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Citations de George Steiner (235)


Un lecteur pourra les regarder comme les deux plus grands maîtres du roman, c'est-à-dire qu'il pourra trouver chez eux la peinture de la vie la plus complète et la plus pénétrante ; mais pressez-le, et il va choisir entre eux. S'il vous dit lequel il préfère, et pourquoi, vous aurez pénétré, je crois, sa propre nature. Le choix entre Tolstoï et Dostoïevski préfigure ce que les existentialistes appellent un engagement ; il implique l'une ou l'autre de deux interprétations radicalement opposées de la destinée humaine, de l'avenir historique et du mystère de Dieu.
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George Steiner
Nos cultures, nos histoires, les infimes connaissances qui lient nos structures sociales et idéologiques, dépendent de la traduction. Sans la traduction, chacun vivrait dans son coin, confiné dans le silence.
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Qu’il me soit donc permis d’affirmer mon inébranlable conviction que Tolstoï et Dostoïevski sont les plus grands des romanciers. Ils excellent dans l’ampleur de la vision et dans la forme d’exécution
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En nivelant , en faisant une fausse démocratie de la médiocrité , on tue chez l’enfant la possibilité d’outrepasser ses limites sociales , domestiques , personnelles et même physiques .
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La littérature, dont le génie s'enracine dans ce qu'Eluard appelait " le dur désir de durer", ne peut vivre que par le jeu d'une traduction constante à l'intérieur de sa propre langue
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Le texte classique est un texte dont la naissance première, existentielle, nous est peut-être perdue (ce qui est toujours vrai des littératures antiques). Mais son autorité inhérente est telle qu'il peut absorber sans perdre son identité les incursions dont il est victime depuis des siècles, ainsi que l'accumulation des commentaires, des traductions et des variations qui s'accrochent à lui. « Ulysse » renforce Homère. « La Mort de Virgile » de Broch enrichit « l'Énéide ». « L'Antigone » de Sophocle n'a rien à craindre de Lacan.
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Il est deux processus que les êtres humains ne sauraient arrêter aussi longtemps qu'ils vivent : respirer et penser. En vérité, nous sommes capables de retenir notre respiration plus longtemps que nous ne pouvons nous abstenir de penser. A la réflexion, cette incapacité à arrêter la pensée, à cesser de penser, est une terrifiante contrainte.
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En dehors de mes goûts personnels ... qu'est-ce qui m'autorise à condamner, tel le Quichotte et ses moulins à vent, la culture populaire et ce qui egaye manifestement des vies par ailleurs grises
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La bande magnétique, la radio, le phono, la cassette répandent une musique ininterrompue sur tous nos instants et tous nos travaux. C'est sans doute ce qui explique le succès commercial de Vivaldi et des compositeurs mineurs du dix-huitième siècle.
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C'est au début et au milieu du dix-neuvième siècle que s'instaurèrent simultanément l'asservissement des ouvriers, hommes et femmes, par le travail à la chaîne, et le décalage de la sensibilité de l'homme moyen par rapport à l'attirail d'une technologie envahissant jusqu'à la vie quotidienne. L'usine, la place boursière servaient d'exutoire au corps social et on y approuvait les ambitions autres que celles de l'action révolutionnaire ou de la lutte armée. Des expressions telles que "Napoléon de la finance", "capitaine d'industrie", soulignent au niveau sémantique un tel infléchissement.
L'énorme extension prise par le système industriel et monétaire favorisa l'avènement de la ville moderne, que Verhaeren appellera plus tard "la ville tentaculaire", mégalopolis dont la prolifération galopante menace de nos jours le plus clair de notre vie. C'est ainsi que se délimite un nouveau conflit, fort grave, celui qui oppose l'individu à l'océan de pierre, qui peut, à tout moment, l'engloutir. L'enfer urbain et ses hordes sans visage hantent l'imagination du dix-neuvième siècle.
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Les nouvelles technologies touchent au cœur du langage. Aux États-Unis, les huit-dix-huit ans passent près de onze heures par jour auprès des médias électroniques. La conversation tient du face-à-face. La réalité virtuelle opère au sein de cyber-sphères. Ordinateur portable, iPod, téléphone mobile, e-mail, Web et Internet planétaires modifient la conscience. L’esprit est «câblé». La mémoire est faite de données récupérables. Le silence et l’intimité, les coordonnées classiques des rencontres avec le poème et l’énoncé philosophique deviennent des luxes idéologiquement, socialement suspects. Suivant le mot de H. Crowther, «le brouhaha qui règne dans la tête ou à l’extérieur a tué le silence et la réflexion». Cela pourrait se révéler fatal, car la qualité du silence est organiquement liée à celle du langage. L’un ne saurait atteindre la plénitude de sa force sans l’autre.
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Quel fanatisme plus sombre que de maintenir en vie ceux qui devraient connaître le repos? Quand l'heure viendra, j'espère trouver ma propre issue.
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Consciemment ou non, la musique vise à se retirer dans sa propre totalité, à vider le texte de son sens lexico-grammatical traduisible. Elle cherche à vocaliser entièrement la phonétique, les syllabes signifiantes du langage. Les mots doivent être fondus en pures vocalises. Dans son tour rival, le lyrique, le libretto verbal, le passage biblique, entend accéder à la parité ou, en fait à la prééminence.... Pourtant, la musique et la danse sont elles-mêmes des mouvements et des figurations primordialité de l'esprit humain, qui déclarent un ordre de l'être plus proche que ne l'est le langage de l'inconnu de la création
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Pourquoi s'évertuer à élaborer et transmettre une culture qui a fait si peu pour endiguer l'inhumain, qui abritait des ambiguïtés profondes, celles-ci n'étant pas toujours hostiles à la barbarie? Et encore : si l'on admet que la culture donnait accès à ce qu'il y a de meilleur en l'homme, à l'élévation de l'esprit, ne la payait-on pas trop cher? En inégalité sociale et spirituelle. Ou en déséquilibre ontologique (car les facteurs économiques ne sont plus seuls en jeu) entre les lieux privilégiés de la réussite intellectuelle et artistique et le monde dédaigné de la pauvreté et du sous-développement? Est-il fortuit que tant de triomphes ostentatoires de la civilisation, l'Athènes de Périclès, la Florence des Médicis, l'Angleterre élizabéthaine, le Versailles du grand siècle et la Vienne de Mozart aient eu partie liée avec l'absolutisme, un système rigide de castes et la présence de masses asservies? Grand art, musique, poésie, la science de Bacon et celle de Laplace florissent sous des systèmes sociaux plus ou moins teintés de totalitarisme. Est-ce par hasard? A quel niveau situer les similarités, elles-mêmes instituées par l'enseignement, entre le pouvoir et la culture classique? La notion de culture n'est-elle pas, après tout, synonyme d'élite? Quelle part de sa vitalité dérive de la violence disciplinée, contenue, qui transparaît cependant dans les rites des sociétés traditionnelles ou répressives? De là le jugement de Pisarev, repris par Orwell, qui fait des arts et des lettres les instruments du régime en place et de la classe dominante.
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Ce n'est pas le passé lui-même qui nous domine, sauf, peut-être, par le biais des déterminations biologiques. Ce sont les images du passé. Celles-ci sont, souvent, tout aussi puissamment structurées et contraignantes que les mythes. Images et constructions symboliques du passé se gravent dans notre sensibilité.
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Le Silence n'est pas le contraire du Verbe mais son gardien.
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Les démarcations que nous présumons, presque fortuitement, entre métaphysique, sciences, musique et littérature n’avaient aucune pertinence dans la Grèce archaïque. Nous ne savons presque rien des origines, oraculaires, rhapsodiques, didactiques, de ce qui allait devenir la pensée cosmologique. Nous ne savons rien des chamans de la métaphore à qui nous devons l’identité de l’esprit occidental, qui ont jeté les fondements de ce que Yeats appelait les « monuments de l’intellect qui ne vieillit pas ». Au mieux hypothétiques demeurent les attributions aux cénacles orphiques, aux cultes à mystère, aux contacts séminaux avec les pratiques perses, égyptiennes, voire indiennes, de la sagesse. On a des raisons de croire que les doctrines présocratiques étaient récitées oralement, chantées peut-être, comme Nietzsche en eut l’intuition. Les lignes entre les récits de la création, les fictions mythologico-allégoriques, d’un côté, les dicta philosophiques, les propositions, de l’autre, sont très longtemps demeurées totalement fluides (Platon est un virtuose du mythe). À quelque stade qu’on ne saurait retrouver, l’abstraction, le cogito prend son impérative autonomie, son étrangeté idéale. Les théories — le concept même est un formidable défi étranger à tant de cultures — sur les composantes et les ordonnances du monde naturel, la nature de l’homme et son statut moral, le politique au sens large, trouvaient leurs formulations les plus incisives dans les modes poétiques. Lesquels, à leur tour, aidaient à se rappeler et à mémoriser. Le précédent rhapsodique, avec ses subversions de la textualité, dérange Platon. Témoin les ironies troublées de son Ion. Nous le retrouvons dans les paradoxes de Wittgenstein sur le non-écrit. L’idée persiste qu’Homère et Hésiode sont les vrais maîtres de la sagesse. Le paradigme du poème philosophique, d’une adéquation parfaite entre l’expression esthétique et la teneur cognitive systématique, perdure dans la modernité. L’aspiration de Lucrèce « à répandre l’éclatante lumière du chant sur les choses les plus cachées » n’a rien perdu de son charme. (chap. II)
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Un chef-d'oeuvre russe existe en dépit du régime. Il représente une subversion, une circonlocution ironique, un défi direct, sinon un compromis ambigu avec l'appareil d'oppression en place, qu'il soit tsariste, orthodoxe ou lénino-stalinien.

