Un monde a pris place solidement et à jamais dans mon salon!
Une atmosphère presque impénétrable, ce dernier tome s'assombrie encore, la lumière se fait éparse et précieuse, l'aventure glisse vers un combat final, une lutte à bien des étages (comme cette lecture a ses multiples analogies), une confrontation, une dislocation. Qui pour y faire sa place, combien vont périr, qui saura rester honorable. Les voix se font plus entremêlantes, les dessins plus brefs et nombreux, on y est on y est. Le livre même deviendrait vivant!
Tout est là pour vivre l'étendu de ce royaume mouvant.
J'ai apprécié perdre de vu certains personnages et les voir revenir à la surface, l'auteur les a parfois épargnés, cachés pour les mettre en sécurité. Ou exposés pour voir de quoi ils étaient fait.
Les petits construisent le grand, s'accompagnent, se collent comme un troupeau, se font bouffer, écraser, déshumaniser.
Tout ça est un grand cycle, les hommes et les objets vont muter et transmuter, on ne sait plus bien au fond distinguer le début de tout ça ni si il peut y avoir une issue... mais c'est incontournable, inextricable, asphyxiant.
En définitive, on est de plus en plus attaché au scénario, happé, et sans qu'on n'y prenne trop gare on s'y sent moins étranger, on éteint la lumière et on suit le mouvement.
J'ai aimé découvrir tout un tas de nouvel univers sans qu'on ait le temps de trop s'y engouffrer parce que le mouvement, la rébellion ou les objets nous entrainaient dans la lente mais grossissante force de rassemblement. Le décor de rues, de la fabrique de bougies, l'abri des orphelins, le lit de la Tamise, quand on s'attarde à l'inverse dans une chambre, sur le toit de maison. On peut facilement imaginer que la vie continue dans les décors que l'on quitte. C'est une grande force évocatrice.
Ah vraiment cette découverte est une belle réussite, un pas de côté très inoubliable, une trilogie pour tous.
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On suit l'histoire incroyable de Madame Tussaud de sa naissance à ses quatre-vingt-neuf ans. L'auteur a mis quinze à l'écrire...
Dans la première partie, elle raconte son enfance, son apprentissage de sculpteur sur cire auprès du docteur Curtius, son mentor. Les personnages secondaires sont mis en avant, comme Mme Picot qui maltraite la petite, c'est une femme méchante, ignoble que personne n'ose contrarier ni son fils Edmond qui est complètement effacé, ni Curtius qui est sous l'emprise de cette femme.
La petite m'a beaucoup fait penser à Cosette dans les misérables...
Dans la deuxième partie, on l'a retrouve à Versailles durant la révolution auprès du roi et de ses proches. Elle va échapper à guillotine..
Elle va y croiser beaucoup de monde...
C'est une biographie romancée agréable à lire mais écrit comme un conte, j'ai pensé souvent à Dickens, d'ailleurs on le croise aussi en fin de roman.
J'aurais aimé que la dernière partie sur son musée à Londres soit plus développé.
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L'observatoire. Un huis clos assez particulier autour d'un ancien observatoire devenu habitation pour particuliers. Hors du temps, hors de la réalité, comme un no-mens-land d'un quartier anglais voué à la démolition.
Des personnages atypiques définis par une particularité physique ou psychique vivant chacun dans leur propre monde.
Roman indéfinissable. Un moment lecture suspendu.
Il faut entrer dans ce monde la tête la première et y rester jusqu'à la fin.
Mais pas de demi-mesure. On aime ou pas.
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Après quelques sauts divertissants, je me replonge avec délice dans le monde d'Edward Carey.
La suite s'engage avec un petit côté gentillet, presque lecture jeunesse, mais très vite l'histoire reprend son goût de lecture à plusieurs étages et la satyre sociale se développe, s'argumente, on est presqu'en pleine anticipation, dystopie. Me voilà de nouveau ferrée, attachée malgré moi à cet univers visuellement submergeant.
