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Citations de Marguerite Duras (2424)


Il fait son Rudolf Valtino, disait-il, mais ce qui est triste, c'est qu'il a une tête plutôt dans le genre tête de veau.

(p.72)

C'était dans la zone située entre le haut quartier et les faubourgs indigènes que les blancs qui n'avaient pas fait fortune, les coloniaux indignes, se trouvaient relégués. Là, les rues étaient sans arbres, les pelouses disparaissaient.

(p.136)

Une vieille coloniale, Mme.Marthe, de soixante-cinq ans, venue en droite ligne d'un bordel du port, tenait l'Hotel Central. Elle avait une fille, Carmen, elle n'avait jamais pu savoir de qui et, n'ayant pas voulu lui réserver un sort pareil au sien, elle avait fait pendant les vingt ans de sa carrière des économies suffisantes pour acheter à la Société de l'Hotellerie coloniale la part d'actions qui lui avait valu la gérance de l'hôtel.

(p.137)

Carmen avait de la vie sa philosophie qui n'était pas amère, elle acceptait son sort, si l'on peut dire, d'un pied léger et elle se défendait farouchement de tout attachement qui aurait nui à son humeur. C'était une vraie fille de putain faite aux arrivées et aux départs incessants de ses compagnons, à la dureté du gain, à l'habitude d'une indépendance forcenée

(p.139)

Tant qu'il saurait la mère vivante, il ne pourrait d'ailleurs rien faire de bon dans la vie, rien entreprendre.

(p.225)
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Elle avait aimé démesurément la vie et c'était son espérance infatiguable, incurable, qui en avait fait ce qu'elle était devenue , une désespérée de l'espoir même.

(p.114)
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𝐸𝑙𝑙𝑒𝑠 𝑏𝑜𝑖𝑣𝑒𝑛𝑡 𝑙𝑒 𝑡ℎ𝑒́.

MADELEINE (𝑡𝑒𝑚𝑝𝑠). - La mort arrivera du dehors de moi.

JEUNE FEMME. - De très loin. (𝑇𝑒𝑚𝑝𝑠). Vous ne saurez pas quand.

MADELEINE. - Non, je ne saurai pas.

JEUNE FEMME. - Elle est partie depuis le commencement du monde en prévision de vous seule.

MADELEINE. - Oui. Inscrite dès la naissance. Quel honneur, dès avant la naissance.

JEUNE FEMME. - Oui.

MADELEINE (𝑚𝑜𝑛𝑡𝑟𝑒 𝑙𝑎 𝑠𝑐𝑒̀𝑛𝑒). - Pour arriver là. (𝑆𝑖𝑙𝑒𝑛𝑐𝑒). Comment sais-tu ces choses là ?

JEUNE FEMME. - Je vous vois.
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Elle avance vers moi, toujours, au même pas. Elle ne peut pas avancer plus vite ni ralentir. La moindre modification dans son mouvement m'apparaîtrait comme une catastrophe, l'échec définitif de notre histoire : personne ne serait au rendez-vous.
Mais qu'est-ce que j'ignore de moi-même à ce point et qu'elle me met en demeure de connaître ? qui sera là dans cet instant auprès d'elle ? [...]
A la voir je pense que cela sera peut-être suffisant pour moi, cela, de la voir et que la chose se ferait ainsi, qu'il sera inutile d'aller plus avant dans les gestes, dans ce qu'on se dira. Mes mains deviennent le piège dans lequel l'immobiliser, la retenir de toujours aller et venir d'un bout à l'autre du temps. [...]
Elle arrive, regarde, nous ne nous sommes jamais encore approchés. Elle est blanche, d'une blancheur nue. Elle embrasse ma bouche. Je ne lui donne rien. J'ai eu trop peur, je ne peux pas encore. [...]
Son regard luit sous ses paupières très abaissées. Il faut s'habituer à la raréfaction de l'air autour de ces petites planètes bleues auxquelles le regard pèse, s'accroche, en perdition. [...]
Elle se met elle-même dans mes bras, les yeux clos, attendant qu'autre chose arrive qui doit arriver et dont son corps disait déjà la proche célébration. [...]