p. 232;

Proposition exacte dans les faits, mais tout est dans le "qu'il soit ...", qui met sur le même plan les oppressions les plus hétérogènes, et à égalité le pouvoir de l'église (qui excommunia Tolstoï) et celui de l'état stalinien (qui massacra physiquement des centaines d'artistes).
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Je crois qu'il n'a été donné qu'à un seul texte littéraire d'exprimer la totalité des principales constantes du conflit inhérents à la condition humaine. Elles sont au nombre de cinq : l'affrontement des hommes et des femmes, de la vieillesse et de la jeunesse, de la société et de l'individu, des vivants et des morts, des hommes et de(s) dieu(x). Les conflits qui résultent de ces cinq types d'affrontements ne sont pas négociables. Les hommes et les femmes, les vieux et les jeunes, l'individu et la communauté ou l'Etat, les vivants et les morts, les mortels et les immortels, se définissent dans le processus conflictuel où ils définissent l'autre.

p. 253
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Il tombe sous le sens que la science et la technologie ont provoqué d'irréparables dégradation de l'environnement, un déséquilibre économique et un relâchement moral. ... soif démesurée de confort et de consommation. ... Nous ouvrons les portes en enfilade du château de Barbe-Bleue parce qu'elles sont là, ... Le vrai problème est de savoir s'il faut résister à faire certaines recherches, si l'esprit humain, à leur stade actuel de développement, pourront supporter les vérités à venir... il est possible que la prochaine porte donne sur des réalités par essence contraire à notre équilibre mental et à nos maigres réserves morales. (p. 151-152)
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