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Jérôme Beaujour (Collaborateur)
EAN : 9782070387175
192 pages
Gallimard (26/08/1994)
3.9/5   134 notes
Résumé :
Ce livre n'a ni commencement ni fin, il n'a pas de milieu. Du moment qu'il n'y a pas de livre sans raison d'être, ce livre n'en est pas un. Il n'est pas un journal, il n'est pas du journalisme, il est dégagé de l'événement quotidien. Disons qu'il est un livre de lecture. Loin du roman mais plus proche de son écriture - c'est curieux du moment qu'il est oral - que celle de l'éditorial d'un quotidien. J'ai hésité à le publier mais aucune formation livresque prévue ou ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (14) Voir plus Ajouter une critique
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Ce que j'aime par dessus tout : sa pudeur, elle me touche lorsqu'elle parle de choses graves sans jamais se complaire. Ce qui me fait sourire : sa mégalomanie lorsqu'elle parle d'elle même à la troisième personne. Ce qui me rend triste : qu'écrire, indissociable de l'être "Marguerite Duras", indissociable de l'alcool, indissociable de la maison, fut autant ce qui l'aidait à vivre que ce qui la noyait.. L'écriture comme surface de contact avec autrui, comme prison tout autant. Je voudrais et espère me tromper, aimerais que l'écriture ait davantage été ce qui la guidait.
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Si je me suis plongée dans ce recueil de textes de Marguerite Duras, c'est parce que l'adaptation théâtrale de l'un de ses extraits m'a particulièrement touchée.
En effet, j'avais été bluffée en mars dernier, par l'interprétation de Corinne Mariotto, pour La Compagnie de la Dame dans la pièce intitulée La Maison, d'après La Cuisine de Marguerite et La Vie matérielle de Marguerite Duras.
Ne connaissant cette auteure que par L'Amant, je sentais bien alors que j'étais passée à côté de l'essentiel la concernant…

Je découvre dans La Vie matérielle une femme proche et abordable, avec ses moments de faiblesse et de lucidité, avec sa vision aiguisée du monde qui l'entoure… une femme qui avait l'âge d'être ma grand-mère… (Mais ma grand-mère avait une vie beaucoup plus rangée et ne picolait pas…).
Ici, Marguerite Duras ne cache rien de sa façon d'être, de ses retards, de certaines de ses rencontres, de son regard et de ses opinions sur les hommes, sur l'homosexualité et l'hétérosexualité, sur le handicap… Elle écrit sur sa maison de Neauphle, sur la vie parisienne des années 80 notamment dans le sixième arrondissement où elle habitait ; elle ne dit pas tout mais parle, par exemple, de la mort de sa mère, de l'Indochine, de Yann Andréa, du « look Duras » (gilet, col roulé, jupe droite), de son fils, de certaines de ses relations amicales ou amoureuses, de ses manies, de ses angoisses, de ses visions délirantes, de sa façon de conduire... Elle ne cache ni le sexe, ni l'alcoolisme, ni la maladie, ni les mauvais jours et les mauvaises rencontres.
Elle évoque des faits divers, dont l'affaire Villemin, autour de notions comme le sublime ou le pouvoir ultime du langage, donnant la prédominance au littéraire sur l'évènementiel.
Elle nous parle aussi de ses lectures du moment, de littérature en général, de Proust, du théâtre, du jeu superflu des acteurs, des autres femmes auteures ou dramaturges comme Nathalie Sarraute… ; elle évoque l'écriture autour de ses oeuvres déjà publiées, partage ses doutes et ses interrogations, analyse la parole journalistique ou télévisuelle. Elle nous livre des réflexions sur l'art, sur la musique et naturellement sur le cinéma.

