée par Dieu et que l'homme n'a en aucun cas le droit d'insulter, même si elle nous cause les pires difficultés. (...)
J'ai désigné du nom de persona ce fragment de la psychée collective dont la réalisation coûte souvent tant d'efforts. Ce terme de persona exprime très heureusement ce qu'il doit signifier, puisque, originairement, la persona désignait le masque que portait le comédien, et qui indiquait le rôle dans lequel il apparaissait.
Pour reprendre l'expression de Pierre Janet, la psychée collective embrasse les "parties inférieures" des fonctions psychiques, la part profondément enracinée, qui se déroule et s'exerce en quelque sorte par automatisme, cette part héritée et présente en chacun, donc impersonnelle et suprapersonnelle, de la psychée de l'individu. Au contraire, le conscient et l'inconscient personnel embrassent les "parties supérieures" des fonctions psychiques, donc la part qui a été acquise et développée ontogénétiquement.
Le public commet l’erreur fondamentale de croire qu’il existe des réponses déterminées, des « solutions » ou des conceptions qu’il suffirait d’exprimer pour répandre la clarté nécessaire. Mais la plus belle vérité ne sert à rien – comme l’histoire l’a mille fois montré –, tant qu’elle n’est pas devenue l’expérience première, profonde de l’individu.
Toute réponse univoque, celle que l’on dit « claire », reste cependant toujours fixée dans la tête, et il est extrêmement rare qu’elle pénètre jusqu’au cœur.
Ce dont nous avons besoin, ce n’est pas de « savoir » la vérité, mais de l’apprendre. Non pas d’avoir une conception intellectuelle, mais de trouver le chemin qui conduit à l’expérience intérieure irrationnelle et peut-être inexprimable en mots. Voilà le grand problème.
Rien n’est plus stérile que parler à propos de comment les choses doivent ou devraient être et rien n’est plus important que de trouver le chemin vers ces buts éloignés.
On pourrait multiplier les exemples de ces cas où, dans un moment critique, surgissent une pensée « salvatrice », une vision, une « voix intérieure », avec la force de conviction d’une illumination, donnant à la vie immédiate et future une nouvelle orientation
Seul peut résister à une masse organisée le sujet qui est tout aussi organisé dans son individualité que l’est une masse. Je me rends parfaitement compte combien une telle phrase doit paraître incompréhensible à l’homme d’aujourd’hui. Il a oublié la notion qui avait cours au Moyen Âge que l’homme est un microcosme, pour ainsi dire une image en réduction du grand cosmos.