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Citations de Constantin Cavafis (136)


J’ALLAI

Je n’ai pas eu de retenue. Je m’abandonnai entièrement et j’allai
vers les jouissances, réelles ou imaginaires
qui tournaient dans mon esprit.
J’allai dans la nuit illuminée.
Et je goûtai à des vins forts
comme savent en boire les courageux de la volupté.

(p. 60 - traduction de Ange S. Vlachos)
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IONIENS

Nous avons brisé leurs statues,
nous les avons chassés de leurs temples,
mais point ne sont morts, pour cela, les dieux.
Ô terre d’Ionie, c’est toi qu’ils aiment encore
c’est toi dont leurs âmes se souviennent.
Quand se lève, sur toi, un matin d’août,
un frisson de leur vie traverse ton atmosphère
et parfois, éthérée, une forme d’éphèbe, imprécise,
passe, d’une foulée rapide, sur tes collines.

(p. 49 - traduction de Ange S. Vlachos)
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CIERGES

Les jours de l’avenir se tiennent devant nous
comme une rangée de petits cierges allumés, –
petits cierges dorés, chauds et lumineux.

Les jours passés restent en arrière,
morne rangée de cierges éteints ;
les plus proches fument encore,
cierges froids, fondus et courbés.

Je ne veux pas les voir ; leur aspect m’attriste
et m’attriste aussi le souvenir de leur clarté.
Je regarde devant moi mes cierges allumés.

Je ne veux pas me retourner, ne pas voir avec effroi
combien vite s’allonge la ligne sombre
combien vite augmentent les cierges éteints.

(p. 26 - traduction de Ange S. Vlachos)
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Comme de beaux gisants morts tout jeunes
Et qu'en larmes on a enfermés dans un mausolée superbe,
Avec à leur tête des roses et à leur pieds des fleurs de jasmin
Telle est l'image des désirs qui passèrent
En vain ; sans qu'une nuit de volupté
Ni son matin de lumière ne soit accordés.
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Choses tues

Qu’on ne cherche pas à découvrir qui je fus
en alléguant ce que j’ai pu faire ou dire.
Un obstacle était là qui transformait
mes actes et ma façon de vivre.
Un obstacle était là qui me retenait
souvent lorsque j’allais parler.
Ce sont mes actes les plus imperceptibles,
ce sont mes écrits les plus voilés –
et eux seuls qui permettront de me deviner.
Mais sans doute ne vaut-il pas la peine
de dépenser tant d’efforts pour me comprendre.
Un jour – dans la société meilleure –
un autre, fait tout comme moi,
apparaîtra , c’est sûr, et agira librement.

(avril 1908)
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Désirs.

Beaux comme des morts qui n'ont point vieilli,
enfermé au milieu des larmes dans un mausolée splendide,
le front ceint de roses et jasmins aux pieds -
tels sont les désirs qui nous ont quittés
sans s'être accomplis ; sans qu'aucun n'atteigne
à une nuit de volupté ou à son lumineux matin.
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Ithaque

Quand tu partiras pour Ithaque,
souhaite que le chemin soit long,
riche en péripéties et en expériences.

Ne crains ni les Lestrygons, ni les Cyclopes,
ni la colère de Neptune.
Tu ne verras rien de pareil sur ta route si tes pensées restent hautes, s
i ton corps et ton âme ne se laissent effleurer
que par des émotions sans bassesse.

Tu ne rencontreras ni les Lestrygons, ni les Cyclopes,
ni le farouche Neptune,
si tu ne les portes pas en toi-même,
si ton cœur ne les dresse pas devant toi.

Souhaite que le chemin soit long,
que nombreux soient les matins d’été,
où (avec quelles délices !) tu pénètreras
dans des ports vus pour la première fois.

Fais escale à des comptoirs phéniciens,
et acquiers de belles marchandises :
nacre et corail, ambre et ébène,
et mille sortes d’entêtants parfums.
Acquiers le plus possible de ces entêtants parfums.