Je ne sais pas dire ce qui me plait tant dans cette lecture, à coup sûr déjà l'ambiance. Cette fidélité de genre commune au premier tome. Gothique, magique, humaniste, philosophique. Sans compter qu'on n'est pas dans une suite pâlichonne, c'est un très bon tremplin du 1 vers le 3.
Les dessins égrenés me semblent de plus en plus pertinents, l'ensemble devient encore plus palpable. L'auteur réinvente son scénario sans jamais perdre le fil conducteur, c'est comme une confiance qui s'est installée : je sais que ce qui va suivre va être à la hauteur, l'auteur tient vraiment les ficelles! Je n'ai plus qu'à lire et suivre les remous!
La suite promet du renouveau, comme un nouvel acte on va une troisième fois changer le décor, tout est installé les personnages peuvent entrer en scène. Aux dernières pages le public guette par la fenêtre et n'en croit pas ses yeux....
Entracte avant d'entamer le troisième tome : Les Aiguilles d'or ? le Seigneur des porcheries? le Cercueil de job? Les marches de l'Amérique?
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Après avoir lu en LC Le Château T1, @jeterminemonchapitre t n'approuve pas du tout mon choix de LC 2024.
Moi, j'ai aimé l'écriture d'edward Carey mais effectivement les tasses qui dansent, même en décembre, m'ont un peu gavée !
Ici pas de tasse qui danse mais la vie romancée de Marie Grosholtz, la future Madame Tussaud.
Avec Petite on voyage de Berne à Paris en passant par Versailles.
On rencontre le Docteur Curtius, sculpteur d'organes en cire, une marâtre digne de La Thenardier, d' Élisabeth sœur du roi, sans oublier quelques révolutionnaires bien connus.
J'ai pris un grand plaisir à lire ce roman, j'aime vraiment l'écriture d'edward Carey. Et si vous voulez savoir si @jeterminemonchapitre a aimé cette lecture je vous invite à aller lire sa publication
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Les ferrailleurs, la librairie le propose pour prendre le relai après l’inclassable Les saisons de Maurice Pons (a-do-ré)
Dans la veine pas du tout, loupé!, mais on est plongé dans un monde magico-gothico-fabuleux très attachant. C’est pas du tout mes attraits habituels mais plus j’y goute plus j’en veux (Murakami, Martinez, Marques, Pons) J’adore! Quel bon moment, quel délice de s’entourer de ces univers hors normes. On ne sait pas ce qui nous attend, c’est inclassable, ça frétille.
Edward Carey c’ est du Tim Burton en barre, un enfant qui entend parler les objets, pas la peine dans savoir plus pour succomber. Tout l’univers et les intrigues autour collent parfaitement à l’enchantement de son écriture. Les dialogues sont vivants, les jeux de mots très fins et habiles, l’humour très anglais pour ce que j’en imagine, les personnages bien à leurs places et costumés comme l’architecture du décor : sérieux, loufoque et de guingois. L’empire prend l’eau mais sauve qui peut les apparences de cette noblesse pauvre et misérable. Les parallèles sociétales sont nombreux et suffisamment imagés pour en faire de multiples lectures alors on rit, on prend ça avec légèreté mais la satyre est bien en place, le flot d’aventure continuel est intarissable. Evidemment que les deux prochains tomes sont avidement attendus, on va pas laisser les gentils se perdent dans la nature hostile….
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✍ EDWARD CAREY
💬 PETITE
🏠 CHERCHE MIDI
📚 555 Pages
📆 2021
📈 4/5
Je ne voulais pas lire ce livre, ne plus lire cet auteur à la suite d’un abandon de LC avec #lechateau . Ne jamais s’en tenir à un essai 😉 Je suis finalement très contente de cette lecture. Merci @stephanie.barbet.1907 pour ce choix que j’ai d’abord détesté. Je n’y croyais pas. Surtout que Mme Tussaud: m’en fous un peu.
Un roman qui confirme la sensibilité de l’auteur pour la poésie et l’imaginaire. Les personnages et les décors sont encore de style gothique mais ici point de tasses qui courent et de poignées de portes qui parlent . Le récit est très imagé mais reste réel, crédible et interessant: la vie romancée (plus ou moins?) de Mme Tussaud, alsacienne.