Nous sommes enfermés quelque part. Tous les échos se meurent. Je commence à voir clair, petit à petit, très très peu. Je vois des murs, lisses, qui n'offrent aucune prise, ils n'étaient pas là tout à l'heure, ils viennent de s'élever autour de nous. On m'offrirait de me sauver, je ne comprendrais pas. Mon ignorance elle-même est enfermée.
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Marguerite Duras
L’écrit ça arrive comme le vent, c’est nu, c’est de l’encre, c’est l’écrit et ça passe comme rien d’autre ne passe dans la vie, rien de plus, sauf elle, la vie." Marguerite Duras
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Marguerite Duras
Je crois que l’homme sera littéralement noyé dans l’information, dans une information constante, sur son corps, sur son devenir corporel, sur sa santé, sur sa vie familiale, sur son salaire, sur son loisir. Ce n’est pas loin du cauchemar. Il n’y aura plus personne pour lire. Ils verront de la télévision. On en dépose tout partout, dans la cuisine, dans les water-closets, dans le bureau, dans les rues. Où sera-t-on... Tandis que l’on regarde la télévision, où est-on... ? On n’est pas seul. On ne voyagera plus, ce ne sera plus la peine de voyager. Quand on peut faire le tour du monde en huit jours, en quinze jours, pourquoi le faire ?
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On dit, on demande : Mais qu'a-t-il fait au juste ? Je ne suis jamais au courant.
- Il a fait le pire, mais comment le dire ?
- Le pire ? tuer ?
- Il tirait la nuit sur les jardins de Shalimar où se réfugient les lépreux et les chiens.
- Mais des lépreux ou des chiens, est-ce tuer que de tuer des lépreux ou des chiens ?
- Aussi bien des balles ont été trouvées dans les glaces de sa résidence à Lahore, vous savez.
- Les lépreux, de loin, avez-vous remarqué ? On les distingue mal du reste, alors...
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Marguerite Duras
Ce n'est pas parce que Dieu n'existe pas qu'il faut se tuer. Je pense que c'est parce que Dieu n'existe pas qu'il faut s'en foutre et être joyeux. Rien ne remplacera Dieu. C'est une notion absolue, irremplaçable, et magnifique, et essentielle, une notion géniale, complètement géniale. Mais bon, du moment qu'il n'existe pas, il n'existe pas. Donc, soyons dans le gai désespoir. Le gai désespoir qu'il n'existe pas et qu'en quelque sorte on s'en réjouisse!

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Ainsi vous avez pu vivre cet amour de la seule façon qui puisse se faire pour vous, en le perdant avant même qu'il soit advenu.
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« Quand même, […], tu pourrais t’en souvenir une fois pour toutes. Moderato, ça veut dire modéré, et cantabile, ça veut dire chantant, c’est facile. » (p. 20 & 21)
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Je ne peux pas penser à mon enfance sans penser à l'eau. Mon pays natal c'est une patrie d'eaux. Celle des lacs, des torrents qui descendaient de la montagne, celle des rizières, celle terreuse des rivières de la plaine dans lesquelles on s'abritait pendant les orages. La pluie faisait mal tellement elle était drue.
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Jean Bedford s'est retiré dans sa chambre. Il a un concert demain. Il fait des exercices de violon.
[...]
Les exercices de Jean Bedford sur double corde sont très aigus. Leur frénésie monotone est éperdument musicale, chant de l'instrument même.
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Jamais bonjour, bonsoir, bonne année. Jamais merci. Jamais parler. Jamais besoin de parler. Tout reste, muet, loin. C'est une famille en pierre, pétrifiée dans une épaisseur sans accès aucun. Chaque jour nous essayons de nous tuer, de tuer. Non seulement on ne se parle pas mais on ne se regarde pas. Du moment qu'on s'est vu, on ne peut pas regarder. Regarder c'est avoir un mouvement de curiosité vers, envers, c'est déchoir. Aucune personne regardée ne vaut le regard sur elle. Il est toujours déshonorant. Le mot conversation est banni. Je crois que c'est celui qui dit ici le mieux la honte et l'orgueil. Toute communauté, qu'elle soit familiale ou autre, nous est haïssable, dégradante. Nous sommes ensemble dans une honte de principe d'avoir à vivre la vie. C'est là que nous sommes au plus profond de notre histoire commune, celle d'être tous les trois des enfants de cette personne de bonne foi, notre mère, que la société a assassinée. Nous sommes du côté de cette société qui a réduit ma mère au désespoir. A cause de ce qu'on a fait à notre mère si aimable, si confiante, nous haïssons la vie, nous nous haïssons.
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Rares étaient les bateaux de plaisance. Le rose de la journée finissante colora le ciel tout entier. D'autres enfants, ailleurs, sur les quais, arrêtés, regardaient.
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Avec l'été, la défaite allemande est arrivée. Elle a été totale. Elle s'est étendue sur toute l'Europe. L'été est arrivé avec ses morts, ses survivants, son inconcevable douleur réverbérée des Camps de Concentration Allemands.
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Comme ça me plaît, des villes où toujours il y a des gens qui sont réveillés, la nuit, le jour,…
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"Très vite dans ma vie il a été trop tard."
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Elle disait qu'elle aimait bien les putains, qu'elle-même était fille de putain mais que ce n'était pas seulement pour ça, mais parce que c'était encore ce qu'il y avait de plus honnête, de moins salaud dans ce bordel colossal qu'était la colonie.
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Il y a souvent des récits et très peu souvent de l'écriture.
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Et sans ironie aucune, on doit pouvoir dire que les occasions de rendre les gens pensifs sont toujours excellentes.
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