Visite de nombreuses cités égyptiennes,
et instruis-toi avidement auprès de leurs sages.
Garde sans cesse Ithaque présente à ton esprit.
Ton but final est d’y parvenir,

mais n’écourte pas ton voyage :
mieux vaut qu’il dure de longues années,
et que tu abordes enfin dans ton île aux jours de ta vieillesse,
riche de tout ce que tu as gagné en chemin,
sans attendre qu’Ithaque t’enrichisse.

Ithaque t’a donné le beau voyage :
sans elle, tu ne te serais pas mis en route.
Elle n’a plus rien d’autre à te donner.

Même si tu la trouves pauvre, Ithaque ne t’a pas trompé.
Sage comme tu l’es devenu à la suite de tant d’expériences,
tu as enfin compris ce que signifient les Ithaques.
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Lorsqu’elles s’éveillent
  
  
  
  
Efforce-toi de les conserver, poète,
même s’il en est peu qui se laissent capturer,
les visions de ton amour sensuel.

Glisse-les, à moitié cachées, dans tes phrases.
Efforce-toi de les conserver, poète,
lorsqu’elles s’éveillent dans ton cerveau,
la nuit, ou dans l’éclat du midi.


/Traduction du grec de Gilles Ortlieb et Pierre Leyris
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Monotonie
  
  
  
  
Un jour monotone, puis un autre,
monotone, tout pareil.
Les mêmes choses viendront, viendront encore.
Pareils, les instants nous prennent, et nous laissent.

Un mois passe, en amène un autre.
On devine sans peine ce qui vient :
les choses d’hier, les choses routinières.
Et le lendemain n’a même plus l’air d’un lendemain.


/Traduction du grec de Gilles Ortlieb et Pierre Leyris
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APPORTS

Je reste à rêver… Mon apport à l’art est fait de sensations et de désirs… Quelques visages ou lignes entrevues, vagues mémoires d’amours inachevées… Mieux vaut m’abandonner à l’art. Il sait façonner une certaine forme de beauté, complétant la vie de manière presque imperceptible, combinant les impressions, combinant les jours…

(Traduction Marguerite Yourcenar / Constantin Dimaras)
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À L’ÉGLISE
J’aime l’église, ses bannières, l’argent de ses vases sacrés, ses candélabres, ses lumières, ses icônes et son ambon.
Quand j’entre dans une église grecque, avec ses parfums d’encens, ses voix et ses chœurs liturgiques, la belle prestance de ses prêtres aux chasubles étincelantes et le rythme grave de chacun de leurs gestes, ma pensée se retourne vers les grandeurs de notre race, vers notre glorieuse époque byzantine.

(traduction Marguerite Yourcenar / Constantin Dimaras)
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Monotonie

Un jour monotone en suit un autre
monotone, identique. Les mêmes choses
vont se produire, et se reproduiront encore –
pareils sont les instants qui nous trouvent et nous quittent.

Un mois qui s’écoule en amène un autre.
Ce qui vient est facile à imaginer ;
c’est ce pesant ennui d’hier. Au point
que demain n’a déjà plus l’air d’être demain.
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REVIENS

Reviens souvent et saisis-moi,
sensation chère, reviens et saisis-moi –
quand s’éveille la mémoire de la chair
et qu’un désir passé tressaille dans mon sang :
quand les lèvres et la peau se souviennent
et que les mains sentent comme si elles touchaient à nouveau.

Reviens, souvent, et saisis-moi la nuit
quand les lèvres et la peau se souviennent…

(p. 56 - traduction de Ange S. Vlachos)
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LES MURS

Sans précaution, sans pitié, sans pudeur
On a bâti autour de moi de grandes et hautes murailles.

Et maintenant je me trouve ici et je me désespère.
Je ne pense à rien d’autre ; cela ronge mon esprit.

Car j’avais bien des choses à faire, dehors.
Ah, quand on bâtissait les murs comment n’ai-je rien compris ?

Mais je n’ai jamais entendu de maçons ou de bruits.
On m’a exclu du monde imperceptiblement.

