Pour préparer la soirée de présentation de la rentrée littéraire à la médiathèque de Ballan-Miré, j’ai lu un certain nombre de romans. Et dans la liste, il y avait Le voyage dans l’Est de Christine Angot, qui a été récompensé par le prix Médicis. Honnêtement, je n’avais pas envie de le lire. Je n’aime pas particulièrement Christine Angot, que ce soit la personne ou ses romans, et j’ai un souvenir assez douloureux de la lecture d’Un amour impossible, un 1er janvier (et bonne année surtout !).
Le voyage dans l’Est fait écho à Un amour impossible, il y est raconté à peu près la même histoire, celle de la relation incestueuse entre Christine Angot et son père. L’emprise de ce dernier.
Si Un amour impossible mettait en avant la relation entre la jeune Christine et sa mère, sourde aux appels à l’aide de sa fille, car tellement sous l’emprise elle aussi de cet homme qui lui a toujours fait comprendre qu’il était tellement au-dessus d’elle, dans Le voyage dans l’Est, il est plutôt question de la relation entre Christine et son père. Son envie à elle d’avoir une relation normale avec un père, son envie à lui de la baiser (désolée, je n’ai pas d’autres mots).
Ce qui est dramatique dans Le voyage dans l’Est, c’est que Christine Angot a parlé, a dénoncé. Mais personne autour d’elle n’a à un moment dit : « OK, ce n’est pas normal, on va voir les flics et ils vont le jeter en prison ». Non, on a fait comme si tout était normal, « Oh, il couche avec sa fille ? Bon, d’accord, tu me passe le sel, s’il-te-plaît ? » On a continué à inviter Christine et son père à la même table et même pire, on a essayé d’avoir la même emprise sur elle – tant qu’à faire.
Le voyage dans l’Est est très dur à lire. L’histoire de Christine Angot est terrible. Son père a réussi à lui donner l’impression qu’elle était amoureuse de lui et que ce qu’ils faisaient n’était que la conséquence normale de leur amour, que c’était beau. Il a réussi à la faire culpabiliser, adulte, d’avoir consenti. C’est une manipulation abjecte.
Mais encore plus difficiles à lire, sont les descriptions de leurs rapports. Crus. Détaillés. J’avais envie de fermer les yeux en lisant, je tendais les bras pour m’éloigner le plus possible de ce livre sordide et profondément triste. Savoir que des pères peuvent détruire ainsi leurs enfants, savoir que d’autres hommes profitent de jeunes filles brisées (cette scène au cinéma m’a donné envie de vomir), ça me fout en l’air.
Cette lecture, que j’ai trouvée extrêmement éprouvante, m’a attendrie vis-à-vis de Christine Angot et de son histoire, qu’elle couche sur le papier comme une sorte de catharsis, je suppose. Mais lorsque des lecteurs empruntent Le voyage dans l’Est à la bibliothèque, je ne peux pas m’empêcher de les informer que cette histoire pourra les heurter autant qu’elle m’a heurtée, comme un genre de parental advisory, explicit containt.
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