Son écriture est encrée, au sens de l'encre qui sert à écrire, dans une forme d'oralité : c'est un dire à lire, un livre à lire et à dire ou à écouter, à méditer aussi. L'auteure le définit bien mieux que moi dans la quatrième de couverture de l'édition Folio et dans son prologue : « cette écriture flottante […], ces aller et retour entre moi et moi, entre vous et moi dans ce temps qui nous est commun ».
C'est un partage, une conversation, un échange à un moment précis sur certains sujets… Ainsi, pour « La Maison », Marguerite Duras est dans la cuisine de sa maison de Neauphle et prépare une soupe de poireaux tout en pensant tout haut. Tous les sujets qu'elle aborde sont très actuels et toujours d'actualité malgré le temps passé ou, du moins ils nous concernent et nous parlent même si la société a un peu changé depuis 1986. C'est intimiste et, dans la mise en scène dont je parlais en introduction, l'odeur des poireaux qui cuisent, les quelques rires en sourdine dans le public, les hochements de tête appréciatifs, les réactions spontanées, les coups d'oeil partagés traduisent bien cette forme de communion dans le temps commun revendiquée par l'auteure…
Marguerite Duras est né en 1914 ; en 1986, elle avait 72 ans… Ce que je ressens est très personnel… En 1986, j'étais mère pour la première fois et ma grand-mère était venue passer quelques temps chez nous pour m'aider un peu. C'était une femme admirable : en 1986, elle avait 82 ans mais était d'une rare vaillance et nous étions très complices toutes les deux… Voir la pièce citée plus haut et lire le texte dans ce livre m'a fait penser à elle. Je découvre Marguerite Duras comme une grand-mère soucieuse de son entourage, du bien-être de chacun et de la bonne marche de la maison tout en ayant un regard aiguisé sur le monde qui l'entoure. « La Maison » figure parmi mes textes préférés de ce recueil, même s'il n'en est pas le plus représentatif.

La lecture de la Vie matérielle est une formidable rencontre et l'occasion pour moi de me pencher très vite sur d'autres textes et livres de Marguerite Duras.
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En une mosaïque dont les fragments ne tiendraient ensemble que par l'encre de la plume de Marguerite Duras, ce recueil nous donne à entendre des réflexions très diverses, tous azimuts.

Ce volume présente la particularité d'avoir été conçu, à son origine, comme un dialogue avec l'ami-écrivain Jérôme Beaujour. Mais rapidement les deux complices ont gommé du texte toutes les questions. Il nous reste par conséquent : un monologue, et... une absence !
Un monologue... qui s'adresse à quelqu'un... nous, finalement.

Comme souvent avec Duras, le style et les mots choisis pourraient s'accorder aussi bien au récit d'un événement réel qu'à une fiction (voire à un rêve ?) ... Si bien qu'on flotte ici parfois entre deux eaux, ne sachant pas toujours très bien de quoi relèvent les lignes qui défilent. Et c'est très bien ainsi ! Impression de cheminer sur la crête sinueuse qui sépare fiction et réalité, au bon vouloir de l'auteure.

Se succèdent alors des sujets variés : l'écriture, les hommes, le désir, l'amour, les maisons, la condition des femmes, l'injustice, les rencontres, et puis l'enfance -un peu-, l'alcool -beaucoup-... Ce dernier s'infiltre et sourd entre les lignes de la fin du livre, et donne l'impression d'assister en direct à un naufrage, et aux tentatives de l'auteure de ne pas sombrer. Elle parle très crûment de ce combat. Ne pas laisser la mosaïque voler en éclats...

