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Citations de J.M.G. Le Clézio (1806)


Où va la route ? Lalla ne sait pas où elle va, à la dérive, entraînée par le vent du désert qui souffle, tantôt brûlant ses lèvres et ses paupières, aveuglant et cruel, tantôt froid et lent, le vent qui efface les hommes et fait crouler les roches au pied des falaises. C'est le vent qui va vers l'infini, au-delà de l'horizon, au-delà du ciel jusqu'aux constellations figées, à la Voie Lactée, au Soleil.
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Chaque soir, leurs lèvres saignantes cherchaient la fraîcheur des puits, la boue saumâtre des rivières alcalines. Puis, la nuit froide les enserrait, brisait leurs membres et leur souffle, mettait un poids sur leur nuque. Il n’y avait pas de fin à la liberté, elle était vaste comme l’étendue de la terre, belle et cruelle comme la lumière, douce comme les yeux de l’eau. Chaque jour, à la première aube, les hommes libres retournaient vers leur demeure, vers le sud, là où personne d’autre ne savait vivre. Chaque jour, avec les mêmes gestes, ils effaçaient les traces de leurs feux, ils enterraient leurs excréments. Tournés vers le désert, ils faisaient leur prière sans paroles. Ils s’en allaient, comme dans un rêve, ils disparaissaient.
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On ne mourait pas sous les bombes des Anglais et des Américains. Mais on mourait petit à petit, de ne pas manger, de ne pas respirer, de ne pas être libre, de ne pas rêver.
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Il n’y a rien qui justifie un bonheur idéal, comme il n’y a rien qui justifie un amour parfait, absolu, ou un sentiment de foi totale, ou un état de santé perpétuelle. L’absolu n’est pas réalisable : cette mythologie ne résiste pas à la lucidité. La seule vérité est d’être vivant, le seul bonheur est de savoir qu’on est vivant.
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Elle me dit quelque chose
Me tourmente et j’aperçus
Son cou de neige et dessus
Un petit insecte rose

On eût dit un coquillage
Dos rose et taché de noir
Les fauvettes pour nous voir
Se penchaient dans le feuillage

Sa bouche fraîche était là
Je me courbais sur la belle
Et je pris la coccinelle mais le baiser s’envola

Les bêtes sont au bon Dieu
Mais la bêtise est à l’homme

Victor Hugo.
La coccinelle.
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De tous ces noms, de toutes ces vies, ce sont les oubliés qui m’importe davantage, ces hommes, ces femmes que des bateaux ont volés de l’autre côté de l’océan, qu’ils ont jetés sur les plages, abandonnés sur les plages glissantes des docks, puis à la brûlure du soleil, puis à la morsure du fouet. Je ne suis pas né dans ce pays, je n’y ai pas grandi, je n’en connais presque rien, et pourtant je sens en moi le poids de son histoire, la force de sa vie, une sorte de fardeau que je porte sur mon dos partout où je vais. P 14
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Comment être loin de la vie ? Comment accepter d'être étranger, exilé ? Tout ce que l'on sait, tout ce que l'on reconnaît, et les chimères de la conscience, tout cela cède devant un seul instant de vie.
Un moucheron qui traverse l'air, un brin d'herbe que fait vibrer le vent, une goutte d'eau, une lumière, et d'un seul coup il n'y a plus de mots : il y a l'étendue muette de la réalité, où le langage est déposé, où la conscience est minéralisée.
Ceux qui veulent vivre au-dehors (ils disent au-dessus du monde), où sont-ils ? En effaçant le monde, c'est eux qu'ils effacent.
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Le soleil se lève au-dessus de la terre, les ombres s'allongent sur le sable gris, sur la poussière des chemins. Les dunes sont arrêtées devant la mer. Les petites plantes grasses tremblent dans le vent. Dans le ciel très bleu, froid, il n'y a pas d'oiseau, pas de nuage. Il y a le soleil.
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La lune suit son cours sur le ciel et les arbres dansent tant qu'elle est là. Puis la lune disparaît de l'autre côté de la forêt et les arbres cessent de danser.
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"Le silence du monde indien est sans aucun doute l'un des plus grands drames de l'humanité. À l'instant où l'Occident redécouvrait les valeurs de l'humanité et inventait les bases d'une nouvelle république, fondée sur la justice et le respect de la vie, par la perversité des Conquérants du Nouveau Monde, il initiait l'ère d'une nouvelle barbarie, fondée sur l'injustice, la spoliation et le meurtre. Jamais l'homme n'aura été semble-t-il à la fois si libre et si cruel, découvrant au même instant l'universalité des lois et l'universalité de la violence. Découvrant les idées généreuses de l'humanisme et la dangereuse conviction de l'inégalité des races, la relativité des civilisations et la tyrannie culturelle. Découvrant, par ce drame de la Conquête du Mexique tout ce qui va fonder les empires coloniaux, en Amérique, en Inde, en Afrique, en Indochine : le travail forcé, l'esclavage systématique, l'expropriation et la rentabilisation des terres, et surtout cette désorganisation délibérée des peuples, afin non seulement de les maintenir, mais aussi de les convaincre de leur propre infériorité. Le silence du monde indien est un drame dont nous n'avons pas fini aujourd'hui de mesurer les conséquences. Drame double, car en détruisant les cultures amérindiennes, c'était une part de lui-même que détruisait le Conquérant, une part qu'il ne pourra sans doute plus jamais retrouver." (p. 213)