Ce récit est médical à Berne où l’on découvre l’utilisation de la cire pour copier les organes et parties du corps pour en faire des objets d’enseignements et de recherches. Il est historique à Versailles où l’on rencontre le roi et sa sœur et où l’on assiste à l’accouchement de Marie Antoinette tout en dormant dans le placard d’un couloir. Tranchant à Paris, quand Marie a pour mission d’immortaliser les têtes coupées pendant la révolution.
Il s’arrête à l’arrivée à Londres seule de Marie. Pourquoi? C’est dommage j’imagine qu’il lui est arrivé encore moult péripéties entre son arrivée en 1802 et l’ouverture de son musée permanent en 1835.
Je suis contente d’avoir lu ce livre, j’ai passé un très bon moment avec cette PETITE , plein d’anecdotes et assez captivant (nous avons réduit le temps de la LC par 2 tellement nous voulions avancer dans le récit plus rapidement).
Qui aurait pensé que Mme Tussaud était né en 1761? Je la croyais du 20e .
A noter aussi que le livre est parsemé de dessins ✏qui rendent le récit très vivant.
LC avec @picorette14 @dededado782 et bien sûr @stephanie.barbet.1907
#romanhistorique #cire #musee #masquemortuaire #revolution #apprentissage #guillotine #tussaud #berne #paris #londres
#petite
#edwardcarey
#cherchemidiediteur @cherchemidiediteur
#editionspocket @editions_pocket
#livreaddict #book #livre #livres #bookstagram #livrestagram #bookaddict #ilovebooks #lirecestlavie #read
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Incroyable destin de Marie Grosholtz, future Mme Tussaud qui va modeler les visages des notables pour flatter leur égo, puis façonner les têtes des décapités de la révolution française, pour survivre.
Une belle biographie romancée pour les zones d'ombres qu'il a fallu comblées, mais très bien documentée, et agrémentée de quelques illustrations. Ce roman est très agréable à lire et on n'y apprend beaucoup de chose sur cette époque sanglante.
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Loin d'être une simple biographie de Marie Grosholtz, plus connue sous le nom de Madame Tussaud, on est également plongé dans cette période si particulière qui annonce la Révolution française. Le roman est séparé en deux/trois parties pourrait-on dire, d'abord les débuts de la vie de cette femme très petite et pas très belle accueillie par un étonnant personnage qu'est le docteur Curtius. Ensuite, sa parenthèse à Versailles puis l'époque révolutionnaire, violente et sanglante. On s'attarde très peu voire pas du tout sur la fin de sa vie, quand elle change de nom et qu'elle devient si célèbre. C'est un roman presque initiatique qui dépeint comment elle a réussi à devenir qui elle était et son apprentissage de la sculpture sur cire.
Edward Carey a une particularité dans sa manière d'écrire, c'est de rendre les objets quasi vivants. Les maisons, les meubles, les objets semblent s'animer et posséder quelques émotions, donnant à tout le texte une ambiance étonnante, que j'adore personnellement. Ce n'est pas fantastique parce que ces objets ne sont pas vivants, mais on dirait presque, une sorte d'illusion qui donne une atmosphère unique au récit. Sans oublier ces dessins que l'on retrouve régulièrement au fil des pages, qui ajoutent du réalisme et une ambiance gothique. Une patte singulière qui montre des croquis, des esquisses, des morceaux de corps... C'est vraiment un roman unique en son genre !
Ce qui ajoute à l'atmosphère unique du roman, ce sont les personnages, parfois grotesques, lâches, touchants, cocasses... Marie déjà qui développe une passion pour la sculpture sur cire, une femme intelligente mais rejetée par les autres de par sa taille (et son sexe), réduite au statut de domestique ou de quasi jouet (à Versailles notamment). Le docteur Curtius complètement dans son monde, un génie passionné qui ne semble jamais complètement à sa place nulle part et pas vraiment courageux. Et tout un tas d'autres personnages avec des personnalités originales et un récit plein d'émotions, parfois de la colère à cause de l'injustice, mais aussi du rire, des larmes, l'amour et l'espoir arrivent à se frayer un chemin dans cette période qui a vraiment bouleversé la France.