Une lecture intéressante mais qui n'est pas parvenue à me passionner tout à fait, peut-être parce que les fragments ne dépassent pas deux ou trois pages maximum, ce qui ne laisse pas le temps d'y pénétrer entièrement ? Ou peut-être parce que l'ensemble m'a paru un peu froid, comme désabusé ? J'ai peiné à retrouver le souffle qui me porte habituellement si vivement chez Duras, de page en page et de roman en roman !
Ce texte s'adressera surtout, me semble-t-il, aux familiers de l'oeuvre de l'auteure, les références aux personnages et situations des romans étant assez présentes.
Mais si certains peuvent y trouver une introduction à Marguerite Duras, ce sera tant mieux !
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Faut-il être très cultivé pour lire Margueritte Duras ou pour parler d'elle? Non, il faut la lire pour se cultiver, et tous peuvent parler d'elle, tant elle se livre à tous! Je ne souhaite à personne de se livrer comme elle le fait ici, non sans pudeur il est vrai, mais avec tant de sincérité semble-t-il, et de transparence. Comment n'a-t-elle été mangée toute crue? Peut-être l'a-t-elle été, peut-être est-ce là une façon de vivre davantage. Comment rester en vie? Peut-être l'alcool, peut-être l'écriture? Mais, si je ne le souhaite à personne, je l'en remercie. Merci de m'avoir permis d'entrevoir une vie d'artiste comme si j'y étais, comme si j'étais, moi aussi, l'artiste de ma vie... Et je m'interroge, comment peut-on vivre sa vie et l'écrire simultanément, puisque c'est toujours sa propre vie qu'on écrit. Merci de s'être rendue vulnérable pour nous rendre plus forts, plus conscient de nos faiblesses (à nous, les hommes, les vrais! ;-)).
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« Le livre ne représente tout au plus que ce que je pense certaines fois, certains jours, de certaines choses. »

Ce livre publié en 1987 est une compilation de textes sur la vie ordinaire selon Marguerite Duras ; une suite de courts chapitres, sans lien les uns avec les autres, traitant chacun d'un sujet en particulier sur lequel elle se confie et partage ses expériences.

Les thèmes abordés sont très variés, certains légers d'autres profonds. On trouve par exemple : le quotidien, sa vie et son époque, ses oeuvres, l'écriture et la place de l'écrivain, les femmes, les hommes, l'Indochine, ses lieux de résidence, le 6e arrondissement de Paris, l'injustice sociale. Elle évoque également des sujets très intimes comme ses amours, ses amants, son alcoolisme, ses crises, ses cures et ses rechutes.

Finalement, porté par la lecture, on finit par entrevoir qui fut Marguerite Duras et par lever un peu le voile sur cette femme avec son humanité, ses forces, ses convictions, ses faiblesses. On ressent des révoltes, des blessures et de la solitude aussi je trouve.

L'écriture de ce livre démarra sous la forme d'un entretien entre Jérôme Beaujour et Marguerite Duras, puis les questions furent retirées et le texte devint peu à peu un long monologue.  Il ne resta finalement que la pensée de l'autrice dans un enchaînement de textes remarquablement bien écrits qui m'a donné l'impression qu'elle s'adressait directement à moi. Je n'ai eu qu'à me laisser porter par une lecture hypnotique et à voyager dans son univers intérieur.

N'étant pas un grand connaisseur de Marguerite Duras, certaines références m'ont sans doute échappé mais la lecture de la vie matérielle m'a donné envie de découvrir le reste de son oeuvre.
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Citations et extraits (47) Voir plus Ajouter une citation
Je crois que l'amour va toujours de pair avec l'amour, on ne peut pas aimer tout seul de son côté, je n'y crois pas à ça, je ne crois pas aux amours désespérées qu'on vit solitairement. Il m'aimait tellement que je devais l'en aimer, il me désirait tellement que je devais l'en désirer. Ce n'est pas possible d'aimer quelqu'un à qui vous ne plaisez pas du tout, que vous ennuyez, totalement, je ne crois pas à ça.
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A Neauphle, souvent, je faisais de la cuisine au début de l’après-midi. Ça se produisait quand les gens n’étaient pas là, qu’ils étaient au travail, ou en promenade dans les Étangs de Hollande, ou qu’ils dormaient dans les chambres. Alors j’avais à moi tout le rez-de-chaussée de la maison et le parc. C’était à ces moments-là de ma vie que je voyais que je les aimais et que je voulais leur bien. Le sorte de silence qui suivait leur départ je l’ai en mémoire.