(p. 35 - traduction de Ange S. Vlachos)
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TROYENS

Nos efforts, à nous, malheureux,
nos efforts sont comme ceux des Troyens.
Nous parvenons à quelque chose
nous nous ressaisissons un peu
et commençons à prendre courage et avoir bon espoir.

Mais toujours quelque chose surgit et nous arrête.
Achille surgit au bord du fossé, devant nous
et nous terrifie par de grands cris. –

Nos efforts sont comme ceux des Troyens.
Nous croyons qu’avec résolution et audace
nous changerons le sort défavorable
et nous restons dehors pour combattre.

Mais quand vient la grande crise
notre audace et notre résolution nous abandonnent
notre âme se trouble, elle est paralysée
et nous courons tout autour des murailles
cherchant le salut dans la fuite.

Mais notre chute est certaine. Là-haut
sur les créneaux, commencent déjà des pleurs.
Des souvenirs de notre vie, des sentiments pleurent.
Priam, Hécube pleurent amèrement sur nous.

(p. 32 - traduction de Ange S. Vlachos)
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Autant que tu le pourras
Si tu ne peux donner à ta vie le sens que tu veux,
Au moins, autant que tu le pourras,
Essaie ceci : ne la rabaisse pas
Dans trop d'implications avec le monde,
Dans trop d'affairements et de discours.

Ne la rabaisse pas, en la traînant
En tout lieu et en l'offrant
A l'imbécillité quotidienne
De ces fréquentations et accointances,
Jusqu'à ce qu'elle devienne une ennuyeuse étrangère.
(p. 143)

Version Grandmont : Autant que possible.
Et si tu ne peux pas mener la vie que tu veux,
essaie au moins de faire en sorte, autant
que possible : de ne pas la la gâcher
dans trop de rapports mondains,
dans trop d'agitations et de discours.

Ne la galvaude pas en l'engageant à tout propos,
en la traînant partout et en l'exposant
à l'inanité quotidienne
des relations et des fréquentations ;
jusqu'à en faire une étrangère importune.
(1913)
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La satrapie

Quelle pitié! Tu es fait pour accomplir de belles et grandes choses, mais toujours le sort te refuse les encouragements et les succès. L'indifférence, les petitesses, les routines méprisables viennent sans cesse entraver ta marche... Et qu'il est affreux le jour où tu succombes, le jour où tu te laisses aller à céder, où tu décides de faire route vers Suse...
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Une nuit.

La chambre était pauvre et vulgaire, cachée au-dessus de la taverne louche. De la fenêtre, on voyait la ruelle étroite et sale. D'n bas montaient des voix de quelques ouvriers qui jouaient aux cartes et se divertissaient.
Et là, sur l'humble lit plébéien, j'ai possédé le corps de l 'amour, j'ai possédé les lèvres empourprées et voluptueuses de l'ivresse. Si empourprées, et d'une telle ivresse, que même en ce moment où j'écris, après tant d'années, dans la maison solitaire, j'en suis de nouveau grisé.
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Constantin Cavafis
Volupté.

Joie et parfum de ma vie, ces moments où j'ai trouvé le plaisir, tel que je le cherchais. Joie et parfum de ma vie : cet éloignement de toutes les amours, de toutes les jouissances routinières.
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Constantin Cavafis
The God abandons Anthony
(1911)
When suddenly, at midnight, you hear
an invisible procession going by
with exquisite music, voices,
don’t mourn your luck that’s failing now,
work gone wrong, your plans
all proving deceptive—don’t mourn them uselessly.
As one long prepared, and graced with courage,
say goodbye to her, the Alexandria that is leaving.
Above all, don’t fool yourself, don’t say
it was a dream, your ears deceived you:
don’t degrade yourself with empty hopes like these.
As one long prepared, and graced with courage,
as is right for you who proved worthy of this kind of city,
go firmly to the window
and listen with deep emotion, but not
with the whining, the pleas of a coward;
listen—your final delectation—to the voices,
to the exquisite music of that strange procession,
and say goodbye to her, to the Alexandria you are losing.
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