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Petite, c’est le surnom donné à Marie Grosholz, la future Madame Tussaud, en raison de ses caractéristiques physiques. Originaire de Strasbourg, qui n’est pas française, Marie va traverser la fin du XVIIIe siècle et la première moitié du XIXe siècle. De fait, elle est vraiment au cœur de l’histoire avec la Révolution française. Orpheline dès son plus jeune âge, elle est “recueillie” par Curtius, un médecin qui se prend de passion pour la reproduction en cire des organes humains. Il se fait repérer par un homme qui accompagne un certain Jean-Jacques Rousseau et ils montent tous les deux à Paris où leur art va connaître une belle reconnaissance. Petite est rejetée par l’associée de Curtius, mais elle va se faire remarquer par la sœur du roi de France, Louis XVI, Elizabeth et va vivre un temps à Versailles.Ce roman est vraiment très intéressant car on traverse les moments importants de l’histoire de France. Edward Carey a agrémenté son récit de magnifiques dessins d’organes, de visages, de corps, célèbres ou non ce qui donne un rendu encore plus “véridique” à cette histoire. Car évidemment, il s’agit d’un roman et même s’il est parti de faits réels, l’auteur a bien entendu brodé autour. C’est plutôt facile à lire, on enchaîne les aventures de Petite et c’est très distrayant.
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Je vais vous parler de mon expérience de lecture de L'observatoire.
Très tentée par les retours de quelques babelamis, je me suis décidée à découvrir cet auteur.
J'avais déjà Petite dans mon pense-nouille, donc pourquoi pas...
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Le narrateur, 37 ans, vivant chez ses parents, gardien de son musée personnel qu'on pourrait qualifier de très spécial, ne quitte jamais ses gants blancs.
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Il vit dans un gigantesque manoir ayant appartenu à ses aïeux, en pleine campagne, jusqu'à ce que la ville envahisse les terrains alentour.
Le manoir ayant déjà perdu en splendeur et en taille, le bâtiment restant a été divisé en appartements, dont seuls sept sont occupés.
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Les résidents sont tous plus que loufoques, et l'auteur les décrit parfaitement.
Je vous laisse découvrir les détails.
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Ma lecture ne fut pas mauvaise, mais d'une lenteur... du sur place.
Je me suis ennuyée, n'arrivant à m'intéresser ni à l'histoire ni aux personnages.
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J'en suis désolée, et si j'ai pu comprendre l'emballement de mes amies, je n'ai pas réussi à accrocher.
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Ce livre n'est pas mauvais, n'hésitez pas à le lire, il n'est juste pas fait pour moi et je suis passée à côté.
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Je tenterai quand même Petite, qui me semble différent.
Si quelqu'un peut confirmer et m'éviter une nouvelle déconvenue, je lui en serais reconnaissante.
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Si vous ne connaissez pas encore Edward Carey, cet auteur a un talent fou pour faire voyager ses lecteurs dans des univers fantasmagoriques complètement décalés qui rappellent ceux de Mervyn Peake ou de Tim Burton.
Avec « le Château » qui marque l'entrée dans la trilogie des Ferrayor, l'auteur nous invitait à faire la connaissance des Ferrayor, une famille extravagante et inquiétante qui s'est enrichie au fil des générations, grâce à la collecte des déchets de tout Londres.
Sa suite, « le Faubourg », déplaçait l'intrigue en dehors de la propriété des Ferrayor et dévoilait quelques mystères entourant leur ascension et leur pouvoir.
Le troisième chapitre, "la ville", qui clôt cette superbe saga dystopique, offre un dernier voyage dans la noirceur et le macabre.
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Nos deux héros ont été, à nouveau, séparés à la fin du second tome après l'incendie qui a ravagé le quartier de Fetidborough . Clod et les membres de sa famille se sont disséminés dans les rues de Londres. Pourchassés, traqués, ils se terrent en attendant de se venger.