Rentrer dans ce silence c’était comme entrer dans la mer. C’était à la fois un bonheur et un état très précis d’abandon à une pensée en devenir, c’était une façon de penser ou de non-penser peut-être, – ce n’est pas loin – et déjà, d’écrire.
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Je ne peux pas penser à mon enfance sans penser à l'eau. Mon pays natal c'est une patrie d'eaux. Celle des lacs, des torrents qui descendaient de la montagne, celle des rizières, celle terreuse des rivières de la plaine dans lesquelles on s'abritait pendant les orages. La pluie faisait mal tellement elle était drue.
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L"AUTOROUTE DE LA PAROLE.

Dans cet espèce de livre qui n'est pas un livre j'aurais voulu parler de tout et de rien comme chaque jour, au cours d'une journée comme les autres, banale . Prendre la grande autoroute, la voie générale de la parole, ne m'attarder sur rien en particulier. C'est impossible à faire, sortir du sens, aller nulle part, ne faire que parler sans partir d'un point donné de connaissance ou d'ignorance et arriver au hasard, dans la cohue des paroles. On ne peut pas. On ne peut pas à la fois savoir et ne pas savoir. Donc ce livre que j'aurais voulu être comme une autoroute en question, qui aurait dû être partout en même temps, il restera un livre qui veut aller partout et qui ne va dans un seul endroit à la fois et qui en reviendra et qui repartira encore, comme tout le monde, comme tous les livres à moins de se taire mais ça , cela ne s'écrit pas.
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La maison, c'est la maison de famille, c'est pour y mettre les enfants et les hommes , pour les retenir dans un endroit fait pour eux, pour y contenir leur égarement, les distraire de cette humeur d'aventure, de fuite qui est la leur depuis les commencements des âges.
Quand on aborde ce sujet, le plus difficile, c'est d'atteindre le matériau lisse, sans aspérité , qui est la pensée de la femme autour de cette entreprise démente que représente une maison. Celle de la recherche du point de ralliement commun aux enfants et aux hommes.
Le lieu de l'utopie même c'est la maison créée par la femme, cette tentative à laquelle elle ne résiste pas, à savoir d'intéresser les siens non pas au bonheur mais à sa recherche....
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Vidéo de Marguerite Duras
Narcisse Slam a répondu au décalé et intimiste Questionnaire de Trousp, autant inspiré par celui de Proust que des questions de Bernard Pivot. Site Internet: https://trousp.ch/
0:00 Introduction 0:17 Que pensez-vous de cette citation? «C'est curieux un écrivain. C'est une contradiction et aussi un non-sens. Écrire c'est aussi ne pas parler. C'est se taire. C'est hurler sans bruit. C'est reposant un écrivain, souvent, ça écoute beaucoup.» Marguerite Duras 1:19 Quel métier n'auriez-vous pas aimé faire? 3:06 Quelle qualité préférez-vous chez l'Homme? 4:22 Quel est pour vous le pire des défauts? 5:38 Avec quel écrivain décédé, ressuscité pour une soirée, aimeriez-vous boire une bière au coin du feu? 8:33 Comment imaginez-vous les années 2050? 11:18 Quel mot vous évoque le plus de douceur? 12:48 Comment commence-t-on un roman? Par exemple L'Épouse? 16:23 Si vous pouviez résoudre un problème dans le monde, lequel choisiriez-vous? 20:18 Que pensez-vous de cette citation? «Les écrivains sont des monstres.» Henry de Montherlant 23:19 Quel livre emporteriez-vous sur une île déserte? 25:09 Si votre maison brûle, qu'aimeriez-vous sauver en premier? 28:36 Comment construit-on un personnage? 32:04 Remerciements
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