AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Manuel Vázquez Montalbán (446)


Une autre considération obligée se rapporte au plaisir. Tout plaisir est joyeusement immoral [...].
Et l'affaire est bien plus immorale lorsqu'il s'agit d'additionner ou de combiner deux plaisirs aussi extrêmes que bien manger et bien aimer.
Commenter  J’apprécie          40
J'ai envie de m'apitoyer sur moi. Depuis je ne sais combien de temps, probablement depuis le jour où je nous ai vus tous les trois dans la salle du tribunal où l'on allait juger mon père et ainsi nous juger nous aussi, ma mère et moi, pour avoir perdu l'Histoire comme on perd une guerre, dans cette salle où ma mère m'avait conduit pour m'inspirer de la compassion. Je nous ai vus, tous les trois, et j'ai eu le pressentiment que, malgré les apparences, nous ne reviendrions jamais à la maison.
Commenter  J’apprécie          40
De tous les cannibalismes professionnels, rien ne vaut le cannibalisme politique.
Commenter  J’apprécie          30
-- Ça avait l'air de te plaire.
-- L'espace d'un instant, j'ai pensé que vingt-quatre ans de ma vie n'étaient pas passés et que la réunion d'aujourd'hui avait eu lieu le lendemain du jour où j'ai quitté le parti.
-- Ah ? Parce que tu y étais ?
-- J'y ai été.
-- Eh bien, on ne le dirait pas.
Commenter  J’apprécie          30
Depuis sa condition de trouble-fête sentimental, un livre demandait a être brûlé, et il arracha de son royaume "Le poète à New York" pour le porter à l'holocauste. En guise de grâce ultime, il ouvrit le livre à une page qui avait conservé pendant des années certain espacement avec les autres pages, mémoire d'une prédilection. "Lune et panorama des insectes." Juste devant le feu, les vers le frappèrent comme le cri d'un innocent.
"Mais la nuit est interminable quand elle s'appuie sur les malades.
Et il y a des bateaux qui cherchent à être regardés pour pouvoir sombrer tranquilles."
Il revint sur ses pas et reposa le livre là où il avait été depuis qu'il avait décidé de transformer sa bibliothèque en couloir des condamnés à mort.
Commenter  J’apprécie          30
La veuve Stuart Pedrell avait dû être une fillette avec toutes les facultés d'enthousiasme du monde. Il y avait encore des mers dans ses yeux, et ses traits fatigués évoquaient le visage d'une jeune fille pleine d'espoir qui ignore la brièveté de cette maladie qui sépare la naissance de la vieillesse et de la mort.
Commenter  J’apprécie          30
Sans vouloir vous montrer mes blessures de guerre, cher ami, vous avez devant vous un ancien combattant antifranquiste, et cela peut paraître incroyable, mais c'est mal vu aujourd'hui, ça provoque rougeur, honte et mauvaise conscience.
La vie de cette démocratie est comme l'échelle d'un poulailler: courte et pleine de merde.
Commenter  J’apprécie          30
_ J'ai appris à boire du vin blanc entre les repas grâce au roman de Goytisolo, Senas de identidad. Plus tard, le vin blanc a superbement été utilisé dans le film de Resnais, Providence. Jusqu'alors j'étais resté fidèle aux portos et au bon vieux xérès. Ca, c'est une bénédiction. De plus, c'est la boisson alcoolisée à plus basses calories, à part la bière. Quel vin blanc buvez-vous ?
_ Du blanc de blanc, Marqui de Monistrol.
_ Je ne connais pas. Moi je suis un fanatique du chablis, de ce chablis. Et s'il n'y a pas de chablis, un albarino fefinanes. C'est un vin bâtard impressionnant. Des racines alsaciennes dans un sol galicien. C'est une des meilleures choses que nous ait données le Chemin de Saint-Jacques.
Commenter  J’apprécie          30