Mais après leur arrivée, des évènements anormaux et incompréhensibles se produisent : Londres est envahie par un inhabituel brouillard qui se glisse partout, absorbe la lumière du jour et plonge la ville dans une nuit opaque et fantasmagorique ; de nombreuses disparitions plongent la population dans la suspicion et l'angoisse ; des objets du quotidien sont retrouvés sur les lieux des disparitions et à l'intérieur des maisons, des objets ont commencé à bouger.
Des bruits circulent, faisant état d'une maladie terriblement contagieuse.
Mais je n'en dis pas plus sur l'intrigue qui gagne en complexité par quelques ellipses, je vous laisse le plaisir de découvrir par vous-même cette très sympathique trilogie.
« Cette famille, autrefois une grande famille, se tient debout sur la plus mince des pellicules de glace. Un faux pas et nous pouvons tous être noyés. Qui veillerait alors sur les ordures ? Aujourd'hui nous marquons la ville de notre empreinte, aujourd'hui Londremor saignera, et toutes les cloches de cette île souveraine sonneront le glas. »
*
La plus grande force de cette histoire est son univers original, ourlé d'obscurité et de malveillance. Avec quelle facilité, quelle force, quelle maîtrise de la narration, Edward Carey installe ses décors, ses personnages et son intrigue !
Le monde imaginé par l'auteur ressemble au notre, mais sans l'être non plus. L'auteur nous emmène en effet en Grande-Bretagne à la fin du XIXème siècle. Nous sommes à Londres, mais l'auteur a revêtu la capitale d'un étrange costume, très différent de celui de l'ère victorienne, perlé de fantastique et d'opacité. L'ambiance de ce Londres, mélange de gothique et de décharge à ciel ouvert, est très réussie : visuelle et immersive, poétique et âpre.
« C'était une grande maison, d'un certain point de vue, je pense, mais vraiment petite comparée au Château où l'on pouvait facilement cheminer dans le dédale de ses galeries et de ses escaliers intérieurs, et découvrir chaque fois un nouvel endroit à visiter. Qui plus est, depuis le Château, on pouvait voir l'océan de détritus onduler dans le coucher de soleil. Observer l'astre du jour se lever et se coucher sur cette mer d'ordures pouvait être d'une grande beauté, c'était comme la respiration d'un géant endormi. Ainsi j'avais la nostalgie de ce lieu, et le vague à l'âme au souvenir de Tummis agitant les bras dans la décharge pour appeler les mouettes. Ici il n'y avait pas la moindre lumière, pas davantage dehors, jour et nuit tout n'était que ténèbres depuis que Fetidborough avait été anéanti et que les Ferrayor étaient arrivés à Londres. Pour vivre. En secret. Parmi vous, les Londoniens. »
J'ai été emportée dans ce monde sombre et grisâtre, glauque et nauséabond, envahi par des montagnes d'immondices. Edward Carey est un magicien qui de sa plume, dessine un monde obscur, sordide, envoûtant et grisant.
Vous pourriez froncer le nez, comprenant dans quel univers je vous emmène, mais voilà, j'ai adoré me plonger dans cet univers sale et repoussant.
*
C'est aussi un roman porté par ses deux héros, Clod Ferrayor et Lucy Pennant. Là encore, leur caractérisation est très réussie.
Dans le tome précédent, le récit alternait leur deux voix. Celle de Clod, né avec le don de pouvoir parler avec les objets de naissance, de les déplacer ou les commander par la pensée. Celle de Lucy, une jeune servante du château des Ferrailleurs. Courageuse, intrépide, coriace, déterminée, elle donne beaucoup de dynamisme à l'intrigue.
Ici, dans ce dernier volet, l'histoire est racontée de plusieurs points de vue, pas uniquement ceux de Clod et de Lucy. Cette multiplicité des regards est intéressante car elle permet de se déplacer dans tous les coins de Londres, des taudis des quartiers malfamés jusqu'au palais de Westminster, de saisir l'ambiance de la ville comme les sentiments, les ambitions ou la noirceur des personnages.
