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Citations de Léonora Miano (372)


Si notre peuple peut produire des individualités assez audacieuses pour affronter ses errances et ses lâchetés, il lui reste une chance de prétendre à sa grandeur. Notre valeur ne réside pas dans les métaux du sous-sol auxquels d'autres ont donné une importance que nous ne comprenons toujours pas, que nous ne savons ni cerner, ni exploiter pour le bien commun. Ils en fixent le prix et nous l'acceptons parce que cela ne signifie rien pour nous. Ils nous dupent peut-être, mais nous les laissons faire, toujours inaptes à décider quoi que ce soit pour nous-mêmes. Notre valeur n'est pas non plus cette mystique dénuée de spiritualité, au travers de laquelle nous prétendont commander aux puissances occultes. Sans chercher à nous conformer aux principes supérieurs et universels qui régissent la vie. Notre grandeur viendra de ce que nous saurons engendrer des êtres libres. Qu'ils se tiennent debout, qu'ils ne récitent leur longue généalogie que pour mieux regarder devant. Qu'ils disent : je suis parce que j'existe. Je récuse l'obscur et réfute la démence comme unique horizon. Et après qu'ils auront dit combien l'Afrique vaut mieux que ce qu'elle pense d'elle-même, des légions leur emboîteront le pas.
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De plus en plus de familles démunies cherchaient des prétextes pour se défaire de leurs rejetons. Le père perdait son emploi. Au bout de quelques jours à tourner en rond et à se noyer au fond d'une bouteille d'alcool de maïs, il empoignait un de ses enfants et le jetait dehors. La mère faisait une crise de nerfs à l'idée d'affronter une journée de plus sans savoir ce qu'on mangerait à la maison. Soudain, elle trouvait qu'un de ses enfants avait décidément un regard étrange. Un regard qui l'accablait, elle qui avait pris la responsabilité de le mettre au monde. Quelquefois, ces parents allaient chercher l'approbation des esprits qui la leur accordaient toujours, une fois qu'ils avaient payé le marabout, ou donné quelques billets au pasteur. Les esprits s'étaient syndiqués et leur convention collective se résumait en quelques mots : payez avant d'être servis.

Prélude : absence.
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Ceux d'entre eux qui cherchaient sincèrement Dieu espéraient trouver en Lui une sorte de vaisseau spatial vers une planète tranquille. Ils en avaient par-dessus la tête de devoir prendre leur vie au collet chaque jour que Nyambey faisait, pour n'arriver à rien. Ils priaient non pas pour demander la force d'affronter la vie, mais pour en être délivrés, pour que tombent enfin les barreaux qu'elle érigerait autour d'eux. Ils voulaient s'évader du monde réel, n'y avoir aucune responsabilité, n'avoir jamais à s'y engager. Ils priaient comme certains se font un fix : pour planer.

Prélude : absence.
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De son point de vue, la vie entiere des Africains se passait a échapper a la mort. Ils ne semblaient meme pas se rendre compte qu´elle les environnait. Elle était dans les cours d´eau au fond desquels proliféraient des vers. Ces derniers causaient des ulceres qui rongeaient les chairs des enfants. Elle était dans l´eau de boisson, dans les mares qui stagnaient aux abord des habitations, envoyant des nuées de moustiques couvrir le monde a la nuit tombée. La mort était partout dans la misere insalubre de l´Afrique. La mort était partout dans l´ignorance des populations. Et la mort était dans les tradiions. Dans ces comportements nécrophiles qui impliquaient souvent la conservation des cranes des trépassés. Dans les pratiques de sorcellerie, ou des potions étaient fabriquées avec de la poudre d´ossements humains ou avec des visceres. Dans certains rituels qui pouvaient parfois finir en bains de sang, et personne ne s´émouvait outre mesure devant le déces de cette femme qui n´avait pas été suffisamment endurante, suffisamment femme, pour retenir les flots de sang répandus lors de son excision. La mort avait fait de l´Afrique son royaume. Il suffisait de voir les nuées de mouches qui couvraient de leur ombre des territoires entiers pour n´en pas douter, la mouche était gardienne de la mort. Il semblait cependant a Ayané que l´etre africain qui méprisait cette mort multiforme, dansant et riant sur son dos, courbait l´échine devant elle sitot qu´elle s´incarnait dans des chefs. Ele prenait forme humaine, tenait le chasse-mouches, arborait le chéchia en peau de panthere, et sévissait tout son soul.
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Je viens de te donner toute l'aide que je peux, et tu es là en train de me faire la morale. Tu crois qu'on a les moyens d'en avoir, de la morale, dans ce pays ?