La coutume ancestrale et barbare qui consistait à obtenir pour une jeune fille déshonorée un bureau de tabac s’était infléchie doucement jusqu’à cette nouvelle habitude qui voulait qu’on remise les femmes mal mariées sujettes à l’angoisse métaphysique dans une boutique de fringues.
Commenter  J’apprécie          30
À la cour des Kennedy cohabitent des eunuques dalmates – qui chient de peur sur les sables de Long Island -, des cochers de fiacre de Nanterre, des cuisiniers suisses (excellents), un ambassadeur soviétique, des pom pom girls de Californie, des veuves de cinq guerres mondiales, deux objecteurs de conscience australiens, un champion du monde de ping-pong qui a apporté sa table préférée, trois vendeurs de chemises pédés qui font chambre à part, un gaucho empaillé par Ted (précoce taxidermiste depuis que Rose lui a offert une panoplie complète le jour de sa première communion), un pelotari basque avec des sourcils qui se rejoignent, une demi-douzaine de chanteurs sucrés comme un milk-shake à la vanille, deux vieux marins amoureux de deux énormes sirènes de Syracuse, dix défenseurs des droits civiques avec chacun son défendu, un sheriff méchant, deux sheriffs gentils, un batteur de jazz tuberculeux qui se masturbe dans tous les cabinets de Boston, un agriculteur abyssal spécialisé dans la greffe d’algue Rosalind, un châtreur de mites, un poète lettriste qui grince quand il marche, une vierge samoyède qui s’est perdue au pôle Nord, une doctoresse espagnole spécialisée dans les zones érogènes, deux chanteurs de jazz avec un cancer de la gorge, un milieu de terrain du Manchester United, un ailier droit de Manchester City, un philosophe allemand spécialiste de lui-même (sa femme le précède dans les couloirs en demandant de se taire aux gens qu’ils croisent), deux présidents de comité de quartier d’Ankara, un cousin germain de Hitler, qui lui ressemble beaucoup d’allure et dans l’intonation spéciale qu’il donne au mot spatule, un météorologue, un dompteur de poules, un dentiste florentin, des princes nains abandonnés dans des boîtes à ordures, un champion de parties d’échecs simultanées, le traducteur d’Oscar Wilde en ukrainien et la vraie princesse Anastasia, l’ultime carte que l’Occident se réserve de jouer pour réclamer le trône de l’U.R.S.S., une seconde avant l’agression nucléaire.
Commenter  J’apprécie          30
De toutes les maladies volontaires,c'était la nostalgie qui l'ennuyait le plus .
Commenter  J’apprécie          30
- Pour qui allez-vous voter ?
Demanda la femme après avoir jeté un oeil sur les titres des journaux et revues suspendus aux kiosques des Ramblas.
- Oui, la température est élevée, anormale même pour la saison, dommage qu'il fasse humide.
La réponse de Carvalho déconcerta Marta et la fit s'arrêter et le prendre par un bras pour l'empêcher d'avancer.
- Je vous ai demandé pour qui vous alliez voter.
- J'ai cru entendre : il fait un temps superbe.
- Ça ne se ressemble pas du tout.
- Au ton de votre voix, c'était la même chose.
- Vous insinuez que je ne peux parler que de la pluie et du beau temps ?
Commenter  J’apprécie          30
Parce que vous avez usurpé la fonction des dieux qui en d’autres temps guidèrent la conduite des hommes, apportant la thérapie du cri le plus irrationnel sans le réconfort du surnaturel : l’avant-centre sera assassiné en fin de journée.
Parce que vous utilisez l’avant-centre pour vous sentir des dieux générateurs de victoires et de défaites, carrés dans vos confortables bergères de césar à la petite semaine : l’avant-centre sera assassiné en fin de journée.
Parce qu’à l’heure où le soir tombe, les biorythmes de l’enthousiasme décroissent, l’hallali et le râle final résonnent comme une musique truculente et mélancolique : l’avant-centre sera assassiné en fin de journée.