Plus on se rapproche de l'épilogue et plus les voix des différents narrateurs se bousculent pour un final explosif surprenant et inattendu.
*
Dans ce Londres décadent, d'étranges personnages parcourent les ruelles étroites et miséreuses : une femme qui déverse de sa bouche grande ouverte un nuage d'un noir absolu ; un homme qui attire à lui, comme un aimant, toutes les immondices à sa portée ; des personnages qui se métamorphosent ; un monstre qui se repaît d'objets.
Et puis des centaines de rats qui se déversent dans la ville et se glissent partout.
*
L'histoire est très bien écrite, fluide et agréable à lire, avec une petite touche d'humour qui rend ce roman plus léger qu'on ne le pense à première vue à la lecture de ce billet. Toutes ces qualités servent une intrigue bien menée, prenante, riche en surprises.
Mais, si ce monde est ancré dans le fantastique et dans un passé historique, des analogies avec le monde d'aujourd'hui sont évidentes. L'auteur nous projette dans un monde singulier mais très réel, asphyxié par la surconsommation liée à notre mode de vie. Il nous amène aussi à réfléchir aux dérives de nos sociétés individualistes qui creusent les inégalités et fragilisent les liens sociaux.
« C'était donc la vie de Londres, c'était donc la grande machine de l'Empire, je pouvais la sentir et elle sentait l'humain logé à l'étroit, elle sentait le café et le tabac, le vin, l'encre et la suie, et la sueur, aussi. Entraînée avec le troupeau, je ne pouvais pas m'arrêter. J'étais ballottée sur cette vague telle une épave au sommet de la grande décharge. »
D'autres thématiques sont également abordées dans cette série : l'identité, la famille, la mort et la résilience.
*
Pour finir, c'est avec beaucoup de plaisir que j'ai retrouvé l'atmosphère lourde et colorée de gris des Ferrayor, mais je dois bien avouer que c'est avec un petit pincement au coeur que je quitte le monde d'Edward Carey.
A découvrir bien entendu pour son originalité, son cadre si singulier, son ambiance si fascinante, et ses personnages atypiques particulièrement attachants.
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Géniale folie !
C’est là où réside toute la superbe de Babelio sinon comment aurais-je fait la rencontre de Edward Carey et de son monde.
Comment aurais-je découvert tout un monde qui souhaite rester caché et ne sort presque jamais de l’Observatoire ?
Heureusement, j’ai doucement ouvert la porte de ce bâtiment à l’allure décrépite décourageant volontairement l’extérieur de s’y aventurer. J’ai passé la tête, accueillie par le chuintement du portier me faisant comprendre de déguerpir. Je me suis pourtant faufilée discrètement à l’intérieur, m’arrêtant à chaque étage pour découvrir derrière chacune de ses portes un monde, une vie, un être à part.
J’ai d’abord été submergée par leurs folies, à tous, toutes douces sauf quand j’ai été mordue par Numéro 20 mais elle ne me connaissait pas et j’étais sur son territoire, une étrangère.
Alors sur un des paliers entre le deuxième et le troisième étage, je me suis accroupie sur le tapis bleu élimé, le dos contre le papier peint déchiré et suis restée totalement immobile. Je les ai observés, les ai écoutés, appris à les connaitre et bien sûr à force je me suis attachée à eux.
J’ai alors fait d’Anna une complice, ai vu le loup Anna entrer dans la bergerie, les ai vu tous s’affoler, et Anna les apprivoiser. J’ai ensuite suivi Anna derrière chaque porte d’appartement pour rentrer profondément dans leur vie, leur passé, leurs blessures, leurs secrets.
Avec eux, en parcourant chacune des pièces de l’Observatoire, nous avons remonté le temps, ou au contraire repris le cours du temps, nous rencontrant parfois en même temps au même moment au même endroit.