Second mouvement : génération.
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Le petit s'endormit avant la fin du conte. Shrapel posa le livre sur la table de chevet, et l'embrassa sur le front. Il eut envie de hurler, sentant ce vide autour de lui. C'était l'autre deuil de sa vie, et c'était le plus cruel. Il n'aimait pas son fils.
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Léonora Miano
Quiconque a été engendré porte en lui les vivants et les morts
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Les gamins que nous avions trouvés sur place ne venaient pas nous aider. Ils attendaient les ordres, ne prenaient aucune initiative, agissaient machinalement. C'était une technique de survie. Désolidariser les actes de la pensée. En faire des réflexes. Minimiser ainsi leur portée.
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Le ressentiment que nous vouons aux autres est impuissant à nous délivrer de nos propres turpitudes.
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Lorsque nous avons quitté la mine, nos corps sentaient la mort de tous ces hommes. Une odeur de sang, de chair carbonisée. Mes mains tremblaient. Mes oreilles bourdonnaient de leurs cris. Ce n'est pas facile de tuer, Ayané. On s'imagine des tas de choses à ce sujet. On regarde trop de mauvais films. Laisse-moi te le redire : ce n'est pas facile de tuer.
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La conception des êtres implique qu'ils soient considérés pour eux-mêmes, avant d'être mis au monde. Elle nécessite qu'on ait à l'esprit qu'ils sont des entités à part entière, non pas des outils de purification, non pas des moyens de se réaliser, non pas des bâtons de vieillesse, non pas la rémanence de géniteurs trépassés, mais des individus. Personne ne pense aux enfants. Des générations d'humains sont donc engendrées plutôt que conçues. Il leur appartiendra, si elles en trouvent les ressources, de se définir, de se donner une signification. Dans la misère de notre pays, dans la démence qui lui suce le cerveau, on peut parier sans trop de risques que ces vies ne feront rien que s'écouler, comme la petite goutte translucide dont elles auront jailli.

Premier mouvement : volition.
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L'amour des mères pour leurs fils n'a que faire des astres pour trouver son chemin. Il est lui-même l'étoile.
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La nuit est un calice rempli de sang, et les ténèbres s’accrochent au ciel.
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Ce qui existe naturellement ne devient bon ou mauvais qu'au contact d'une volonté.
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L'âme de nombreux Kémites était si pervertie à présent, qu'ils ne savaient poser sur les leurs qu'un regard dédaigneux. Ils se disaient modernes, soucieux de l'avenir, ce qui signifiait simplement qu'ils avaient adopté la tournure d'esprit de l'oppresseur. Ils se disaient des métis culturels, avaient appris à aimer les barreaux de leur cage.
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La nuit est faite pour le repos , mais elle n 'est pas si tranquille . Il faut rester sur ses gardes .
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Je m'entends à peine penser. De quels ravages le déchaînement des éléments était-il annonciateur ? Cette pluie n'est pas simple, et j'y laisserai des plumes, c'est une certitude. Je me lève, quitte le salon pour rejoindre le petit Kabral qui doit être dans sa chambre? In est en train de regarder un film dans la grande salle de séjour située au premier étage. De larges baies vitrées ouvrent sur le jardin, ses arbres fruitiers, ses frangipaniers, ses hibiscus. Je sais qu'il aime la vue. (...)
Cet enfant ne se plaint jamais. Il se débrouille pour trouver des solutions à ses problèmes. Nous nous entendons bien. C'est à moi de briser la glace. Tandis que j'avance dans les couloirs, je me rappelle les paroles de la personne chargée d'empêcher ton mariage avec Ixora. Kabral est son fils, elle l'élève seule. Il ne saurait s'attacher à quiconque détesterait sa mère. Je n'ai pas de haine. Je n'ai pas voulu sa mort. Je souhaite que sa voir soit épargnée. Si c'était à refaire ... Rien n'est jamais à refaire. Une fois de plus, il me faut espérer ton retour, fils. Me tenir droite face à mes actes et voir venir.
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Si leurs fils ne sont pas retrouvés ,si le ngambi ne révèle pas ce qui leur est arrivé , on ne racontera pas le chagrin de ces mères .La communauté oubliera les dix jeunes initiés , les deux hommes d' âge mûr ,évaporés dans l' air au cours du grand incendie . Du feu lui-même , on ne dira plus rien .Qui goûte le souvenir des défaites ?
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On a souvent un peu raison et un peu tort à la fois. Le révolté peut sans mal désigner les régions où sa colère a germé. Sa rancœur a des sources, toujours les mêmes, intarissables, comme la faiblesse humaine. Le fataliste a, lui aussi, constaté les flots ininterrompus de cette couardise. Il en a déduit l’inutilité de tenter de les endiguer. L’un croit que le mal n’existe que pour être combattu. L’autre le croit inévitable, consubstantiel à l’expérience humaine. 
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Parce qu’il est si personnel, j’ai attendu longtemps pour proposer ce texte au lecteur. Il s’agissait de ne pas me laisser définir par ces faits passés, de ne pas être la SDF qui écrit des livres. Je connais la société française et sa propension à enfermer les minorités en particulier dans les aspects dégradants — ou perçus comme tels — de leur trajectoire. 
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