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Non, l’œil ne suffit plus, tant il y a à voir. Il faudrait avoir dix mille yeux, et ce ne serait pas assez. Il faudrait être vite comme les mouches, lent comme les arbres, grand comme les baleines et haut comme les condors. Et ce ne serait pas assez. Il faudrait être plusieurs comme les microbes, il faudrait être lourd comme l’osmium, doux comme la terre, froid comme la neige. Il faudrait être eau comme l’eau, et feu comme le feu. Et moi, je ne suis qu’un!
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Lalla connaît tous les chemins, tous les creux des dunes. Elle pourrait aller partout les yeux fermés, et elle saurait tout de suite où elle est, rien qu'en touchant la terre avec ses pieds nus. Le vent saute par instants la barrière des dunes, jette des poignets d'aiguilles sur la peau de l'enfant, emmêle ses cheveux noirs.
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Comme les fourmis, les scorpions étaient les vrais habitants de ce lieu, nous ne pouvions être que des locataires indésirables et inévitables, destinés à nous en aller. Des colons, en somme.
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Le vent tourbillonne et m'enivre, et je sens le goût salé des embruns quand la vague couvre l'étrave.
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Quand on saisit l'esprit de la boisson
A quoi bon expliquer à celui qui est sobre ?

(Li Bai, poète chinois sous la dynastie des Tang , dans les années 700 de notre ère)
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Ce qui me tue, dans l'écriture, c'est qu'elle est trop courte. Quand la phrase s'achève, que de choses sont restées au-dehors !
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C'était donc cela, l'Afrique, cette ville chaude et violente, le ciel jaune où la lumière battait comme un pouls secret. Avant qu'ils ne repartent pour Dakar, les Botrou avaient invité Maou et Fintan à Gorée, pour visiter le fort. Sur la rade, le canot glissait vers la ligne sombre de l'île. La forteresse maudite où les esclaves attendaient leur voyage vers l'enfer. Au centre des cellules, il y avait une rigole pour laisser s'écouler l'urine. Aux murs, les anneaux où on accrochait les chaînes. C'était donc cela l'Afrique, cette ombre chargée de douleur, cette odeur de sueur au fond des geôles, cette odeur de mort. Maou ressentait le dégoût, la honte. Elle ne voulait pas rester à Gorée, elle voulait repartir au plus vite vers Dakar.
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Elle montrait la ville qui bouillait de l’autre côté du fleuve, le pont arqué où roulent les trains, la silhouette de la Tour Eiffel, les immeubles. « Pour moi, c’est ici que tout se passe. Les souvenirs, ça me donne mal au cœur. Je veux changer de vie, je ne veux pas vivre comme une mendiante. »
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Ethel regardait Xénia, elle s'étonnait de ne pas ressentir de honte. Dans le fond, elle préférait que tout se finisse dans la banalité. La grâce de l'extrême jeunesse envolée, il ne restait plus en Xénia qu'une femme comme les autres, toujours très belle, certes, mais un peu vulgaire, un peu méchante , probablement insatisfaite. C'était mieux. On ne pouvait pas passer sa vie à adorer une icône.
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Cette longue relation qui avait uni cette femme à son père, avant sa naissance, avant même qu’Alexandre n’ait rencontré Justine. Une autre époque, comme on dirait une autre vie. Un sentiment qui traînait comme un nuage attardé, qui languissait, qui s’étirait tout au long d’une vie, sans avoir de nom, sans avoir d’issue. Et le souvenir d’une présence au sein de la famille, un fantôme de présence, mais ça n’avait pas été un secret pour Éthel, même si personne n’en parlait devant elle. Se pouvait-il que les adultes fussent assez bêtes pour croire qu’une enfant n’était pas capable de comprendre, à demi-mot, à quart de parole, ou même dans le silence ?
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