Je me suis même à un moment figée prise de tournis et ai pris le temps de tout regarder à nouveau, les vieux tapis, les vieilles tapisseries, eux tous et même Anna, quelle égoïste que je suis, car elle semble avoir perdu du poids et les yeux rougis.
J’ai vécu avec eux tant de choses, des histoires d’amour, de deuil, de frustration, des histoires de famille, des passions, des talents, des espoirs et des désillusions. Et comme eux, je n’ai plus voulu sortir de l’Observatoire, cet îlot à part de la ville, isolé de la vie complètement folle de dehors.
Vous l’avez compris ce style si particulier d’Edward Carey m’a totalement entrainée avec lui et j’ai été emportée dans ces tourbillons de vies. Un style très original si pas unique car je ne saurai vraiment le décrire. Ce rythme en apparence calme, ralentissant tout, arrive pourtant à essouffler. J'ai eu parfois l'impression de manquer d'air ou du moins de respirer difficilement ressentant la poussière, la moisissure, la lourdeur de l'atmosphère tangible et stagnante. L’auteur arrive à nous rendre tous ces personnages insupportables, fous, méchants, et en même temps tous sympathiques, adorables. J’ai eu envie de tous les prendre dans mes bras et de les serrer fort en leur disant Ca va aller maintenant ! Oui tous, même le pire car il ne peut pas faire exception, c’est juste que ses souffrances, lui, il les a gardées pour lui.
Alors je dis encore, encore, je veux encore ! Edward Carey, je veux encore rencontrer d’autres de vos personnages. Promis, je prendrai le temps qu’il faut !
PS : Merci Sandrine/HundredDreams, c’est au détour de ta chronique sur le cycle Les Ferrailleurs que tu m’as conseillé de commencer avec cet auteur par l’Observatoire et quelle grande idée !
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Le roman d'une vie particulière, qu'à été celle qui deviendra Madame Tussaud. Une lecture intéressante, et agréable de par les illustrations de l'auteur incrustées ça et là tout au long du livre.
Née à Strasbourg en 1761, Marie Grosholz travaille depuis son plus jeune âge. Mais ce sont les arts qui l'intrigue, elle devient rapidement apprentie d'un étrange sculpteur sur cire et ils finissent par s'installer à Paris. De fil en aiguille, elle aura pour modèles les plus grands noms de l'époque et finira même par sculpter la famille royale.
Dans un contexte historique particulier, la Révolution Française est en marche et le peuple ne démord pas de l'idée de faire tomber quelques têtes ! Marie, rescapée de la guillotine est toute désignée pour réaliser les masques mortuaires de tout ceux qu'elle a connus, amis comme ennemis..
Un roman aux allures de biographie romancée et à l'ambiance particulière qui permet d'en apprendre plus sur un parcours de vie absolument hors du commun ! Je ne regrette pas de l'avoir lu même si je m'attendais à quelque chose de légèrement différent...
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Edward Carey nous présente ici l'histoire de la célèbre Madame Tussaud. Nous y suivons ses aventures de sa naissance à sa mort et rencontrons les plus illustres personnages qui ont marqué l'histoire.
J'ai bien aimé cette lecture, ça se lit très facilement, le style est fluide et les parties bien découpées. Certains personnages mis en avant m'ont agacé au plus haut point ( ce qui prouve cependant mon investissement dans l'histoire). En soit une bonne lecture que j'étais contente de découvrir.
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Un livre se concentrant sur la vie de Marie Grosholt (surnommée petite et qui sera plus tard Madame Tussaud) avant son arrivée en Grande-Bretagne.
On apprend à connaître son enfance, son parcours, son apprentissage, ses déceptions de jeune adulte.
Les descriptions de Paris, l'idée qu'on s'en fait au travers du récit de Marie et ses proches, ne font pas envie.. Vive notre hygiène de vie!
Ce livre est exellent pour celui qui souhaite connaître "les débuts" de Madame Tussaud.
Les 350 premières pages m'ont beaucoup plu, la fin un peu moins. La vie à Londres que j'aurais voulu plus détaillée .. quelques longueurs qui me font dire que le livre aurait pu être plus court .
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