[…]

Carvalho se redressa et emboita le pas au footballeur et à M. Relations publiques. Il remâchait silencieusement des injures incongrues contre lui-même, s’en voulant d’avoir accepté cette mission. Partager une paella avec un fils à papa et un veau anglais couvert de tâches de rousseur… Il pressentait un désastre.

[…]

Le temps n’en fait qu’à sa tête et seul le mensonge du cinéma ou des romans peut le circonvenir. Mais Biscuter, Charo, Bromure et lui-même étaient l’incarnation du temps, qui trahissait ses victimes différemment, selon le cas. Sous son action, Charo s’empâtait, Bromure pourrissait de l’intérieur, Carvalho devenait un spectateur toujours plus pensif de son temps et de celui d’autrui, lequel jusqu’à présent, n’avait pas de prise sur Biscuter, qui l’avait peut-être vaincu à la minute même de sa naissance en apparaissant aussi hideux qu’aujourd’hui, comme si le temps, en le voyant sortir du ventre de sa mère, avait reconnu en lui une victime à long terme.

[…]

- Oui. Et non. En vérité, je suis déconcerté. Je savais lire dans les yeux des crapules espagnoles, mais j’ai du mal à lire dans les yeux des crapules d’importation. Le langage des yeux n’est pas universel. Je m’en suis rendu compte.
- Que voulez-vous dire ?
- Mes informateurs m’on conduits à des mafias qui n’ont rien d’indigène et, d’après mes conversations, ces gens-là ne savent rien de ce que nous voudrions qu’ils sachent, mais ce qu’il savent, ils ne veulent pas que nous le sachions.
- Ça ne revient pas au même.
- Non.

[…]

Vivre littérairement est très dangereux, même d’excellents écrivains n’y ont pas résisté.
Commenter  J’apprécie          30
Car on peut devenir sourd quand on ne sait pas écouter la musique de son temps
Commenter  J’apprécie          30
En vérité, un être humain que la nourriture laisse indifférent ne saurait être digne de confiance.
Commenter  J’apprécie          30
Il y a une chose qui s'appelle le pouvoir, qui s'est toujours appelée le pouvoir et nous vivons un moment fantastique où le pouvoir politique ne s'oppose pas au pouvoir économique et vice versa, et où personne ne lui demande de s'y opposer. C'est l'inverse.
Commenter  J’apprécie          30
Du temps de Coubertin, on aurait pu accuser un sportif délaissé qui se serait senti obligé de prouver son idéalisme, ou une puissance intéressée par l’échec organisé de l’État qui convoquait ces Jeux. Mais à l’ère Samaranch, le sabotage était plus vraisemblablement le fait d’une conspiration terroriste ou de la mauvaise humeur d’un sponsor furieux que les organisateurs aient choisi une marque rivale de cacao en poudre. L’inventaire des sabotages menait à la casuistique. Mais le record contre nature de Ben Johnson n’était peut-être dû qu’à une tension psychosomatique refoulée après le scandale de Séoul et sublimée plus tard dans un effort surhumain
Commenter  J’apprécie          30
La révolution industrielle avait provoqué une migration des travailleurs vers la ville ; les exercices physiques imposés par les règles de la confrontation avec la nature s’étaient implantés dans les lourds ateliers des usines et dans les perspectives de programmation du travail industriel. En outre, la nouvelle classe ouvrière s’entassait dans des quartiers dont la bourgeoisie et l’aristocratie ne savaient que faire, elle vivait mal, dans des conditions d’hygiène déplorables. Curieusement, les bienfaiteurs du XIXe siècle avaient inventé le sport social pour améliorer le sort des esclaves industriels, et les compétitions sportives entre États pour démontrer qu’en effet la paix était le prolongement de la guerre et nécessitait un entraînement sans faiblesse dans la perspective d’une victoire future des armes.
Commenter  J’apprécie          30
Une ville occupée par des gens qui feignent d’être en pleine forme risque de devenir insupportable, surtout si, profitant des jeux Olympiques, la ville s’offre une chirurgie esthétique qui efface de son visage d’importantes rides de son passé. Des rois, des présidents de républiques incertaines, l’insupportable légèreté de l’être des membres du C.I.O (Comité international olympique), gros lards bardés de philosophie olympique qui refusaient formellement de distinguer entre cannibales et victimes, et enfin, parqués aux portes de la ville, attendant leur chance néologisée, les paralympiques, euphémisme d’un autre euphémisme, les diminués, qui aspirent à devenir des héros dans la foulée des olympiades de la pitié dangereuse, au cœur d’une société qui ne se soucie de ses diminués que lorsqu’ils réussissent à marquer des buts avec le nez.
Commenter  J’apprécie          30
Quand Carvalho serre dans ses bras son corps nu, il perçoit des électricités qui émanent de tout ce qui pointe et il se remplit aussitôt la bouche de poils blonds frisés sur un pubis de nacre. Il avait besoin de manger du sexe comme on a besoin d'embrasser la terre après un exil.
Commenter  J’apprécie          30



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Manuel Vázquez Montalbán (1075)Voir plus

Quiz Voir plus

Pepe Carvalho, à la Proust N°1

S'il était une ville ?

Teruel
Zaragoza
Valencia
Barcelona
Badalona
Granada
Alicante
Almeria

10 questions
25 lecteurs ont répondu
Thème : Manuel Vázquez MontalbánCréer un quiz sur cet auteur

{* *}